Arrêtons-nous, s’il vous plaît, à ce groupe particulier. C’est le bu
reau des passeports, et c’est là qu’il vous faut aller, si vous vou
lez assister au défilé des Prussiens de Paris.
L’espionnage de M. de Bismark fait chez nous la tache d’huile. C’est une lèpre, c’est une vermine immonde. La Prusse est encore, sur ce point, fidèle à ses tra
ditions. Frédéric II disait en riant: « Soubise a vingt cuisiniers et un espion; moi, j’ai vingt espions et un cuisinier ! »
Mais cet espionnage finit par surexciter si bien les esprits, que la seule épithète de Prussien devient un péril et une menace de mort.
Deux honnêtes négociants, signalés comme Prussiens, au Corps législatif ont été l’objet de poursuites violentes.
Un commerçant de la rue Saint- Denis a vu son magasin saccagé parce qu’un mauvais plaisant avait écrit sur la devanture de sa maison : « Ici on loge les Prussiens. »
Enfin, les journaux de la Dordogne nous envoient le récit d’un crime épouvantable, commis à propos do la Prusse. Un honorable citoyen de Hautcfaye, M. de Monneys, adjoint de sa commune, est apostrophé, un jour de mar
ché, par un groupe de jeunes gens exaltés. Il répond, et dans sa ré
ponse, on croit comprendre qu’il a crié : Vive la Prusse.
L’accusation vole de bouche en bouche, et soudain M. deMonneys est frappé, déchiré, foulé aux pieds, traîné dans les rues jusqu’au champ de foire, où les for
cenés qui le torturent, le brûlent sous un monceau de bois vert. Et comme le bois vert ne s’allume que diilicilement, les misérables attisent la flamme en y jetant de la paille. Horrible !
Et M. de Monnevs était un franc et, loyal patriote !
Du calme ! Du calme ! Soyons maîtres de nous. Regardons le péril comme le soldat regarde l’en
nemi, sans pâlir, et que la peur du mal ne vienne pas ajouter des crimes aux désastres de l’invasion!
Au milieu de ces foules qui se poussent et se repoussent, que fait Paris? direz-vous.
— Paris, vous répondrai-je, Paris fait sa toilette de combat.
Ou coupe les routes, on coupe les chemins de fer, on place les ponts-levis, on place les canons, on remplit d’eau les fossés, on approvisionne les greniers, on en
rôle les citoyens, on fait l’exercice sur les places, on distribue des fusils, on parle et on agit comme si le prince royal nous envoyait des environs de Paris son premier parlementaire!
Sommes-nous donc menacés?
Qu’importe! Dans la crise que nous traversons, il ne faut rien remettre au lendemain, et l’ap
pel de la landwohr nous montre que la Prusse a toujours Paris pour objectif.
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reau des passeports, et c’est là qu’il vous faut aller, si vous vou
lez assister au défilé des Prussiens de Paris.
L’espionnage de M. de Bismark fait chez nous la tache d’huile. C’est une lèpre, c’est une vermine immonde. La Prusse est encore, sur ce point, fidèle à ses tra
ditions. Frédéric II disait en riant: « Soubise a vingt cuisiniers et un espion; moi, j’ai vingt espions et un cuisinier ! »
Mais cet espionnage finit par surexciter si bien les esprits, que la seule épithète de Prussien devient un péril et une menace de mort.
Deux honnêtes négociants, signalés comme Prussiens, au Corps législatif ont été l’objet de poursuites violentes.
Un commerçant de la rue Saint- Denis a vu son magasin saccagé parce qu’un mauvais plaisant avait écrit sur la devanture de sa maison : « Ici on loge les Prussiens. »
Enfin, les journaux de la Dordogne nous envoient le récit d’un crime épouvantable, commis à propos do la Prusse. Un honorable citoyen de Hautcfaye, M. de Monneys, adjoint de sa commune, est apostrophé, un jour de mar
ché, par un groupe de jeunes gens exaltés. Il répond, et dans sa ré
ponse, on croit comprendre qu’il a crié : Vive la Prusse.
L’accusation vole de bouche en bouche, et soudain M. deMonneys est frappé, déchiré, foulé aux pieds, traîné dans les rues jusqu’au champ de foire, où les for
cenés qui le torturent, le brûlent sous un monceau de bois vert. Et comme le bois vert ne s’allume que diilicilement, les misérables attisent la flamme en y jetant de la paille. Horrible !
Et M. de Monnevs était un franc et, loyal patriote !
Du calme ! Du calme ! Soyons maîtres de nous. Regardons le péril comme le soldat regarde l’en
nemi, sans pâlir, et que la peur du mal ne vienne pas ajouter des crimes aux désastres de l’invasion!
Revenons à Paris.
Au milieu de ces foules qui se poussent et se repoussent, que fait Paris? direz-vous.
— Paris, vous répondrai-je, Paris fait sa toilette de combat.
Ou coupe les routes, on coupe les chemins de fer, on place les ponts-levis, on place les canons, on remplit d’eau les fossés, on approvisionne les greniers, on en
rôle les citoyens, on fait l’exercice sur les places, on distribue des fusils, on parle et on agit comme si le prince royal nous envoyait des environs de Paris son premier parlementaire!
Sommes-nous donc menacés?
Qu’importe! Dans la crise que nous traversons, il ne faut rien remettre au lendemain, et l’ap
pel de la landwohr nous montre que la Prusse a toujours Paris pour objectif.
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