HISTOIRE DE LA SEMAINE
Cette semaine, au point de vue parlementaire, n’est rien moins que glorieuse et, dans l’histoire de la Chambre actuelle— si tant est qu’on la fasse jamais — elle s’appellera d’un nom médiocrement vénérable; ce sera « la semaine de M. Boland ».
Ou’une petite vilenie, conséquence d’un scandale financier tout ordinaire, soit devenue affaire d’Etat; qu’elle occupe le parlement et remplisse la presse de son bruit malsain; que, par suite d’une dénonciation produite par un accusé dans sa défense, un homme aussi peu immaculé que M. Bo
land devienne un personnage, soit entendu, à son jour et à son heure, par les représentants de la souveraineté nationale; que ses paroles soient recueillies par la sténographie officielle; qu’enfin les ca
prices de son silence deviennent des événements,
cela est si misérable qu’en vérité cela ne s’explique pas, au premier aspect.
Et pourtant, si l’on y veut bien réfléchir, l’explication en est toute naturelle, parfaitement admissible, excusable, acceptable même. Tout ce bruit,
toute cette importance, en effet, ont pour cause première la condition vraiment misérable faite, en France, à ces « souverains » temporaires qu’on appelle les députés.
Pius d’une fois, je vous ai dit les misères des grandeurs électives. Les mendicités électorales dont je vous parlais la semaine dernière — et dont la semaine courante nous a donné de si remarqua
bles exemples — ne sont pas les seules auxquelles soit soumis le député. Quand on n’est pas person
nellement fort riche, la députation, c’est la misère, la misère en habit noir, avec des tentations et des charges. Combien j’en connais de députés pauvres qui, rigides de conscience — au moins dans les premiers temps — ont dû, pour subsister, se réduire à un train de vie dont un commis de magasin ne se contenterait pas !
Cela ne dure pas, il est vrai. Le besoin, toujours si terrible, emprunte aux conditions spéciales de cette situation une force impérieuse à laquelle on ne saurait longtemps résister. On se raidit, d’abord, non sans colère et sans envie, — et c’est là ce qui explique l’espèce de haine farouche que certains députés ressentent et professent contre les finan
ciers et même contre les députés-journalistes qui touchent de riches traitements. Puis... on aug
mente un beau matin le nombre des députés — administrateurs de compagnies financières ou commerciales.
Mais la conscience n’y perd rien, au fond. Et le grand souci de la Chambre c’est de rester honnête, exempte de soupçons, considérée et probe.
Ceux qui se sentent purs sont d’autant plus irrités du reproche de vénalité qu’ils ont en même temps toutes les épines de la vertu et toutes les
éclaboussures de la déconsidération. Les autres, ne se sentant coupables d’aucun acte délictueux, sont
irrités tout autant et peut-être davantage, parce que l’acte répréhensible reproché aux « bolandistes », couvre d’une défaveur, à leurs yeux parfaite
ment injuste, leur participation plus ou moins correcte à des affaires financières.
Aussi gare aux « coupables » si M. Boland se décide à les nommer. Il leur sera d’autant moins pardonné que, ne s’étant pas désignés eux-mêmes, leur silence équivaut à une sorte de confession de culpabilité. Leur exécution sera donc d’autant plus implacable qu’ils l’auront, pour ainsi dire, justifiée d’avance en ne parlant pas, et qu’ils se sont fait eux-mêmes, par leur maladresse, les boucs émissaires de tout le monde.
La morale de cette piètre histoire — qui n’a pas la moindre morale — c’est qu’au fond, ce sont les institutions, les mœurs, la bêtise populaire qui sont les vrais coupables. Les députés sont ce que les font d’un çôté la constitution, de l’autre les élec
teurs. Pour représenter le peuple souverain, nous voulons avoir, tous tant que nous sommes, des hommes parfaits, éminents, irréprochables, de
grands hommes, en un mot ; et nous prenons à tâche d’en faire des pâtiras et des domestiques.
Cette souveraineté, maintenant émiettée en 856 petites parts— 300 sénateurs, 556 députés — cette souveraineté de la nation, tout le monde semble prendre à tâche de l’humilier, de la rapetisser, de la pervertir. Tout député, tout sénateur est un sus
pect, une façon d’ennemi public sur qui tout le monde crie haro. Les colères et les révoltes qui
s’adressaient autrefois aux rois n’étaient ni plus fortes ni aussi malignes; et du moins le roi ne man
quait pas de quelques moyens de défense, tandis que nos souverains d’aujourd’hui, loin de se dé
fendre, contribuent plus que personne à leur propre démolition et s’occupent surtout de se déchirer entre eux.
A ce point de vue, le parlementarisme, depuis deux ans, offre un spectacle peu fait pour édifier. En tout temps la passion politique s’est montrée ardente; mais, du moins, elle avait eu jusqu’à pré
sent dans ses colères un certain decorum et parfois même quelque grandeur.Aujourd’hui, au contraire, à mesure que les colères montent, il semble que la passion s’abaisse et que le niveau des caractères descende.
A cette heure, quand on dit d’un homme politique : « C est une canaille », cela veut dire tout simplement : « Voilà un homme qui ne pense pas comme moi ». L’invective a remplacé l’argument.
On ne se guillotine pas comme en 1793, mais on se déshonore les uns les autres le plus qu’on peut. L’adoucissement des mœurs, produisant la dégénérescence de la passion, finit par aboutir à l’abaissement.
Ce serait décourageant si le mal était sans remède. Mais il dépend du parlement lui-même d’y couper court quand il le voudra. La réforme du régime parlementaire se trouve, par la force des choses, mise à l’ordre du jour; et si ce n’est l’assemblée actuelle, c’est la prochaine — au plus tard — qui la fera.
Car il n’est pas possible - même pour le parlement — que le parlement continue à se traîner dans l’impuissance et la stérilité parce que les membres qui le composent, dévorés par les men
dicités électorales, aux prises avec les exigences de la vie matérielle, sont en même temps chargés de tout faire et hors d’état de fane quoi que ce soit.
Décrets. — M. Sienkievicz est nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République française près l’empereur du Japon, en remplace
ment de M. Tricou. — M. le vice-amiral Peyron est nommé ministre de la marine et des colonies en remplacement de M. Ch. Brun, démissionnaire.
* *
Elections.— Générales pour le renouvellement partiel des conseils généraux. Voici les résultats du scrutin :
Républicains élus,890 Monarchistes élus,404 Ballottages,
151 Total,
1,445
Les républicains gagnent 159 sièges et en perdent 31. Résultat net : 121 sièges gagnés.
*
Inauguration du monument de la Défense de Paris, le 12 août, au rond-point de Courbevoie. M. Waldeck- Rousseau, ministre de l’intérieur, assistait à la cérémo
nie. M. Forest, président du Conseil général de la Seine, a prononcé un discours après lequel les troupes et les sociétés particulières ont défilé devant le monument.
*
* *
Alsace-Lorraine. — Le maréchal de Manteuffel, statthalter d’Alsace-Lorraine, ayant interdit la publica
tion d un journal, qui devait être intitulé : Metz, et dont M. Antoine, député de cette ville, devait prendre la direction, ce dernier lui répond par une lettre très courageuse, en date du 10 août et publiée par la Gazette d’Alsace-Lorraine de Strasbourg.
Dans cette lettre, M. Antoine reproche au maréchal d’aller jusqu’à abuser de la dictature, attendu qu’il n’est autorisé par la loi à recourir aux pouvoirs dictatoriaux qu’au cas où la sécurité publique serait menacée. La lettre se termine ainsi :
« Votre arrêté ne se défendant pas au point de vue légal, il devient évident qu’il constitue un acte de per
sécution personnelle, qui met hors la loi le député de Metz. C’est le dernier mot du Vœ victis! Je ne courbe
rai cependant pas la tête, j’oserai quand même et plus que jamais, en remplissant le mandat que le peuple m’a confié, dire à l’Allemagne entière quelles sont nos aspi
rations, quelles sont nos revendications, et lui dire, aussi, qu’il n’y a rien d’éternel ici-bas ! Et vous, monsieur le maréchal, qui m’avez frappé à la façon de l’In
quisition au moyen-âge, des commissions mixtes sous Napoléon III, rappelez-vous comment l’histoire juge
l’Inquisition. Voyez ce que la France d’aujourd’hui fait des derniers survivants des commissions mixtes. J’espère
que de votre vivant vous assisterez à la revanche du droit sur la force; ce jour-là, je serai vengé de l’arrêté du 4 août. »
*
Grande-Bretagne. — Discours important prononcé par M. Gladstone au banquet annuel du lord-maire, à Mansion-House. Dans ce discours, le premier minis
tre parle de l’incident qui s’est dernièrement produit à Madagascar.
« Le gouvernement a maintenant reçu, a-t-il dit, de plus amples informations. Quand ces nouvelles nous sont parvenues, il nous a été facile de nous convaincre que la question ne contenait rien qui ne pût être résolu par un échange loyal de vues entre les deux gouvernements intéressés, grâce aux sentiments généreux et di
gnes qui, je l’espère, prévaudront toujours entre des nations amies et surtout entre nous et nos illustres voisins d’outre-Manche.
« Les renseignements que nous avons reçus sur cette affaire me permettent de dire que les espérances que nous entretenions sont pleinement confirmées, et je crois raisonnablement et même fermement que rien
dans ces transactions ne viendra troubler la bonne harmonie qui a existé sans interruption entre la France et l’Angleterre depuis un demi-siècle. »
Il est donc aujourd’hui avéré que les faits avancés à la tribune de la Chambre des communes au sujet des rapports de l’amiral Pierre avec le consul anglais à Tamatave sont inexacts.
*
* *
L’insurrection en Espagne. — Le préfet de Badajoz et le général commandant h place sont destitués. — Manifestations séditieuses à Barcelone. Révolte de plu
sieurs autres régiments dans le nord de la Péninsule. Le roi signe un décret suspendant dans toute l’Espagne les garanties constitutionnelles et autorisant la proclamation de l’état de siège dans les provinces où le ministère jugerait convenable de l’établir.
*
Italie. — Consistoire tenu le 8 par le pape au Vatican. Dans ce consistoire sont préconisés dix évêques d’Italie, sept de Portugal, trois d’Espagne, trois d’Au
triche et deux de France : l’archevêque de Bordeaux et l’éiêque de Limoges.
*
Nécrologie. — M. Georges Rhallis, ancien ministre de la justice en Grèce. Il avait occupé dans sa longue carrière les plus hautes charges dans la magistrature et dans l’enseignement. Successivement professeur de droit commercial, doyen de la Faculté de droit et recteur de l’Université, puis président du tribunal d’appel, et président de la Cour de cassation, il occupa en 1841 le mi
nistère de la justice. M. Rhallis était né le 30 avril 1804. Son fils, ministre de la justice dans le cabinet actuel, a récemment donné sa démission.
L’amiral autrichien, baron Wüllerstorf-Urbair, bien connu du monde savant. N’étant qu’enseigne de vais
seau, il fut directeur de l’Observatoire et professeur d’astronomie à l’Académie de marine de Venise. De 1856 à 1858, il dirigea l’expédition de la Novara autour du monde, si féconde en observations scientifiques. De 1865 à 1867, il fut ministre du commerce et se montra partisan zélé du libre échange. Le baron Wüllerstorf- Urbair a publié de nombreux ouvrages sur l’astronomie, la météorologie et l’art naval. Il était né en janvier 1816.
COURRIER DE PARIS
C’est la Semaine de Deauville, comme 011 dît là-bas, et on ne parlerait que de la semaine de Deauville, si l on n’avait la préoccupation des dernières élections. Car toute la France a voté, diman
che dernier ! On ne s’en serait guère aperçu, à dire vrai. Plus on va, plus la machine fonctionne sans qu’on s’en aperçoive. On renouvelle les conseils généraux sans que le pays ait la fièvre et chacun s’inquiétant, en ces sortes d’affaires, de son petit coin et de son petit trou, il s’ensuit que ces batailles électorales ne sont que des querelles de taupinières dont on se préoccupe fort peu en fin de compte. Cela ne regarde que les candidats.
De quoi se préoccupe-t-on vraiment, d’ailleurs, et profondément aujourd’hui ? De fort peu de chose. On inaugure le monument commémoratif de la Défense de Paris, Le temps est superbe. C’est un beau dimanche, avec un gai soleil rayonnant
sous un ciel bleu. Le discours de M. Forest, qui représente le Conseil municipal de Paris, est con
Cette semaine, au point de vue parlementaire, n’est rien moins que glorieuse et, dans l’histoire de la Chambre actuelle— si tant est qu’on la fasse jamais — elle s’appellera d’un nom médiocrement vénérable; ce sera « la semaine de M. Boland ».
Ou’une petite vilenie, conséquence d’un scandale financier tout ordinaire, soit devenue affaire d’Etat; qu’elle occupe le parlement et remplisse la presse de son bruit malsain; que, par suite d’une dénonciation produite par un accusé dans sa défense, un homme aussi peu immaculé que M. Bo
land devienne un personnage, soit entendu, à son jour et à son heure, par les représentants de la souveraineté nationale; que ses paroles soient recueillies par la sténographie officielle; qu’enfin les ca
prices de son silence deviennent des événements,
cela est si misérable qu’en vérité cela ne s’explique pas, au premier aspect.
Et pourtant, si l’on y veut bien réfléchir, l’explication en est toute naturelle, parfaitement admissible, excusable, acceptable même. Tout ce bruit,
toute cette importance, en effet, ont pour cause première la condition vraiment misérable faite, en France, à ces « souverains » temporaires qu’on appelle les députés.
Pius d’une fois, je vous ai dit les misères des grandeurs électives. Les mendicités électorales dont je vous parlais la semaine dernière — et dont la semaine courante nous a donné de si remarqua
bles exemples — ne sont pas les seules auxquelles soit soumis le député. Quand on n’est pas person
nellement fort riche, la députation, c’est la misère, la misère en habit noir, avec des tentations et des charges. Combien j’en connais de députés pauvres qui, rigides de conscience — au moins dans les premiers temps — ont dû, pour subsister, se réduire à un train de vie dont un commis de magasin ne se contenterait pas !
Cela ne dure pas, il est vrai. Le besoin, toujours si terrible, emprunte aux conditions spéciales de cette situation une force impérieuse à laquelle on ne saurait longtemps résister. On se raidit, d’abord, non sans colère et sans envie, — et c’est là ce qui explique l’espèce de haine farouche que certains députés ressentent et professent contre les finan
ciers et même contre les députés-journalistes qui touchent de riches traitements. Puis... on aug
mente un beau matin le nombre des députés — administrateurs de compagnies financières ou commerciales.
Mais la conscience n’y perd rien, au fond. Et le grand souci de la Chambre c’est de rester honnête, exempte de soupçons, considérée et probe.
Ceux qui se sentent purs sont d’autant plus irrités du reproche de vénalité qu’ils ont en même temps toutes les épines de la vertu et toutes les
éclaboussures de la déconsidération. Les autres, ne se sentant coupables d’aucun acte délictueux, sont
irrités tout autant et peut-être davantage, parce que l’acte répréhensible reproché aux « bolandistes », couvre d’une défaveur, à leurs yeux parfaite
ment injuste, leur participation plus ou moins correcte à des affaires financières.
Aussi gare aux « coupables » si M. Boland se décide à les nommer. Il leur sera d’autant moins pardonné que, ne s’étant pas désignés eux-mêmes, leur silence équivaut à une sorte de confession de culpabilité. Leur exécution sera donc d’autant plus implacable qu’ils l’auront, pour ainsi dire, justifiée d’avance en ne parlant pas, et qu’ils se sont fait eux-mêmes, par leur maladresse, les boucs émissaires de tout le monde.
La morale de cette piètre histoire — qui n’a pas la moindre morale — c’est qu’au fond, ce sont les institutions, les mœurs, la bêtise populaire qui sont les vrais coupables. Les députés sont ce que les font d’un çôté la constitution, de l’autre les élec
teurs. Pour représenter le peuple souverain, nous voulons avoir, tous tant que nous sommes, des hommes parfaits, éminents, irréprochables, de
grands hommes, en un mot ; et nous prenons à tâche d’en faire des pâtiras et des domestiques.
Cette souveraineté, maintenant émiettée en 856 petites parts— 300 sénateurs, 556 députés — cette souveraineté de la nation, tout le monde semble prendre à tâche de l’humilier, de la rapetisser, de la pervertir. Tout député, tout sénateur est un sus
pect, une façon d’ennemi public sur qui tout le monde crie haro. Les colères et les révoltes qui
s’adressaient autrefois aux rois n’étaient ni plus fortes ni aussi malignes; et du moins le roi ne man
quait pas de quelques moyens de défense, tandis que nos souverains d’aujourd’hui, loin de se dé
fendre, contribuent plus que personne à leur propre démolition et s’occupent surtout de se déchirer entre eux.
A ce point de vue, le parlementarisme, depuis deux ans, offre un spectacle peu fait pour édifier. En tout temps la passion politique s’est montrée ardente; mais, du moins, elle avait eu jusqu’à pré
sent dans ses colères un certain decorum et parfois même quelque grandeur.Aujourd’hui, au contraire, à mesure que les colères montent, il semble que la passion s’abaisse et que le niveau des caractères descende.
A cette heure, quand on dit d’un homme politique : « C est une canaille », cela veut dire tout simplement : « Voilà un homme qui ne pense pas comme moi ». L’invective a remplacé l’argument.
On ne se guillotine pas comme en 1793, mais on se déshonore les uns les autres le plus qu’on peut. L’adoucissement des mœurs, produisant la dégénérescence de la passion, finit par aboutir à l’abaissement.
Ce serait décourageant si le mal était sans remède. Mais il dépend du parlement lui-même d’y couper court quand il le voudra. La réforme du régime parlementaire se trouve, par la force des choses, mise à l’ordre du jour; et si ce n’est l’assemblée actuelle, c’est la prochaine — au plus tard — qui la fera.
Car il n’est pas possible - même pour le parlement — que le parlement continue à se traîner dans l’impuissance et la stérilité parce que les membres qui le composent, dévorés par les men
dicités électorales, aux prises avec les exigences de la vie matérielle, sont en même temps chargés de tout faire et hors d’état de fane quoi que ce soit.
Décrets. — M. Sienkievicz est nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République française près l’empereur du Japon, en remplace
ment de M. Tricou. — M. le vice-amiral Peyron est nommé ministre de la marine et des colonies en remplacement de M. Ch. Brun, démissionnaire.
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Elections.— Générales pour le renouvellement partiel des conseils généraux. Voici les résultats du scrutin :
Républicains élus,890 Monarchistes élus,404 Ballottages,
151 Total,
1,445
Les républicains gagnent 159 sièges et en perdent 31. Résultat net : 121 sièges gagnés.
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Inauguration du monument de la Défense de Paris, le 12 août, au rond-point de Courbevoie. M. Waldeck- Rousseau, ministre de l’intérieur, assistait à la cérémo
nie. M. Forest, président du Conseil général de la Seine, a prononcé un discours après lequel les troupes et les sociétés particulières ont défilé devant le monument.
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Alsace-Lorraine. — Le maréchal de Manteuffel, statthalter d’Alsace-Lorraine, ayant interdit la publica
tion d un journal, qui devait être intitulé : Metz, et dont M. Antoine, député de cette ville, devait prendre la direction, ce dernier lui répond par une lettre très courageuse, en date du 10 août et publiée par la Gazette d’Alsace-Lorraine de Strasbourg.
Dans cette lettre, M. Antoine reproche au maréchal d’aller jusqu’à abuser de la dictature, attendu qu’il n’est autorisé par la loi à recourir aux pouvoirs dictatoriaux qu’au cas où la sécurité publique serait menacée. La lettre se termine ainsi :
« Votre arrêté ne se défendant pas au point de vue légal, il devient évident qu’il constitue un acte de per
sécution personnelle, qui met hors la loi le député de Metz. C’est le dernier mot du Vœ victis! Je ne courbe
rai cependant pas la tête, j’oserai quand même et plus que jamais, en remplissant le mandat que le peuple m’a confié, dire à l’Allemagne entière quelles sont nos aspi
rations, quelles sont nos revendications, et lui dire, aussi, qu’il n’y a rien d’éternel ici-bas ! Et vous, monsieur le maréchal, qui m’avez frappé à la façon de l’In
quisition au moyen-âge, des commissions mixtes sous Napoléon III, rappelez-vous comment l’histoire juge
l’Inquisition. Voyez ce que la France d’aujourd’hui fait des derniers survivants des commissions mixtes. J’espère
que de votre vivant vous assisterez à la revanche du droit sur la force; ce jour-là, je serai vengé de l’arrêté du 4 août. »
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Grande-Bretagne. — Discours important prononcé par M. Gladstone au banquet annuel du lord-maire, à Mansion-House. Dans ce discours, le premier minis
tre parle de l’incident qui s’est dernièrement produit à Madagascar.
« Le gouvernement a maintenant reçu, a-t-il dit, de plus amples informations. Quand ces nouvelles nous sont parvenues, il nous a été facile de nous convaincre que la question ne contenait rien qui ne pût être résolu par un échange loyal de vues entre les deux gouvernements intéressés, grâce aux sentiments généreux et di
gnes qui, je l’espère, prévaudront toujours entre des nations amies et surtout entre nous et nos illustres voisins d’outre-Manche.
« Les renseignements que nous avons reçus sur cette affaire me permettent de dire que les espérances que nous entretenions sont pleinement confirmées, et je crois raisonnablement et même fermement que rien
dans ces transactions ne viendra troubler la bonne harmonie qui a existé sans interruption entre la France et l’Angleterre depuis un demi-siècle. »
Il est donc aujourd’hui avéré que les faits avancés à la tribune de la Chambre des communes au sujet des rapports de l’amiral Pierre avec le consul anglais à Tamatave sont inexacts.
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L’insurrection en Espagne. — Le préfet de Badajoz et le général commandant h place sont destitués. — Manifestations séditieuses à Barcelone. Révolte de plu
sieurs autres régiments dans le nord de la Péninsule. Le roi signe un décret suspendant dans toute l’Espagne les garanties constitutionnelles et autorisant la proclamation de l’état de siège dans les provinces où le ministère jugerait convenable de l’établir.
*
Italie. — Consistoire tenu le 8 par le pape au Vatican. Dans ce consistoire sont préconisés dix évêques d’Italie, sept de Portugal, trois d’Espagne, trois d’Au
triche et deux de France : l’archevêque de Bordeaux et l’éiêque de Limoges.
*
Nécrologie. — M. Georges Rhallis, ancien ministre de la justice en Grèce. Il avait occupé dans sa longue carrière les plus hautes charges dans la magistrature et dans l’enseignement. Successivement professeur de droit commercial, doyen de la Faculté de droit et recteur de l’Université, puis président du tribunal d’appel, et président de la Cour de cassation, il occupa en 1841 le mi
nistère de la justice. M. Rhallis était né le 30 avril 1804. Son fils, ministre de la justice dans le cabinet actuel, a récemment donné sa démission.
L’amiral autrichien, baron Wüllerstorf-Urbair, bien connu du monde savant. N’étant qu’enseigne de vais
seau, il fut directeur de l’Observatoire et professeur d’astronomie à l’Académie de marine de Venise. De 1856 à 1858, il dirigea l’expédition de la Novara autour du monde, si féconde en observations scientifiques. De 1865 à 1867, il fut ministre du commerce et se montra partisan zélé du libre échange. Le baron Wüllerstorf- Urbair a publié de nombreux ouvrages sur l’astronomie, la météorologie et l’art naval. Il était né en janvier 1816.
COURRIER DE PARIS
C’est la Semaine de Deauville, comme 011 dît là-bas, et on ne parlerait que de la semaine de Deauville, si l on n’avait la préoccupation des dernières élections. Car toute la France a voté, diman
che dernier ! On ne s’en serait guère aperçu, à dire vrai. Plus on va, plus la machine fonctionne sans qu’on s’en aperçoive. On renouvelle les conseils généraux sans que le pays ait la fièvre et chacun s’inquiétant, en ces sortes d’affaires, de son petit coin et de son petit trou, il s’ensuit que ces batailles électorales ne sont que des querelles de taupinières dont on se préoccupe fort peu en fin de compte. Cela ne regarde que les candidats.
De quoi se préoccupe-t-on vraiment, d’ailleurs, et profondément aujourd’hui ? De fort peu de chose. On inaugure le monument commémoratif de la Défense de Paris, Le temps est superbe. C’est un beau dimanche, avec un gai soleil rayonnant
sous un ciel bleu. Le discours de M. Forest, qui représente le Conseil municipal de Paris, est con