LE THÉATRE A LONDRES
La Saison Théâtrale de 1906
NERO (His Majesty’s Theatre). — HIS HOUSE IN ORDER (Saint James’s Theatre). — ALL-OF-A-SUDDEN PEGGY
(Duke of York’s Theatre). — DOROTHY O’ THE HALL (New Theatre)
BRIGADIER GERARD (Lyric Theatre). — THE BEAUTY OF BATH (Aldwych Theatre)
THE BELLE OF MAYFAIR (Vaudeville Theatre)
LES ACTEURS EN VEDETTE (Garrick Theatre), (His Majesty s Theatre), (Vaudeville), (Gaiety Theatre)
Londres a deux saisons théâtrales: la saison d’automne et la saison de printemps. La première commence en sep
tembre, à la rentrée des vacances, par le drame à grand spectacle de Drury Lane, dont la formule ne varie pas. C’est un bon mélodrame, bourré d’incidents plus ou moins vrai
semblables, mais sensationnels à plaisir, construit selon les règles du bon vieux temps; à la fin le vice est congrûment puni et la vertu triomphe. De plus, il est indispensable d’y mêler un élé
ment d’actualité mécanique ou scénique, qui est le clou de la représentation : une course du Derby, si le Derby a offert quel
que chose de remarquable ; un accident de chemin de fer, de yacht ou de ballon, rappelant un fait marquant de l’année; un camp, s’il y a eu une guerre, et ainsi de suite. Dès l’apparition des premières automobi
les, Drury Lane nous en a offert une dans un spec
tacle d’automne et, cette année, nous aurons vraisemblablement une éruption du Vésuve.
C’est également en septembre que les théâtres de drame et de comédie font leur réou
verture avec des reprises, si les vacances ont inter
rompu un succès, ou avec des pièces nouvelles; mais en général cette sai
son d’automne est moins bri liante que la saison de printemps, pourlaquelle les direc
teurs réservent ce qu’ilsontdemieux, à quelques excep
tions près : deux ou trois théâtres, en effet, maintien
nent toujours au même niveau leur répertoire et leur troupe, ce sont :
His Majesty’sTheatre, le Haymarket Theatre, le Saint- James’s Theatre. Il y a deux ou trois ans il aurait fallu mettre en première ligne le Wyndham’s Theatre;
mais Sir Charles Wyndham, sans renoncer au théâtre, se repose un peu comme directeur et surtout comme acteur.
A ce propos, il est à remarquer que la plupart des théâtres de drame ou de comédie ont à leur tête des acteurs-directeurs. Dès qu’un acteur anglais sort un peu du rang il lui faut son théâtre à
lui; c’est sa grande, son unique ambition, et il n’est satisfait que lorsqu’il l’a réalisée. Est-ce à cela qu’il faut attribuer l’état peu satisfaisant de l’art dramatique anglais à la fin du xixe siècle et au commencement du xxe? Beaucoup le pensent, quelques-uns osent le dire. Les acteurs-directeurs sont des hommes et, pour employer une expression dont s’est servi un premier ministre anglais, il ne faut pas demander à la nature humaine plus qu’elle
nepeut donner; en
dépit de l’amour de l’art, un acteur, même directeur,ne peut se sacrifier et faire abstraction de sa personnalité ar
tistique. Un beau rôle, un rôle pro
pre à faire valoir ses qualités le ten
tera toujours et, entre une pièce ex
cellente où il n’a pas un rôle à sa taille et une pièce médiocre où il sait pouvoir briller, il choisira la se
conde, malgré lui, comme par ins
tinct, et il trouvera mille raisons pour justifier son choix, et cela de la meilleure foidu monde.
Par un travail d’espiit inconscient, il en vient à se leur
rer lui-même. Voilà un côté de la ques
tion. Il y en a un autre. S’il est impossible à un ac
teur-directeur de s’effacer complète
ment, il est non moins impossible à un auteur drama
tique d’oublier que les chances de faire jouer sa pièce dé
pendent en grande partie du fait que M.X ou Madame Z trouvera dans son œuvre un rôle à sa
convenance. Et c’est hanté par
Photo F.-W. burfurd (Londres)
OCTAVIA (Miss Phyllis Embury)
HIS MAJESTY’S THEATRE. — NERO