tante. Voilà certes un titre de plus au ruban rouge! Mais ce n’est pas
tout : Madame Champmorel a sollicité son concours pour une œuvre de bienfaisance qui se propose de venir en aide aux « anciens pre
miers prix du Conservatoire ». Le ménage Margerie a donc un excel
lent prétexte de fréquenter le « Bois sacré ». Seulement, il n’y a pas un instant à perdre; et Francine, mo
bilisant son mari, s’achemine, sans plus tarder, vers la Direction des Beaux-Arts.
L’important sous-secrétaire d’Etat Champmorel s’y livre aux différents exercices que comporte sa fonction. Il remue des dossiers et s’abstient de les ouvrir. Pour un
discours ou pour un toast, il cherche les noms des Neuf Muses ; et, avec l’assistance de tout son personnel, il ne trouve jamais que ceux de Melpomène, de Thalie et de Terpsichore. D avance, il fait tenirau secrétairedu Conservatoire la liste des futures lauréates et télé
phoner à deux de ses collègues du ministère que leur commune pro
tégée sera, dès demain, pensionnaire de Ja Comédie-Française.
Enfin, il s’applique à discerner la nuance politique des cantates qu’on lui exécute au piano, tandis que Madame Champmorel et son nou
vel amant, le colonel Zakouskine, miment derrière lui une muette et violente scène de jalousie. Tout cela pourtant ne suffirait pas à oc
cuper ses loisirs de grosse mouche du coche, à distraire sa musardisc bedonnante et affairée. Restent, heureusement, les heures d’au
dience, les visites de solliciteuses. Celle de Francine Margerie e moustilie tout spécialement M. le Direc
teur des Beaux-Arts. Grisé par ses innocentes coquetteries, par sa grâce rieuse d’honnête femme, par l’épanouissement capiteux et au
tomnal de sa beauté, il perd bientôt toute mesure et s’attire un maître soufflet. Son Excellence en de
meure suffoquée. On ne manque pas à ce point d’usage ou d’entlaînement. « Gifler le Directeur des Beaux-Arts ! » Voilà qui ne s’était jamais vu ! Que cette pim
bêche aille apprendre son métier de candidate et se fasse mieux ini
tier aux rites du Bois sacré ! Champ
Photo Bert.
M. GUY
Du Théâtre des Variétés