MARIETTA ALBONI
Buste exécuté par M. Alphonse Moncel, destiné au Foyer de l Opéra
ne dépayse le public, qui a des habitudes, et il m’a paru que le Beau Jeune homme aurait un succès moins éclatant que n’eurent ses aînées. Ça ne sera pas, en tout cas, la faute de l’interpréta
tion, excellente jusque dans ses moindres rôles, avec Baron, Brasseur, Guy, Max Dearly, Mesdames Yahne et Lavallière. Je veux citer, à part, Mademoiselle Jeanne Thomassin, nouvelle venue aux Variétés, exquise comédienne, d’émotion contenue,de
cat. Son succès a été très grand.
Signalons, pour être complet, les débuts, à la Comé
die-Française, dans le rôle d’Hermione, de Mademoiselle Roch, premier prix de Tragédie au der
nier concours du Conservatoire. Elle dit avec justesse, et sa voix porte bien, grâce à une articu
lation très étudiée, mais elle est d’aspect un peu pauvre, ça n’est qu’une élève, pas encore une co
médienne. La tragédie d Andromaque,
dans son ensemble, et si j’excepte Mademoiselle Bartet, très touchante et très belle dans la veuve d’Hector, aétéd’une interprétation audessous du médio
cre. Il semble qu’au Théâtre-Français le répertoire tragique ne soit plus qu’un « pensum » dont on s’acquitte par puni
tion et parce qu’on ne peut pas l’éviter.
On va ériger bientôt au foyer de l’Opéra, le buste de la célèbre cantatrice Marietta Alboni — ou plutôt l’Alboni, ainsi qu’elle fut tou
jours appelée. — Nous donnons ici la reproduction de ce buste, une œuvre tout à fait remarquable de M. Al
phonse Moncel, un statuaire de grand talent. L’Alboni a
été une desplus brillantes étoiles de notre Académie de Musique. Ce fut le
contralto le plus étendu, le plus souple et le plus purque l’on con
naisse, et personne ne l’a jamais égalée pour la grâce et la facilité du chant, la richesse de la vocalisation. Elle a quitté la carrière lyrique en 1866, encore dans toute la splendeur de son talent. Son souvenir méritait vraiment d’être conservé à cet Opéra, qu’elle a rempli de son succès, et dont elle fut une des gloires artistiques.
FÉLIX DUQUESNEL.
Aux Variétés, nous avons eu, enfin, la pièce très attendue d’Alfred Capus, une comédie qui n’est pas du moule habituel de l’auteur de la Veine et des Deux Ecoles, mais se réfère plutôt au rajeunissement d’un genre d’autrefois, ce qu’on appelait le vaudeville épisodique ou la comédie d’aventures, tels que les pra
tiquèrent, il y a bien longtemps, les Folies-Dramatiques, avec la Semaine des amours, les Variétés elles-mêmes, avec Gentil Bernard, par exemple.
Le Beau Jeune homme, qu’on pour
rait intituler Six mois de la Vie d un jeune homme de pro
vince à Paris, — ce qui, par parenthèse, serait un peu long pour l’affiche, — comme jadis on di
sait : Dix ans de la
vie d’une Femme, est visiblement la tentative de la reproduction d un genre.
Ce vieux-nouveau a même causéquelque étonnement, comme le spectacle d une chose inattendue.
L’a vent ure de Valentin Bridoux, biblio
thécaire à Savignysur-Saône,qui aban
donne son poste et sa gentille fiancée Marthe Aubry, l’in
stitut rice, pour venir s’installer à Paris, est instructive, et pourrait être livrée à la méditation des jeunes ambitieux de province. D’abord secrétaire du sénateur Jounel, Valentin sc retrouve bien
tôt sur le pavé, pour avoir été trop ten
drement regardé par la femme du patron.
C’est alors le bureau de placement, avec ses horreurs, et ledit Valentin, bom
bardé caissier chez un emballeur des Halles, rencontre- Marthe dans une gargotte, où elle tient le comptoir,— dame ! comme dit le proverbe latin, primum vivere ! ■—• puis, après milleincidents, c’est le retour au pays, dont le sol hospitalier estmoinsglis
sant que le pavé de la capitale, où on a peine à se tenir debout!
La pièce, sous sa forme plus populaire, a les mêmes qualités que ses aînées ; l’auteur nous y présente une série de types crayonnés de son crayon le plus vif, et on y retrouve ce même fond de raison douce, de quiétude bon enfant, de belle humeur et de logique saine. Je crains, toutefois, que ce milieu nouveau
Buste exécuté par M. Alphonse Moncel, destiné au Foyer de l Opéra
ne dépayse le public, qui a des habitudes, et il m’a paru que le Beau Jeune homme aurait un succès moins éclatant que n’eurent ses aînées. Ça ne sera pas, en tout cas, la faute de l’interpréta
tion, excellente jusque dans ses moindres rôles, avec Baron, Brasseur, Guy, Max Dearly, Mesdames Yahne et Lavallière. Je veux citer, à part, Mademoiselle Jeanne Thomassin, nouvelle venue aux Variétés, exquise comédienne, d’émotion contenue,de
sincérité louchante et de réalisme déli
cat. Son succès a été très grand.
Signalons, pour être complet, les débuts, à la Comé
die-Française, dans le rôle d’Hermione, de Mademoiselle Roch, premier prix de Tragédie au der
nier concours du Conservatoire. Elle dit avec justesse, et sa voix porte bien, grâce à une articu
lation très étudiée, mais elle est d’aspect un peu pauvre, ça n’est qu’une élève, pas encore une co
médienne. La tragédie d Andromaque,
dans son ensemble, et si j’excepte Mademoiselle Bartet, très touchante et très belle dans la veuve d’Hector, aétéd’une interprétation audessous du médio
cre. Il semble qu’au Théâtre-Français le répertoire tragique ne soit plus qu’un « pensum » dont on s’acquitte par puni
tion et parce qu’on ne peut pas l’éviter.
On va ériger bientôt au foyer de l’Opéra, le buste de la célèbre cantatrice Marietta Alboni — ou plutôt l’Alboni, ainsi qu’elle fut tou
jours appelée. — Nous donnons ici la reproduction de ce buste, une œuvre tout à fait remarquable de M. Al
phonse Moncel, un statuaire de grand talent. L’Alboni a
été une desplus brillantes étoiles de notre Académie de Musique. Ce fut le
contralto le plus étendu, le plus souple et le plus purque l’on con
naisse, et personne ne l’a jamais égalée pour la grâce et la facilité du chant, la richesse de la vocalisation. Elle a quitté la carrière lyrique en 1866, encore dans toute la splendeur de son talent. Son souvenir méritait vraiment d’être conservé à cet Opéra, qu’elle a rempli de son succès, et dont elle fut une des gloires artistiques.
FÉLIX DUQUESNEL.
Aux Variétés, nous avons eu, enfin, la pièce très attendue d’Alfred Capus, une comédie qui n’est pas du moule habituel de l’auteur de la Veine et des Deux Ecoles, mais se réfère plutôt au rajeunissement d’un genre d’autrefois, ce qu’on appelait le vaudeville épisodique ou la comédie d’aventures, tels que les pra
tiquèrent, il y a bien longtemps, les Folies-Dramatiques, avec la Semaine des amours, les Variétés elles-mêmes, avec Gentil Bernard, par exemple.
Le Beau Jeune homme, qu’on pour
rait intituler Six mois de la Vie d un jeune homme de pro
vince à Paris, — ce qui, par parenthèse, serait un peu long pour l’affiche, — comme jadis on di
sait : Dix ans de la
vie d’une Femme, est visiblement la tentative de la reproduction d un genre.
Ce vieux-nouveau a même causéquelque étonnement, comme le spectacle d une chose inattendue.
L’a vent ure de Valentin Bridoux, biblio
thécaire à Savignysur-Saône,qui aban
donne son poste et sa gentille fiancée Marthe Aubry, l’in
stitut rice, pour venir s’installer à Paris, est instructive, et pourrait être livrée à la méditation des jeunes ambitieux de province. D’abord secrétaire du sénateur Jounel, Valentin sc retrouve bien
tôt sur le pavé, pour avoir été trop ten
drement regardé par la femme du patron.
C’est alors le bureau de placement, avec ses horreurs, et ledit Valentin, bom
bardé caissier chez un emballeur des Halles, rencontre- Marthe dans une gargotte, où elle tient le comptoir,— dame ! comme dit le proverbe latin, primum vivere ! ■—• puis, après milleincidents, c’est le retour au pays, dont le sol hospitalier estmoinsglis
sant que le pavé de la capitale, où on a peine à se tenir debout!
La pièce, sous sa forme plus populaire, a les mêmes qualités que ses aînées ; l’auteur nous y présente une série de types crayonnés de son crayon le plus vif, et on y retrouve ce même fond de raison douce, de quiétude bon enfant, de belle humeur et de logique saine. Je crains, toutefois, que ce milieu nouveau