(ju un pauvre montagnard, dont la mère recueillit jadis une petite iîlle échappée par miracle à l’avalanche qui engloutit sa famille au passage du mont Cénis. Le riche collier de perles trouvé sur l’enfant indiquait une noble origine, et Claude Thibaut le conservait comme moyen de reconnais


sance, jusqu’au moment où la misère l’a contraint à s’en défaire pour donner du pain à la petite Geneviève. Gene


viève a grandi; elle est devenue la femme de Thibaut, lorsqu’un soir, dans leur humble cabane, se présente un voyageur dont l’allure est assez farouche : c’est le crime en per
sonne, annoncé ci-dessus. Ce Luizzi sait l’histoire du collier, vendu à un bijoutier de Chambéry, et racheté par le comte de Ferrare, dont Geneviève est la nièce et l’héritière. Seulement l’oncle défunt, en léguant tous ses biens à Gene
viève, y a mis une condition, c’est qu’elle ne serait plus M“e Thibaut ; mais Geneviève repousse des offres qui lui en
lèveraient son mari ; et, pour en finir, le traître dénonce aux Autrichiens, comme un espion de l’armée française, le
pauvre Thibaut, qui est fusillé. Tel est du moins le bruit public ; mais si Thibaut a échappé à la fusillade, il n’en est pas moins mort pour Geneviève. 11 se gardera bien de démentir une légende qui assure la fortune de sa femme au
jourd’hui comtesse de Ferrari ; et puis, si l’abnégation vous paraît inacceptable, songez que Thibaut est père, et il est tout simple qu’il se sacrifie au bonheur de son enfant.
Quand le drame commence, car ceci n’en est que le prologue, il y a quinze ans déjà que Geneviève a épousé ce Luizzi, marquis d’Arezzo, et c’est un singulier protecteur qu’elle a donné à sa fille Jeanne. Luizzi a fondu, dans tous les tripots de Paris, l’opulent héritage des Ferrari. Encore quelques jours et Jeanne sera majeure; elle épousera un colonel, double échéance que le scélérat voit venir avec ter
reur. Ajoutez à cette situation périlleuse les exigences d’un complice qui a vendu son silence, et qui n’est pas encore payé; de sorte que pour échapper à sa ruine, M. le marquis s’avise d’un nouveau crime : séquestrer Jeanne, c’est impos
sible, et, puisque le poison pourrait laisser des traces, Luizzi se décide à jeter l’obstacle à la rivière. Jeanne est perdue, et elle est sauvée par son père Claude Thibaut, le cocher de fiacre. Après cette longue absence, pendant laquelle le sol
dat Thibaut a figuré sur tous les champs de bataille de l’Europe, la Providence lui ménageait celte rentrée écla
tante.^ Ici combien de voiles vont tomber, que de mystères qui s’éclairciront ! et, pour commencer, voici le chapitre des reconnaissances, où tout autre que M. Bouchardy se serait perdu. Au contraire, l’intérêt s’accroît, les événe
ments se développent sans confusion, et l’on est charmé d’un dénouement si simple. Au bout de ces complications infinies, si l’entrevue de Thibaut et de Geneviève est touchante et neuve, celle des deux maris est terrible et inat


tendue ; elle se termine par un duel, que le comte se pro


pose de tourner en assassinat ; mais enfin justice est faite, et l’on peut vous épargner le reste.
A quoi bon insister davantage sur le succès d’un drame
La reine d’Angleterre visitant la chapelle ardente du duc de Wellington, à Chelsea.
que tout le monde voudra voir, et qui sera une mine d’or pour le théâtre de l’Ambigu ? Les acteurs sont MM. Saint- Ernest, Chilly, Laurent, et Mmes Guyon et Thuillier, autant de noms qui portent avec eux leur éloge. Quant à l’au


teur, de plus experts vous auront dit qu’il s’est surpassé.


Or, un mélodrame supérieur au Sonneur de Saint-Paul et à Gaspardo a bien des chances pour être accepté comme le chef-d’œuvre du genre.
Vous connaissez le roman qui, depuis quelques jours, remue toutes les têtes et fait courir une foule de plumes élé
gantes dans les feuilletons ; cette œuvre virile, sortie tout armée du cerveau d’une femme, ce beau livre, qui est en
même temps une bonne action, a passé des mains des traducteurs dans celles des arrangeurs dramatiques. Il n’y a guère de théâtre à Paris qui ne s’apprête à mettre en pièces la Cabane de l oncle Tom. C’est le Gymnase, -nous assure
t-on, qui aurait pris les devants dans cette course aux recettes , et tout est prêt pour la cérémonie de la première représentation, qui sera donnée samedi.
En vertu de la rentrée des chambres de justice, les plaideurs ont reparu dans la salle des Pas-Perdus, et les gour
mets qui se plaisent à déguster le scandale ont repris le chemin de la cour d’assises, au risque d’y perdre leur peine ou leur plaisir, car le crime se fait rare ; et si la badauderie le regrette, l humanité s’en réjouit. Il y a encore des mal
faiteurs, mais ils ne sortent plus guère d’une malhonnête médiocrité.: Tel est ce garçon de bureau de l’administration des postes, qui dévalisait courageusement les plis confiés à sa garde. Sa filouterie, qui se décorait d’un titre nobiliaire
pour mieux donner le change sur cette existence en partie double, aura coûté plus de cent mille francs à ses contribuables.
Ici le Courrier tourne bride et abandonne Paris pour l’é­ tranger, en considération de ces vignettes. L’explication de la première est bien simple : c’est une vue de Civita-Vecchia au moment de rembarquement pour la France des 13e léger, 32e et 36e de ligne, provenant de la garnison de Rome, et qui ne l’avaient pas quittée depuis l’époque du siège.
On sait que la célébration des obsèques du duc de Wellington a été fixée au jeudi 18 novembre. Le gouvernement anglais a voulu entourer de la plus grande magnificence les honneurs funèbres décernés au plus illustre capitaine des armées britanniques depuis Marlborough, et le parle
ment a voté cent mille livres sterling à celte intention. « Il ne faut pas qu’aucune pompe, quelle qu’elle soit, a dit un lord à la tribune de la chambre haute, puisse surpasser jamais celle que la nation va déployer pour honorer cetle