marbre jaune de Sienne, ont une valeur inappréciable dans cette collection toute supérieure. N’oublions pas cependant
que le plus célèbre mosaïste de Home est un Fr; - es et que Paris, Berlin, Vienne et Londres ont, depuis q e-ees années, le talent d’accaparer les meilleurs fabricants ci ca
mées et de mosaïques nés et élevés dans la capitale du monde chrétien,
Ch.-P. Magne.
P. S. Nous émettions le regret, dans notre précédente étude , que l’Empereur n’eût pas acheté la magnifique bi
bliothèque-bureau exposée par l’Association des ébénistes de la rue de Charonne. Nous apprenons que notre vœu a reçu son accomplissement : S. M. l’Impératrice a acheté ce beau meuble. — Ch.-P. M.
Histoire contemporaine (1).
Sous le simple titre de Mémoires, M. Joseph Montanelli embrasse, sinon pour les détails, au moins pour les résul
tats généraux, l’histoire politique entière de l’Italie du dixneuvième siècle. Acteur au premier rang dans le drame non encore dénoué de l’indépendance italienne, ayant passé par les sociétés secrètes, par l’opposition constitutionnelle, par le pouvoir et par l’exil, publiciste, orateur, homme d’Etat, Montanelli était en droit comme en position de ra
conter la vie de son siècle et de son pays. Ce livre touche directement la France. Nous ne pouvons séparer notre cause de celle de l’Italie ; ne fut-elle pas deux fois la mère de notre civilisation ? Pour prix de ses bienfaits , nous l’a
vons envahie, foulée, ravagée comme des barbares. Dès Charlemagne, nous empêchons les Lombards de lui donner l’unité politique. Nous, si soigneux de fonder chez nous l’indépendance du pouvoir civil et d’opposer à la théocratie la barrière des libertés gallicanes, nous nous sommes faits au delà des monts les éternels complices de l’ambition pon
tificale. C’est une grande dette contractée envers ce noble pays, et notre intérêt politique s’accorde ici avec les droits de la justice et de la reconnaissance. Comme l’avait compris Lamennais, la plus puissante et la plus naturelle in
fluence de la France sera toujours sur des races néo-latines. Une étroite communauté de sang, de religion , de langue,
les relie entre elles. Jadis l’Italie fut leur lumière, la France est aujourd’hui leur centre et leur espoir. Constituées vi
goureusement et harmonieusement autour d’elle, l’Italie et
l’Espagne la rendraient l’invincible rempart de la plus belle et de la plus vraie civilisation. Alors elle tendrait avec plus de confiance la main à la race anglo-saxonne, forte race, mais de nature moins sympathique, et à la masse germani
que, où les idées comme les institutions féodales onl encore tant de racines.
Politiquement, l’Italie n’a point encore existé. Rome païenne la domina, mais ne l’unit pas. Les provinces de l’Italie n’étaient ni plus ni moins romaines que les provin
ces de la Gaule ou de l’Espagne. La Rome chrétienne, ou plutôt Ihéocratique du moyen âge, héritière trop fidèle du
génie altier et oppresseur de l’ancienne, ne permit jamais à l’italie d’être soi. Mais, au sein même des discordes civiles, l’unité nationale se révélait aux âmes d’élite et faisait l’objet constant de leurs aspirations. Dans les cœurs magnanimes de Dante et de Machiavel vivait l’idée de la grande pa
trie. De nos jours, par l’effet de l’impulsion extraordinaire imprimée au monde, le sentiment est devenu général, et il a reçu en 1848 un commencement de réalisation. C’est un des plus grands résultats de cette époque tourmentée, mais féconde. Rien d’incompressible comme le génie de la natio
nalité, quand il a une fois pris conscience de lui-même. L’a
venir, un avenir prochain, montrera de quel poids l’Italie doit peser désormais dans les destinées du monde.
Le vrai sujet traité par l’auteur des Mémoires, c’est la merveilleuse et puissante éclosion de la nationalité italienne.
Il la prend au berceau et la dépeint dans ses trois âges successifs : l’âge des conspirations, celui des réformes con
stitutionnelles, enfin celui des victorieuses insurrections de 1848. Les grandes conspirations furent celles du carbona
risme. Le parti militaire ou bonapartiste en fit la force, en
lui donnant des chefs et des soldats. Les coups de main de Mazzini, qui vinrent ensuite, n’approchèrent pas de !.i puissance de ces mouvements qui ébranlèrent Naples. Piémont et l Espaç»»·, Peu à peu l’élément libéral et dé •ratknie t< ud à prédominer, c’est la transition au m·.
et j» dô;a; : b-e de la lutte, les accueille avec défi .ê. Les chefs du mouvement se divisent. Les uns, comme Mo, oaiielii, tendent la main au peuple, et travaillent à cimenter l’union des deux éléments, démocratique et bourgeois. Les autres,
à l’imitation de nos doctrinaires, ne voient de salut que dans le règne exclusif de la classe moyenne, et appliquent à la bourgeoisie le célèbre farà da se de Mazzini et de Charles- Albert. Dès le début, on surveille, on comprimé, on licencie autant qu’on peut les deux forces vives de toute révolution, la jeunesse et le peuple. La bourgeoisie n’est pas enthou
siaste, c’est là son moindre défaut. Pourtant, sans l’ardeur et le désordre même de l’enthousiasme universel, comment créer en quelques jours un gouvernement, une armée, une
nation? comment arracher du sol le despotisme séculaire, et le rejeter par delà les Alpes? On verse à la noble Italie l’as
soupissement d’une énervante modération, quand le temps réclamait la fièvre dp patriotisme et les cris tumultueux de
la bataille. Montaneli n’a qu’a laisser parler les faits : ils accusent hautement · fautes il juste-milieu italien, et la
tienne, ne comprenait alors cette nécessité. Pie IX s’élait donc singulièrement refroidi, et, s’il fit encore des conces
sions en 1848, ce fut à contre-cœur et sous la pression des événements. Rome n’entrait pas avec résolution dans le mouvement, ce qui empêchait l’unité, et par conséquent me
naçait la vie naissante de l’Italie. Dans un pays neuf comme aux Etats-Unis, aucune ville n’ayant de tradition, ni de pré
pondérance, on a pu créer un centre politique artificiel, on a pu le créer avec une force exécutive modérée. Dans la condition des Etats européens, il faut à chaque nation une véritable capitale, un centre puissant de pensée et d’action. Or l’Italie n’a encore qu’une capitale possible : Rome. De
vant sa majesté séculaire se taisent les rivalités. M ais Venise cédera-t-elle à Florence ou Naples à Milan ? En refusant de rendre à l’Italie son organe d’unité politique, la papauté portait un coup mortel à la cause de l’indépendance.
D’une part, le licenciement de la force populaire par les chefs de la bourgeoisie, anciens conspirateurs devenus des
héros de modération et les apôtres d’une légalité pharisaïque; de l’autre, les hésitations, la défiance et bientôt l’hostihlé ouverte de la cour romaine, telles sont les causes, admirablement exposées par l’auteur des Mémoires, qui em
pêchèrent le sang généreux dont l’Italie fut abreuvée de porter ses fruits d’affranchissement, et qui firent succéder d’irréparables revers à la gloire des premiers succès. Milan, hé
roïque en mars, semble bientôt s’affaisser. Tombée en des mains pusillanimes, elle ne sait pas rester elle-même quel
ques jours, et elle se hâte de se livrer sans garantie à Charles-Albert. Le plus italien de ses, ministres, Gioberti, recule devant l’union avec la Toscane et Rome. Venise aban
donnée retrouva son courage et Manin ; mais elle ne put qu’honorer les funérailles de la liberté italienne. La tenta
tive tristement avortée de Pie L\ prouvé une fois de plus la vanité des espérances qui rêvent l’unité de l’Italie par la suprématie pontificale.
En même temps que Montanelli nous fait pénétrer dans les profondeurs de. la vie nationale, il raconte avec une no
ble candeur sa propre vie. La haine politique, qui ne res
pecte rien, lui imposait l’obligation de défendre son parti et de se défendre lui-même. La vitalité du génie italien s’est révélée en ce siècle par une riche moisson de grands esprits et de grands caractères; Montanelli brille parmi les plus éminents. On serait tenté de lui appliquer à lui-même la peinture qu’il trace quelque part du caractère toscan, « mé
lange de bon sens pratique et d’imagination créatrice, de délicatesse, et de force, des facultés qui font les grands ar
ticles et de celles qui font les grands hommes d’Etat. » Il avait combattu avec énergie, avec succès, les petits Metternich de la Toscane, et ce gouvernement sbirocratique, pire, dit-il, que le gouvernement des prêtres ; ce qui en dit beaucoup pour un Italien. Il eut des triomphes d’orateur populaire à Bise et à Livourne, comme Lamartine, à l’IIôtel de ville de Paris. Comme Lamartine, il était, sur ce petit théâtre, l’initiateur de la bourgeoisie à la république ; mieux que Lamartine, il comprit que, sans l’appui des masses, les révolutions avortent et les gouvernements tombent. La nation italienne est une nation politique ; le vieux génie ro
main y vit toujours. Us sont juristes, diplomates, et cela ne les empêche pas d’être poètes. La vie publique de l’auteur des Mémoires fut courte, mais d’une grandeur et d’une pu
reté antiques. Au premier cri de guerre contre l’étranger, il quitte ses études et sa chaire de professeur, et entraîne ses élèves sur les champs de bataille de l’indépendance. Blessé dans leurs rangs au combat glorieux de Curlatone, et laissé, cour mort, ii est fait prisonnier par les Autrichiens. Echangé
A lie. C’est sa pensée, sa passion de tous les instants. La i’twcaàe, n’ayant pas l’ambition de dominer, était propre à servir Je lien entre les autres parties de l’Italie. Mon ta
nin ;, trop confiant, préparait un beau rôle au grand-duc, mais il avait compté sans Son Altesse Impériale et Royale.
Pendant que le chef du parti démocratique négocie au milieu des peuples frémissants, le grand-duc s’évade honteuse
ment, laissant là son ministère et comptant sur la guerre civile. Ce fut le plus beau moment de la carrière de Monta
nelli. Les mécontents contenus, la sédition militaire compri
mée par le seul ascendant de la parole, la guerre civile écartée, le gouvernement reconstitué, le projet de la con
stituante italienne repris avec plus d’autorité, attestèrent la force du parti démocratique en Toscane, la décision et l’é
nergie de son plus noble représentant. Il faut reconnaître que dans cette crise périlleuse Guerrazzi le seconda coura
geusement. Mais la liberté italienne venait d’avoir son Wa
terloo; le moment approchait où la force brutale allait triompher partout. Montanelli court en France chercher des secours. C’était peut-être une faute de laisser la Toscane, entre les mains de Guerrazzi. Le tribun de Livourne ne
put dominer la situation ; il avait à lutter non-seulement contre, le parti absolutiste, qui relevait la tête sur les ruines de la patrie, mais contre l’ancien parti libéral, que la frayeur poussait au devant de la servitude. Les difficultés étaient grandes,- insurmontables peut-être ; mais Montanelli du < lins fût tombé avec plus de dignité. Il eut le malheur que
èi révolution toscane fut emportée sans gloire en son ab•v :;ce, et que la patrie de Dante ne partagea point l’hon
v d; s suprêmes résistances avec Rome et Venise.
U erf peu de lectures plus attachantes que celle des Mém.-rii es. Montanelli a les couleurs du poète et la méditation
i.seur. La flamme de la jeunesse circule dans ces pa
ie ne sais quelle éloquence du cœur les anime. L’aumanie heureusement tous les genres de style; il peint, juge, disserte. Quelquefois un cri déchirant s’échappe du cœur du patriote. Il remue la pitié et l’indignation ; il étale aux regards la robe sanglante, non d’un usurpateur arrêté dans ses attentats, mais de la patrie déchirée et couverte du sang de ses meilleurs fils. Un pays qui produit de tels hommes et de tels écrivains peut braver le malheur et la tyrannie : l’avenir ne saurait lui échapper.
Le livre de l’illustre exilé méritait à tous égards l’honneur d’une traduction en français : nous sommes heureux d’annoncer qu’elle ne se fera pas attendre. Un homme qui ap
partient à la même famille des nobles et généreux esprits, M. Arnaud (de l’Ariége), est sur le point de publier ce tra
vail. Montanelli a toujours manifesté son amour pour la France; le public français, nous ne saurions en douter, lui rendra sympathie pour sympathie. U s’agit ici de quelque chose de plus qu’un sùçcès littéraire. L’union intime de la France et de l’Italie est un des premiers intérêts de la civilisation ; le beau livre de Montanelli contribuera puissamment à opérer un si heureux et si fécond rapprochement.
F. Huet.
Fête offerte par les exposants
à S. A. I. le prince Napoléon et à la commission impé
riale, le 18 octobre.
Nous n’avons qu’à nous louer de la bonne grâce avec la
quelle on nous a permis de reproduire l’aspect de cette, fête.
que le plus célèbre mosaïste de Home est un Fr; - es et que Paris, Berlin, Vienne et Londres ont, depuis q e-ees années, le talent d’accaparer les meilleurs fabricants ci ca
mées et de mosaïques nés et élevés dans la capitale du monde chrétien,
Ch.-P. Magne.
P. S. Nous émettions le regret, dans notre précédente étude , que l’Empereur n’eût pas acheté la magnifique bi
bliothèque-bureau exposée par l’Association des ébénistes de la rue de Charonne. Nous apprenons que notre vœu a reçu son accomplissement : S. M. l’Impératrice a acheté ce beau meuble. — Ch.-P. M.
Histoire contemporaine (1).
Sous le simple titre de Mémoires, M. Joseph Montanelli embrasse, sinon pour les détails, au moins pour les résul
tats généraux, l’histoire politique entière de l’Italie du dixneuvième siècle. Acteur au premier rang dans le drame non encore dénoué de l’indépendance italienne, ayant passé par les sociétés secrètes, par l’opposition constitutionnelle, par le pouvoir et par l’exil, publiciste, orateur, homme d’Etat, Montanelli était en droit comme en position de ra
conter la vie de son siècle et de son pays. Ce livre touche directement la France. Nous ne pouvons séparer notre cause de celle de l’Italie ; ne fut-elle pas deux fois la mère de notre civilisation ? Pour prix de ses bienfaits , nous l’a
vons envahie, foulée, ravagée comme des barbares. Dès Charlemagne, nous empêchons les Lombards de lui donner l’unité politique. Nous, si soigneux de fonder chez nous l’indépendance du pouvoir civil et d’opposer à la théocratie la barrière des libertés gallicanes, nous nous sommes faits au delà des monts les éternels complices de l’ambition pon
tificale. C’est une grande dette contractée envers ce noble pays, et notre intérêt politique s’accorde ici avec les droits de la justice et de la reconnaissance. Comme l’avait compris Lamennais, la plus puissante et la plus naturelle in
fluence de la France sera toujours sur des races néo-latines. Une étroite communauté de sang, de religion , de langue,
les relie entre elles. Jadis l’Italie fut leur lumière, la France est aujourd’hui leur centre et leur espoir. Constituées vi
goureusement et harmonieusement autour d’elle, l’Italie et
l’Espagne la rendraient l’invincible rempart de la plus belle et de la plus vraie civilisation. Alors elle tendrait avec plus de confiance la main à la race anglo-saxonne, forte race, mais de nature moins sympathique, et à la masse germani
que, où les idées comme les institutions féodales onl encore tant de racines.
Politiquement, l’Italie n’a point encore existé. Rome païenne la domina, mais ne l’unit pas. Les provinces de l’Italie n’étaient ni plus ni moins romaines que les provin
ces de la Gaule ou de l’Espagne. La Rome chrétienne, ou plutôt Ihéocratique du moyen âge, héritière trop fidèle du
génie altier et oppresseur de l’ancienne, ne permit jamais à l’italie d’être soi. Mais, au sein même des discordes civiles, l’unité nationale se révélait aux âmes d’élite et faisait l’objet constant de leurs aspirations. Dans les cœurs magnanimes de Dante et de Machiavel vivait l’idée de la grande pa
trie. De nos jours, par l’effet de l’impulsion extraordinaire imprimée au monde, le sentiment est devenu général, et il a reçu en 1848 un commencement de réalisation. C’est un des plus grands résultats de cette époque tourmentée, mais féconde. Rien d’incompressible comme le génie de la natio
nalité, quand il a une fois pris conscience de lui-même. L’a
venir, un avenir prochain, montrera de quel poids l’Italie doit peser désormais dans les destinées du monde.
Le vrai sujet traité par l’auteur des Mémoires, c’est la merveilleuse et puissante éclosion de la nationalité italienne.
Il la prend au berceau et la dépeint dans ses trois âges successifs : l’âge des conspirations, celui des réformes con
stitutionnelles, enfin celui des victorieuses insurrections de 1848. Les grandes conspirations furent celles du carbona
risme. Le parti militaire ou bonapartiste en fit la force, en
lui donnant des chefs et des soldats. Les coups de main de Mazzini, qui vinrent ensuite, n’approchèrent pas de !.i puissance de ces mouvements qui ébranlèrent Naples. Piémont et l Espaç»»·, Peu à peu l’élément libéral et dé •ratknie t< ud à prédominer, c’est la transition au m·.
et j» dô;a; : b-e de la lutte, les accueille avec défi .ê. Les chefs du mouvement se divisent. Les uns, comme Mo, oaiielii, tendent la main au peuple, et travaillent à cimenter l’union des deux éléments, démocratique et bourgeois. Les autres,
à l’imitation de nos doctrinaires, ne voient de salut que dans le règne exclusif de la classe moyenne, et appliquent à la bourgeoisie le célèbre farà da se de Mazzini et de Charles- Albert. Dès le début, on surveille, on comprimé, on licencie autant qu’on peut les deux forces vives de toute révolution, la jeunesse et le peuple. La bourgeoisie n’est pas enthou
siaste, c’est là son moindre défaut. Pourtant, sans l’ardeur et le désordre même de l’enthousiasme universel, comment créer en quelques jours un gouvernement, une armée, une
nation? comment arracher du sol le despotisme séculaire, et le rejeter par delà les Alpes? On verse à la noble Italie l’as
soupissement d’une énervante modération, quand le temps réclamait la fièvre dp patriotisme et les cris tumultueux de
la bataille. Montaneli n’a qu’a laisser parler les faits : ils accusent hautement · fautes il juste-milieu italien, et la
u; que l’entourage de Pie IX u cil point acceptée. Personne d’ailleurs, même dans les rangs de la démocratie chré
tienne, ne comprenait alors cette nécessité. Pie IX s’élait donc singulièrement refroidi, et, s’il fit encore des conces
sions en 1848, ce fut à contre-cœur et sous la pression des événements. Rome n’entrait pas avec résolution dans le mouvement, ce qui empêchait l’unité, et par conséquent me
naçait la vie naissante de l’Italie. Dans un pays neuf comme aux Etats-Unis, aucune ville n’ayant de tradition, ni de pré
pondérance, on a pu créer un centre politique artificiel, on a pu le créer avec une force exécutive modérée. Dans la condition des Etats européens, il faut à chaque nation une véritable capitale, un centre puissant de pensée et d’action. Or l’Italie n’a encore qu’une capitale possible : Rome. De
vant sa majesté séculaire se taisent les rivalités. M ais Venise cédera-t-elle à Florence ou Naples à Milan ? En refusant de rendre à l’Italie son organe d’unité politique, la papauté portait un coup mortel à la cause de l’indépendance.
D’une part, le licenciement de la force populaire par les chefs de la bourgeoisie, anciens conspirateurs devenus des
héros de modération et les apôtres d’une légalité pharisaïque; de l’autre, les hésitations, la défiance et bientôt l’hostihlé ouverte de la cour romaine, telles sont les causes, admirablement exposées par l’auteur des Mémoires, qui em
pêchèrent le sang généreux dont l’Italie fut abreuvée de porter ses fruits d’affranchissement, et qui firent succéder d’irréparables revers à la gloire des premiers succès. Milan, hé
roïque en mars, semble bientôt s’affaisser. Tombée en des mains pusillanimes, elle ne sait pas rester elle-même quel
ques jours, et elle se hâte de se livrer sans garantie à Charles-Albert. Le plus italien de ses, ministres, Gioberti, recule devant l’union avec la Toscane et Rome. Venise aban
donnée retrouva son courage et Manin ; mais elle ne put qu’honorer les funérailles de la liberté italienne. La tenta
tive tristement avortée de Pie L\ prouvé une fois de plus la vanité des espérances qui rêvent l’unité de l’Italie par la suprématie pontificale.
En même temps que Montanelli nous fait pénétrer dans les profondeurs de. la vie nationale, il raconte avec une no
ble candeur sa propre vie. La haine politique, qui ne res
pecte rien, lui imposait l’obligation de défendre son parti et de se défendre lui-même. La vitalité du génie italien s’est révélée en ce siècle par une riche moisson de grands esprits et de grands caractères; Montanelli brille parmi les plus éminents. On serait tenté de lui appliquer à lui-même la peinture qu’il trace quelque part du caractère toscan, « mé
lange de bon sens pratique et d’imagination créatrice, de délicatesse, et de force, des facultés qui font les grands ar
ticles et de celles qui font les grands hommes d’Etat. » Il avait combattu avec énergie, avec succès, les petits Metternich de la Toscane, et ce gouvernement sbirocratique, pire, dit-il, que le gouvernement des prêtres ; ce qui en dit beaucoup pour un Italien. Il eut des triomphes d’orateur populaire à Bise et à Livourne, comme Lamartine, à l’IIôtel de ville de Paris. Comme Lamartine, il était, sur ce petit théâtre, l’initiateur de la bourgeoisie à la république ; mieux que Lamartine, il comprit que, sans l’appui des masses, les révolutions avortent et les gouvernements tombent. La nation italienne est une nation politique ; le vieux génie ro
main y vit toujours. Us sont juristes, diplomates, et cela ne les empêche pas d’être poètes. La vie publique de l’auteur des Mémoires fut courte, mais d’une grandeur et d’une pu
reté antiques. Au premier cri de guerre contre l’étranger, il quitte ses études et sa chaire de professeur, et entraîne ses élèves sur les champs de bataille de l’indépendance. Blessé dans leurs rangs au combat glorieux de Curlatone, et laissé, cour mort, ii est fait prisonnier par les Autrichiens. Echangé
! devenu premier ministre ’en Toscane, il travaille à faire
A lie. C’est sa pensée, sa passion de tous les instants. La i’twcaàe, n’ayant pas l’ambition de dominer, était propre à servir Je lien entre les autres parties de l’Italie. Mon ta
nin ;, trop confiant, préparait un beau rôle au grand-duc, mais il avait compté sans Son Altesse Impériale et Royale.
Pendant que le chef du parti démocratique négocie au milieu des peuples frémissants, le grand-duc s’évade honteuse
ment, laissant là son ministère et comptant sur la guerre civile. Ce fut le plus beau moment de la carrière de Monta
nelli. Les mécontents contenus, la sédition militaire compri
mée par le seul ascendant de la parole, la guerre civile écartée, le gouvernement reconstitué, le projet de la con
stituante italienne repris avec plus d’autorité, attestèrent la force du parti démocratique en Toscane, la décision et l’é
nergie de son plus noble représentant. Il faut reconnaître que dans cette crise périlleuse Guerrazzi le seconda coura
geusement. Mais la liberté italienne venait d’avoir son Wa
terloo; le moment approchait où la force brutale allait triompher partout. Montanelli court en France chercher des secours. C’était peut-être une faute de laisser la Toscane, entre les mains de Guerrazzi. Le tribun de Livourne ne
put dominer la situation ; il avait à lutter non-seulement contre, le parti absolutiste, qui relevait la tête sur les ruines de la patrie, mais contre l’ancien parti libéral, que la frayeur poussait au devant de la servitude. Les difficultés étaient grandes,- insurmontables peut-être ; mais Montanelli du < lins fût tombé avec plus de dignité. Il eut le malheur que
èi révolution toscane fut emportée sans gloire en son ab•v :;ce, et que la patrie de Dante ne partagea point l’hon
v d; s suprêmes résistances avec Rome et Venise.
U erf peu de lectures plus attachantes que celle des Mém.-rii es. Montanelli a les couleurs du poète et la méditation
i.seur. La flamme de la jeunesse circule dans ces pa
ie ne sais quelle éloquence du cœur les anime. L’aumanie heureusement tous les genres de style; il peint, juge, disserte. Quelquefois un cri déchirant s’échappe du cœur du patriote. Il remue la pitié et l’indignation ; il étale aux regards la robe sanglante, non d’un usurpateur arrêté dans ses attentats, mais de la patrie déchirée et couverte du sang de ses meilleurs fils. Un pays qui produit de tels hommes et de tels écrivains peut braver le malheur et la tyrannie : l’avenir ne saurait lui échapper.
Le livre de l’illustre exilé méritait à tous égards l’honneur d’une traduction en français : nous sommes heureux d’annoncer qu’elle ne se fera pas attendre. Un homme qui ap
partient à la même famille des nobles et généreux esprits, M. Arnaud (de l’Ariége), est sur le point de publier ce tra
vail. Montanelli a toujours manifesté son amour pour la France; le public français, nous ne saurions en douter, lui rendra sympathie pour sympathie. U s’agit ici de quelque chose de plus qu’un sùçcès littéraire. L’union intime de la France et de l’Italie est un des premiers intérêts de la civilisation ; le beau livre de Montanelli contribuera puissamment à opérer un si heureux et si fécond rapprochement.
F. Huet.
Fête offerte par les exposants
à S. A. I. le prince Napoléon et à la commission impé
riale, le 18 octobre.
Nous n’avons qu’à nous louer de la bonne grâce avec la
quelle on nous a permis de reproduire l’aspect de cette, fête.