tragédies mises sur la toile : elle est plutôt parente du drame moderne. On connaît le tombeau de Botzaris, à Missolonghi. Cette jeune fdle agenouillée qui écarte de grandes
herbes et découvre le nom de Botzaris, est une conception qu’on dirait inspirée de Shakespeare. Et ce cavalier qu’on voit au Père Lachaise, écrasant un guérillo qui com
bat encore, n’est-ce pas tout un drame de marbre? M. David fait de la sculpture clas
sique, en ce sens qu’il a l’horreur du laid, et qu’il porte plus loin que personne l’a
mour des belles lignes et des contours par. faits; mais ses œuvres ont une vie visible, une activité tumultueuse, et je ne sais quoi de bruyant qui n’appartient qu’à l’école moderne, et qui fait son originalité.
Telles sont les qualités qu’on remarque dans le buste de Canaris. Il est d’une beauté irréprochable, et n’a rien de commun avec les œuvres barbouillées de quelques ar
tistes à la mode qui veulent faire du Delacroix en sculpture. Mais la veste grecque, l’écharpe à gros plis qui se noue négli
gemment autour du cou, le bonnet de pê
cheur rejeté à droite avec une coquetterie hère, enfin, et surtout, l’expression du vi
sage, tout est dramatique, tout dénonce un héros et rappelle une guerre fertile en prodiges. Je ne sais pas ce que les sculp
tures du Parthénon doivent penser de cette nouvelle voisine ; mais je crois qu’on l admire encore en revenant du Parthénon.
Le buste est colossal : nous sommes tellement accoutumés à attendre de la sculpture quelque chose de grand, que les œuvres de grandeur naturelle nous paraissent plus petites que nature.
Ceux qui verront le marbre sans connaître le modèle ne sauront pas quelles difficultés l’artiste a dû vaincre. J’avais quelquefois rencontré M. Canaris, que le roi de Grèce a fait son premier ministre, et je me demandais si son buste était possible, tant les lignes de sa figure sont peu sculp
turales. Quoiqu’il soit un des plus dignes fils de la Grèce, son visage offre précisé
ment le contraire du type grec : son nez relevé, ses narines ouvertes, son menton prononcé, signe d’un caractère énergique, sa physionomie vive et intelligente, le feraient plutôt, prendre pour un Français.
Buste de Canaris. — Dessin de Marc, d’après le croquis de M. David d’Angers ; gravure de Best, Hotelin et Cie.
M. David a surmonté tous ces obstacles. Le buste est beau et ressemblant.
Je ne vous parle pas de bien d’autres difficultés, mais toutes matérielles. M. David, qui a les plus beaux ateliers de Paris, n’au
rait pas su où trava lier sans l’obligeance du docteur Roeser, médecin du roi, et l’un
des hommes les plus bienveillants et les plus éclairés qui soient en Grèce. Par une de ces plaisanteries que le sort se permet quelquefois, c’est dans l’hôpital des aveugles que M. David a fait son buste. L’ate
lier trouvé, il fallait se procurer de la terre, chose moins facile aujourd’hui qu’au siècle de Périclès. La glaise ne valait rien,
elle était courte et se crevassait tous les jours, quelque soin qu’on prît de la mouil
ler. Le modèle achevé, pas de mouleurs :
ce sont les élèves de l’ecole de sculpture qui ont fait le moule; mais le plâtre n’é- tait pas meilleur que la terre, il a fallu travailler sur nouveaux frais. Enfin le buste
est fait, elle marbre viendra bientôt, mais il faudra que M. David se serve à luimême de praticien.
En attendant, toute la ville s’occupe de David (d’Angers) et du buste de Canaris.
Je causais l’autre soir avec un Grec de beaucoup d’esprit, c’est ce qui manque le moins dans Athènes. Il louait chaudement l’œuvre de M. David, et affectait de s’en réjouir comme d’un succès national. « On ne prétendra plus, disait-il, que nous vi
vons sur notre passé, et que nous dormons sur les lauriers de nos pères.
— Arrêtez, lui répondis-je. M. David n’est pas encore citoyen d’Athènes, et je crois qu’il renoncerait plutôt à son nom d’artiste qu’à son titre de Français.
— Bon, bon ! Vous nous le laisserez. Le mérite est assez commun chez vous, mes
sieurs les Français, pour que vous ayez le moyen de l’exiler. Si vous n’étiez pas si riches en hommes de talent, vous n’en distribueriez point à toute l’Europe.
— Prenez-le moins haut, messieurs les Athéniens. N’avez-vous pas exilé Phidias, qui n’avait jamais fait de politique?
— Oui, mais le jour ou nous avons su qu’il avait sculpté son Jupiter à Olympie, nous nous sommes hâtés de le rappeler. »
Edmond About.
Nous mettons sous les yeux des intéressés les dess’ns explicatifs des dé
crets qui règlent le costume de ville de la magistrature, en déclarant tou
tefois que nous les avons empruntés à un document officiel, et non copiés sur nature, le hasard ne nous ayant point encore offert la vue d’un magistrat ainsi orné et illustré.
Voici donc comment les décrets du 22 mai et 18 juin 1852 ont réglé, et môme déjà modifié ce cos
tume, qui se compose invariablement, pour les membres de la cour de cassation, des cours d’appel et des tri
bunaux civils de première instance, d’un liabit coupé droit sur le devant en forme de frac, avec cran au collet; le devant garni de neuf boutons.
Gilet droit avec cran au collet, boutonné au tiers de sa hauteur avec six boutons.
Pantalon de drap noir avec une bande de cinq centimètres sur le côté. Broderie en soie noire.
Chapeau en feutre noir ; ganse brodée en soie noire, sur velours noir,
semblable au dessin de l’habit; ruban mo;rénoir; cocarde tricolore; plumes noires.
Epee en acier et dorée ; poignée à six bandes dorées et six bandes en acier poli; pommeau à l’aigle; plaque à jour d’après le modèle; chaîné à perles d’acier et dorées mélangées,
avec glands en haut et en bas ; lame trois quarts ; garniture dorée.
Crochet porte-épée en drap noir.
Pouries membres de la cour de cassation et de la cour d’appel, l’habit sera en velours noir ; le drap noir sera employé pour ceux des membres des tribunaux civils du parquet et des greffiers.
MARQUES DISTINCTIVES.
1° Premier président et procureur général à la cour de cassation.
Habit de velours noir brodé de grou oes alternatifs de feuilles de chêne et d’olivier sur le collet, les parements, l’écusson et la poitrine; bouquet de poches ; bord courant et ba
guettes tout autour. Le collet et les parements auront un triple bord.
Gilet en soie noire, avec une baguette brodée autour et un bord cou
rant. Baguette simple aux pattes des poches.
Nouveaux costumes de ville de la magistrature. Dessin de Janet-Lange; gravure de Best, Hotelin et Cie.
Pantalon orné d’une bande de velours noir brodée en feuilles de chêne et d’olivier.
2° Présidents de chambre, conseillers et avocats généraux à la cour de cassation.
Premiers présidents et procureurs généraux des cours d’app L
Habit dont le collet et les parements n’auront, avec les broderies, qu’un simple bord ; gilet et pantalon comme dessus.
3° Président de chambre, conseillers, avocats généraux et substituts des cours d’appel.
Président et procureur de la République du tribunal de la Seine.
Hab:t brodé moins le bord courant, baguette simple sur le pantalon, sur le bord et les pattes du gilet.
4° Présidents et procureurs de la République, des tribunaux civils d’arrondissement.
Habit en drap noir, gilet de Casimir noir; mêmes broderies à l’habit, au gilet et an pantalon que pour les membres des cours d’appel.
5° Vice-présidents, juges, substituts des procureurs de la République, destribuuauxcivilsd’arrondissement.
Habit en drap noir avec broderies seulement au collet, aux parements et à l’écusson, baguetle autour de l’habit; gilet de Casimir noir sans bro
deries, pantalon avec bande en galon
de soie noire, formée de feuilles de chêne et d’olivier.
Les membres de la cour de cassation porteront un jabot et des man
chettes de dentelle, qui seront en sim
ple batiste pour les membres de la cour d’appel et des tribunaux de première instance.
Enfin, pour les actes extérieurs de leurs fonctions :
Les magistrats des cours d’appel, le président et le procureur de la République du tribunal de la Seine por
teront une ceinture de soie blanche à glands d’or, grosse torsade.
Les vice-présidents, juges, substituts du tribunal delà Seine el les ma
gistrats des autres tribunaux civils de première instance, une ceinture de soie rouge cramoisie, à glands d’argent mat, petite torsade.
Les juges de paix et leurs suppléants, une ceinture en soie orange, a glands de soie verte, petite torsade.
G. Falampin.
herbes et découvre le nom de Botzaris, est une conception qu’on dirait inspirée de Shakespeare. Et ce cavalier qu’on voit au Père Lachaise, écrasant un guérillo qui com
bat encore, n’est-ce pas tout un drame de marbre? M. David fait de la sculpture clas
sique, en ce sens qu’il a l’horreur du laid, et qu’il porte plus loin que personne l’a
mour des belles lignes et des contours par. faits; mais ses œuvres ont une vie visible, une activité tumultueuse, et je ne sais quoi de bruyant qui n’appartient qu’à l’école moderne, et qui fait son originalité.
Telles sont les qualités qu’on remarque dans le buste de Canaris. Il est d’une beauté irréprochable, et n’a rien de commun avec les œuvres barbouillées de quelques ar
tistes à la mode qui veulent faire du Delacroix en sculpture. Mais la veste grecque, l’écharpe à gros plis qui se noue négli
gemment autour du cou, le bonnet de pê
cheur rejeté à droite avec une coquetterie hère, enfin, et surtout, l’expression du vi
sage, tout est dramatique, tout dénonce un héros et rappelle une guerre fertile en prodiges. Je ne sais pas ce que les sculp
tures du Parthénon doivent penser de cette nouvelle voisine ; mais je crois qu’on l admire encore en revenant du Parthénon.
Le buste est colossal : nous sommes tellement accoutumés à attendre de la sculpture quelque chose de grand, que les œuvres de grandeur naturelle nous paraissent plus petites que nature.
Ceux qui verront le marbre sans connaître le modèle ne sauront pas quelles difficultés l’artiste a dû vaincre. J’avais quelquefois rencontré M. Canaris, que le roi de Grèce a fait son premier ministre, et je me demandais si son buste était possible, tant les lignes de sa figure sont peu sculp
turales. Quoiqu’il soit un des plus dignes fils de la Grèce, son visage offre précisé
ment le contraire du type grec : son nez relevé, ses narines ouvertes, son menton prononcé, signe d’un caractère énergique, sa physionomie vive et intelligente, le feraient plutôt, prendre pour un Français.
Buste de Canaris. — Dessin de Marc, d’après le croquis de M. David d’Angers ; gravure de Best, Hotelin et Cie.
M. David a surmonté tous ces obstacles. Le buste est beau et ressemblant.
Je ne vous parle pas de bien d’autres difficultés, mais toutes matérielles. M. David, qui a les plus beaux ateliers de Paris, n’au
rait pas su où trava lier sans l’obligeance du docteur Roeser, médecin du roi, et l’un
des hommes les plus bienveillants et les plus éclairés qui soient en Grèce. Par une de ces plaisanteries que le sort se permet quelquefois, c’est dans l’hôpital des aveugles que M. David a fait son buste. L’ate
lier trouvé, il fallait se procurer de la terre, chose moins facile aujourd’hui qu’au siècle de Périclès. La glaise ne valait rien,
elle était courte et se crevassait tous les jours, quelque soin qu’on prît de la mouil
ler. Le modèle achevé, pas de mouleurs :
ce sont les élèves de l’ecole de sculpture qui ont fait le moule; mais le plâtre n’é- tait pas meilleur que la terre, il a fallu travailler sur nouveaux frais. Enfin le buste
est fait, elle marbre viendra bientôt, mais il faudra que M. David se serve à luimême de praticien.
En attendant, toute la ville s’occupe de David (d’Angers) et du buste de Canaris.
Je causais l’autre soir avec un Grec de beaucoup d’esprit, c’est ce qui manque le moins dans Athènes. Il louait chaudement l’œuvre de M. David, et affectait de s’en réjouir comme d’un succès national. « On ne prétendra plus, disait-il, que nous vi
vons sur notre passé, et que nous dormons sur les lauriers de nos pères.
— Arrêtez, lui répondis-je. M. David n’est pas encore citoyen d’Athènes, et je crois qu’il renoncerait plutôt à son nom d’artiste qu’à son titre de Français.
— Bon, bon ! Vous nous le laisserez. Le mérite est assez commun chez vous, mes
sieurs les Français, pour que vous ayez le moyen de l’exiler. Si vous n’étiez pas si riches en hommes de talent, vous n’en distribueriez point à toute l’Europe.
— Prenez-le moins haut, messieurs les Athéniens. N’avez-vous pas exilé Phidias, qui n’avait jamais fait de politique?
— Oui, mais le jour ou nous avons su qu’il avait sculpté son Jupiter à Olympie, nous nous sommes hâtés de le rappeler. »
Edmond About.
Nous mettons sous les yeux des intéressés les dess’ns explicatifs des dé
crets qui règlent le costume de ville de la magistrature, en déclarant tou
tefois que nous les avons empruntés à un document officiel, et non copiés sur nature, le hasard ne nous ayant point encore offert la vue d’un magistrat ainsi orné et illustré.
Voici donc comment les décrets du 22 mai et 18 juin 1852 ont réglé, et môme déjà modifié ce cos
tume, qui se compose invariablement, pour les membres de la cour de cassation, des cours d’appel et des tri
bunaux civils de première instance, d’un liabit coupé droit sur le devant en forme de frac, avec cran au collet; le devant garni de neuf boutons.
Gilet droit avec cran au collet, boutonné au tiers de sa hauteur avec six boutons.
Pantalon de drap noir avec une bande de cinq centimètres sur le côté. Broderie en soie noire.
Chapeau en feutre noir ; ganse brodée en soie noire, sur velours noir,
semblable au dessin de l’habit; ruban mo;rénoir; cocarde tricolore; plumes noires.
Epee en acier et dorée ; poignée à six bandes dorées et six bandes en acier poli; pommeau à l’aigle; plaque à jour d’après le modèle; chaîné à perles d’acier et dorées mélangées,
avec glands en haut et en bas ; lame trois quarts ; garniture dorée.
Crochet porte-épée en drap noir.
Pouries membres de la cour de cassation et de la cour d’appel, l’habit sera en velours noir ; le drap noir sera employé pour ceux des membres des tribunaux civils du parquet et des greffiers.
MARQUES DISTINCTIVES.
1° Premier président et procureur général à la cour de cassation.
Habit de velours noir brodé de grou oes alternatifs de feuilles de chêne et d’olivier sur le collet, les parements, l’écusson et la poitrine; bouquet de poches ; bord courant et ba
guettes tout autour. Le collet et les parements auront un triple bord.
Gilet en soie noire, avec une baguette brodée autour et un bord cou
rant. Baguette simple aux pattes des poches.
Nouveaux costumes de ville de la magistrature. Dessin de Janet-Lange; gravure de Best, Hotelin et Cie.
Pantalon orné d’une bande de velours noir brodée en feuilles de chêne et d’olivier.
2° Présidents de chambre, conseillers et avocats généraux à la cour de cassation.
Premiers présidents et procureurs généraux des cours d’app L
Habit dont le collet et les parements n’auront, avec les broderies, qu’un simple bord ; gilet et pantalon comme dessus.
3° Président de chambre, conseillers, avocats généraux et substituts des cours d’appel.
Président et procureur de la République du tribunal de la Seine.
Hab:t brodé moins le bord courant, baguette simple sur le pantalon, sur le bord et les pattes du gilet.
4° Présidents et procureurs de la République, des tribunaux civils d’arrondissement.
Habit en drap noir, gilet de Casimir noir; mêmes broderies à l’habit, au gilet et an pantalon que pour les membres des cours d’appel.
5° Vice-présidents, juges, substituts des procureurs de la République, destribuuauxcivilsd’arrondissement.
Habit en drap noir avec broderies seulement au collet, aux parements et à l’écusson, baguetle autour de l’habit; gilet de Casimir noir sans bro
deries, pantalon avec bande en galon
de soie noire, formée de feuilles de chêne et d’olivier.
Les membres de la cour de cassation porteront un jabot et des man
chettes de dentelle, qui seront en sim
ple batiste pour les membres de la cour d’appel et des tribunaux de première instance.
Enfin, pour les actes extérieurs de leurs fonctions :
Les magistrats des cours d’appel, le président et le procureur de la République du tribunal de la Seine por
teront une ceinture de soie blanche à glands d’or, grosse torsade.
Les vice-présidents, juges, substituts du tribunal delà Seine el les ma
gistrats des autres tribunaux civils de première instance, une ceinture de soie rouge cramoisie, à glands d’argent mat, petite torsade.
Les juges de paix et leurs suppléants, une ceinture en soie orange, a glands de soie verte, petite torsade.
G. Falampin.