SOMMAIRE.
Te.vle : Histoire de la semaine. — Courrier de Paris, par M. Philibert Audebrand — Iliyotoko, nouvelle japonaise, par M. Peyremal (suite). — Nos gravures : La proclamation de don Alphonse; — Inauguration du nouvel Opéra : le cortège du lord-maire; — La salle du nouvel Opéra; — L incendie du Cospatrick; — M. Pierre Larousse; — La conscription des chevaux; — M. Emile Pereire; — M. des Ambrois; — La dé
bâcle de la.Saône, à Lyon. — Anciennes coutumes populaires:
la fête aux harengs. — Bu.lotin bibliographique. — Revue iinancière de la semaine. — Faits divers.
Gravures : La nouvelle royauté espagnole : arrivée à l’hôtel Basilewski de la dépêche officielle annonçant la proclamation de don Alphonse. — Inauguration du nouvel Opéra : le cortège du lord-maire. — L’incendie du Cospatrick: aspect du canot du Cospatrick, le jour où il fut rencontré par le British- Sceplre. — La salle du nouvel Opéra. — L’incendie du Cos.patrick. — M. Pierre Larousse. — La conscription des che
vaux destinés au service de l’armée territoriale. - M. Emile Péreirc. — M. des Ambrois. — La débâcle de la Saône, à Lyon. — Echecs. — Rébus.
FRANCE
Si les conférences de l’Elysée, qui ont précédé la rentrée de la Chambre, n’ont, point abouti à une entente entre les partis sur le chapitre des lois constitu
tionnelles, elles ont du moins servi à mettre en lumière la pensée intime de M. le maréchal de Mac- Mahon, qui ne les avait provoquées que pour son édification.
Son message sur ce point ne peut plus laisser planer l’ombre d’un dotite.
Il a pris parti pour le centre droit et la droite modérée contre le centre gauche, en ne se préoccupant que de la loi sur le Sénat et en déclarant que, suivant lui, la transmission des pouvoirs, à l’échéance du 20 novembre 1880, « devrait être réglée de manière à laisser aux assemblées qui seront alors en exercice la liberté pleine et entière de déterminer la forme du
gouvernement de la France », et que cette condition lui paraissait «indispensable pour assurer jusqu’à ce terme le concours de tous les partis modérés à l’œuvre de réparation nationale » qu’il est chargé de poursuivre. C’est ce qui ajoute à la gravité de la crise mi
nistérielle qui a éclaté à la suite du vote du 5 janvier, et dure encore. Nous espérions sortir enfin d’une impasse, et nous y voilà plus renfermés que jamais, ré
duits à tourner comme auparavant sur l’étroit terrain de la loi du 20 novembre, en attendant le plus redoutable des inconnus.
En effet, il semble peu probable maintenant que les lois constitutionnelles aboutissent. Cela ne pouvait arriver que sur le terrain du centre gauche, avec le
quel il ne semblait pas impossible, en détachant quel
ques voix seulement du centre droit, d’arriver à former une majorité gouvernementale. En dehors de ce ter
rain, nous ne voyons plus de majorité possible que celle du 24 mai, et, qui l’eût cru, il y a huit jours seulement? A l’heure actuelle, il ne paraît pas invrai
semblable que l’on y revienne. Disons mieux : on est déjà en train d’y revenir. MM. de Larcy, Dufaure et d’Audiffret-Pasquier, tour à tour appelés auprès de M. le président de la République, ont successivement décliné l’offre de composer un ministère, déclarant
que, dans l’état actuel des choses, il n’y avait pas à la Chambre de majorité possible. M. de Broglie lui
înême, appelé ensuite, a refusé également de former un cabinet avant que l’Assemblée ait statué sur les lois constitutionnelles, qui sont, comme on voit, la grande pierre d’achoppement de loute combinaison ministérielle. La question de ces lois doit donc être tranchée avant tout, et comme elle ne peut l’être affir
mativement sans une alliance fort douteuse aujour
d’hui du centre droit et du centre gauche, tout porte à croire que, malgré le péril qui en peut résulter, elle le sera négativement, ce qui paraît devoir ramener en même temps dans -les droites l’union et la majorité.
Au reste, nous verrons bien, et bientôt.
L’Assemblée doit, en effet, se prononcer sur cet important sujet immédiatement après la deuxième délibération de la loi sur les cadres, c’est-à dire dans le courant de celte semaine; et, par suite du vote du 5, c’est sur le projet de M. de Ventavon que la discus
sion doit s’engager. Nous avons, dans le temps, dit un mot de ce projet, et nous ne croyons pas inutile
d’en mettre aujourd’hui le texte sous les yeux de nos lecteurs.
Le voici donc :
Art. 1er. — Le maréchal de Mac-Mahon, président de la République, continue à exercer avec ce titre le
pouvoir exécutif dont il est investi parla loi du 20 novembre 1873.
Art. 2. — Il n’est responsable que dans le cas de haute trahison. Les ministres sont solidairement res
ponsables, devant les Chambres, de la politique générale du gouvernement, et, individuellement, de leurs actes personnels.
Art. 3. — Le pouvoir législatif s’exerce par deux Assemblées : la Chambre des députés et le Sénat.
La Chambre des députés est nommée par le suffrage universel, dans les conditions déterminées par la loi électorale. Le Sénat se compose de membres élus ou
nommés dans les proportions et aux conditions qui seront réglées par une loi spéciale.
Art. 4. — Le maréchal président de la République est investi du droit de dissoudre la Chambre des députés. Il sera procédé, en ce cas, à l’élec
tion d’une nouvelle Chambre dans le délai de six mois.
Art. 5.—A l’expiration du terme fixé par la loi du 20 novembre 1873, comme en cas de vacances du pouvoir présidentiel, le conseil des ministres con
voque immédiatement les deux Assemblées qui,
réunies en congrès, statuent sur les résolutions à prendre. Pendant la durée des pouvoirs confiés au maréchal de Mac-Mahon, la révision des lois constitutionnelles ne peut être faite que sur sa proposition.
Et maintenant, attendons l’événement.
Grâce à l’agitation provoquée par ia crise ministérielle, les travaux de l Assemblée, durant la semaine qui vient de s’écouler, ne pouvaient, on le compren
dra, être bien suivis. Le 8, la Chambre s est occupée des pétitions, dont trois relatives à l’observance du repos du dimanche. Non pas qu’on ait discuté au fond la question du repos dominical obligatoire, mais il s’agissait de décider si l’on passerait sur ces trois pétitions à l’ordre du jour pur et simple ainsi que le désirait la gauche, ou si les pétillons seraient ren
voyées au ministre compétent, conformément aux conclusions du rapporteur. Sur ie premier point, une majorité formée des droites et du centre droit a vo é contre l’ordre du jour. Puis on est tombé d’accord
pour que les pétitions fussent renvoyées au ministre des travaux publics, chargé de faire observer la loi en ce qui regarde les ouvriers employés par l’Etat. M. Caiilaux a donné sur ce,point des assurances formelles, tout en indiquant qu’il n’était nullement ques
tion de faire une loi nouvelle, mais, seulement de veiller à l’application mesurée et pratique d’une an
cienne loi plus ou moins tombée en désuétude. C’est dans ces conditions et sous le bénéfice de ces observations que le renvoi des trois pétitions a été prononcé.
Le lendemain, 9, il n’v a pas eu de séance. Enfin, lundi, l’ordre du jour appelait la deuxième délibéra
tion sur le projet de loi relatif à la constitution des cadres et des effectifs de l’armée de terre et de l’armée territoriale. On sait que ce projet met en pré
sence des opinions et des idées fort contradictoires.
La commission de l’armée, comme nous avons déjà eu occasion de le dire, a pris parti pour la composi
tion du bataillon à quatre compagnies. De son côté le ministre de la guerre n’a pas mis moins d’énergie à combattre cette réforme. Toutefois, comme de part et d’autre on a un sentiment très-vif des nécessités de la situation générale, et que l’on est disposé à toutes les concessions susceptibles d’activer l’importante dis
cussion qui vient de commencer et sur laquelle nous reviendrons, il y a lieu d’espérer qu’elle ne se prolon
gera pas outre mesure, et qu’elle aboutira à un accord définitif entre le ministre de la guerre cl la commission.
Disons, pour en finir, que Ton vient de distribuer aux députés le projet de loi relatif à la réforme judi
ciaire en Egypte, dont nous parlions dernièrement. Ce projet a pour but de restreindre provisoirement, du
rant cinq années, les pouvoirs de juridiction exercés par les consuls français en Egypte, afin de faciliter i’essai d’une réforme des institutions judiciaires dans ce pays. Après celte période de cinq années, si l’expérience n’a pas confirmé Futilité pratique de la réforme résultant de la convention signée le 10 novem
bre 1874 par Chérif-paeha, ministre de la justice du vice-roi et M. de Cazeaux, agent et consul général de France, il sera loisible aux deux puissances contrac
tantes soit de revenir à l’ancien état de choses, soit d’aviser, d’accord avec l’administration égyptienne, à d’autres combinaisons.
ESPAGNE
Le nouveau roi a mis le pied, le 9, sur le territoire espagnol» Il était parti de Paris le 0, et, le 8, de Mar
seille. Il a débarqué à Barcelone, et s’ost mis en route le lendemain pour Valence et Madrid. On peut
dire qu’il a maintenant pris possession de son royaume. L’accueil qu’il a reçu à Barcelone, où Prim avait fait, il y a quelques années, son célèbre pronunciamento,
paraît avoir été des plus sympathiques, ce qui tend à prouver, comme le fait justement remarquer le Moni
teur universel, que la lassitude de la situation était générale au moment où l’armée espagnole s’est prononcée contre le maréchal Serrano. Aucune protestation n’a été signalée, en effet, jusqu’ici, et si le nou
veau gouvernement a la bonne fortune de pouvoir mettre fin, dans un délai très-rapproché, à l’insurrection carliste, nul doute qu’il ne se consolide avec autant de facilité qu’il s’est établi.
ITALIE
Le pape a adressé à tous les évêques une encyclique annonçant un jubilé pour 1875. Le Saint-Père dit qu’il a toujours engagé le peuple chrétien à apai
ser Dieu par des prières et par de bonnes œuvres ; mais qu’il convient surtout de prier dans l’année des
tinée a la célébration du jubilé, selon l’habitude de nos ancêtres.
S. S. rappelle avec quelle vénération il était célébré dans les temps tranquilles, et regrette vivement que,
par suite des circonstances, il n’ait pu l’être en 1850. Aussi croit-elle nécessaire de procurer aujourd’hui cette grâce aux fidèles. Elle énumère ensuite les in
dulgences attachées au jubilé, les conditions requises pour les gagner, et invite finalement l’épiscopat à préparer les fidèles à en recueillir les fruits.
« On m étouffe sous des roses ! » s’é criait un vieux poète à ia première représenta
tion d’une pièce où les acclamations du parterre
l’avaient, amené de force sur le théâtre. Il parait que le lord-maire aurait dit quelque chose de
semblable. « Ces Parisiens ! ils me tueront à force de bons dîners ! » Sa Seigneurie, toujours accom
pagnée de lady mayoress, n’a pu réussira avoir un jour de liberté. Le digne Anglais éprouvait le désir bien concevable de visiter Paris un peu en détail ; on ne lui a fait voir que des salles à man
ger. Si l’on en excepte le nouvel Opéra et une promenade à travers les égouts, notre hôte n’a pu trouver assez de loisir pour faire de station nulle part. Ça été impossible tant les invitations ont serré le noble étranger à la cravate. Ainsi lady mayoress et lui ont dû repasser le détroit après avoir rassassié beaucoup plus leur ventre que leurs yeux.
S’il lit David Hume, il y verra que, dans le temps où le brillant-Buckingham était énvové en ambassade auprès d’Anne d’Autriche, c’était un autre Paris. On ne s’y mettait pas si souvent à table, on y dansait le malin, on y dansait à midi,
on y dansait le soir. En dansant, on récitait des vers ou des compliments ; Buckingham était bien fait pour ces mœurs galantes. Mais la civilisation moderne nous a inculqué d’autres allures. On mange, on fait manger; il faut qu’on ne sorte de notre pays que la bouche pleine. Le lord-maire est donc rentré à Londres charmé de l’accueil qui lui a été fait et pesant 3 kilogrammes de plus.
Cependant ne dissimulons rien, puisque la mode est maintenant de tout dire. Le très-ho
norable M. Stone et sa digne épouse ont éprouvé une déconvenue. Figurez-vous qu’à peine dé
barqués à Calais, on avait vivement aiguillonné leur curiosité en leur faisant la plus séduisante des promesses. « A l’ouverture de l’Opéra, vous » entendrez Christine Nilsson dans un rôle tiré » de Shakespeare. » Le lendemain, le lordmaire, en compagnie de sa femme, arrivait en voiture de gala par la rue de la Paix au splendide édifice. Ce qui tenait son attention en éveil, ce n’était pas le spectacle des boulevards illumi
nés ; ce n’était pas non plus son propre cortège moyen âge de quatre hérauts sonnant de la trom
pette. Ces hérauts, vêtus de rouge et coiffés, d’une toque noire, à peu près comme les quatre valets
Te.vle : Histoire de la semaine. — Courrier de Paris, par M. Philibert Audebrand — Iliyotoko, nouvelle japonaise, par M. Peyremal (suite). — Nos gravures : La proclamation de don Alphonse; — Inauguration du nouvel Opéra : le cortège du lord-maire; — La salle du nouvel Opéra; — L incendie du Cospatrick; — M. Pierre Larousse; — La conscription des chevaux; — M. Emile Pereire; — M. des Ambrois; — La dé
bâcle de la.Saône, à Lyon. — Anciennes coutumes populaires:
la fête aux harengs. — Bu.lotin bibliographique. — Revue iinancière de la semaine. — Faits divers.
Gravures : La nouvelle royauté espagnole : arrivée à l’hôtel Basilewski de la dépêche officielle annonçant la proclamation de don Alphonse. — Inauguration du nouvel Opéra : le cortège du lord-maire. — L’incendie du Cospatrick: aspect du canot du Cospatrick, le jour où il fut rencontré par le British- Sceplre. — La salle du nouvel Opéra. — L’incendie du Cos.patrick. — M. Pierre Larousse. — La conscription des che
vaux destinés au service de l’armée territoriale. - M. Emile Péreirc. — M. des Ambrois. — La débâcle de la Saône, à Lyon. — Echecs. — Rébus.
HISTOIRE DE LÀ SEMAINE
FRANCE
Si les conférences de l’Elysée, qui ont précédé la rentrée de la Chambre, n’ont, point abouti à une entente entre les partis sur le chapitre des lois constitu
tionnelles, elles ont du moins servi à mettre en lumière la pensée intime de M. le maréchal de Mac- Mahon, qui ne les avait provoquées que pour son édification.
Son message sur ce point ne peut plus laisser planer l’ombre d’un dotite.
Il a pris parti pour le centre droit et la droite modérée contre le centre gauche, en ne se préoccupant que de la loi sur le Sénat et en déclarant que, suivant lui, la transmission des pouvoirs, à l’échéance du 20 novembre 1880, « devrait être réglée de manière à laisser aux assemblées qui seront alors en exercice la liberté pleine et entière de déterminer la forme du
gouvernement de la France », et que cette condition lui paraissait «indispensable pour assurer jusqu’à ce terme le concours de tous les partis modérés à l’œuvre de réparation nationale » qu’il est chargé de poursuivre. C’est ce qui ajoute à la gravité de la crise mi
nistérielle qui a éclaté à la suite du vote du 5 janvier, et dure encore. Nous espérions sortir enfin d’une impasse, et nous y voilà plus renfermés que jamais, ré
duits à tourner comme auparavant sur l’étroit terrain de la loi du 20 novembre, en attendant le plus redoutable des inconnus.
En effet, il semble peu probable maintenant que les lois constitutionnelles aboutissent. Cela ne pouvait arriver que sur le terrain du centre gauche, avec le
quel il ne semblait pas impossible, en détachant quel
ques voix seulement du centre droit, d’arriver à former une majorité gouvernementale. En dehors de ce ter
rain, nous ne voyons plus de majorité possible que celle du 24 mai, et, qui l’eût cru, il y a huit jours seulement? A l’heure actuelle, il ne paraît pas invrai
semblable que l’on y revienne. Disons mieux : on est déjà en train d’y revenir. MM. de Larcy, Dufaure et d’Audiffret-Pasquier, tour à tour appelés auprès de M. le président de la République, ont successivement décliné l’offre de composer un ministère, déclarant
que, dans l’état actuel des choses, il n’y avait pas à la Chambre de majorité possible. M. de Broglie lui
înême, appelé ensuite, a refusé également de former un cabinet avant que l’Assemblée ait statué sur les lois constitutionnelles, qui sont, comme on voit, la grande pierre d’achoppement de loute combinaison ministérielle. La question de ces lois doit donc être tranchée avant tout, et comme elle ne peut l’être affir
mativement sans une alliance fort douteuse aujour
d’hui du centre droit et du centre gauche, tout porte à croire que, malgré le péril qui en peut résulter, elle le sera négativement, ce qui paraît devoir ramener en même temps dans -les droites l’union et la majorité.
Au reste, nous verrons bien, et bientôt.
L’Assemblée doit, en effet, se prononcer sur cet important sujet immédiatement après la deuxième délibération de la loi sur les cadres, c’est-à dire dans le courant de celte semaine; et, par suite du vote du 5, c’est sur le projet de M. de Ventavon que la discus
sion doit s’engager. Nous avons, dans le temps, dit un mot de ce projet, et nous ne croyons pas inutile
d’en mettre aujourd’hui le texte sous les yeux de nos lecteurs.
Le voici donc :
Art. 1er. — Le maréchal de Mac-Mahon, président de la République, continue à exercer avec ce titre le
pouvoir exécutif dont il est investi parla loi du 20 novembre 1873.
Art. 2. — Il n’est responsable que dans le cas de haute trahison. Les ministres sont solidairement res
ponsables, devant les Chambres, de la politique générale du gouvernement, et, individuellement, de leurs actes personnels.
Art. 3. — Le pouvoir législatif s’exerce par deux Assemblées : la Chambre des députés et le Sénat.
La Chambre des députés est nommée par le suffrage universel, dans les conditions déterminées par la loi électorale. Le Sénat se compose de membres élus ou
nommés dans les proportions et aux conditions qui seront réglées par une loi spéciale.
Art. 4. — Le maréchal président de la République est investi du droit de dissoudre la Chambre des députés. Il sera procédé, en ce cas, à l’élec
tion d’une nouvelle Chambre dans le délai de six mois.
Art. 5.—A l’expiration du terme fixé par la loi du 20 novembre 1873, comme en cas de vacances du pouvoir présidentiel, le conseil des ministres con
voque immédiatement les deux Assemblées qui,
réunies en congrès, statuent sur les résolutions à prendre. Pendant la durée des pouvoirs confiés au maréchal de Mac-Mahon, la révision des lois constitutionnelles ne peut être faite que sur sa proposition.
Et maintenant, attendons l’événement.
Grâce à l’agitation provoquée par ia crise ministérielle, les travaux de l Assemblée, durant la semaine qui vient de s’écouler, ne pouvaient, on le compren
dra, être bien suivis. Le 8, la Chambre s est occupée des pétitions, dont trois relatives à l’observance du repos du dimanche. Non pas qu’on ait discuté au fond la question du repos dominical obligatoire, mais il s’agissait de décider si l’on passerait sur ces trois pétitions à l’ordre du jour pur et simple ainsi que le désirait la gauche, ou si les pétillons seraient ren
voyées au ministre compétent, conformément aux conclusions du rapporteur. Sur ie premier point, une majorité formée des droites et du centre droit a vo é contre l’ordre du jour. Puis on est tombé d’accord
pour que les pétitions fussent renvoyées au ministre des travaux publics, chargé de faire observer la loi en ce qui regarde les ouvriers employés par l’Etat. M. Caiilaux a donné sur ce,point des assurances formelles, tout en indiquant qu’il n’était nullement ques
tion de faire une loi nouvelle, mais, seulement de veiller à l’application mesurée et pratique d’une an
cienne loi plus ou moins tombée en désuétude. C’est dans ces conditions et sous le bénéfice de ces observations que le renvoi des trois pétitions a été prononcé.
Le lendemain, 9, il n’v a pas eu de séance. Enfin, lundi, l’ordre du jour appelait la deuxième délibéra
tion sur le projet de loi relatif à la constitution des cadres et des effectifs de l’armée de terre et de l’armée territoriale. On sait que ce projet met en pré
sence des opinions et des idées fort contradictoires.
La commission de l’armée, comme nous avons déjà eu occasion de le dire, a pris parti pour la composi
tion du bataillon à quatre compagnies. De son côté le ministre de la guerre n’a pas mis moins d’énergie à combattre cette réforme. Toutefois, comme de part et d’autre on a un sentiment très-vif des nécessités de la situation générale, et que l’on est disposé à toutes les concessions susceptibles d’activer l’importante dis
cussion qui vient de commencer et sur laquelle nous reviendrons, il y a lieu d’espérer qu’elle ne se prolon
gera pas outre mesure, et qu’elle aboutira à un accord définitif entre le ministre de la guerre cl la commission.
Disons, pour en finir, que Ton vient de distribuer aux députés le projet de loi relatif à la réforme judi
ciaire en Egypte, dont nous parlions dernièrement. Ce projet a pour but de restreindre provisoirement, du
rant cinq années, les pouvoirs de juridiction exercés par les consuls français en Egypte, afin de faciliter i’essai d’une réforme des institutions judiciaires dans ce pays. Après celte période de cinq années, si l’expérience n’a pas confirmé Futilité pratique de la réforme résultant de la convention signée le 10 novem
bre 1874 par Chérif-paeha, ministre de la justice du vice-roi et M. de Cazeaux, agent et consul général de France, il sera loisible aux deux puissances contrac
tantes soit de revenir à l’ancien état de choses, soit d’aviser, d’accord avec l’administration égyptienne, à d’autres combinaisons.
ESPAGNE
Le nouveau roi a mis le pied, le 9, sur le territoire espagnol» Il était parti de Paris le 0, et, le 8, de Mar
seille. Il a débarqué à Barcelone, et s’ost mis en route le lendemain pour Valence et Madrid. On peut
dire qu’il a maintenant pris possession de son royaume. L’accueil qu’il a reçu à Barcelone, où Prim avait fait, il y a quelques années, son célèbre pronunciamento,
paraît avoir été des plus sympathiques, ce qui tend à prouver, comme le fait justement remarquer le Moni
teur universel, que la lassitude de la situation était générale au moment où l’armée espagnole s’est prononcée contre le maréchal Serrano. Aucune protestation n’a été signalée, en effet, jusqu’ici, et si le nou
veau gouvernement a la bonne fortune de pouvoir mettre fin, dans un délai très-rapproché, à l’insurrection carliste, nul doute qu’il ne se consolide avec autant de facilité qu’il s’est établi.
ITALIE
Le pape a adressé à tous les évêques une encyclique annonçant un jubilé pour 1875. Le Saint-Père dit qu’il a toujours engagé le peuple chrétien à apai
ser Dieu par des prières et par de bonnes œuvres ; mais qu’il convient surtout de prier dans l’année des
tinée a la célébration du jubilé, selon l’habitude de nos ancêtres.
S. S. rappelle avec quelle vénération il était célébré dans les temps tranquilles, et regrette vivement que,
par suite des circonstances, il n’ait pu l’être en 1850. Aussi croit-elle nécessaire de procurer aujourd’hui cette grâce aux fidèles. Elle énumère ensuite les in
dulgences attachées au jubilé, les conditions requises pour les gagner, et invite finalement l’épiscopat à préparer les fidèles à en recueillir les fruits.
« On m étouffe sous des roses ! » s’é criait un vieux poète à ia première représenta
tion d’une pièce où les acclamations du parterre
l’avaient, amené de force sur le théâtre. Il parait que le lord-maire aurait dit quelque chose de
semblable. « Ces Parisiens ! ils me tueront à force de bons dîners ! » Sa Seigneurie, toujours accom
pagnée de lady mayoress, n’a pu réussira avoir un jour de liberté. Le digne Anglais éprouvait le désir bien concevable de visiter Paris un peu en détail ; on ne lui a fait voir que des salles à man
ger. Si l’on en excepte le nouvel Opéra et une promenade à travers les égouts, notre hôte n’a pu trouver assez de loisir pour faire de station nulle part. Ça été impossible tant les invitations ont serré le noble étranger à la cravate. Ainsi lady mayoress et lui ont dû repasser le détroit après avoir rassassié beaucoup plus leur ventre que leurs yeux.
S’il lit David Hume, il y verra que, dans le temps où le brillant-Buckingham était énvové en ambassade auprès d’Anne d’Autriche, c’était un autre Paris. On ne s’y mettait pas si souvent à table, on y dansait le malin, on y dansait à midi,
on y dansait le soir. En dansant, on récitait des vers ou des compliments ; Buckingham était bien fait pour ces mœurs galantes. Mais la civilisation moderne nous a inculqué d’autres allures. On mange, on fait manger; il faut qu’on ne sorte de notre pays que la bouche pleine. Le lord-maire est donc rentré à Londres charmé de l’accueil qui lui a été fait et pesant 3 kilogrammes de plus.
Cependant ne dissimulons rien, puisque la mode est maintenant de tout dire. Le très-ho
norable M. Stone et sa digne épouse ont éprouvé une déconvenue. Figurez-vous qu’à peine dé
barqués à Calais, on avait vivement aiguillonné leur curiosité en leur faisant la plus séduisante des promesses. « A l’ouverture de l’Opéra, vous » entendrez Christine Nilsson dans un rôle tiré » de Shakespeare. » Le lendemain, le lordmaire, en compagnie de sa femme, arrivait en voiture de gala par la rue de la Paix au splendide édifice. Ce qui tenait son attention en éveil, ce n’était pas le spectacle des boulevards illumi
nés ; ce n’était pas non plus son propre cortège moyen âge de quatre hérauts sonnant de la trom
pette. Ces hérauts, vêtus de rouge et coiffés, d’une toque noire, à peu près comme les quatre valets