Clichés Caulin Sf Berger.
COMEDIE-FRANÇAISE. — LE MALADE IMAGINAIRE. — Toinette. — Mlle Dussane
Celle-ci appartient surtout à la Comédie-Française : nous y trouvons une importante reprise de Tartuffe, où Mademoiselle Cécile Sorel jouait pour la première fois le rôle d’Elmire. Mademoiselle Sorel occupe chez Molièrel’emploi fameux, classé « grandes coquettes », et on était curieux de savoir comme elle se tire
rait de ce rôle, qui passe pour un des plus difficiles du genre, parce qu’il est à la fois un des plus compliqués et aussi des moins brillants. C’est une pierre de touche, cette Elmire, c’est à cette éprouvette qu’on peut savoir si vraiment la comé
dienne est en « or » ou si elle est simplement en « doublé ». Hâtons-nous de reconnaître que Mademoiselle Sorel a, d’ail
leurs, réussi dans sa nouvelle tentative, où elle a eu du succès. Ça n’est pas qu’elle soit encore parfaite, ce serait trop demander, le rôle est assez difficile pour exiger l’épreuve de plusieurs représentations avant d’y être tout à fait établie, et que la comédienne s’y sente « maîtresse », mais les indications sont excellentes, les contours exacts et précis, il ne reste plus qu’à les accuser.
Le rôle d’Elmire est un de ceux qui ont soulevé le plus de discussions, provoqué le plus de « gloses ». Les théories sont si différentes, les écoles si diverses, que la comédienne qui s’en préoccuperait outre mesure, ne saurait vraiment plus comment il convient de le jouer, et quelle est l’interprétation
vraie, chacun donnant au personnage une attitude contraire. Sans parler des contemporains de Molière et de ceux qui suivirent, voici plus près de nous, depuis un demi-siècle, les critiques Geoffroy, Sarcey, Weiss, Larroumet, les comédiens Regnier et Dupont-Vernon, — ce dernier a publié une glose tout à fait remarquable,— qui sesont escrimés, à qui mieux mieux, de la plume, sans se mettre d accord, non pas sur la ligne générale de la figure qui ne saurait faire doute, mais sur ses détails d’exé
cution. Et volontiers, dirai-je, que chacun d’eux a pu prendre l’appui de l’une ou l’autre des interprètes, car, avec chacune d’elles, l’hypothèse d’interprétation a varié.
Toutefois, si les « hachures » du personnage sont complexes, le « dessin » vrai me paraît facile à tracer : Elmire est la dame élégante de haute bourgeoisie, spirituelle, d’un esprit naturel, qui se double et s’agrémente de bon sens, ce qui lui permet de combattre, àarmescourtoises, l’épaisse sottise aveuglée d’Orgon, son naïf et vieux mari, de résister aux radotages de la mère Pernelle, et de maintenir l’équilibre en cette maison un peu ébranlée sur ses assises. Elle est honnête femme, assurément, et incapable de manquer à ses devoirs, bien qu’elle aitamour médiocrepourle benêt Orgon. Elle est, aussi, douce, aimable et sage, discrète et
sûre d’elle-même, au point de n’être pas prude, et d’ignorer les effarouchements des vertus plus chancelantes; ce qui domine chez elle, c’est la modération des belles âmes et le grand charme dans la raison. Toutes ces qualités n’empêchent pas qu’il n’y ait, en
COMEDIE-FRANÇAISE. — LE MALADE IMAGINAIRE. — Toinette. — Mlle Dussane
LA QUINZAINE THÉATRALE
Celle-ci appartient surtout à la Comédie-Française : nous y trouvons une importante reprise de Tartuffe, où Mademoiselle Cécile Sorel jouait pour la première fois le rôle d’Elmire. Mademoiselle Sorel occupe chez Molièrel’emploi fameux, classé « grandes coquettes », et on était curieux de savoir comme elle se tire
rait de ce rôle, qui passe pour un des plus difficiles du genre, parce qu’il est à la fois un des plus compliqués et aussi des moins brillants. C’est une pierre de touche, cette Elmire, c’est à cette éprouvette qu’on peut savoir si vraiment la comé
dienne est en « or » ou si elle est simplement en « doublé ». Hâtons-nous de reconnaître que Mademoiselle Sorel a, d’ail
leurs, réussi dans sa nouvelle tentative, où elle a eu du succès. Ça n’est pas qu’elle soit encore parfaite, ce serait trop demander, le rôle est assez difficile pour exiger l’épreuve de plusieurs représentations avant d’y être tout à fait établie, et que la comédienne s’y sente « maîtresse », mais les indications sont excellentes, les contours exacts et précis, il ne reste plus qu’à les accuser.
Le rôle d’Elmire est un de ceux qui ont soulevé le plus de discussions, provoqué le plus de « gloses ». Les théories sont si différentes, les écoles si diverses, que la comédienne qui s’en préoccuperait outre mesure, ne saurait vraiment plus comment il convient de le jouer, et quelle est l’interprétation
vraie, chacun donnant au personnage une attitude contraire. Sans parler des contemporains de Molière et de ceux qui suivirent, voici plus près de nous, depuis un demi-siècle, les critiques Geoffroy, Sarcey, Weiss, Larroumet, les comédiens Regnier et Dupont-Vernon, — ce dernier a publié une glose tout à fait remarquable,— qui sesont escrimés, à qui mieux mieux, de la plume, sans se mettre d accord, non pas sur la ligne générale de la figure qui ne saurait faire doute, mais sur ses détails d’exé
cution. Et volontiers, dirai-je, que chacun d’eux a pu prendre l’appui de l’une ou l’autre des interprètes, car, avec chacune d’elles, l’hypothèse d’interprétation a varié.
Toutefois, si les « hachures » du personnage sont complexes, le « dessin » vrai me paraît facile à tracer : Elmire est la dame élégante de haute bourgeoisie, spirituelle, d’un esprit naturel, qui se double et s’agrémente de bon sens, ce qui lui permet de combattre, àarmescourtoises, l’épaisse sottise aveuglée d’Orgon, son naïf et vieux mari, de résister aux radotages de la mère Pernelle, et de maintenir l’équilibre en cette maison un peu ébranlée sur ses assises. Elle est honnête femme, assurément, et incapable de manquer à ses devoirs, bien qu’elle aitamour médiocrepourle benêt Orgon. Elle est, aussi, douce, aimable et sage, discrète et
sûre d’elle-même, au point de n’être pas prude, et d’ignorer les effarouchements des vertus plus chancelantes; ce qui domine chez elle, c’est la modération des belles âmes et le grand charme dans la raison. Toutes ces qualités n’empêchent pas qu’il n’y ait, en