qu’il a remise au gouverneur de Moscou, adresse dans laquelle, après avoir remercié les habitants de l’accueil qui lui a élé fait, il se retire, convaincu que tout le peuple est prêt à verser jusqu’à la dernière goutte de son sang pour conserver l’intégrité de l’empire.
Toutes les nouvelles de la Crimée, arrivées cette semaine, montrent les mouvements des alliés comme devant aboutir à un résultat qui doit compléter la victoire du 8 septembre. L Indépendance belge se dit en mesure d’affirmer que les mouvements exécutés à Eupatoria et à Orkussa sont simul
tanés, et cependant bien distincts. Ces faits se sont passés le 123 août, et n’ont jamais eu d’autre importance que d’être les préliminaires d’opérations, futures. Le premier mouve
ment a consisté dans l’envoi à Eupatoria d’une force de 20,000 hommes, qui, une fois arrivée, a opéré une recon
naissance hors les murs de la ville, vers quelques villages qui n’ont pas même été occupés. Par le deuxième mouve
ment, des corps d’infanterie se sont avancés dans la Suisse ïaurique et ont pris pied sur les hauteurs d’Orkussa, sur un chemin qui conduit à Mackensie, centre de l’armée russe. Une dépêche russe confirme cette nouvelle et évalue sa signification.
Une correspondance du Tintes annonce qu’on répare les routes qui conduisent au camp, et le corps des travailleurs, aidé par l’armée, s’occupe de tracer une nouvelle route de Balaklava, parallèlement à la ligne du chemin de fer. Tout annonce l’intention de faire hiverner l’armée sur l’emplacement occupé actuellement par elle.
subsides. Le ministère de la guerre a terminé tous les préparatifs commencés à cette occasion. Les régiments d’infan
terie et de cavalerie qui doivent prendre part à la campagne sont déjà désignés.
La situation est toujours lourde. La reine est arrivée à Madrid le 30 septembre.
Le jeune roi de Portugal doit inaugurer son règne par l’ouverture prochaine d’un premier chemin de fer portugais.
—Sous avons à annoncer avec regret la mort de M. Camille Roqueplan, dont le talent si gracieux a charmé tant d’admirateurs. Nous nous proposons de donner, dans le prochain numéro, le portrait de Camille lloqueplan, avec une notice sur sa vie et ses œuvres.
Paulin.
Par. des motifs d’administration intérieure, les Directeurs de Illustration ont diminué les remises faites à
certains libraires sur leurs souscriptions. Malgré cette nouvelle mesure, le prix des abonnements doit rester le même que par le passé :
36 fr. pour Paris et la province ; 40 fr. pour l’étranger ;


45 fr. Belgique et Prusse;




55 fr. Etats-Romains et 11 eux-Siches.


Courrier de Paris.
Pour cette fois ne craignez pas qu’on vous apprenne des nouvelles que personne ne se soucie de savoir; il y a eu du bruit dans Landernau, et l’on ne saurait accuser cet au


tomne parisien de manquer de physionomie : il les a toutes.


Cette saison équivoque, qui souffle à la fois le froid et le chaud, on lui reprochait de s’endormir dans la mollesse ou de n’offrir que des passe-temps d’écoliers, et elle en a pour tous les goûts. D’abord l’Exposition universelle est toujours en permanence, en attendant sa clôture ou plutôt sa prorogation, que les utilitaires réclament avec une certaine éner
gie. Six mois déjà passés à l’examen de ces merveilles n’est pas un laps de temps suffisant pour satisfaire leur curiosité; et d’ailleurs il devient argent d’accorder la reprise du spec
tacle à ceux qui le donnent, car, si l’on a eu du monde et beaucoup de monde, ce n’est pas tout à fait celui qu’on vou
lait avoir, il s’est trouvé jusqu’à présent des milliers de cu
rieux pour quelques acheteurs, et, après un si “beau succès d’estime, les exposants verraient venir avec une grande sa
tisfaction le succès d’argent. Le temple, fermé prochaine
ment, vu les rigueurs de la saison, ne serait donc plus rendu au culte qu’à la faveur du printemps, l’heureuse époque où Paris compte, beaucoup de ces vrais fidèles qui achètent ce qu’il y a de plus cher. Λ propos des produits à bon mar
ché, dont la vente va si bien aux dépens du reste, Alphonse Karr disait l’autre jour, avec ce suprême bon sens qui n’appartient qu’aux hommes d’esprit : « Je crains bien que, no
nobstant les merveilles de son industrie, l’Europe ne soit dans une mauvaise voie; et la preuve, c’est que l’Europe a faim. L’Exposition universelle vous montre les vêtements, les instruments et les meubles tout perfectionnés et arrivés à un remarquable bon marché, mais il y manque un pain perfectionné et à bon marché. » Oh! la merveilleuse décou
verte à faire, pour si peu que le génie de nos contemporains s’en donne la peine. Malheureusement ce n’est pas sur ces objets de première nécessité qu’il s’exerce le plus volontiers,
et les conquêtes de l’agriculture nous touchent beaucoup moins que les autres. Voulez-vous une nouvelle preuve de l’indifférence publique à son égard? l’aulre jour, au marché des Innocents, avait lieu la proclamation et la promenade solennelle du Roi des potirons, une fête qui, selon le même et clairvoyant Alphonse Karr, devrait être politique, morale et religieuse ; et les Parisiens n’y ont fait aucune attention, leurs journaux s’étant contenté d’enregistrer ce fait-divers dans leurs colonnes en y mettant un peu d’ironie. N’en dé
plaise à notre ingénieux confrère· et ami, un témoignage plus déplorable, encore du peu de considération que l’opi
nion publique semble attacher à l’agriculture, c’est que parmi les hommes célèbres dont la statuette couronne les nouvelles constructions du Louvre, ne figure aucun agricul
teur. On y voit des artistes, des chimistes, des musiciens et des physiciens, des auteurs et des acteurs (il y en a même
un peu trop), à l’exclusion d’Olivier de Serres, de Dauhenton, de Mathieu Dombasle et de leurs pareils.
Entendez-vous cependant ce grand bruit de préparatifs dans tous les mondes? C’est la bonne compagnie qui va rentrer au gile. Les plus pressés sont revenus pour prépa
rer les logements. Cet hiver aura peut-être ses tristesses et des jours sombres comme ses nuits. On ne saurait donc s’y prendre trop tôt pour égayer la situation. Arrangez-vous, mesdames, pour danser le plus possible au bénéfice des pauvres, et ne négligez aucun plaisir au bout duquel peut se trouver le soulagement de quelque souffrance. Ainsi parle la charité par circulaires à cette touchante charité fé
minine qui ne demande pas mieux que d’agir, et déjà elle s’embusque à la porte des églises, pousse aux concerts et leur invente des exécutants. On la voit même inventer des loteries, et en placer très-bien les billets nullement imagi
naires au moyen de ces mots magiques qui délient le cordon des bourses les plus récalcitrantes en leurrant les possesseurs de récompenses impossibles.
Et puisqu’il vous faut absolument un échantillon des nouvelles intéressantes en circulation , il y a ce bruit de Bourse que le roi des banquiers ou le banquier des rois serait décidé à prendre sa retraite, et cette abdication volon
taire serait suivie de la liquidation de sa maison. Depuis longtemps d’ailleurs, — vous diront les gens bien informés, qui le sont parfois si mal, — le grand financier avait retiré son épingle du jeu et même de tous les jeux de Bourse, à
supposer qu’il y ait jamais trempé. Bien d’autres historiettes ont couru et courent encore à la plus grande satisfaction des badauds, parmi lesquelles la suivante, qu’on nous prie de transcrire à l’intention de ceux qui par hasard ne la connaîtraient pas. «Un cordonnier de Lille ayant reçu de son fils au service sous Sébastopol la demande d’expédition d’une paire de souliers, par la voie la plus directe et la plus prompte : Parbleu ! se dit-il, la voie la plus directe,
c’est le télégraphe électrique, ça n’est pas douteux. » Sur quoi notre homme plein de confiance suspend la chaussure
au fil le plus voisin. A peine a-t-il tourné les talons, qu’un maraudeur, alléché par cette, offrande aux étoiles, vient s’en chausser incontinent, laissant ses vieux souliers à la place des souliers neufs. Et alors nous avons le mot d’ébahisse
ment du père à son retour le lendemain pour avoir réponse : il s’approche, il décroche, et s’écrie : Le gaillard les a déjà usés, comme ça va vite ! Une autre histoire qui offre un in
térêt plus vif et plus soutenu, c’est celle du jeune zouave que différents journaux ont marié à une princesse russe pour le récompenser de ce qu’il lui a sauvé la vie ; malheu
reusement on ne peut pas tout dire, et ensuite on ne peut pas tout croire. J’oserai vous donner comme étant plus au
thentique la mésaventure de ce Mécènes· au petit pied, qui tient table ouverte pour les arts à tous le moins une fois la semaine. Dans le but de réconcilier ou du moins de réunir deux illustres compositeurs que toutes sortes de malentendus ont réciproquement aigris, il leur avait envoyé une in
vitation à l’insu l’un de l’autre, et tous les deux ont refusé leur présence au gala, de sorte que ce superbe festin, à destination de célébrités, a été consommé par des obscurités.
Les nouvelles de Crimée, si glorieuses pour nos armes, ont mis le deuil dans bien des familles, ainsi qu’on pouvait s’y attendre. Quelques-unes auraient été frappées de la manière la plus douloureuse, en ce sens, qu’elles comptaient des pa


rents très-proches dans l’une et l’autre armée. Ainsi un


magistrat aurait perdu ses deux neveux qui servaient dans des rangs opposés; et quelques-uns des généraux russes qui ont été blessés et tués portaient des noms on ne peut plus français, par exemple, JJeltegarde et Scudëri.
Les grandes familles qui s’éteignent nous font penser aux grands hommes dont on ne s’occupe plus. En ce moment Paris en possède une demi-douzaine, et leur présence n’y cause aucune émotion. Abd-el-Kader lui-même a fini par y retrouver le désert. Il était vendredi à l’Opéra dans l’atti
tude d’un lion blessé... de cette indifférence peut-être, après un engouement qui alla jusqu’à l’indiscrétion. L’illustre émir habite toujours l’hôtel de la Terrasse ; il a refusé l’hos
pitalité qui lui était offerte, dit-on, à l’hôtel du Louvre, dont on lui eût fait ainsi essuyer les plâtres, sans compter que le nom du héros eût été un magnifique prospectus our l’établissement, fl faut que je dise ici, au risque d’avoir l’air de parler comme une réclame, que l’hôtel d’Osmonl, débarrassé des Aztecset des Earthmen, a ouvert ses salons,
comme cercle des Etrangers, à la meilleure compagnie exotique et indigène. On lui souhaite de pouvoir inscrire le nom de l’émir sur son livre d’or.
S’il s’est fait encore un peu de bruit ailleurs, ça ne peut plus être qu’autour de l’Andarin ou coureur espagnol Genaro, et à Γoccasion de sa bonne ou mauvaise aventure sur le champ de. course de Longchamp. Vous connaissez le défi porté par l’intrépide bipède aux quadrupèdes les plus re
nommés : TAndarin se faisait fort, non de les distancer, mais de les vaincre par la fatigue, et il s’en est fallu de deux che
vaux seulemenl sur une trentaine queGenaro ne remportai la victoire. Après une lutte qui s’est prolongée pendant cinq heures, il est tombé évanoui sur l’arène, applaudi par les uns, blâmé par les autres et admiré par tous. Bien que le combat eût cessé faute de combattants, quelques intrépides n’abandonnèrent pas la place, dans l’espérance que l’An
darin, ayant recouvré ses sens, pourrait recommencer la lutte,^ jusqu’à ce que mort s’ensuivit, apparemment. On conte aussi que le bruit s’étant répandu d’abord que l’as
phyxie paraissait irrémédiable, un Monsieur voulut entrer dans l’enceinte pour examiner la chose de plus près, et que les sergents de ville s’y opposant : « Laissez entrer Mon
sieur, aurait dit un préposé, c’est un amateur; » traduisez un curieux. Dima»che dernier, Genaro devait reprendre sa revanche; mais vu l incertitude du temps, qui ne fut plus jamais certainement mauvais, je vais faire comme si c’était partie remise.
Au Théâtre-Français, MUe Plessy, bien accueillie dans Elmire de Tartuffe, a été extrêmement fêtée dans les Faus
ses confidences. Ce rôle d’Araminlhe lui sied à merveille, et d’un bout à l’autre elle y fait feu de tout son esprit; si !e théâtre de ce charmant Marivaux n’existait pas, Mlle Plessy l’eût certainement inventé ou tout au moins réinventé. Quelle comédienne entendit jamais mieux son auteur! comme elle en fait ressortir les nuances infinies et les déli
catesses insaisissables! Comme créateur perpétuel du détail, Marivaux impose à son interprète les plus grandes diffi
cultés, qui sont les difficultés de sa manière : il a reculé les bornes du possible dans l’analyse du cœur humain, et nul mieux que lui ne donne au petit genre les proportions du grand. On l’accuse d’être recherché : n’est pas recherché qui veut. Oui, Marivaux cherche le plus souvent l’impossible, car tel est son idéal,- et il le trouve toujours, voilà le pro


dige ; et il s’en faut de bien peu que M.11” Plessy ne soit con


stamment à sa hauteur. M. Dressant, dont on ne parlait presque plus, a eu beaucoup de succès à côté d’elle ; c’est un Dorante accompli. Faut-il dire, ou plutôt faut-il répéter avec tout le monde que MIle Plessy veut absolument utiliser deux ou trois proverbes où elle avait beaucoup de succès là-bas, pure fantaisie de jolie femme? O Araminthe ! n’aspirez pas à descendre.
L’Ambigu vient de donner, au milieu d’un enthousiasme presque universel, un très-sombre et très-intéressant mélo
drame qui s’appelle la Tour de Londres. Les auteurs ont taillé leur pièce dans l’histoire d’Angleterre, tandis que le
Des résumés de, tous lès journaux de celte semaine il ne peut être rien conclu, si ce n’est que les alliés ont toujours à Sébastopol les mêmes braves armées tant de fois victorieu
ses, et à qui il ne reste plus qu’à frapper le dernier grand coup pour sceller leur triomphe. Quant à savoir ce que veu
lent les Russes, s’ils veulent abandonner la Grimée en se repliant sur Pérékop, ou bien, se fortifiant derrière les forts du nord, s’ils veulent continuer leur défense, personne, ne peut se prononcer.
Un rapport envoyé au ministre de la guerre par l’intendant général de l’armée d’orient nous apprend que la jour
née du 8 a fait entrer dans nos ambulances bkl I blessés français, dont 212 officiers, et 55Zt blessés russes. Le ser
vice s’est effectué aussi rapidement que possible, et dès le 9 au matin tous les blessés avaient reçu le premier panse
ment. Il y a en ce moment dans les ambulances de Grimée 10,520 blessés, dont 372 officiers. Le service y est assuré d’une manière complè te, et les évacuations seront effectuées le plus vile et le plus régulièrement possible. Le rapport conclut par un éloge bien mérité de tous les membres du corps médical et administratif, qui ont rempli leur devoir avec zèle et dévouement.
Le Sun évalue, d’après des renseignements officiels, la perte des Busses à 20,000 hommeg, tant par suite du bombardement que dans les assauts définitifs. 20 de leurs officiers généraux ont été tués ou blessés. Les pertes des al
liés, c’est-à-dire des Français, Anglais, Piémontais et Turcs, ainsi que des forces navales, sont, d’après la feuille an
glaise, évaluées à 13,000 hommes hors de combat, c’est-à- dire 2,000 de moins qu’on ne l’avait d’abord calculé.
La Presse de Vienne annonce le rappel du général Gortschakoff, pour prendre le poste de ministre de la guerre,
comme une chose résolue. Ce serait, d’après elle, le général Mouravielf, qui commande devant Kars, qui prendrait les opérations de la guerre en Crimée. Ce dernier général vient de remporter à Kars un succès sur la cavalerie turque, dont il a envoyé le rapport reproduit par le Journal de Saint-Pétersbourg. Le général William, commandant la place de Kars, à court de vivres, renvoya île la forteresse la plus grande partie de la cavalerie, qui, observée par les Russes, fut rencontrée et mise en déroute. Poursuivie par l’ennemi, elle fut obligée en partie de se rendre après avoir perdu 500 hommes, laissé entre les mains des Russes 2 of


ficiers supérieurs, 9 officiers subalternes et 185 cavaliers.


Le lendemain de cette rencontre, le U, ayant voulu se frayer un chemin vers l’Araxe, par la plaine de Kars, l’attitude de l’ennemi les força de rentrer dans la forteresse. Heureuse
ment Omer-Pacha va bientôt opérer une diversion salutaire par son arrivée dans les murs de la forteresse, et, en sup
posant que l’avantage remporté par ies Russes soit aussi important qu’ils le prétendent, arrivé le 10 à Trébizonde, Omer-Pacha a dû être rendu le 22 ou 23 à Batoum; tout fait donc espérer qu’il arrivera à temps, la garnison possédant encore des vivres.
On écrit de Kiel que le séjour de la Baltique pour les gros navires devient dangereux ; la flotte anglaise (et probable


ment aussi la flotte française) ira mouiller en rade de Kiel ;


en attendant le moment où, la navigation étant impossible dans ces parages, elle pourra retourner en Angleterre.
L’Indépendance belge assure que le rappel de lord Strafford de Redcliffe, ambassadeur d’Angleterre à Constantino
ple, est chose décidée. Ce rappel devrait être attribué au Sultan lui-même, qui aurait fait savoir à Londres qu’après l’étrange message que lui avait envoyé lord Redcliffe à l’oc
casion des dernières mutations du cabinet ottoman, il ne pouvait, dans l’intérêt de sa dignité, avoir de plus longs rapports avec ce diplomate.
Les séances de la diète de Danemark ont été orageuses cette semaine, et la question méritait en effet qu’on la dis
cutât sérieusement. Plusieurs orateurs ont repoussé la con
stitution générale, qui élimine ce que nous appelions le tiers état, .à l’avantage des privilégiés de l’aristocratie. Dans la séance du 28 septembre, la constitution générale, telle, qu’elle a été présentée par le gouvernement, a été mise aux voix. Le résultat du scrutin a été adopté à la majorité de dix voix seulement.
. Le traité d’alliance entre l’Espagne et les puissances occidentales est arrivé à Madrid, ratifié en toutes formes par les ministres espagnols, français et anglais. C’est donc une question résolue, et les cortès n’auront à s’occuper que des