BRESSANT
Nom cher à l’art, à l’élégance, Qu’on cita bientôt en tout lieu,
Comme on cita jadis en Frànce Le nom du jeune Richelieu.
Nom qui se fit vite une place
Sur notre scène, en moius d’un an Entre Moncade et Lovelace, Entre Tartuffe et Don Juan.
Le nom de Dressant ! Broderie Echappée à la Pompadour ! Nom composé d’étourderie,
De verve gauloise et d’amour! (1)
Le si charmant comédien qui vient de succomber était né à Châlon-sur- Saône. Ses débuts eurent lieu aux Va
riétés, en 1833, dans les Amours de Paris. Il avait dix-huit ans. Après s’être fait remarquer dans la Comtesse d’Egmont, dans le Marquis de Burnoy,
dans Kean, il alla en Russie, où il fut adoré et l été de tous. Son engagement au Gymnase date de 1846, et la pre
mière pièce qu’il joua, à ce théâtre, fut Georges et Maurice.
On le vit ensuite dans Clarisse Harlowe, dans le Collier de Perles, dans Manon Lescaut, dans le Mariage de Victorine, dans le Piano de Berthe, dans le Fils de Famille, dans Philiberte, dans le Pressoir, dans Diane de Lys.
Dressant entra à la Comédie-Française avec le titre de sociétaire et y débuta le G février 1851, par le rôle de Clitandrede VEcole des Fouines.Parmi
les œuvres reprises et dans lesquelles il réussit brillamment, il faut citer : le Verre d’eau, Mademoiselle de Belle- Isle, le Gendre de M. Poirier, le Jeune Mari, VAventurière, Don Juan, etc.
Dans les ouvrages nouveaux, ses plus importantes créations furent :
Un Jeune Homme qui ne fait rien, le Lion amoureux, Madame Desroches, le Baiser anonyme, Hernani, où, sous les traits de Don Carlos, il fut remarquable.
Que d’anecdotes, que de souvenirs nous pourrions rappeler, que nous ne
voulons pas évoquer, sous le poids du chagrin où nous sommes, nous qui l’avons connu et aimé.
Le portrait que nous donnons de lui est de M. Geffroy, un vieux camarade de la Comédie-Française, qui, on le sait, est un peintre distingué. L’émi
nent comédien avait quatre-vingts ans lorsqu’il a peint cette toile remarquable, d’une ressemblance absolue et d’un grand caractère; c est certainement une des meilleures qu’il ait signées.
La dernière fois que nous visitâmes notre pauvre ami, c’était à Nemours,
dans la petite maison que sa digne compagne avait su lui rendre si agréable.
En le voyant, ce jour-là, superbe, robuste, malgré l horrible paralysie qui le réduisait à l immobilité, en complète possession de sa mémoire, de son esprit, de toutes ses facultés intellectuelles, nous étions loin de nous attendre à un dénouement si soudain.
H. Roger de Beauvoir.
BRESSANT
D’après une peinture de M. Gettroy.
LES MINES DE DECAZEVILLE — LA FENDUE
(1) ftoger de Beauvoir père.