3° Pour la défense du pays, la levée en masse et la réquisition générale de tout ce qui peut être utilisé contre l’invasion; après la guerre, sup
pression de l’armée permanente et organisation desmilices nationales;
4° La commune souveraine, opérant révolutionnairement la défaite de l’ennemi, ensuite facilitant 1’harmonie des intérêts et le gouvernement direct des citoyens par eux-mêmes.
Il y aurait beaucoup de choses à dire sur ce programme. Contentons-nous de répliquer au quatrième article, qui n’est rien autre chose cjue la résurrection de la commune révolutionnaire de 1793. Le comité central républicain nous per
mettra de lui faire observer que c’est la Conven
tion, et non la Commune de Paris, qui sauva la France de 1792, et que nous avons autre chose à faire qu’à semer perpétuellement autour de nous des germes de discorde. Nous renvoyons sur ce point les membres du comité central républicain aux conseils patriotiques donnés par Louis Blanc,
qui nous montre comme une force l’obéissance passive des Prussiens, et qui nous conjure de répondre à cette obéissance par l’harmonie puissante de tous nos dévouements.
Terminons le chapitre de notre politique intérieure par un mot relatif aux finances.
Quelques journaux ont parlé d’un nouvel emprunt; nous pouvons dire que cette question n’a été ni résolue ni même traitée dans les conseils du gouvernement.
Les publications des comptes du Trésor constatent que le gouvernement est en mesure de faire face aux exigences de la situation actuelle.
POLITIQUE EXTÉRIEURE.
Nous ne connaissons pas encore l’effet produit sur les cabinets de l’Europe par le rapport de M. Jules Favre. Les puissances s’éveilleront-elles à la voix éloquente- qui leur montre l’abîme où les pousse la politique des gros armements ? Il est permis d’en douter, en voyant l’attitude des ambassadeurs restés à Paris. On sait qu’après la pu
blication de ce rapport, tous les représentants des puissances s’étaient réunis chez son Éminence le nonce apostolique. L’opinion s’attendait à quelque déclaration qui, sans engager les gouvernements, protesterait hautement contre cette politique de rapine et d’annexion à outrance.
En aucune manière ; le corps diplomatique s’est réuni, et voici quel a été le résultat de ses délibérations :
1° Le Corps diplomatique continuera à séjourner à Paris jusqu’au jour où l’un des belligérants le préviendra officiellement que, d’après la tour
nure que prend l’attaque ou la défense, il y a lieu, pour les représentants des neutres, de s’absenter de la ville.
2° Demander au gouvernement français et au roi de Prusse de faciliter les départs réguliers des courriers qui porteraient à l’étranger les dépêches du Corps diplomatique resté à Paris.
Ces deux résolutions nous montrent la diplomatie européenne dans toute sa majestueuse nullité !
En résumé, voici, jusqu’à présent, ce que nous ont valu les sympathies du monde civilisé.
Un témoignage de bienveillance stérile de la part des États-Unis.
Une indifférence complète de la part des puissances européennes, qui nous abandonnent à nousmêmes.
Des manifestations ouvrières ont bien eu lieu çà et là. Le ministre de la police à Berlin s’est même cru obligé d’incarcérer le président de la section prussienne de l’Internationale. Mais on sait que ce n’est pas entre les mains des sociétés ouvrières qu’est déposée l’autorité.
iDonnons néanmoins un souvenir aux réunions démocratiques tenues en Angleterre. Deux meet
ings ont eu lieu à Londres : le premier à Hyde- Park, convoqué par un ouvrier jouissant d’une grande influence en Angleterre, M. Odger. Il s’est montré enthousiaste pour la proclamation de la République, et absolument opposé aux prétentions de la Prusse.
L’autre réunion, tenue à Saint-James Saint- Hall, sur la convocation de M. Beales, au nom des ouvriers, a exprimé les mêmes sentiments. On y a entendu M. Beesly, professeur d’histoire au Collège de l’Université de Londres.
Un troisième meeting réunissant deux cent mille assistants aurait eu une attitude très-hostile pour la reine et très-sympathique pour la France.
L’appui que la France pourra tirer de là n’est pas de nature à lui donner le moindre secours pour la sauver de l’invasion.
Le gouvernement de la défense nationale tient pourtant à bien édifier l’Angleterre sur la con
duite des événements, comme on peut le voir par la note publiée par le Journal officiel. Yoici cette note :
« Le gouvernement de la défense nationale est heureux d’apprendre qu’un grand nombre de ci
toyens pressent M. Louis Blanc de se rendre en Angleterre pour y éclairer l’opinion publique sur le véritable esprit qui anime la République fran
çaise, et exciter les sympathies du peuple anglais en faveur de la France.
M. Louis Blanc se montre tout disposé à partir pour l’Angleterre, et nous croyons sincèrement qu’il trouvera le peuple anglais prêt à condamner l’insultant ultimatum de M. de Bismark.
D’un autre côté, nous savons par les dernières nouvelles arrivées de Tours, que M. Thiers est parti pour se rendre à Saint-Pétersbourg, où il va continuer la mission diplomatique qui lui a été confiée.
Nous le disons hautement. M. Louis Blanc et M. Thiers possèdent, comme hommes politiques et comme écrivains, tout l’ascendant nécessaire pour exercer une influence utile aux intérêts de la France. Mais ce n’est pas sur cette double mission que le pays doit placer l’espérance de son salut. La France ne doit compter que sur elle-même, et l’histoire est là pour montrer qu’elle a triomphé de plus grands périls.
Aug. Marc.
LA DÉLÉGATION DE TOURS.
Une estafette, envoyée par la délégation du gouvernement établie à Tours, a réussi à pénétrer dans Paris. Elle a apporté la dépêche suivante, datée du 24 septembre :
« Nous avons fait afficher dans toute la France la proclamation et le décret suivants :
PROCLAMATION A LA FRANCE.
« Avant l’investissement de Paris, M. Jules Favre, ministre des affaires étrangères, a voulu voir M. de Bismark pour connaître les dispositions de l’ennemi.
« Voici la déclaration du ministre du roi Guillaume :
« La Prusse veut continner la guerre et réduire la France à l’état, de puissance de second ordre.
La Prusse veut l’Alsace et la Lorraine, jusqu’à Metz, par droit de conquête.
« Pour consentir à un armistice, la Prusse a osé demander la reddition de Strasbourg, de Toul et du Mont-Valérien.
« Paris, exaspéré, s’ensevelirait plutôt sous ses ruines.
« A d’aussi insolentes prétentions, en effet, on ne répond que par la lutte à outrance. La France accepte cette lutte et compte sur tous ses enfants.
DÉCRET.
« Vu la proclamation ci-dessus, qui constate la gravité des circonstances,
« Le Gouvernement décrète :
« Toutes élections municipales et pour l’Assemblée constituante sont suspendues et ajournées.
« Nous envoyons partout des ordres et des hommes pour surexciter l’esprit de la défense natio
nale. Nous faisons les plus grands efforts pour jeter sur les derrières de l’armée prussienne tou
tes les forces possibles, soit comme guérillas, soit comme forces régulières. Déjà l’amiral Fourichon a envoyé en avant d’Orléans des forces qui ont eu
plusieurs petits engagements; elles harcèlent l’ennemi sans relâche, sous les ordres du général de Polhès. »
RAPPORT
DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES


AU GOUVERNEMENT DE LA DÉFENSE NATIONALE.




A MM. les Membres du Gouvernement de la défense


nationale.
Mes chers collègues,
L’union étroite de tous les citoyens, et particulièrement celle des membres du Gouvernement, est plus que jamais une nécessité de salut public. Chacun de nos actes doit la cimenter. Celui que
je viens d’accomplir, de mon chef, m’était inspiré par ce sentiment; il aura ce résultat. J’ai eu l’honneur de vous l’expliquer en détail. Gela ne suffit point. Nous sommes un Gouvernement- de publicité. Si à l’heure de l’exécution le secret est indispensable, le fait, une fois consommé, doit être entouré de la plus grande lumière. Nous ne sommes quelque chose que par l’opinion de nos concitoyens; il faut qu’elle nous juge à chaque heure, et pour nous juger elle a le droit de tout connaître.
J’ai cru qu’il était de mon devoir d’aller au quartier général des armées ennemies; j’y suis allé. Je vous ai rendu compte de la mission que je m’étais imposée à moi-même; je viens dire à mon pays les raisons qui m’ont déterminé, le but que je me proposais, celui que je crois avoir atteint.
Je n’ai pas besoin de rappeler la politique inaugurée par nous, et que le ministre des affaires étrangères était plus particulièrement chargé de formuler. Nous sommes avant tout des hommes de paix et de liberté. Jusqu’au dernier moment,
nous nous sommes opposés à la guerre que le gouvernement impérial entreprenait dans un in
ACTES DU GOUVERNEMENT PROVISOIRE
Ainsi que nous l’avons dit, les élections de la Constituante et les élections municipales sont ajournées.
Le conseil d’État a été remplacé par une commission provisoire, qui a tenu sa première séance le 22 septembre courant.
M. de Jouvencel, ancien conseiller d’État, a été élu président de la commission.
Le ministre de l’instruction publique vient de nommer une commission de cinq membres, chargée d’inspecter les archives du Louvre, et de remonter à la source des détournements qui au
raient pu être commis par les fonctionnaires du gouvernement déchu.
Le gouvernement de la défense nationale, considérant que M. Devienne, premier président de la Cour de cassation, aurait gravement compro
mis la dignité du magistrat dans une négociation d’un caractère scandaleux, l’a déféré disciplinairement à la Cour de cassation, qui statuera conformément aux lois.
Plusieurs commerçants de Paris s’adressent au gouvernement pour obtenir une mesure qui leur permettrait d’imputer sur les termes à échoir les loyers qu’ils ont payés d’avance.
Un décret du 7 de ce mois déclare l’article 1244, g 2 du Code civil applicable, pendant la durée de la guerre, à toute contestation entre locataire et propriétaire relative au payement des loyers, et autorise les tribunaux, et en cas d’urgence le pré
sident du Tribunal, à accorder des délais suivant les circonstances.
Les locataires qui ont payé leurs loyers à l’a­ vance se trouvent évidemment dans des conditions plus favorables pour revendiquer le bénéfice de cette disposition.