(1878), avec la noblesse de ses attitudes et la chaleur de sa voix, fut l’objet d’une admiration universelle ; et quant à la sauvage figure d’Hermosa du Tribut de Zamora (1881), l’en
thousiasme qu’elle souleva fut vraiment indescriptible. Dans le genre romanesque et exotique, personne ne s’est jamais élevé si haut.
L’année précédente, Gabrielle Krauss avait
repris son rôle plus pur et non moins caractéris
tique d Aida, où nous l’avons vue, jusqu’à la fin de sa carrière, pathé
tique et fière. Eu 1882, séduite par le mélange de grâce élégante et de terreur passionnée qui marque le personnage de Marguerite, elle se montra dans Faust et y fit une puissante impres
sion. Bientôt c’est la reine Catherine de Henry VIII ( 1883), une des plus touchantes et desplus grandioses com
positions de l’artiste; c’est la pathétique Sa
pho, où jamais son grand style ne parut plus large, plus classique ; et c’est encore Rigoletto, qui entrait pour la première fois au répertoire. Enfin, comme conclusion, le rôle terrible de Dolorès, dans Patrie ! (1886). Qui pourrait oublier la cou
leur extraordinaire que cette traîtresse figure prit avec elle, et la scène delà dénonciation,toute vibrante de passion, tout éperdue de honte ?...
Depuis cette époque (1888), Madame Krauss avait renoncé à la scène pour se consacrer entiè
rement, et avec quelle passion ! à ses élèves.
Elle avait même renoncé aux concerts, où non seulement le Paradis et la Péri, qu’elle avait révélé à la France en 1869 et qu’elle reprit en 1887, mais la Dam
nation de Faust, Marie Magdeleine, la Vierge, la Tempête, Mors et Vita, le second acte d Alceste, lui avaient valu des ovations égales à celles du théâtre.
Seuls, les habitués de ses salons et de quelques autres ont pu goû
ter ce grand style et cette_ expression qui n’étaient pas moins in
tenses et sublimes, pour ne s’attacher qu’à des lieder comme ceux de Schubert ou de Schu
mann, que je n’ai jamais entendu personne dire comme elle.
Parmi les cantatrices étrangères que Paris a pu fêter à diverses re
prises, il n’en est pas qui lui aient été aussi fidèles que Madame Gabrielle Krauss. Paris ne l’a pas oubliée et ne l’oubliera jamais.
HENRI DE CURZON.
Photo Bcmjito.
M-me GABRIELLE KRAUSS
Rôle de Sapho