Photo P. Boyer.
FABIENNE
(M-lle Bartet)
LABUSSIÉRE (M. Coquelin)
UN AGENT (M. Villain)
UNE FEM ME DU PEUPLE
(Mlle Lynnès)
MARTIAL HUGON (M. Marais)
THERMIDOR, DE V. SARDOU, A LA COMEDIE-FRANÇAISE. — Acte I-er. - L’Ile Saint-Louis
rière, alors que, grâce au mauvais vouloir de quelques-uns, les représentations furent interrompues dès le troisième jour, sous prétexte d’ordre public, parce que quelques camelots payés avaient fait au dehors plus de bruit qu’il ne convenait. Le ministre, intimidé par ce bruit factice, veule, comme toujours, et complai
sant jusqu’au mépris de lui-même, ne fut pas fâché de faire acte de déférence vis-à-vis des braillards, alors qu’il aurait dû les faire disperser, par respect pour la liberté. Quand on revoit à distancent de sang-froid la teneur de petits événements comme ceux-ci, on ne peut s’empêcher de la juger, par un haussement d’épaules méprisant.
Il vous souvient, sans doute, d’ailleurs, de cette fameuse théorie, une des plus délicieuses plaisanteries que je connaisse, émise à ce moment-là, laquelle consistait à s’interdire toute sélection dans la période révolutionnaire, et à s’obliger à accepter en « bloc », de confiance et sans analyse, le conglomérat sanglant de 89 et
jeune comédien très éprouvé, dont les succès ne se comptaient plus, et qui avait toutes les qualités requises, Marais, dont la réputation était déjà faite et solidement établie, grâce à une série de belles créations successives parmi lesquelles il faut citer celle du Comte Wladimir Danicheff, dans la belle comédie d’Alex. Dumas, qui porte ce nom; de « Michel Strogoff », dans le drame d’Ennery, qu’il joua cinq cents fois de suite; de Serge
Panine de Georges Ohnet; d’Andréas dans Théodora, et tant d’autres. Thermidor, c’était l’occasion de le faire entrer à la Comédie, ce fut la clef avec laquelle Sardou lui ouvrit cette porte, que, le plus souvent, on tient fermée à double tour.
Ce fut, appuyé sur cette distribution parfaite — Coquelin faisant sa rentrée, et Marais, ses débuts — complétée par la bonne troupe d’ensemble de la Comédie, que le drame de V. Sardou affronta sa première représentation.
Celle-ci fut très brillante et tout faisait prévoir la longue car
à ce jour, la synthèse la plus réussie, celle qui donne le mieux, avec son dénouement, le crépuscule de l’épopée sanglante.
On comprend, d’ailleurs, que Sardou ait été hanté par l’idée d’un drame révolutionnaire, lui qui, depuis bien des années,
s’est livré, avec passion, aux plus curieuses études sur cette époque si obscure, dans la génération de ses épisodes, bien qu’encore si proche de nous.
Dès longtemps, il ruminait son Thermidor. Il en roulait l’action en son cerveau, entassant, au fur et à mesure, des notes éparses, en ces fameux tiroirs, où il sait les retrouver, quand vient l’heure de réaliser le rêve, et de lui donner la vie réelle, par la formule dramatique. Son idée première avait été visiblement d’écrire sa pièce en vue du Boulevard, qui est favorable à ce
genre de spectacle, l’emploi des masses s’y faisant plus facile. Le hasard des événements le conduisit du côté de la Comédie- Française. Il y trouva, à l’heure opportune, une distribution sans pareille qu’il ne pouvait rencontrer nulle part ailleurs : Coquelin, l’interprète rêvé pour le rôle de son héros, le comédien Labussière, mi-comique, mi-dramatique, et Julia Bartet, l’idéal de son
héroïne, Fabienne Lecoulteux, une figure virginale, d’une effigie de toute pureté. Restait, il est vrai, un personnage difficile à dis
tribuer, partout, celui de Martial Hugon, le « jeune premier ». Cet emploi, c’est l’emploi rare parce qu’il demande tout à la fois de la jeunesse, du charme, du talent et de l’expérience. A la Comédie, le
plus souvent, les « jeunes » sont joués par des « vieux... » ça n’était pas précisément l’affaire. Mais il y avait alors, au Boulevard, un