LE TRUST




DES




THÉATRES


Me MILLER AN D
Avocat de MM. Roy et Deval
quand même. Je vais tâcher, amis lecteurs, de vous l’expliquer aussi clairement et aussi brièvement que possible, bien entendu sans prendre parti pour per
sonne, parce que « entre l’arbre et l’écorce, il ne faut pas mettre son doigt... », ainsi l’affirme feu Sancho Pança en ses proverbes de grand bon sens.
Donc vous saurez qu’au temps jadis, les infortunes auteurs dramatiques étaient des gens fort à plaindre, car ils étaient abandonnés à leur triste sort, nullement protégés et livrés en pâture à la rapacité des comédiens. Les pièces de théâtre ne rapportaient rien ou presque rien, et les chefs-d’œuvre s’ache
taient, à forfait, une centaine d’écus. Beaumarchais fut le premier qui s’avisa que, puisqu’une œuvre de l’esprit rapportait parfois de gros bénéfices à celui qui l’exploitait commercialement, il était tout naturel
et absolument équitable que l’auteur de celle-ci prît sa part, très légitime, dans ces bénéfices. C’est donc
à Beaumarchais que remonte la première idée du droit proportionnel, qualifié « droit d’auteur ». Mais ce droit, il fallait d’abord en fixer le quantum, et ensuite en assurer la perception régulière. Là était l’intérêt le plus vif pour tous les auteurs dramatiques, intérêt général qui devait les amener à se réunir, à se syn
diquer en société, pour la protection des droits de chacun, par l’effort commun de tous.


Ce fut Scribe qui prit l’initiative de la combinaison


protectrice, et, grâce à lui, fut fondée la Société des
Auteurs et Compositeurs dramatiques, constituée le 7 mars 1829, puis réorganisée et reconstituée en société civile le 18 décembre 1837. Le but de cette
Me RAYMOND POINCARE
Avocat de la Société des Auteurs dramatiques


S


ous ce titre : le Trust des Théâtres, se débat, depuis bien des mois, un procès intéressant pour le monde des théâtres, — il est intéressant, en effet, surtout pour ce monde spécial et n’a été qu’à demi compris par l’autre, — pen
dant nombreuses audiences, des avocats, non des moindres, ont prononcé beaucoup de paroles plus ou moins utiles..., n’estce pas cela, d’ailleurs, qu’on appelle « plaider »? Les juges delà première chambre du tribunal vont, dans quelques jours, donner le dénouement sous forme de jugement. Ça ne sera encore qu’un jugement provisoire, il est vrai, puisque, derrière le tri
bunal, il y a la cour d’appel, robes rouges, après robes noires, et que le perdant pourra en appeler, à moins, toutefois, que le
différend ne se termine par un accord entre les parties, un de ces arrangements qui, ainsi que dit le brocard, même lorsqu’ils sont mauvais, « valent mieux que le meilleur des procès ». Je dis, quant à moi : « Ainsi soit-il! », bien certain que ma voix trouvera des échos.
Maintenant, en quoi consiste la querelle? ont demandé ceux, très nombreux, qui ne sont pas initiés, mais que cela intéresse