litaire, le changement était opéré le lendemain à sept heures du soir, et la fête commençait à dix heures pour finir le lendemain à six heures du matin.
Le vaisseau amiral était amarré il quai. Les abords extérieurs pour parvenir des voitures au vaisseau avaient été préparés, couverts et ornés par les soins empressés de la marine napolitaine.
On entrait au vaisseau par la deuxième batterie. — Vestiaire, salle de jeu, grande chambre des officiers réservée aux dames et aux femmes de chambre à leur service ; voilà l’avant-scène.
Dans la première batterie, rafraîchissements en permanence et buffet. Les appariements de l’amiral ouverts toute la nuit aux invités.
Le pont était converti en salle debal surun développement de 33 mètres de long sur 12 de large, sans compter la dunette. De la dunette, formant tribune et plongée dans une obscu
rité calculée, le regard embrasse une décoration dont la description sommaire, non plus que le dessin qui l’accom
pagne, ne saurait rendre l’effet pittoresque. Ces femmes charmantes, ces parures étincelantes, les yeux et les dia
mants, parmi les uniformes variés, offrent un spectacle que la marine seule peut réaliser dans ses fêtes.
Le pourtour du vaisseau, d’une extrémité à l’autre, formant corbeille en paille tressée, et rempli d’arbustes et de fleurs ; —le pied du grand mât-palmier, immense Corbeille pyramidale de fleurs et d’arbustes; — la dunette entourée do fleurs, et couverte de grands arbustes où étincellent des verres de couleur çà et là dans les feuilles.
Le plafond formé des pavillons napolitain; toscan, brésilien et sarde; le pourtour entier d’une suite de pavillons tricolores portant sur le fond blanc les écus couronnés de fleurs de tous les bâtiments de 1 escadre: Pille de Paris,
P almy, Jupiter, Bayard, Henri IP, léna, Sanê, Mogador, Gomer; — les musiques de la / ille de Paris et du Corner jouant alternativement.
Douze lustres formés de baïonnettes et de pistolets; six pyramides d’armes et de bougies; soixante lampes Carcel, dans les fleurs tout autour du vaisseau, éclairaient splendidement cette immense et magnifique salle.
Notre dessin figure la scène au moment de l’entrée de la comtesse d’Aquila donnant le bras à l’amiral.
— Le voyage du Président, dont le départ a eu lieu le 1 h, est le plus grand événement de la semaine. Le Moniteur a rendu compte en ces termes de ce premier acte du voyage :
« Le Prince-Président est parti aujourd’hui pour son voyage dans le midi. Il est arrivé un peu avant une heure il la gare du chemin de fer d’Orléans.
« Le Prince était en voiture découverte et avait avec lui son oncle le prince Jérôme, président du sénat.
« Il n’avait pas voulu de l’escorte que lui fournit habituellement la garnison de Saint-Cloud. Eu apprenant cette détermination, les officiers de cavalerie de la division se sont spontanément réunis, et sont venus ayant à leur tête les généraux Corte et l’Admirault, pour accompagner le Prince, qui a été vivement touché de cette démarche.
« Tous les ministres, le vice-président du conseil d’Etat, des membres du sénat et du corps législatif, le général commandant en chef l’armée de Paris, le général Lawoestine, les officiers généraux présents à Paris, les principaux fonctionnaires, les administrateurs de la ligne de Bordeaux étaient réunis à l embarcadère, et ont reçu
le Prince à son arrivée. Il a traversé, pour se rendre à la gare, une population nombreuse et empressée qui l’a accueilli avec le plus vif enthousiasme et les acclamations les plus sympathiques. Les témoi
gnages d’affection que le Prince a recueillis à son passage l’avaient sensiblement touché, et ceux qui ont été témoins de cette ovation se réjouissaient de voir commencer son voyage sous fie si heureux auspices.
« Le Prince est monté en wagon à une heure et quelques minutes, accompagné de M. le ministre de la police générale, de ses aides de camp et des officiers de sa maison. »
Il ne nous reste, en fait d’événement notable, qu’à enregistrer le sommaire du règlement relatif à l enseignement public, lequel a paru dans le Moniteur du là, en renvoyant a la feuille officielle elle-même, qui consacre à ce règlement deux suppléments.
L’enseignement religieux est obligatoire pour tous les élèves internes des lycées et pour ceux des élèves externes dont les parents auront demandé Γadmission au commencement de l’année.
Quant au nouveau plan d’études, on connaît le principe sur lequel il repose. Ce principe, qui du reste est loin d’ê­
tre appliqué d’une manière absolue, ëst la séparation des lettres cl des sciences dans les classes supérieures.
Les élèves des lycées sont classés en trois divisions : élémentaire, de grammaire et supérieure. La division élémen
taire comprend les classes de huitième et de septième ; en huitième, les élèves apprennent l’orthographe, des notions de grammaire, de géographie et de calcul ; j’étude du latin commence en septième.
A la fin de l’année de septième, les élèves subissent un examen pour entrer dans la division de grammaire, com
posée des classes clé sixième, ffe cinquième et de quatrième.
On continue le latin, on commencé le grec, en apprend les éléments de Thistoîre de France.
Parmi les auteurs grecs expliqués en cinquième et en quatrième, nous remarquons avec quelque surprise l’Evan
gile (le saint Jajr. Tout le monde sait que, littérairement parlant, les évangélistes sont loin d’être des modèles.
A la fin de la quatrième, les élèves subissent un nouvel examen pour entrer dans la division supérieure, composée de deux sections, l’une des lettres, l’autre des sciences. Mais les élèves de la section des sciences continuent à par
ticiper à une partie des études dé la section des lettres, et réciproquement.
La partie commune aux deux sections comprend des études de français, de latin, de grec, d’histoire, de géographie, d’allemand, d’anglais et de logique.
On sait que la classe de logique remplace ce qu’on a appelé jusqu’à présent la classe de philosophie. L’étude de la
philosophie moderne est complètement exclue. Le programme, qui comprend les Dialogues de Platon, les Analytiques d’Arislote, les Soliloques de Saint-Augustin, le dis
cours de la Méthode, la Logique de Port-Royal, s’arrête aux Pensées de Leibnitz, par l’abbé Emery, et aux Lettres à une princesse d’Allemagne, d’Euler.
— Les nouvelles de l’étranger ne sontpasplus intéressantes que les nouvelles de l’intérieur. La question douanière en est toujours au même point en Allemagne. La Prusse et l’Autriche gardent chacune la position qu’elles ont respec
tivement prise dès le début. Quant aux Etats coalisés, leurs dispositions diffèrent suivant les versions qui arrivent de Vienne ou de Berlin.
— Le ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, M. Van Sonsbeek, a donné sa démission, fondée, dit-on, sur le rejet par la chambre des députés de Hollande du traité de commerce avec la France.
— L’Amérique est plus agitée que l’Europe. Il est toujours question de Cuba, et le mouvement de l opinion parait de plus en plus énergique aux Etats-Unis, où des réunions publiques ont eu lieu pour provoquer une solution. L’autorité espagnole, de soft côté, poursuit les moyens de répres
sion à l’intérieur de la Havane avec une grande sévérité.
Le Mexique est en pleine guerre civile, ainsi que divers Etats de la Confédération argentine. Urquiza a reconnu l’indépendance du Paraguay. Les correspondances de la Plata envi
sagent cette mesure comme une fin de non-recevoir à opposer aux demandes de la France et de l’Angleterre relative
ment à la liberté de navigation pour le pavillon européen sur les affluents de la Plata.
— Nous apprenons, au moment de mettre sous presse, la mort du duc de Wellington.
Paulin.


Voyage du Président de la République.


On a déjà, au moment où nous écrivons, des nouvelles de la réception du Président de la République à Bourges, à Nevers et à Moulins. On en aura de Roanne et de Saint- Etienne quandeenuméro paraîtra. Nous recueillerons toutes ces nouvelles, en les résumant dans une relation historique, en illustrant la marche triomphale du principal personnage
de tous les épisodes pittoresques qui vont signaler celte odyssée politique. Nous répondons ailleurs à ceux qui veu
lent bien nous offrir leur concours, et aussi à ceux qui se montrent plus pressés que nous ne pouvons nous montrer prêts à les satisfaire. Nous espérons que notre relation sera de l’histoire, au lieu d’être une chronique ; nos mesures sont prises en conséquence.
Courrier de Paris.
Vous avez prévu notre première nouvelle, qui n’en est plus une : M. le Président de la République est parti pour
son voyage dans le Midi. Il en résulte que, pendant un grand mois, la politique de grand et petit format en sera réduite à battre la campagne à la suite de tant de voya
geurs illustres. Puisque l’enthousiasme a commencé son tour de France, le moment est venu pour cette politique de s’inspirer des contorsions du télégraphe! Déjà même les récits et les descriptions abondent, et l’on n’y voit aucun in
convénient pour le lecteur, si ce n’est que ce sera toujours et partout le même récit. Depuis tes temps les plus reculés, nos provinces n’ont qu’une manière, — et c’est la bonne, — de fêter les augustes visiteurs qui leur arrivent : les villes s’empanachent, les populations accourent, les autorités déifient; et comme les grandes joies ne. sont jamais muettes, l’éloquence de chef-lieu fait merveille. « Sire, disait à l’un de nos rois quelque municipal du bon vieux temps, je. pour
rais vous faire une belle harangue; mais le couvert est mis,
et nous allons boire à votre, santé. » Et le prince avoua qu’aucun discours ne pouvait lui être plus agréable.
Le fait est qu’en l’honneur ffe l’illustre voyageur et à sa suite, les routes s’encombrent de représentants de quoi que ce soit et d’hommes d’Ètal de toutes sortes d’états. Dans la prévision de cette affluence extrême , à Nevers, l’autorité ecclésiastique a dispensé les habitants de faire maigre le mercredi, qui était celui (les quatre-temps; et cette nou
velle manière de décréter la püdtè au pot n’a trouvé que des approbateurs. Mais, sans accompagner plus loin tout ce qui part, voyons un peu ce qui arrive à Paris.
il arrive donc que, l’automne s’y dessinant de plus belle par des averses côpieuses, beaucoup d’émigrés s’apprêtent à rentrer. Ainsi la campagne d’hiver commencerait au mois d’octobre; mais un bruit s’est répandu qui pourrait bien calmer celte fièvre ardente du retour : il s’agit de la clô
ture, indéfiniment prolongée, du Théâtrc-Halien. Du plus loin qu’il nous en seuvienne, c’est-à-dire il y a si* mois,
l’état-majer des amateurs vit fermer d’un eeil sec la volière musicale de la place Ventadeur. De part et d’autre en se sépara iVeideaient, et il ne vint à personne l’idée de cou
vrir la scène des adieux d’une pluie de bouquets. Ce n’était peut-être que l’effet d’un caprice, les intéressés y ont vu un symptôme de lassitude et de ffégoût ; et la direction est vacante. Personne, à ce qu’il paraît, ne se sent plus le courage de jouer à cette loterie chanceuse. Quoi1 après qua
rante ans de l’union la plus intime et de l entente la plus cordiale, l’accord serait rompu, et Paris congédierait sa favorite !
Seigneur, y pensez-vous, et quç dira le monde!
Paris laissera sans sourciller l’Alhoni aux Etats-Unis, Ronconi à l’Espagne, la Cruvefji à Vienne, et la Sontag à l’Angleterre : n’est-ce pas une grande calamité?
Votre dédommagement et le nôtre , c’est que le règne du cheval va recommencer. Encore quelques, jours, et le sport aura repris le cours de ses exercices au Champ de Mars, sur la pelouse de Chantilly et dans la plaine de Marches. Il est
bien temps d’ailleurs de demander à cette saison une commutation de plaisirs, puisque la chasse n’y est plus de saison. Les orages et les tempêtes de cet été ont détruit le gi
bier, sans compter que les paysans, plus que jamais pos
sédés du démon de leur propriété, se livrent à cet exercice d’une manière inattendue; eux aussi ils s’en font un jeu de prince, etils vontà lâchasse... aux chasseurs. Indépendam
ment de ces procédés sauvages, la foule des tireurs se plaint d’être arrêtée au moindre coup par quelque règlement en liabit de garde champêtre, et le gibier, quand il s’en trouve, les nargue à l’abri d’un procès-verbal.
En Angleterre, les amis des bêtes viennent de prouver à M. Poitevin jusqu’à quel point ils s entendent à les proté
ger. L’aéronaute et son compère, condamnés à l’amende pour avoir associé deux poneys à leur ascension, ce n était rien encore; le fait du Taureau enlevant Europe malgré lui criait vengeance, et les coupables ont dû financer une seconde fois et fournir caution ; la récidive est peut-être un cas pendable. En l’absence du taureau, conduit prématuré
ment à l abattoir, un témoin a déposé, on pourrait dire plaidé, contre les bourreaux d’une manière pathétique. — Ah!
quelle bête, monsieur le juge, pour l’encolure et l’embonpoint il n’avait pas son égal. — Et vous l’avez vu ? — Comme je vous vois. — lie quel air se prêtait-il à cet indigne traite
ment?— Dam, il pleurait comme... un veau, la chair la plus tendre et la meilleure des bêtes... en bifsteack. — Qu’en savez-vous? ·—J’en ai mangé.
Les alarmistes qui avaient annoncé une épidémie pour ces derniers beaux jours ne se seront pas trompés : heureu
sement ce n’est pas le choléra qui exerce ses ravages; le mal est moins grand et l’épidémie moins meurtrière, elle ne sort guère du cercle des têtes vives et des esprits susceptibles; nous voulons parler du duel, puisqu’il faut l’appeler par son nom; la plupart de ces rencontres, entre militaires, ont eu, dit-on, le même motif : une rivalité amou
reuse. C’est contre ces courages égarés que l’empereur Napoléon fulminait ses ordres du jour les plus sévères. Le maître ne comprenait pas que Ton se batlîl pour une maî
tresse. Le héros de tout combat singulier n’était pas son homme, et même sa prévention était telle, qu’il jugeait les combattants du champ clos incapables d’une action d’éclat, et il disait à son monde : Latour-Maubourg, qui est le brave des braves, n’a jamais eu de ces affaires que vous appelez des affaires d’honneur.
N’allez pas croire cependant, d’après cet échantillon de nos nouvelles, que la semaine ait été complètement stérile. Certaines aventures, encore pendantes et assez ténébreuses, ne sauraient manquer d offrir quelque aliment à l’imagination de nos déseuvrés. Telle est celle de cette grande clame
allemande et de race princière, dont la vie intriguée comme un roman de bas étage sera bientôt tirée au clair par-de
vant justice. On parle d’un enfant supprimé par cette mère dénaturée, tandis que plusieurs personnes assurent que la progéniture en question n’aurait été mise à mort que par un canard, ce qui est infiniment moins lamentable. De
même on a imaginé, — si toutefois de telles monstruosités sont des inventions, — une variante assez dramatique au mélodrame intitulé l enfant de sept ans, muet et coura
geux. L’enfant serait une petite fille détournée du foyer maternel, à cette fin d’amener à composition un cœur trop peu sensible; en d’autres termes, c’est l’honneur de la mère qui aurait eu à payer la rançon de ce cher ange. L’auteur de cet odieux massacre des innocentes porte, dit-on tou
jours, un très-beau nom qu’il aurait ainsi enlaidi à plaisir,
Une autre nouveauté du moment, c’est que les cages de la conciergerie regorgent de filous ; on croirait que la moi
tié de la ville emploie ses vacances à voler l’autre. Un de
ces industriels, signalé pour exploiter les chemins de fer comme une Californie, et qui y faisait les bagages des voyageurs comme on fait le mouchoir, a été arrêté au débar
cadère par la police qui, outre l’œil d’Argus, possède main
tenant les longs bras du télégraphe électrique. Un de ces messieurs, qui opérait dans la ruelle Saint-Bon ( où diable Je crime va-t-il se nicher? ), a été trouvé nanti d’un écu de cinq francs, et, ajoute gravement la feuille judiciaire, il sera demandé à ce malfaiteur d’expliquer comment il se trouve en possession d’une pareille somme.
Dernièrement, dans une ville voisine, le président des assises ayant fait venir un condamné à mort, lui tint à peu prés ce Langage : Un tel, en considération de votre repen
tir, la cour s’empresse de vous informer que vous ne serez pas décapité... sur la place publique, mais dans quelque endroit moins fréquenté.
Autre chose. Un citoyen de Dijon vient de découvrir un moyen bien simple, — c’est l’inventeur qui le dit, — d’arrêter les chevaux les plus fougueux qui prennent si facile
ment le mors aux dents : il s’agit uniquement de passer la rêne de droite dans l’anneau de gauche et la rêne de gauche
dans l’anneau de droite. Fussiez-vous dans un char traîné par des coursiers aussi indomptablesqqe ceux d’Hippolyle, le procédé est infaillible, et rien ne vous empêche d’essayer.
Quel siècle ! et nous en verrons bien d’autrés. Je ne sais de comparable à cette découverte que l’invention dont un beau soir ilarel s’avisa à la Porte-Saint-Martin. On allait lever le rideau pour la seconde pièce, lorsque la corde crie et se rompt. La recette était déjà distribuée aux ayants droit, à ce point qu’il ne restait pas un sou en caisse pour se procurer une corde neuve. Le régisseur accourt tout effaré de
vant son directeur : Eh bien ! lui dit-il, comment remédier à la catastrophe et que faut-il faire? —Mais, mon cherMoessard, il faut faire un nœud.
A Grignan (nous faisons aussi notre tour de France), on a décidé l’érection d’une statue en l’honneur de M e de Sévigné. Après Jeanne d’Arc et Jeanne Hachette, M ‘c de Sévigné devait obtenir cet honneur, s’il est vrai qu’il soit également glorieux à une femme d’avoir combattu pour son pays et de l’illustrer à jamais par ses écrits. L’honneur que reçoit la première des dames françaises qui