devant se détacher sur des rochers qui sont des masses claires, s’harmonisera à merveille avec eux, tandis qu’elle jurerait terriblement si j’employais une matière foncée. »
La tentative sera donc intéressante et permettra de voir qui a raison de la tradition ou du judicieux artiste.
On ne saurait non plus oublier les bustes qu’a signés Pierre Roche. Ses qualités d’obser
vateur et de dessinateur, son souci de vérité et le soin avec lequel il serre sa forme lorsqu’il se trouve devant une physionomie caractéristique, font des portraits qu’il a signés des documents précieux. Quoi de plus typique, par exemple, que le buste deHuysmans? Pierre Roche a ad
mirablement saisi l’allure ironique et fatiguée qui domine l’expression du curieux écrivain.
Mais peut-être, à certain point de vue, préférons-nous encore le buste du peintre américain K. Avec sa face osseuse, ses lèvres épaisses,
son front volontaire, son regard vif, il se dégage de cet homme au masque distingué une sorte de bestialité sen
suelle qui explique la tyrannique et pourtant sympathique domination qu’il exerça sur la plus extraordinaire magicienne du temps présent, celle
dont les danses tout esthétiques ont transporté d’admiration les foules du nouveau et de l’ancien continent.
De tels travaux suffiraient à la réputation d’un statuaire, à la condition d’être répétés à satiété au moyen de la pierre, du marbre, du bronze.
Pierre Roche a préféré se multiplier, accueillir tous les procédés nouveaux Aussi la céramique d’art trouva-t- elle en lui un adepte enthousiaste. Mais instantanément il sentit que l’œuvre devaitse modifierselonlesmoyensde
traduction. Et voilà pourquoi il n’imita pas tels de ses confrères qui, avec une indifférence inju
rieuse vraiment pour leur art, coulent en grès
telle œuvre conçue pour le bronze et encrassent d’émail un morceau qui eût exigé pour son harmonieuse mise en valeur la précision du marbre.
Il modèle alors, pour Bigot, cette curieuse, énigmatiqüe, «prenante» Mort qui, traduite en terre lustrée, bénéficie du mystère étrange des choses patinées par un long enfouissement. — Oh! l’horreur du bandeau qui retient la mâ
choire, empêche le ricanement affolant du squelette! En pendant, c’est une Aphrodite toute d’élégance et de grâce, aux seins tendus, qui semble être venue pour réparer les déprédations de sa compagne.
Mais l’émail est avant tout un élément décoratif, il est de plus propre aussi à renvoyer une certaine luminosité. Aussi l’artiste, après avoir imaginé certains revêtements, des frises dont la salamandre, des ondines font tous les frais, se
plaît-il à concevoir des ensembles où l’art et la science trouvent bénéfice à se marier. C’est,
par exemple, l’ingénieuse coupole émaillée qui abrita l’orchestre du théâtre de la Loïe Fuller. Par un artifice tout nouveau, en raison de cer
taines courbes, elle irradiait la lumière par réfraction sans que les sources de lumière fussent apparentes.
Puisque nous parlons du théâtre de la Loïe Fuller, est-il nécessaire de rappeler quelle part Pierre Roche eut dans son ornementation, voire dans sa construction plus sculpturale qu’architecturale? Les sinueuses gazes des danseuses
PIERRE ROCHE LA FEMME DE LOTH (PLOMB)