venu au palais de Saint-Cloud tenir sur les fonts baptismaux le duc de Guise par repiésenlation du parrain désigné, le prince de Salerne, frère de la reine. Ces démarches du prince ne prouvent sans doute pas que l’accident sur lequel les journaux ministériels ont gardé le silence le plus absolu ne soit pas arrivé, mais elles démontrent au moins que ses conséquences ont été sans gravité.
NOuveaux détails sur la soumission de pomaré. — Des NOuvelles abondantes NOus sont venues de Tahiti. Bien qu’elles renferment un récit plus complet encore que celui que NOus avons donné de la prise du fort Fautahua, qui a été pour NOus la clef de l’île, NOus ne reviendrons pas_ sur ce fait d’armes si hoNOrable pour les quarante volontaires qui l’ont héroïquement accompli ; mais NOus en ferons connaître les conséquences.
Dès que le fort fut tombé en NOtre pouvoir, un message fut envoyé par les Kanacs à Pomaré, qui vit alors qu’il ne lui restait rien de mieux à faire que de se soumettre. Sa résolution étant connue, le vapeur le Gassendi reçutl’ordre de l’aller chercher. Pomaré monta à bord sans hésiter, et, ap
prenant que le steamer ne devait partir que le lendemain, elle déclara qu’elle coucherait sur le pont.
A minuit, elle fait mander le commandant et lui dit :
« Fournier, je veux que demain NOus allions à la voile et à la vapeur ; fais at acher tes voiles. »
Et aussitôt des ordres furent donnés en conséquence. Au jour, Sa Majesté aperçoit le compas sur le pont :
«s Fournier, dit-elle, tu donneras ce compas aux hommes aue j’envoie dans une de mes îles. »
‘ St le compas fut donné, tant on avait peur que la fantaisie ne prît à la reine de retourner en arrière.
Arrivée à Tahiti, Pomaré descendit au Gouvernement, où les honneurs dus à son rang lui furent, rendus. Madame Bruat avail eu l’attention de préparer deux robes de soie, l’une pour Pomaré et l’autre pour sa mère. Quand elle les offrit à la reine, en lui faisant connaître leur destination, Sa Majesté lui répondit : «—Je les prends toutes deux pour moi ; n’en donne pas à ma mère ; elle n’est pas jolie, elle est trop vieille. — » Pomaré procéda ensuite aux réceptions qu’elle avait à faire, et s’en tira avec dignité. Les différents corps furent admis en sa présence et sortirent surpris de l’aplomb et de la NOblesse de cette reine de sauvages.
Pomaré versa, parétiqüette, d’abondantes larmes pendant les huit jours qui ont suivi son retour; en voici le motif : à Tahiti, il est d’usage, quand deux femmes se rejoignent après une absence, que la plus jeune ou la moins considérée, s’incline et cache son visage dans les mains et les ge
NOux de la plus âgée, qui est assise ; dans cette poslure elles pleurent toutes deux, puis se relèvent et tout est dit. Or, Pomaré a ainsi reçu toutes les dames de distinction de son île, et elle a pleuré avec chacune d’elles.
Sa Majesté tahitienne a été installée au Gouvernement en attendant qu’on lui eût préparé un logement digne d’elle. A cet effet, le gouverneur a pris les ordres de Pomaré, qui est allée choisir elle-même le lieu le plus à sa convenance.
Quand elle eut fait son choix, elle dit au gouverneur : « Bruat, bâtis-moi ici une belle maison! » Mais, par mal
heur, quand la maison était à moitié, elle dit de NOuveau : «Bruat, bâtis-moi dans cet autre endroit une maison semblable à cette aile du Gouvernement !» Et à l’instant les ouvriers furent à l’œuvre NOuvelle.
Pomaré est une femme de quarante à quarante-trois ans, grande et replète ; elle est lourde de corps, mais d’une intelligence et d’une pénétration peu ordinaires. En habileté po
litique, elle peut se mesurer avec les princes de l’Europe. Les Français ne sont pas encore arrivés à savoir ce qu’elle pense ni ce qu’elle veut; son pouvoir, comme celui des chefs de tribus de l’Océanie, est absolu, et le dévouement de ses sujets est sans bprnes; elle parle et elle est obéie. Au fond, c’est la meilleure des femmes, aimant passionnément le Champagne, qu’elle boit à plein verre à la table du gouverneur. . . ,
Le gouvernement français lui servira une liste civile de S,000 dollars (vingt-cinq mille francs) par an, outre le revenu qu’elle pourra tirer de ses terres ou de contributions sur son peuple. Cela l’aidera à fournir à ses dépenses et à acquitter ses dettes, car la reine est obérée et sa libération exigera plusieurs années.
NOus devons reconnaître humblement que l’Européen qui a jamais acquis le plus d’empire sur elle est le révérend M. Pritchard. Les lettres d’elle à cet estimable indemnisé, qui ont été interceptées, ne laissent pas le plus petit doute
à C6t égard.
Les fonctions de secrétaire intime de la reine sont encore remplies par un Anglais, M. Salmon, résidant depuis longtemps à Tahiti et mari d’une des parentes de Sa Majesté. — Quelques chefs indigènes font les fonctions de surveillants dans File pour le maintien de la paix.
Les dernières NOuvelles sont du 25 mai 1847. Le NOuveau gouverneur, M. Lavaud, était arrivé le 21, et avait pris pos
session le lendemain. L’amiral Bruat devait partir le 51 pour la France avec les plus anciens officiers, et six ou huit des fils des principaux chefs qu il emmène dans le but de les faire instruire à Paris.
Abd-el-Kader et Abd-er-Rahman. — On avait répandu le bruit que le gouvernement avait reçu la NOuvelle qu’Abd-el-Kader marchait sur Fez après s’être emparé de Taza. Tazaest une ville de six à huit mille âmes, située à l’extrémité méridiona’e d’un des derniers chaîNOns du Rif;
elle s’élève sur une position assez forte, et elle est entourée d’une vieille muraille moitié moresque, moitié portugaise, flanquée de tours carrées. Ces fortifications tombent en rui
ne de toutes parts. Les rues sont tortueuses et très-étroites; la ville est arrosée par de NOmbreuses fontaines alimentées par des sources venues de la montagne, et dont les eaux vont ensuite fertiliser de vastes jardins. Elle est située à moitié chemin delà frontière algérienne à Fez. LMoniteur
algérien et VEcho d Oran sont venus NOus faire connaître
plus exactement la situation et l’attitude d’Abd-el-Kader. Il s’accrédite qu’après un premier mouvement de retraite, l’exémir s’est de NOuveau porté vers l’ouest et qu’il a été bien accueilli par les habitants de Taza. Toutefois, aucun acte d’hostilité positive ne se serait encore produit. Diverses con
jectures sont permises au sujet de ce mouvement, s’il est réel. L’émir aurait voulu rallier les Béni-Amer transplantés près de Fez, ou châtier une tribu accusée de quelques ten
tatives de vol sur les convois du désert. Enfin il est encore possible que ces prétextes cachent des vues plus ambitieuses auxquelles il faudra, selon toute apparence,_ un certain laps de temps pour se produire, et qui, par conséquent, devront être l’objet de NOtre surveillance politique.
Régence de Tunis. — On se rappelle que le gouvernement français ayant donné au bey de Tunis le bâtiment à vapeur de l’Etat le Dante, la maladresse du pilote tunisien, qui le faisait entrer pour la première fois dans la rade de là Goulette, le jeta sur un bas fonds de la côte, d’où il a été impossible de le relever. NOus appreNOns que le cadeau va être reNOuvelé, et que le gouvernement a envoyé l’ordre de retrancher du service des paquebots-posles le MiNOs, pour être offert au bey, après avoir reçu les changements d’installation néces-aires.
Turquie. — On écrit de ConstantiNOple au Journal des Débats: « Les derniers événements de Rome ont occasionné ici une manifestation en faveur du saint-père. Les Romains et les autres Italiens assez NOmbreux à ConstantiNOple ont fait célébrer, dimanche dernier, une messe suivie d’un Te Deum, pour remercier la Providence divine. Une fouie immense y assistait. Le soir, la promenade publique était il
luminée; des transparents, portant des inscriptions en l’hon
neur du pape, étaient placés dans divers endroits; deux
corps de musiciens exécutaient des symphonies. La foule n’a pas proféré d’autres cris que ceux de vive Pie IX! Tout s’est passé, du reste, avec beaucoup d’ordre et de tranquillité.
« Les dernières NOuvelles de Perse parlaient d’une grave insurrection qui aurait éclaté à Téhéran parmi les troupes campées autour de la ville. Un courrier extraordinaire de M. de Sartiges, qui apporte des NOuvelles du 3 août, a réduit ces bruits à leur juste valeur. Les troupes, qui avaient à rece
voir un arriéré de solde considérable, se sont en effet livrées à de bruyantes réclamations ; on a dès lors jugé prudent de les payer, et tout est rentré dans l’ordre. Tous ces régi
ments devaient d’ailleurs partir prochainement pour faire une expédition dans le Khoraçan.
« Le choléra fait d’assez grands ravages dans la Russie méridionale ; il existe en ce moment à Taganrok, à Maria- NOpolis et à Rostof. On dit que dans cette dernière ville, qui contient à peine 8,000 âmes, il a enlevé 2,000 victimes. »
Royaume Lombardo-Vénitien. — On écrivait de Venise le 26 août : « La ville des doges est dans l attente d’une grande solennité. On se rappelle que c’est ici que se réunit cette année le congrès des naturalistes. Le comte Giovanelli, pré
sident de NOire Société des Naturalistes, a, dit-on, dépensé un million de francs pour les arrangements convenables de son palais, où les séances auront lieu, et il serait.peut-être difficile de trouver dans aucune ville de l’Europe un hôtel meublé avec autant de goût et de luxe.
« Chaque jour voit affluer aux lagunes un NOmbre considérable de savants, d’amateurs et de curieux ; la saison dés vacances dans toutes les universités de l’Europe contribue beaucoup à augmenter le NOmbre des voyageurs. On compte déjà dix mille étrangers arrivés à Venise; on compte aussi parmi eux des ecclésiastiques qui ont dû quitter Rome par suite des derniers événements.»
Les 8, 9 et 10 de ce mois une agitation populaire assez vive s’est produite à Milan.
Royaume ms Deux- Siciles. — Des troubles ont éclaté en Sicile, à Messine, et à lleggio. Des renforts ont été envoyés de Naples, sur ces deux points. Le numéro du 6 sep
tembre du journal officiel présentait ce double mouvement comme comprimé.
Etats, pontificaux. — Le cardinal Ferretti vient de créer à Rome un corps de sergents de ville en uniforme. Cette mesure a produit un bon effet aux yeux de la popula
tion en ce qu’elle ôte à la police locale son caractère secret et inquisileur.
La garde nationale de Romeareçu enfin son organisation. Le Diario publie les NOminations des capitaines adjudantsmajors et des capitaines de compagnie choisis par le pape pour commander cette milice.
A Ancône, le conseil municipal, après avoir voté une adresse au souverain pontife, a offert au gouvernement une somme de 2,000 écus (10,800 fr.) pour aider à l’armement de la garde civique. La chambre de commerce a voté une somme égale; les Israélites, les habitants aisés d’Ancône et le clergé offrent de fournir le reste de la dépense. Trois ci
toyens de la ville sont partis pour mettre ces votes aux pieds de Pie IX, et, si l’offre est acceptée, s’occuper immédiatement de l’achat des armes nécessaires à la milice.
A Bologne, les chefs supérieurs de la garde civique sont NOmmés. Une lettre circulaire de l’archevêque, M. le cardi
nal Opizzoni, invite les curés du diocèse à user de toute leur influence pour maintenir la tranquillité et la bonne intelligence dans la population.
Principauté de Lucques. — A la suije d’un mouvement provoqué par des arrestations arbitraires, le duc de Lucques avait, te 1er septembre, publié une proclamation dans la
quelle il manifestait l’intention d’entrer dans la voiedu pro
grès, et d’adopter les réformes nécessaires au bonheur de son peuple. La création de la garde nationale était anNOn
cée dans cette proclamation comme une chose déjà résolue. Après avoir fait cette concession, il paraît que ie duc se se
rait ravisé, et que, se retirant à Massa, ville située à peu de distance de Lucques et qui appartient au duc de Modène,il aurait déclaré que ces promesses lui ayant été arrachées par la violence, il n’entendait pas les ratifier. Cette déclaration
ne pouvait manquer d’exciter un vif mécontentement. Les Lucquois se sont soulevés; la garde civique s est loimée d’elle-même. Une députation NOmbreuse, ayant a .a tele le marquis de Mazzarosa, qui, dans ces démitrs jours, ava,
rétisné les fonctions de président du conseil d Etat, s est rendue auprès du duc pour l’engager a rentrer dans ses Etats Le duc a répondu à celle démarché par un decret qui instituait une régence dontM. Mazzarosa devait être le pre
sident ; mais le conseil des ministres n a pas voulu le publier et a supplié de NOuveau le prince de revenir. En attendant, l’agitation allait toujours en augmentant. Pour for
cer le duc à rentrer à Lucques, on parlait déjà de saisir ses revenus, ses meubles, et de mettre sous séquestre son palais. Toutes lès populations des environs étaient accourues à Luc
ques et à chaque instant il arrivait de Pise et de Livourne, parle chemin de fer, des centaines d individus. L émotion
était à son comble, quand tout à coup, le a, a une heure de Fanrès-midi, le duc est revenu dans la ville, accompagné du prince héréditaire, et a été accueilli avec de grandes démonstrations de joie. Les manifestations populaires ont con
tinué, le prince y a pris part, et NOus n avons pas appris que cette harmonie, pour etre subite, ait été depuis troubiee
un seul instant. _ „ ,
Grand-duché de Toscane. — Le 5 il y a eu une grande démonstration à Florence, pour lêter la création de la garde
nationale instituée par décret de la veille. Le peuple s est rendu sous les fenêtres du grand-duc pour le remercier. Des troupes de musiciens ont parcouru la ville, qui a été illumi
née le soir. L’enthousiasme était général. On assure aussi qu’à Livourne il devait y avoir une fête-monstre le 8, et qu’un grand banquet serait donné à cette occasion pour célébrer l’institution de la garde civique.
Piémont. — La ville de Gênes a été également le théâtre d’une grande manifestation politique le 8 de ce mois. L’ordre n’y a pas été un moment troublé.
Suisse. — La diète s’est ajournée au 18 octobre. La mi NOrité espérait un terme moins rapproché, et elle ne se dis
simule pas qu’on veut résolument arriver à une solution de l’affaire du Sonderbund.
Angleterre. — lie de Guernesey. — Guernesey est en proie à une violente agitation, par suite de l’intervention ex
traordinaire du gouverneur militaire, le major-général Napier, dans les affaires civiles de File, y compris l’ancien droit d’élire les magistrats appartenant aux états ou corporations. La Guernesey Cornet a raison de dire que tous les habitants devraient faire une adresse à la reine, pour lui repré
senter que la tranquilité de File ne saurait être maintenue tant que le major-général Napier sera à la tête du gouverne
ment. Cette adresse devrait prier respectueusement la reine d’ordonner qu’à l’avenir le gouverneur militaire se retranchât dans ses attributions, sans s’occuper des affaires ci
viles; ou bien si un favoritisme inexplicable le maintient à la tête des affaires de Guernesey, il faut que ses pouvoirs soient limités.
Espagne. — Un décret de la reine a NOmmé sénateur Je général Espartero. Le Daily-News anNOnce que le duc de la Victoire partira de Londres le 28 septembre pour Bruxelles, et que de là il se rendra à Madrid avec sa famille.
Une circulaire du ministre de l’intérieur, qui prouve qu’en Espagne tous les cabinets entendent la liberté et ses droits de la même manière, interdit à tous les journaux de parler des affaires intérieures du palais, de la reine et du roi.
On assure qu’avant son départ pour Barcelone, le général Conchaa reçu l assurance qu’il ne se-aitrien inNOvé quant à la question des cotons, cette pierre de touche de la fidélité ca
talane. 11 paraît que la modification des tarifs est une des premières questions dont s’occupera le NOuveau cabinet.
Paraguay. — On écrit de BueNOs-Ayres, le 6 juin : « M. de Bomplan, le cé èbre compagNOn de voyage de M. de Humboldt, que plusieurs journaux avaient fait mourir der
nièrement, est plein de vie et de santé. Retenu pendant neuf ans au Paraguay par Francia, il obtint vers 1850 la permission de sortir de ce malencontreux pays, uù il avait eu l’im
prudence de s’engager sans autorisation, fut retenu dix-huit
mois encore à la frontière, et enfin, redevenu libre, il se fixa . yis-à-vis de Corrientes, près des confins du Paraguay, où il se trouve encore aujourd’hui. Il vit ainsi depuis dix-sept ans à San-Borja, de l’Uruguay, dans les anciennes missions bré
siliennes. Il a là des intérêts matériels : il possède quelques, terrains, et ses soixante-quinze ans sonnés le rendent plus sédentaire et lui ôtent presque toute idée de retour. Des voyageurs récemment arrivés du Paraguay par le Brésil, un entre autres qui vient de passer plusieurs mois avec lui,, n’ont pu le décider à revenir. Il compte toutefois faire un voyage à Montevideo, assure-t-il, quand la navigation des fleuves sera plus praticable; mais on n’espère pas le revoir de longtemps.
« La personne de qui je tiens ces renseignements est M. de Mersay, qui revientdu Paraguay, où il est entré assez facilement au moment où l’on refusait à M. de Castelnau l’autorisation de pénétrer à la tête de sa mission scientifi
que. Il termine par la Plata un voyage d’exploration dont l’avait chargé M. Villemain, et retournera prochainement en France.
« Le gouvernement du Paraguay espère que le gouvernement français le reconnaîtra quelque jour ; mais il sait bien que cela ne peut arriver que lorsque les affaires de la Plata seront terminées et que la navigation des fleuves sera ou
verte. Du reste, les renseignements que M. de Mersay et plusieurs voyageurs NOus donnent sur cette autre Chine n’ont rien de très-sé luisant. »
Nécrologie. — L’armée vient de perdre une de ses plus glorieuses et plus pures illustrations, le maréchal Oudi- NOt, duc de Reggio, gouverneur des Invalides, auquel NOus
consacrons une NOtice spéciale. — L’armée a encore perdu M. le lieutenant général baron Piquet, mort à Heidelberg, et M. le lieutenant général comte de Fernig, mort à bord d’un paquebot qui le conduisait à Alexandrie, au retour d’un
NOuveaux détails sur la soumission de pomaré. — Des NOuvelles abondantes NOus sont venues de Tahiti. Bien qu’elles renferment un récit plus complet encore que celui que NOus avons donné de la prise du fort Fautahua, qui a été pour NOus la clef de l’île, NOus ne reviendrons pas_ sur ce fait d’armes si hoNOrable pour les quarante volontaires qui l’ont héroïquement accompli ; mais NOus en ferons connaître les conséquences.
Dès que le fort fut tombé en NOtre pouvoir, un message fut envoyé par les Kanacs à Pomaré, qui vit alors qu’il ne lui restait rien de mieux à faire que de se soumettre. Sa résolution étant connue, le vapeur le Gassendi reçutl’ordre de l’aller chercher. Pomaré monta à bord sans hésiter, et, ap
prenant que le steamer ne devait partir que le lendemain, elle déclara qu’elle coucherait sur le pont.
A minuit, elle fait mander le commandant et lui dit :
« Fournier, je veux que demain NOus allions à la voile et à la vapeur ; fais at acher tes voiles. »
Et aussitôt des ordres furent donnés en conséquence. Au jour, Sa Majesté aperçoit le compas sur le pont :
«s Fournier, dit-elle, tu donneras ce compas aux hommes aue j’envoie dans une de mes îles. »
‘ St le compas fut donné, tant on avait peur que la fantaisie ne prît à la reine de retourner en arrière.
Arrivée à Tahiti, Pomaré descendit au Gouvernement, où les honneurs dus à son rang lui furent, rendus. Madame Bruat avail eu l’attention de préparer deux robes de soie, l’une pour Pomaré et l’autre pour sa mère. Quand elle les offrit à la reine, en lui faisant connaître leur destination, Sa Majesté lui répondit : «—Je les prends toutes deux pour moi ; n’en donne pas à ma mère ; elle n’est pas jolie, elle est trop vieille. — » Pomaré procéda ensuite aux réceptions qu’elle avait à faire, et s’en tira avec dignité. Les différents corps furent admis en sa présence et sortirent surpris de l’aplomb et de la NOblesse de cette reine de sauvages.
Pomaré versa, parétiqüette, d’abondantes larmes pendant les huit jours qui ont suivi son retour; en voici le motif : à Tahiti, il est d’usage, quand deux femmes se rejoignent après une absence, que la plus jeune ou la moins considérée, s’incline et cache son visage dans les mains et les ge
NOux de la plus âgée, qui est assise ; dans cette poslure elles pleurent toutes deux, puis se relèvent et tout est dit. Or, Pomaré a ainsi reçu toutes les dames de distinction de son île, et elle a pleuré avec chacune d’elles.
Sa Majesté tahitienne a été installée au Gouvernement en attendant qu’on lui eût préparé un logement digne d’elle. A cet effet, le gouverneur a pris les ordres de Pomaré, qui est allée choisir elle-même le lieu le plus à sa convenance.
Quand elle eut fait son choix, elle dit au gouverneur : « Bruat, bâtis-moi ici une belle maison! » Mais, par mal
heur, quand la maison était à moitié, elle dit de NOuveau : «Bruat, bâtis-moi dans cet autre endroit une maison semblable à cette aile du Gouvernement !» Et à l’instant les ouvriers furent à l’œuvre NOuvelle.
Pomaré est une femme de quarante à quarante-trois ans, grande et replète ; elle est lourde de corps, mais d’une intelligence et d’une pénétration peu ordinaires. En habileté po
litique, elle peut se mesurer avec les princes de l’Europe. Les Français ne sont pas encore arrivés à savoir ce qu’elle pense ni ce qu’elle veut; son pouvoir, comme celui des chefs de tribus de l’Océanie, est absolu, et le dévouement de ses sujets est sans bprnes; elle parle et elle est obéie. Au fond, c’est la meilleure des femmes, aimant passionnément le Champagne, qu’elle boit à plein verre à la table du gouverneur. . . ,
Le gouvernement français lui servira une liste civile de S,000 dollars (vingt-cinq mille francs) par an, outre le revenu qu’elle pourra tirer de ses terres ou de contributions sur son peuple. Cela l’aidera à fournir à ses dépenses et à acquitter ses dettes, car la reine est obérée et sa libération exigera plusieurs années.
NOus devons reconnaître humblement que l’Européen qui a jamais acquis le plus d’empire sur elle est le révérend M. Pritchard. Les lettres d’elle à cet estimable indemnisé, qui ont été interceptées, ne laissent pas le plus petit doute
à C6t égard.
Les fonctions de secrétaire intime de la reine sont encore remplies par un Anglais, M. Salmon, résidant depuis longtemps à Tahiti et mari d’une des parentes de Sa Majesté. — Quelques chefs indigènes font les fonctions de surveillants dans File pour le maintien de la paix.
Les dernières NOuvelles sont du 25 mai 1847. Le NOuveau gouverneur, M. Lavaud, était arrivé le 21, et avait pris pos
session le lendemain. L’amiral Bruat devait partir le 51 pour la France avec les plus anciens officiers, et six ou huit des fils des principaux chefs qu il emmène dans le but de les faire instruire à Paris.
Abd-el-Kader et Abd-er-Rahman. — On avait répandu le bruit que le gouvernement avait reçu la NOuvelle qu’Abd-el-Kader marchait sur Fez après s’être emparé de Taza. Tazaest une ville de six à huit mille âmes, située à l’extrémité méridiona’e d’un des derniers chaîNOns du Rif;
elle s’élève sur une position assez forte, et elle est entourée d’une vieille muraille moitié moresque, moitié portugaise, flanquée de tours carrées. Ces fortifications tombent en rui
ne de toutes parts. Les rues sont tortueuses et très-étroites; la ville est arrosée par de NOmbreuses fontaines alimentées par des sources venues de la montagne, et dont les eaux vont ensuite fertiliser de vastes jardins. Elle est située à moitié chemin delà frontière algérienne à Fez. LMoniteur
algérien et VEcho d Oran sont venus NOus faire connaître
plus exactement la situation et l’attitude d’Abd-el-Kader. Il s’accrédite qu’après un premier mouvement de retraite, l’exémir s’est de NOuveau porté vers l’ouest et qu’il a été bien accueilli par les habitants de Taza. Toutefois, aucun acte d’hostilité positive ne se serait encore produit. Diverses con
jectures sont permises au sujet de ce mouvement, s’il est réel. L’émir aurait voulu rallier les Béni-Amer transplantés près de Fez, ou châtier une tribu accusée de quelques ten
tatives de vol sur les convois du désert. Enfin il est encore possible que ces prétextes cachent des vues plus ambitieuses auxquelles il faudra, selon toute apparence,_ un certain laps de temps pour se produire, et qui, par conséquent, devront être l’objet de NOtre surveillance politique.
Régence de Tunis. — On se rappelle que le gouvernement français ayant donné au bey de Tunis le bâtiment à vapeur de l’Etat le Dante, la maladresse du pilote tunisien, qui le faisait entrer pour la première fois dans la rade de là Goulette, le jeta sur un bas fonds de la côte, d’où il a été impossible de le relever. NOus appreNOns que le cadeau va être reNOuvelé, et que le gouvernement a envoyé l’ordre de retrancher du service des paquebots-posles le MiNOs, pour être offert au bey, après avoir reçu les changements d’installation néces-aires.
Turquie. — On écrit de ConstantiNOple au Journal des Débats: « Les derniers événements de Rome ont occasionné ici une manifestation en faveur du saint-père. Les Romains et les autres Italiens assez NOmbreux à ConstantiNOple ont fait célébrer, dimanche dernier, une messe suivie d’un Te Deum, pour remercier la Providence divine. Une fouie immense y assistait. Le soir, la promenade publique était il
luminée; des transparents, portant des inscriptions en l’hon
neur du pape, étaient placés dans divers endroits; deux
corps de musiciens exécutaient des symphonies. La foule n’a pas proféré d’autres cris que ceux de vive Pie IX! Tout s’est passé, du reste, avec beaucoup d’ordre et de tranquillité.
« Les dernières NOuvelles de Perse parlaient d’une grave insurrection qui aurait éclaté à Téhéran parmi les troupes campées autour de la ville. Un courrier extraordinaire de M. de Sartiges, qui apporte des NOuvelles du 3 août, a réduit ces bruits à leur juste valeur. Les troupes, qui avaient à rece
voir un arriéré de solde considérable, se sont en effet livrées à de bruyantes réclamations ; on a dès lors jugé prudent de les payer, et tout est rentré dans l’ordre. Tous ces régi
ments devaient d’ailleurs partir prochainement pour faire une expédition dans le Khoraçan.
« Le choléra fait d’assez grands ravages dans la Russie méridionale ; il existe en ce moment à Taganrok, à Maria- NOpolis et à Rostof. On dit que dans cette dernière ville, qui contient à peine 8,000 âmes, il a enlevé 2,000 victimes. »
Royaume Lombardo-Vénitien. — On écrivait de Venise le 26 août : « La ville des doges est dans l attente d’une grande solennité. On se rappelle que c’est ici que se réunit cette année le congrès des naturalistes. Le comte Giovanelli, pré
sident de NOire Société des Naturalistes, a, dit-on, dépensé un million de francs pour les arrangements convenables de son palais, où les séances auront lieu, et il serait.peut-être difficile de trouver dans aucune ville de l’Europe un hôtel meublé avec autant de goût et de luxe.
« Chaque jour voit affluer aux lagunes un NOmbre considérable de savants, d’amateurs et de curieux ; la saison dés vacances dans toutes les universités de l’Europe contribue beaucoup à augmenter le NOmbre des voyageurs. On compte déjà dix mille étrangers arrivés à Venise; on compte aussi parmi eux des ecclésiastiques qui ont dû quitter Rome par suite des derniers événements.»
Les 8, 9 et 10 de ce mois une agitation populaire assez vive s’est produite à Milan.
Royaume ms Deux- Siciles. — Des troubles ont éclaté en Sicile, à Messine, et à lleggio. Des renforts ont été envoyés de Naples, sur ces deux points. Le numéro du 6 sep
tembre du journal officiel présentait ce double mouvement comme comprimé.
Etats, pontificaux. — Le cardinal Ferretti vient de créer à Rome un corps de sergents de ville en uniforme. Cette mesure a produit un bon effet aux yeux de la popula
tion en ce qu’elle ôte à la police locale son caractère secret et inquisileur.
La garde nationale de Romeareçu enfin son organisation. Le Diario publie les NOminations des capitaines adjudantsmajors et des capitaines de compagnie choisis par le pape pour commander cette milice.
A Ancône, le conseil municipal, après avoir voté une adresse au souverain pontife, a offert au gouvernement une somme de 2,000 écus (10,800 fr.) pour aider à l’armement de la garde civique. La chambre de commerce a voté une somme égale; les Israélites, les habitants aisés d’Ancône et le clergé offrent de fournir le reste de la dépense. Trois ci
toyens de la ville sont partis pour mettre ces votes aux pieds de Pie IX, et, si l’offre est acceptée, s’occuper immédiatement de l’achat des armes nécessaires à la milice.
A Bologne, les chefs supérieurs de la garde civique sont NOmmés. Une lettre circulaire de l’archevêque, M. le cardi
nal Opizzoni, invite les curés du diocèse à user de toute leur influence pour maintenir la tranquillité et la bonne intelligence dans la population.
Principauté de Lucques. — A la suije d’un mouvement provoqué par des arrestations arbitraires, le duc de Lucques avait, te 1er septembre, publié une proclamation dans la
quelle il manifestait l’intention d’entrer dans la voiedu pro
grès, et d’adopter les réformes nécessaires au bonheur de son peuple. La création de la garde nationale était anNOn
cée dans cette proclamation comme une chose déjà résolue. Après avoir fait cette concession, il paraît que ie duc se se
rait ravisé, et que, se retirant à Massa, ville située à peu de distance de Lucques et qui appartient au duc de Modène,il aurait déclaré que ces promesses lui ayant été arrachées par la violence, il n’entendait pas les ratifier. Cette déclaration
ne pouvait manquer d’exciter un vif mécontentement. Les Lucquois se sont soulevés; la garde civique s est loimée d’elle-même. Une députation NOmbreuse, ayant a .a tele le marquis de Mazzarosa, qui, dans ces démitrs jours, ava,
rétisné les fonctions de président du conseil d Etat, s est rendue auprès du duc pour l’engager a rentrer dans ses Etats Le duc a répondu à celle démarché par un decret qui instituait une régence dontM. Mazzarosa devait être le pre
sident ; mais le conseil des ministres n a pas voulu le publier et a supplié de NOuveau le prince de revenir. En attendant, l’agitation allait toujours en augmentant. Pour for
cer le duc à rentrer à Lucques, on parlait déjà de saisir ses revenus, ses meubles, et de mettre sous séquestre son palais. Toutes lès populations des environs étaient accourues à Luc
ques et à chaque instant il arrivait de Pise et de Livourne, parle chemin de fer, des centaines d individus. L émotion
était à son comble, quand tout à coup, le a, a une heure de Fanrès-midi, le duc est revenu dans la ville, accompagné du prince héréditaire, et a été accueilli avec de grandes démonstrations de joie. Les manifestations populaires ont con
tinué, le prince y a pris part, et NOus n avons pas appris que cette harmonie, pour etre subite, ait été depuis troubiee
un seul instant. _ „ ,
Grand-duché de Toscane. — Le 5 il y a eu une grande démonstration à Florence, pour lêter la création de la garde
nationale instituée par décret de la veille. Le peuple s est rendu sous les fenêtres du grand-duc pour le remercier. Des troupes de musiciens ont parcouru la ville, qui a été illumi
née le soir. L’enthousiasme était général. On assure aussi qu’à Livourne il devait y avoir une fête-monstre le 8, et qu’un grand banquet serait donné à cette occasion pour célébrer l’institution de la garde civique.
Piémont. — La ville de Gênes a été également le théâtre d’une grande manifestation politique le 8 de ce mois. L’ordre n’y a pas été un moment troublé.
Suisse. — La diète s’est ajournée au 18 octobre. La mi NOrité espérait un terme moins rapproché, et elle ne se dis
simule pas qu’on veut résolument arriver à une solution de l’affaire du Sonderbund.
Angleterre. — lie de Guernesey. — Guernesey est en proie à une violente agitation, par suite de l’intervention ex
traordinaire du gouverneur militaire, le major-général Napier, dans les affaires civiles de File, y compris l’ancien droit d’élire les magistrats appartenant aux états ou corporations. La Guernesey Cornet a raison de dire que tous les habitants devraient faire une adresse à la reine, pour lui repré
senter que la tranquilité de File ne saurait être maintenue tant que le major-général Napier sera à la tête du gouverne
ment. Cette adresse devrait prier respectueusement la reine d’ordonner qu’à l’avenir le gouverneur militaire se retranchât dans ses attributions, sans s’occuper des affaires ci
viles; ou bien si un favoritisme inexplicable le maintient à la tête des affaires de Guernesey, il faut que ses pouvoirs soient limités.
Espagne. — Un décret de la reine a NOmmé sénateur Je général Espartero. Le Daily-News anNOnce que le duc de la Victoire partira de Londres le 28 septembre pour Bruxelles, et que de là il se rendra à Madrid avec sa famille.
Une circulaire du ministre de l’intérieur, qui prouve qu’en Espagne tous les cabinets entendent la liberté et ses droits de la même manière, interdit à tous les journaux de parler des affaires intérieures du palais, de la reine et du roi.
On assure qu’avant son départ pour Barcelone, le général Conchaa reçu l assurance qu’il ne se-aitrien inNOvé quant à la question des cotons, cette pierre de touche de la fidélité ca
talane. 11 paraît que la modification des tarifs est une des premières questions dont s’occupera le NOuveau cabinet.
Paraguay. — On écrit de BueNOs-Ayres, le 6 juin : « M. de Bomplan, le cé èbre compagNOn de voyage de M. de Humboldt, que plusieurs journaux avaient fait mourir der
nièrement, est plein de vie et de santé. Retenu pendant neuf ans au Paraguay par Francia, il obtint vers 1850 la permission de sortir de ce malencontreux pays, uù il avait eu l’im
prudence de s’engager sans autorisation, fut retenu dix-huit
mois encore à la frontière, et enfin, redevenu libre, il se fixa . yis-à-vis de Corrientes, près des confins du Paraguay, où il se trouve encore aujourd’hui. Il vit ainsi depuis dix-sept ans à San-Borja, de l’Uruguay, dans les anciennes missions bré
siliennes. Il a là des intérêts matériels : il possède quelques, terrains, et ses soixante-quinze ans sonnés le rendent plus sédentaire et lui ôtent presque toute idée de retour. Des voyageurs récemment arrivés du Paraguay par le Brésil, un entre autres qui vient de passer plusieurs mois avec lui,, n’ont pu le décider à revenir. Il compte toutefois faire un voyage à Montevideo, assure-t-il, quand la navigation des fleuves sera plus praticable; mais on n’espère pas le revoir de longtemps.
« La personne de qui je tiens ces renseignements est M. de Mersay, qui revientdu Paraguay, où il est entré assez facilement au moment où l’on refusait à M. de Castelnau l’autorisation de pénétrer à la tête de sa mission scientifi
que. Il termine par la Plata un voyage d’exploration dont l’avait chargé M. Villemain, et retournera prochainement en France.
« Le gouvernement du Paraguay espère que le gouvernement français le reconnaîtra quelque jour ; mais il sait bien que cela ne peut arriver que lorsque les affaires de la Plata seront terminées et que la navigation des fleuves sera ou
verte. Du reste, les renseignements que M. de Mersay et plusieurs voyageurs NOus donnent sur cette autre Chine n’ont rien de très-sé luisant. »
Nécrologie. — L’armée vient de perdre une de ses plus glorieuses et plus pures illustrations, le maréchal Oudi- NOt, duc de Reggio, gouverneur des Invalides, auquel NOus
consacrons une NOtice spéciale. — L’armée a encore perdu M. le lieutenant général baron Piquet, mort à Heidelberg, et M. le lieutenant général comte de Fernig, mort à bord d’un paquebot qui le conduisait à Alexandrie, au retour d’un