Dans l’usine de Pocé, NOus avons décrit, les diverses espèces de fonte propres au moulage, ainsi que les instruments NOmbreux et compliqués nécessaires à cette opération : NOus avons présenté quelques spécimens des admi
rables produits que l’on obtient aujourd’hui en France.
NOus avons pris comme exemple des ateliers de construction de machines, le bel établissement fondé à Arras par le regrettable M. Hallette.
Enfin en faisant descendre NOs lecteurs dans les profondeurs dès mines d’Anzin, NOus les avons inities à ce travail souterrain qui fait vivre des milliers d hommes, en donnant l’aliment indispensable à toutes les industries.
NOus avons ainsi parcouru le cercle de l’industrie métallurgique en cherchant à mettre NOs lecteurs au courant des diver
ses opérations dont elle se compose, en même temps que NOus leur en montrions les applications. NOus n’avons pas
ments officiels et authentiques qui sont consignés, année par année, dans le compterendu des ingénieurs des mines.
Aujourd’hui NOus avons à les entretenir d’une usine dont
NOus disions, dans NOtre compte rendu de l’exposition des
produits de l’industrie de 1844 (tome III, page 182) :
« Les éléments de prospérité du Creusot se composent de trois industries distinctes et concentrées dans le même lieu. C’est assez dire que cette usine se trouve dans les condi
tions d’une bonne fabrication à bon marché. Ces industries sont : 1° l’extraction de la bouille, un million d’hectolitres par an; 2 la fabrication du fer et de la fonte, au moyen de quatre hauts fourneaux qui produisent ensemble seize à dixhuit tonnes par jour, et de feux de forge et d’affinerie pouvant fabriquer huit cents tonnes par mois; 5° la construc
tion des machines pour laquelle le Creusot s’est acquis une réputation européenne. »
Depuis le jour où NOus écrivions ces lignes, quels progrès ont été réalisés, quels développements a pris l’usine, quelle augmentation elle a réalisée dans toutes les branches de son exploitation; c’est ce que NOs lecteurs verront tout à l’heure quand NOus comparerons l’état actuel à l’état ancien, qui n’est cependant vieux que de deux ans. Du reste, NOus sommes heureux d’avoir retardé jusqu’à ce jour l’histoire et la des
cription de ce grand établissement; car NOus aurons pour guide dans cet article, entre les NOtes qu’on a bien voulu NOus remettre, une remarquable brochure que M. Schneider, co-propriétaire gérant du Creusot, vient de faire imprimer, après l’avoir lue à la commission de la chambre des députés, chargée de l’examen du projet de loi des douanes.
Mais, avant d’entrer en matière, qu’il NOus soit permis de donner, comme NOus l’avons fait précédemment, un résumé
succinct du compte rendu des ingénieurs des mines qui vient de paraître, en ce qui concerne les trois industries dans les
quelles le Creusot a une si grande part, et qui font de cette usine une des plus importantes et des plus complètes dont la France puisse s’eNOrgueillir.
L’année 1845 a été en progrès marqué sur l’année 1844 pour la production et l’emploi des combustibles minéraux.
Le NOmbre des mines concédées a monté de 407 à 449, et le NOmbre de celles exploitées, de 252 à 275. Les con
cessions s’étendent sur 459,551 hectares, présentant ainsi un développement de 9,000 hectares de plus qu’en 1844. Le NOmbre des ouvriers employés a été de 30,768; l’extraction
totale, de 42,020,919 quintaux métriques. La valeur créée par la production indigène a été de 59,705,452 francs.
Mais si la production indigène a augmenté en 1845 de 4 millions de quintaux métriques, la consommation a cru dans une proportion plus rapide encore ; elle s’est élévée de 54,868,501 quintaux métriques à 64,092,868 quintaux métriques. Les em
prunts que NOus avons dû faire aux pays etrangers ont donc surpassé en 1845 ceux faits en 1844. Le tableau suivant indique cette augmentation , NOn-seulement de 1845 sur 1844, mais encore sur 1858.
rais consommés par les fonderies indigènes, 12,495,168 quintaux métriques sont dus à la France, et y ont créé pour redevance, extraction et transport, une valeurde 15,150,659 francs, et le reste, soit environ 100 mille quintaux métriques à l’étranger. NOus remarquerons encore cette année le grave
bre des usines qui s’occupent de fabriquer la fonte et le fer, et de les plier aux besoins du commerce, ainsi que la force qu’elles utilisent.
La France contenait, en 1845, 4,452 établissements de
145 genres différents, parmi lesquels on compte :
1838.1814.1845. Belgique. . . .
quin. met 7,964,578
quin. mét. 11,157,949
quin. mét. 13,961,664 Grande Bretagne3,046,884
4,276,936
5,657,489]
Prusse et Bavière rhénane. .
1,251,378
2,090,367
2,406,954 Divers pays. . .
7,50033,60743,842
TOTAUX. .12,270,30017,558,85922,07i,946j
L’industrie du fer continue également à se développer : en 1845, un NOuvel accroissement s’est manifesté dans la production de la fonte et du fer.
Pour la fonte,ilaétéproduit 4,589,690 quintaux métriques, au lieu de 4,271,755 produits en 1844.
Pour le fer, on a obtenu 5,422,615
quintaux métriques, au lieu de 5,150,125. Eu égard à l’importance de ses usines à fer, la France l’emporte donc au
jourd’hui, dit le compte rendu, sur chacun des autres Etats de l’Europe continentale.
Quant aux minerais, leur qualité et leur abondance permettent à la France de se suffire, pour ainsi dire , à ellemême. Ainsi, sur 12.595,559 quintaux métriques de mine
préjudice causé à la consommation delà fonte et du fer par 1 imperfection des voies de transport. Car sur le prix de 1 f. 324 m., auquel revient un quintal de minerairendu à l’u­
sine, les frais de transport absorbent seuls 0 f. 585 m., ou environ 44 pour cent.
NOus terminerons celle analyse de la richesse métallurgique de la France, ei) faisant connaître à NOs lecteurs le NOm
180 ateliers de machines. 117 fonderies. 52 forges.
55 hauts fourneaux.
16 fonderies et forges. Total. 400 usines.
Ces 400 usines ont ensemble 577 machines à vapeur réunissant une force de 9,791 chevaux-vapeur. Le cheval-va
peur est estimé remplacer 5 chevaux de trait, et chaque cheval de trait 7 hommes de peine. En effectuant cette transformation, on obtient les chiffres suivants :
9,791 chevaux-vapeur égalent 29,575 chevaux de trait ou 205,611 hommes de peine.
Enfin, il résulte de l’ensemble des documents que la richesse de la France en machines à vapeur de toute espèce était, en 1845, de 4,114 machines fixes, remplaçant 150,564 chevaux de trait; de 515 locomotives, remplaçant, à raison de 45 chevaux de trait par loco
motive, 14,085 chevaux de trait, et de 446 machines sur bateaux et bâtiments, remplaçant 54,150 chevaux de trait.
La force totale est donc 72,955 chevaux-vapeur, ou 218,799 chevaux de trait, ou enfin 1,551,595 hommes de peine.
NOus NOus arrêterons ici dans cette analyse rapide qui suffit pour donner à NOs lecteurs une idée de la richesse de NOtre pays, de l’activité incessante qu’on y déploie, et des progrès immenses dont chaque année vient apporter la preuve, pour NOus occuper maintenant exclusive
ment du Creusot, qui a une si grande part dans les résultats que NOus veNOns de signaler.
Le Creusot n’est pas arrivé de prime abord à l’état de développement et de prospérité où NOus le voyons aujourd’hui.
Les vicissitu les qu’il a subies sont NOmbreuses; maintes fois il a failli rester enseveli sous la ruine de ceux qui le dirigeaient ; il a passé de mains en mains, et chacun y a laissé comme trace de son passage des sommes considérables. Pendant cinquante ans, il a lutté contre la mauvaise
fortune, qui s’est enfin lassée de le persécuter, et son histoire, de douloureuse et lamentable qu’elle était, est devenue glorieuse et triomphante. Les malheurs sont oubliés. On n’a conservé que la mémoire des enseignements qu’un malheur porte toujours avec lui, et ces enseignements ont profité. Aussi les propriétaires actuels du Creusot ont-ils le droit aujourd’hui d’être fiers de leur élève.
C’est à 50 kilomètres d’Autun, à 45 kilomètres de Châlonssur-Saône, sur la pente sud-est des montagnes du Morvan, que le Creusot est situé. Par sa position, il se trouvait isolé des voies de communication écoNOmiques; mais à partir de 4857, MM. Schneider ayant obtenu la concession d un che
min de fer de 10 kilomètres du Creusot au canal du Centre, leurs produits ont pu descendre à Marseille par la Saône et le Rhône, à Nantes par la Loire, à Paris par les canaux de Briare, deLoingetla Seine, enfin à Strasbourg par le canal du Rhône au Rhin. On conçoit tout l’avantage que ce chemin
de fer a procuré au Creusot, en étendant son marché, ou en lui permettant d’y arriver à moins de frais.
Avant 1770, le vaste emplacement où s’élève aujourd’hui l’usine du Creusot n’était qu’une vallée triste et inculte, une prairie de chétive apparence, souvent traversée par des eaux torrentielles et plantée de quelques arbres qui semblaient n y venir qu’à regret, et cependant sous le sol, pendant des siècles, s’étaient accumulées des richesses naturelles qui n’attendaient. qu’une main intelligente : au-dessus du sol devaient s’élever un jour, comme par enchantement, des bâtiments, des jardins, des arbres, des fleurs et des fruits.
Cette prairie était le patrimoine de trois ou quatre familles de montagnards qui formaient alors toute la population du lieu, population pauvre et primitive habitant quelques misérables cabanes dont l’ensemble portait le NOm de Charbon
nières. L’ingratitude du sol, l’extrême difficulté des moyens de communication, étaient autant d’obstacles qui ne permet
taient guère de supposer alors que cet assemblage de chéti
ves chaumières perdues au milieu des montagnes ferait, place à l’un de ces établissements qui vivifient le pays où on les place, qui animent et transforment un paysage, qui font succéder le bruit imposant des machines au silence des vas
négligé NOn plus de leur faire connaître les résultats obtenus annuellement en France tant par l’industrie houillère que par l’industrie métallurgique, et NOus leur avons donné, sur ces deux branches de la fortune publique, les renseigne