Photo Larcher.
THÉRESE DAUTREMONT (Mlle Marthe Brandes)
Décor de U. Amable.Mlle B R ICA RT SUZE
(MmeClaudia) (Mlle Monna Delza)
Acteer I


THÉATRE DU GYMNASE




PIERRE ET THÉRÈSE


Pièce en. quatre actes, de M. MARCEL PRÉVOST


M


Marcel Prévost étudie complaisamment les souf
frances de la femme. Il s’est intéressé à l’émoi delà . jeune fille et à la passion de la bourgeoise qui arrive
à l’automne de la vie. Il a surpris les confidences des créatures amoureuses ou inquiètes qui ont trente ans. Il a publié leurs lettres. Nous aurions pu croire qu’il n’était envieux que de troubler ses lecteurs et ses lectrices, en leur révélant les fièvres de nos contemporaines. Mais il nous a présenté aussi les vierges fortes; il a réclamé pour le sexe faible Je droit à l’indé
pendance laborieuse, intelligente, noble. Aussi traîne-t-il der
rière lui un cortège d’admiratrices. Elles le chérissent comme leurs aïeules aimaient le directeur de conscience.
Il est impossible de penser qu’une œuvre de M. Marcel Prévost ne célèbre pas une héroïne meurtrie par les brutalités de l’existence. Thérèse possède donc une âme précieuse et pure. Elle est la fille aînée d’un homme d’affaires — Dautremont — qui, à défaut de stricte honnêteté, n’est pas incapable de scrupules. II ne pille qu’en se conformant à la loi. Or Thérèse a rencontré, au cours d’un voyage en automobile, Pierre Hountacque, et elle l’a aussitôt aimé. Il a suffi qu’elle dînât auprès de lui, et elle a compris que jamais elle n’aurait un autre mari. Et Pierre a
senti qu’il n’aurait pas une autre épouse. Pierre et Thérèse ont aussitôt reconnu qu’ils étaient destinés l’un à l’autre. Sans doute on leur versa, pendant ce repas, quelques gouttes du philtre qui lia Yseult à Tristan.
Rien ne s’oppose au bonheur de Pierre et de Thérèse. A la vérité le père Dautremont regrette que Pierre se soit séparé,
quand il avait dix-huit ans, de sa famille et que sa jeunesse ait été aventureuse. Mais Thérèse est séduite par l audace de ce conquérant qui n’avait pas un sou et qui, par ses seules forces, est arrivé à la fortune. Cependant, à l’instant précis où les fiancés doivent partir pour la mairie, une lettre anonyme révèle que Pierre fut élevé par l’amant de sa mère. Et ce détail trouble Tnérèse. Elle interroge Pierre qui avoue.
« Pourquoi ne point m’avoir dit la vérité?
— Par pitié filiale. Oui ! Ma mère a fui loin de mon père qui était méchant et brutal. Elle a vécu avec un homme qu’elle ado
rait et qui l’adorait. Il avait abandonné sa femme et c’est elle qui nous dénonce aujourd’hui. Cet homme a été très bon pour moi quand j’étais petit. Plus tard, quand je ne fus plus un enfant, il me montra moins de tendresse. Je compris que ma mère n’hésiterait pas entre lui et moi. Je suis parti. J’ai voyagé. J’ai travaillé.
— Vous auriez dû avoir confiance en moi et tout m’avouer. Mais, mon ami, vous ne me cachez plus rien?
— Rien ! »
Et Pierre et Thérèse vont à la mairie.
Cette exposition est sobre et dramatique. Il va sans dire que, quand tombe le rideau, nous sentons que Pierre ment et qu’il dissimule encore quelque tare. S’il n’en était pas ainsi, il n’y aurait pas de pièce. Et puis nous avons vu auprès de Thérèse une femme de confiance, Madame Chrétien, dont le mari fut naguère l’ami de Pierre. Elle ne peut refréner des mouvements de colère quand on parle devant elle de Pierre. Cependant il a été très bon pour elle. Depuis qu’elle est veuve, il lui vient en