tion obligatoire, deviennent confus ou insignifiants 1 Celui de Daria, au contraire, est nettement conçu en ses deux actes, et, maigre une analogie as-e/. nappante avec la donnée -las Danicheff, ne saurait se concevoir autrement qu’en sa robuste brièveté.


Sujet russe, Daria nous introduit dans la maison seigneu


riale d’un grand domaine rural, où le maître, Boris, est attendu d’un moment à l’autre par ses serfs, et spéciale
ment par la jeune Daria, qu’il a aimée, et qui se figure, en sa fierté naïve, qu’elle va, dès son retour, devenir l’épouse de son seigneur. En vain, Ivan, le grossier mais dévoué moujick, qui l’aime, veut-il la préparer à la déception; en vain, lui révèle-t-il les bruits qui courent du pro
chain mariage du maître, à la ville; Daria, outrée, repousse cette idée. Et bientôt, comme Boris revient de Moscou, plein de gaieté, et lui fait gracieuse et tendre mine, la jeune fille reprend toute sa confiance.
Boris, cependant, ne l’a prise en ses bras que pour la détromper et l’assurer qu’il saura veiller sur son avenir. En vain Daria lui rappelle tant d’amour promis, en vain lui peint-elle la profondeur de son désespoir en des termes dont je ne puis mieux faire que citer la grâce extrême :
Le printemps nous sourit et l’églantine pleure Ses pétales rosés sur le bord du chemin :


Faut-il donc que notre amour meure


Avant demain ?
Tout mon être frémit quand ton baiser l’effleure ; Dans tes bras j’ai rêvé d’un bonheur surhumain,
Faut-il donc que notre amour meure
Avant demain ?
Tu ne me réponds pas, cruel, ta main demeure, Quand je la presse, inerte et glacée en ma main... Faut-il donc que notre amour meure
Avant demain ?
Boris perd vite patience, et comme Daria se révolte jusqu’à l’injure, le maître appelle ses serfs, et infligerait à la belle un châtiment exemplaire, si Ivan n’implorait sa grâce. Cette intervention amuse Boris, et puisqu’elle est la preuve d’un réel amour, il trouve plaisant d’ordonner aussitôt un mariage qui le débarrasse. Ivan, tremblant de joie, reçoit des mains du pope, aussitôt appelé, Daria frémissante, et part pour une des forêts du domaine.
Au second acte, un an plus tard, nous trouvons Ivan installé dans cette solitude heureuse et libre, auprès de Daria qui l’aime enfin et pour jamais, auprès du berceau de son fils nouveau-né, parmi de francs compagnons, bûche
rons comme lui. Ici encore, on aime à citer quelques vers de la berceuse que Daria chante à son enfant endormi :
Dans ton petit berceau, ne grandis pas trop vite !


Reste avec nous au fond des bois.


Le pauvre n’est jamais heureux quand il habite Près des seigneurs ou près des rois...
Dors, ô mon doux agneau, dors, ma tendre colombe, O le plus beau de mes trésors ;


Le jour fuit, le soir tombe...


Dors!... Dors !...
Photo Paul Berger.
Soudain des appels de chasse retentissent, un piqueur annonce le passage du maître qui s’est égaré et qui vient passer la nuit chez son serf... Ivan jette un regard sur Daria, qui a tressailli; mais il se rassure aussitôt : Boris peut venir...... Le voici, insouciant d’abord, puis repris à la
beauté de celle qu’il a délaissée et narguant le rustre à qui il l’a livrée. Il prétend griser Ivan et pense y avoir réussi, tant celui-ci entre franchement et lourdement dans son jeu : et Daria frémit, incertaine, à le voir ainsi danser, à l’en
tendre chanter comme un sauvage ivre, et tomber enfin en un lourd sommeil. Mais qui donc guette d’un œil ardent, au fond de la cabane, Boris empressé autour de Daria et bientôt sur le point de lui faire violence ? C’est le dormeur, qui surgit soudain, saisit Boris à la gorge et le
Devant la pauvre izba, seule en la forêt sombre,


Le frêle enfant s’est endormi ;


Et pour le bercer mieux, sous les chênes pleins d’ombre,
La brise a doucement frémi...