vaux avec la même activité près de la grande baie de Sébastopol, afin de pouvoirprocéder au bombardement. D’après les dernières dispositions du général Pélissier, on reconnaît facilement qu’il a l’intention de bombarder la flotte russe à la fois de la pointe H. O. de la baie de la Quarantaine et des redoutes de Sapun, pour la forcer à se placer plus bas,
afin que le flanc droit du camp français se trouve à l’abri du feu des bâtiments russes. Les Russes veulent, dit-on, forcer les alliés à une grande bataille, afin de donner une tournure particulière à cette guerre, qui, nous semble-t-il, n’en a pas besoin. Du reste, nous nous associons de grand cœur à leur désir ; nous savons ce qui en résultera.
On mande de Crimée que, jusqu’au 17 juillet, on a eu des pluies continuelles, mais qu’à partir de ce jour la chaleur a repris. Il arrive constamment des renforts considé
rables en hommes, chevaux et matériel, et on remarque partout une grande activité. Le corps turc forme actuelle
ment l’extrême droite de l’armée alliée. Il est rangé sur les hauteurs de la vallée de Baïdar, et fait souvent des recon
naissances dans la contrée montagneuse, où se trouvent quinze villages comprenant huit cents familles, qui se réfu


gient dans l’intérieur desmontagnes à l approche des Turcs.


Ceux-ci ont requis des foins, qui ont été transportés dans les magasins. Aux Turcs, qui font toujours maigre chère et que la Porte traite en marâtre, se lient les Piémontais; ils
sont bien nourris et ont une. bonne tenue militaire, qui fait contraste avec l’indolence de leurs voisins anglais. Les Fran
çais ont conservé toute leur gaieté. Ils ont transféré leur théâtre jusque dans les lignes d’attaque. Un autre théâtre a été établi à Kamiesli.
Joignons à ces détails ceux que nous trouvons dans le Wanderer :
« Le choléra, qui exerce de grands ravages dans les troupes russes de Crimée, diminue à Odessa. Les nouvelles de Sébastopol vont jusqu’au 22 ; tous les hôpitaux du côté sud ont été évacués. La division du général Bellegarde était re
venue et s’était réunie à la division de réserve du quatrième corps d’infanterie, commandée par le général Wischniefski.
Le prince Gortschakotf a fait connaître aux troupes, par un ordre du jour, la mort de l’amiral Nachimoff, qui y est pré
senté comme le modèle du soldat russe. Apres la bataille de l’Alma, l’amiral avait voulu sortir avec la flotte, et, au refus du prince Mentchikoff, il s’était adressé directement à l’empereur et au grand-duc Constantin. On lui répondit que la plus haute vertu du soldat, c’était d’obéir aux ordres de son supérieur. Depuis lors il ne cessa d’exister une cer
taine tension entre l’amiral et le prince Mentchikoff. Nachimolï voyait avec douleur qu’on coulait bas l’un après l’autre tous les bâtiments de la flotte. Il paraît qu’il a cherché la mort avec intention. ;>
A propos des immenses intérêts qui sont en jeu en ce moment, il est bon de faire remarquer le langage tenu par la Suède, dans un moment où certaines puissances commen
cent à sé montrer récalcitrantes à payer l’impôt de passage du Sund; la Gazette de Breslau contenait, il y a quelques
jours, l’assertion suivante : « Le drapeau suédois ne s’unira pas aux étendards alliés, tant que la question d’Orient sera purement orientale ; mais quand il s’agira du droit de péage
du Sund, et de la fin de la prépondérance russe dans la mer Baltique, la Suède, peuple et roi, se joindra aux puissances occidentales. » La question posée dans ces termes, nous croyons que bientôt nous aurons la coopération d’un allié d’autant plus fidèle, qu’il agira avec nous dans ses intérêts directs.
Un article du Times examine quel pourra être, pour l’I­ talie, le résultat des conférences de Vienne :
« On sent tous les jours combien il est difficile d’empêcher que cette guerre, comme la guerre de Trente ans, ne devienne une guerre d’opinion, et il est au moins singulier que l’Autriche, qui a plus à perdre que tout autre à une guerre d’opinion, soit la prenrere à la provoquer. Par quelaveuglement de sa part l’Autriche ne voit-elle pas que, bien qu’elle puisse commencer une pareille lutte, elle ne peut savoir avec certitude comment elle finira? Formée d’éléments incompatibles, n’existant qu’en faisantpeser une portion de ses sujets sur l’autre, elle a tout à redouter d’un ré
veil de ce sentiment national qui peut unir les Polonais, Hongrois, Croates et Italiens dans une ligue contre leur oppresseur commun. »
Il a été beaucoup question, à Paris, d’une lettre envoyée par Timpératrice-mère de Russie à l’archiduchesse Sophie, mère de l’empereur cl’Autriche, sur la reprise des confé
rences de Vienne. C’était une pure invention, ou, comme on dit, un bruit de bourse.
Le blocus des ports russes causant un préjudice énorme au commerce et à l’industrie russes, le cabinet russe vient de faire des ouvertures à celui de Berlin pour modifier d’une manière notable le système douanier de la Russie en faveur de la Prusse. On fait aussi de grands efforts pour faire pas
ser les produits de la Russie méridionale par Galatz et r Autriche, par les bateaux du Danube.
Les nouvelles de la flotte se ressentent un peu du temps d’arrêt qui semblent peser sur les opérations de la guerre.
Une dépêche de l amiral Hondas annonce les résultats heureux de l’attaque faite par le capitaine Yverlton sur la position occupée par l’ennemi, dont les troupes (3,000 hommes) défendaient Frederiksmann.
La question de l’achat d’un certain nombre de bateaux à vapeur de rivière par le gouvernement pour servir aux opé


rations de. la mer Voire, a reçu son accomplissement définitif.


Le Rhône et la Saône, fournissent à eux seuls cette nouvelle flotte, qui ne compte pas moins de quatre-vingt-dix-sept bâtiments, qui ont l’avantage de caler peu d’eau, et appro
chent par conséquent très-près du rivage. Les soldats, en débarquant, auront à peine de l’eau jusqu’aux genoux, il
est inutile de faire remarquer les avantages remarquables qui ressortiront de cette décision.
D’après les journaux de Vienne, pendant quelques jours
on a canonné Taganrog. Une, chaloupe à vapeur anglaise s’est échouée et a été brûlée par les Russes; mais l’équipage est parvenu à se sauver.
La ville de Berdiansk, dans la mer d’Azof, a été de nouveau bombardée; les dégâts faits par les alliés ont été considérables.
Il y a quelques jours, les amiraux ont rendu une ordonnance par laquelle les marins des navires alliés peuvent aller chercher des blés à Kertch, à condition seulement de donner la valeur du tiers de leur chargement à l’Etat.
A Saint-Pétersbourg, on souscrit toujours des sommes nombreuses pour la milice de l’Empire. La corporation des marchands de Moscou vient encore de donner 12,000 rou
bles d’argent pour cet objet. L’Empereur a passé en revue, au Champ de Mars, au commencement de ce mois, les ba
taillons des gouvernements de Saint-Pétersbourg et de Nowgorod, avec leur train complet. Les troupes étaient formées sur deux lignes, et comptaient 6,530 hommes divisés en six druschines ou bataillons. La troisième ligne était formée par 91 voitures de train.
Une lettre envoyée au Globe dit, à la date du 1er août : «Nouspartons demain pour Swcaborg, que nous allons attaquer. » Chercher à prévoir le résultat de cette expédition serait assurément très-présomptueux; il est à espérer cepen
dant que le moment est venu où 1e barbare massacre de Hango sera enfin vengé. A ce dernier sujet, des lettres ont été échangées entre l’amiral Dundas, demandant, au nom de l’amirauté anglaise, la mise en liberté des prison
niers faits à I-Iango, et le prince Dolgorouski, ministre de la guerre en Russie, qui refuse, s’appuyant, dans son rapport, sur ce qu’il n’était pas permis, en temps de guerre, de se servir d’un prétexte quelconque pour venir, en pays ennemi, visiter les côtes et prendre des renseignements.
Pendant toute cette semaine, le Parlement anglais n’a pas discuté une seule question de quelque importance. On dirait vraiment que toutes les paroles échangées par les derniers orateurs à la tribune n’avaient pour but que de causer quel
ques désagréments à lord Palmerston. Après avoir, par une habileté transcendante, — reconnue même par ses en
nemis, — terrassé en détail tous les adversaires qui se sont présentés pour le combattre, il se retire dans une position très-difficile. La Chambre des communes s’est montrée envers lui capricieuse et fantasque, ne lui laissant pas la con
fiance nécessaire dans la grande responsabilité qui pèse sur lui, ou ne la lui retirerant pas entièrement, ce qui aurait
tranché la question sans l’améliorer. Elle a voté, du reste sans difficulté les sommes réclamées par le gouvernement pour la poursuite de la guerre. Elle a accueilli presque avec des rires la proposition consciencieuse du major Read, ten
dant à imposer au gouvernement l’obligation de ne conclure aucune paix sans avoir, au préalable, pris l’opinion de la Chambre des communes, qui serait convoquée au besoin.
Celte motion ne devait pas être si mal accueillie, car elle a eu pour résultat l’assurance donnée par lord Palmerston, qu’avant que la paix fût irrévocablement conclue, ta con
vocation du Parlement serait pour le gouvernement un avantagé et un secours plutôt qu’un embarras.
Dans la séance de la Chambre des communes de ta nuit du 7 au 8, lord John Russell a déclaré que, la Turquie ayant accédé aux propositions de ΓAutriche, la guerre n’était plus actuellement de l’intérêt de ta Turquie.
Le noble lord a ajouté qu’il y avait peu de résultats à attendre des escadres. Il a exprimé te vœu que la politique italienne s’améliorât de telle manière que l’occupation des troupes étrangères pût avoir un terme.
Le vicomte Palmerston a nié que la Turquie se fût jamais montrée favorable aux propositions de l’Autriche. Il a nié également que cette dernière puissance eût renforcé son armée d’Italie. Le noble lord a exprimé sa satisfaction de ce que l’Autriche n’avait pas voulu être partie belligérante contre les puissances occidentales. Suivant le noble vicomte, le rappel des troupes étrangères de l’Italie serait de nature à inspirer des craintes. Le. gouvernement, du reste, portera son attention sur les réformes utiles et salutaires à opérer en Italie.
Le noble, lord a terminé en repoussant des discussions qui ne peuvent avoir d’autre résultat que d’amener de la froideur entre l’Autriche et les alliés.
Dans les finances des Indes, cette année, on constate un déficit de trois millions. Toutefois les affaires des Indes continuent d’èfre prospères.
La Société des Amis de la Pologne avait l’intention de faire un meeting en faveur de la formation d’une légion polonaise au service des puissances occidentales ; mais ce meeting n’eut pas lieu, par suite d’une indisposition du pré
sident, sir Laey-Evans. En apprenant ce retard, il écrivit aussitôt qu’il s’étonnait de ce que son absence eût fait remettre le meeting annoncé pour jeudi dernier. Il a la con
viction que la formation d’une légion polonaise doit être accueillie avec enthousiasme par l’opinion publique, et émet le vœu que te meeting ait lieu avec ou sans sa présence.
Lord Clarendon est le ministre désigné pour accompagner 1a. reine d’Angleterre à son voyage à Paris.
En Allemagne, rien de nouveau, toujours mêmes hésitations, mêmes calculs, mêmes ficelles.
Le Journal, des Débats, par l’organe de M. de Sacy, dresse, le 2 août, avec un talent et une justesse incontes
tables, le bilan de la liberté représentative en Allemagne, il constate comme nous avec tristesse que, par suite, des réac
tions qui ont suivi la révolution de 18Û8, les gouvernements constitutionnels rétrogradent vers la féodalité.
Le premier acte par lequel le nouveau ministère du Hanovre a signalé son avènement au pouvoir a été la dissolu
tion de la seconde chambre. Cette dissolution est ordonnée par une proclamation royale. Les ministres, en prenant leurs fonctions, ont seulement, dit-on, prêté serment de fidélité au roi, sans parler de la Constitution. On attend avec an
xiété les mesures qui seront la suite de cette nouvelle organisation.
En Espagne la situation est toujours la même : toujours des difficultés pour le payement des armées et même de l’é­
ventuel. On parle plus que jamais, à Madrid, de la question de dictature, une polémique assez vive est même entrete
nue en ce moment par quelques journaux espagnols. C’est Espartéro et O’Donnell qui sont naturellement désignés sous cette rubrique ; que fera Espartéro ? rien. — Que fera O’Donnell? il travaillera pour Espertéro. La Sobordana,
qui présente ces réflexions, présente doncEspartéro comme laissant faire, et comme devant profiter de la victoire.
Le ministre des travaux et du commerce a réglé la question des ouvriers en Catalogne. La base de ce règlement est la liberté des capitaux, liberté de travail, prohibition de coalition d’ouvriers et d’association en général, si ce n’est toutefois dans. un but de charité. La faction des frères Hierron est dissoute, on ne voit plus les partis de Tritany et de Borges.
M. de Bruil, le ministre des finances, continue à se débattre contre les mêmes difficultés financières. L’emprunt national, dans sa période volontaire, n’a aucun succès, et, malgré ce qu’ont dit tous les journaux, la souscription destinée à combler le déficit ne s’élève pas, dans toute l’Espagne, à plus de ΖιΟΟ,ΟΟΟ réaux.
On lit dans la Espana, du 3 :
«Nous supposons que le lecteur sera surpris d’apprendre que le gouvernement a fait un pas décisif dans la grave question d’Orienf. Avant-hier soir, le conseil des ministres s’est réuni par extraordinaire, et, après une longue discussion, il a été décidé, à ce qu’il paraît, que l’Espagne adhé
rerait au traité d’alliance offensive et défensive conclu entre la France, l’Angleterre et la Turquie. Hier matin, cette ré
solution a été communiquée officiellement aux représentants de la France et de l Angleterre, lesquels l’ont immé


diatement transmise par le télégraphe à leurs cours respec


tives, et quelques heures après par courriers extraordinaires.
Le duc de la Victoire et le ministre des affaires étrangères sont partis de grand matin pour l’Escurial, dans le but de porter à la connaissance de S. M. la détermination adoptée par le ministère.
« Tels sont, d’après nos renseignements, les faits qui paraissent hors de doute. On en ajoute d’autres sur lesquels il serait peut-être aventureux de parler avec la même assu
rance. On dit, par exemple, que la première conséquence de l’alliance sera l’envoi en Crimée d’un corps d’armée de 25,000 hommes, et l’engagement, de la part des puissances occidentales, d’appuyer le gouvernement espagnol de toutes manières et contre tous les ennemis qui pourraient essayer de renverser l’ordre de choses actuel. Comme la question d’alliance en renferme d’autres de subsides tant, en hom
mes qu’en argent, il paraît que l’affaire sera soumise aux cortès pour la partie qui est de leur compétence. »
La Correspondance générale de Madrid s’occupe aussi de la question de l’envoi d’un corps expéditionnaire espagnol en Orient. « Décidément, est-il dit dans celte corres
pondance, le ministère a son opinion bien arrêtée sur la question de l’intervention en Grimée. Mais il ne faut pas perdre de vue : 1“ que ce n’est pas là une affaire définitive
ment arrangée, parce que cette décision doit être soumise à l’approbation préalable des cortès ; 2° que les cortès ne se réuniront pas avant octobre, quoique certains journaux aient, affirmé le contraire ; 3° que, dans le cas où tout serait bien convenu dans les négociations, l’exécution du traité et l’envoi du contingent espagnol n’auront lieu qu’au prin
temps prochain : le gouvernement a besoin de tout le temps intermédiaire pour organiser l’armée, régler les finances , consolider l’ordre et constituer le pays par le moyen de la nouvelle constitution. »
On écrit de Milan. En dépit de tous les démentis, l’armée autrichienne cVJtalie augmente, il y a 04,000 hommes en Lombardie, et plus encore dans le pays vénitien. On refuse presque tous les passe-ports pour la France. Le consistoire du pape, a eu lieu le 26. Dans un discours dont tous les termes sont pesés, le pape a parlé longuement des affaires ec
clésiastiques du Piémont et de l’Espagne·; il constate que, malgré la longanimité de l’Eglise, il ne peut s’empêcher de blâmer ces deux pays d’avoir méconnu la loi de l’Eglise, préexistante aux circonstances actuelles; il inflige donc la censure (ce qui équivaut à l’excommunication), en faisant, bien entendu, les plus grands éloges des personnages qui ont lutté pour la défense de l’Eglise.
Une lettre de Tripoli, du lû juillet, porte que les Arabes, sous les ordres de Ghoumas, ont battu les Turcs dans mie rencontre qui a duré deux jours. L’année turque a été presque entièrement exterminée. Le bateau à vapeur anglais,
T.Inflexible, s’est rendu aussitôt sur les lieux, ayant à son bord le consul anglais, afin de protéger ses nationaux.
Les nouvelles qui sont parvenues de Kars sont du i h juillet; elles apprennent que le général Mouravieff, revenu sou
dainement devant Kars, a attaqué, dans ta journée du 13 juillet, le camp retranché des Turcs avec 35,000 hommes. Kepoussé énergiquement par le général Williams, le général Mouravieff préparait une nouvelle attaque.
Le bruit a couru à Constantinople que Schamyl était descendu des montagnes et menaçait Titïlis. Mais il parait que le général prince Bebutoff commande à Titïlis une ré
serve de 28,000 hommes et qu’il est en état de repousser les attaques de Schamyl. Kars est toujours cerné sur trois côtés, et sur le côté ouvert le long du fleuve vers Musehad les patrouilles russes rendent les communications très-difficiles.
En Chine, les impériaux triomphent; ils ont complètement chassé les insurgés de Canton; tous ceux qui ont été pris ont été décapités.
Sur un rapport du maréchal Vaillant, ministre de la guerre, l’Empereur, dans un décret daté du 5 août, a décidé que le service de guerre fait à l’armée d’Orient sera compté à titre