Cliché du Pholo-Stvdio. m. BROUSSELET (M. Ravet)
Acte Ier
PIERRE DE PONTVANNES


( M. Henry Mayer) COMÉDIE-FRANÇAISE


L҆IRRESOLU, COMÉDIE FN QUATRE ACTES, EN PROSE, DE M. GEORGES BERR
La comédie de « caractère », jouée en ce moment au Théâtre-Français, veut nous présenter — chose assez curieuse — comme personnage principal, un homme dont c’est le propre de « manquer de caractère ». Tâche peu aisée. Le théâtre, en effet, vit surtout par les per
sonnages nets, aux traits fermement accusés, aux sentiments violents : tels le misanthrope, le libertin, le tartuffe, le joueur, le distrait, l’ambitieux, le martyr. Quelle figure fera sur une scène un personnage qui ne sait jamais ce qu’il veut? M. Georges Berr, auteur spirituel et fin, a pensé que la tâche de l’y amener n’était pas au-dessus de ses forces. Il a jugé qu’à côté des grands portraits installés sur la cimaise de la Maison de Molière il y avait place, au-dessus d’une porte, dans un trumeau de coin, pour une sanguine légère, pour un
dessin lestement enlevé du type qu’il appelle « l’Irrésolu ». Et pourquoi pas? On a écrit très justement : la maison de Molière est aussi la maison de Dancourt.
Le rideau se lève. M. Pierre de Fontvannes, jeune homme de trente ans, habite, dans la propriété possédée par sa mère à Louveciennes, un pavillon isolé. Il s’occupe de meubler et de décorer son domaine particulier. Précisément, il choisit des papiers pour la salle de billard. Choisit-il? Non. Il ne peut se décider. Le papier sera-t-il vert, jaune, bleu, chamois, histo
rique et à ramage ou modem style et de fantaisie? Pierre de Fontvannes déplie tous les rouleaux et ne conclut pas. Il ne conclut pas, parce qu’il est « irrésolu ». La scène — scène-affiche, comme le dit plaisamment quelqu’un — est là pour nous pré
venir. Il faut pourtant que la salle de billard ait son papier. Le secrétaire du jeune homme, Chabreloche, choisit, sans regar
der, le premier rouleau venu. Il met en liberté en même temps l’employé de la maison de papiers peints, dont les cheveux commençaient à blanchir.
Nous voici donc en présence d’un « irrésolu ». Mais alors, le propre de l’irrésolu étant de ne jamais prendre de résolution, l’auteur s’engage dans une pièce bien difficile. Le théâtre, c’est l’action; l’irrésolu, c’est l’homme qui n’agit pas. Aussi, le caractère primitivement lancé vers l’irrésolution va dévier, et nous aurons plutôt devant nous un homme sans volonté, un faible, un timide, qui prend des résolutions, tantôt bonnes, tantôt mauvaises.
Il ne s’agit pas seulement, dans l’existence d’un homme riche, de choisir du papier pour une salle de billard, de savoir si, pour sortir, il prendra une canne ou un parapluie, si, pour aller à un concert dominical, il mettra une redingote ou une jaquette. Pierre se mariera-t-il ou ne se mariera-t-il pas ? Ma
dame de Fontvannes désire que son fils épouse Mademoiselle Desclavelles, fille du député royaliste Desclavelles : aussi bien, il y a promesse de mariage. Mais, depuis la promesse, Pierre a
CHABRELOCHE
(M. Garry)