SOMMAIRE.
Texte : His .oire de la s,cinaine. — Courrier de Paris, par M. Philibert Audebrand - M. Wallon. — Le procès Wimpffen et
l’ouvrage de M. de Moltkc. — Hiyotoko, nouvelle japonaise, par M. Peyremal (suite). — Nos gravures : L’attelage russe; — Les acrobates japonais ; — Le bal de l’Opéra; —Mariage de la princesse Louise de Belgique; — La vérification des poids et mesures; - La conscription des chevaux; — Le Concours agricole; — Le nouveau télescope de l’Observatoire de Paris.
— Revue financière de la semaine. — La brique à conjonction de M. Pavy.
Gravures : L attelage russe, d après le tableau de M. SwertschkoAv. — Les acrobates japonais aux Folies-Bergère.
— M. Wallon, député du Nord à l’Assemblée nationale. — Le grand bal de bienfaisance au nouvel Opéra: l’orchestre;
— Vue prise de la scène. — Mariage de la princesse Louise de Belgique et du prince Philippe de Saxe-Cobourg-Gotha : célébration du mariage civil dans le salon bleu du palais du roi, à Bruxelles. — La vérification des poids et mesures. —
Paris : la conscription des chevaux à l’Ecole militaire. — Le grand télescope de l’Observatoire : polissage du miroir ; — Socle destiné à recevoir l’instrument. — Le Concours agricole de 1875 : exposition des machines; — Exposition des animaux gras dans la grande nef du Palais de l’Industrie. — Rébus.
FRANCE
Enregistrons ioul d abord le résultat des deux scrutins qui viennent d’avoir lieu dans le déparlement de Seine-et-Oise, et dans celui des Côtes-du-Nord. Trois candidats étaient en présence dans l’un comme dans l’autre de ces départements.
En Seine-et-Oise, c’étaient MM. Valentin, proscrit par l’empire, ancien préfet de Strasbourg et de Lyon après 1870, candidat, républicain; Arrighi de Padoue, naguère adversaire de M. Senart dans le même dépar
tement, candidat bonapartiste, et de Kéralrv qui se portait comme septennaliste, mais de couleur si indécise qu’il déclarait dernièrement que, dans le cas où il aurait le moins de voix des trois concurrents, il conseillerait l’abstention à ses électeurs au second tour de scrutin, ne voulant prendre parti «ni pour le bonapartisme, ni pour le radicalisme ». Dans le dé
partement des Côtes-du-Nord, c’étaient MM. le contreamiral de Kerjé.gu, candidat légitimiste, mais avec le drapeau tricolore, à l’ombre duquel il a servi et com
battu pendant quarante ans; Toucher de Careil, ancien préfet du département, candidat républicain, choisi au dernier moment après le désistement de M. de Flavigny, auquel avait d’abord été offerte la candidature; et de Goyon, duc de Fellre, candidat bonapartiste, qui a déclaré dans sa circulaire « que
l’empire n’a soustrait deux fois la France à l’anarchie révolutionnaire que pour lui donner les plus grandes gloires et les plus grandes prospérités qu elle ait jamais connues ».
Dans le premier de ces départements le résultat est définitif; c’est le candidat républicain qui l’a emporté, et de beaucoup. Les voix se sont ainsi réparties
M. Valentin, 54 594; M. Arrighi de Padoue, 40877 ; M. de Kéralry, 4026 seulement. Dans le département des Côtes-du-Nord, aucun des candidats n’a obtenu la majorité absolue. M. de Kerjégu a eu 41909 voix; M. Foucher de Careil 37 510, et M. de Goyon 33 934. Il y aura donc un second tour de scrutin.
Ce qui ressort de ces deux épreuves, c’est le double échec des bonapartistes, que l’on s’accorde générale
ment à attribuer aux derniers votes de l’Assemblée nationale. Les journaux de l’appel au peuple ne font eux-mêmes nulle difficulté de l’avouer. de vote qui a terminé la seconde lecture des lois constitution
nelles, dit le Pays, nous laissait peu d’espoir. » Et la Liberté : «Les élections du 7 février peuvent être con
sidérées comme un premier résultat de l’évolution qui vient de s’accomplir dans l’Assemblée nationale. » Ainsi des autres. Le Constitutionnel et la Patrie vont plus loin. Ils ne semblent même pas fâchés de la dé
faite de leurs candidats. « Les bonapartistes étant moins triomphants, lisons-nous dans te premier de ces journaux, seront moins redoutés et persécutés. » Le second accentue encore la note : « Les impéria
listes, dit-il, en étaient arrivés, la veille de ces deux scrutins, à redouter le succès. Devant les animosités parlementaires dont ils sont l’objet, ils appréhendaient que l’élection de M. de Padoue ne fût le signal d’un déchaînement nouveau de haines et de mesures assez injustes pour ressembler presque à un parti pris de persécution. » Ceci évidemment à l’adresse de la commission d’enquête sur l’élection de M. de Bourgoing.
Si l’on en croit les bruits qui courent, les choses semblent, y prendre, en effet, une tournure assez fâ
cheuse pour les bonapartistes. Des communications ayant trait aux actes du parti de l’Appel au peuple y sont, dit-on, journellement adressées des divers points
de la France ; et, dernièrement, une altercation trèsvive y a eu lieu entre M. Tailhand et les membres de
la commission, qui reprochaient au ministre de la justice d’avoir fait preuve d’une trop grande modéra
tion à l’égard des agissements des bonapartistes Ce qu’il y a de certain, c’est que M. Tailhand a persisté dans son refus de communiquer à la commission tous les dossiers de l’instruction relative aux comités de l’Appel au peuple, et que, de son côté, la commission a décidé qu’un rapport spécial serait soumis à l’As
semblée pour lui expliquer que ce refus rend trèsdifficile, sinon impossible, la continuation de l’en
quête. Celte décision a été prise à l’unanimité moins une voix, celle de M. Joubert, et M. Savary nommé rapporteur dans les mêmes conditions. Il a été en outre décidé, ce qui est significatif, que les déposi
tions de MM. Cornélis de Witt, sous-secrétaire d’Etat au ministère de l’intérieur, et Léon Renault, si graves pour les bonapartistes, seraient annexées au rapport.
Cette affaire ne peut donc manquer de donner lieu à un débat très-animé lorsque cerapport viendra devant la Chambre. Mais ce ne sera vraisemblablement pas avant qu’une décision définitive ait été prise sur le projet de loi relatif aux pouvoirs publics, système Wallon, et non plus Ventavon.
Pour le moment, l’Assemblée se repose. C’était bien le moins après ses prouesses de la semaine der
nière. Mais ce repos, très-court, aura cessé quand paraîtront ces lignes. Avant de s’ajourner, elle s’est u,ne fois de plus amusée à donner du poing sur la tête du ministère, sa tète de Turc. C’était à propos du pro
jet de loi sur la vente et la fabrication de la poudredynamite, qui venait devant elle en deuxième lecture.
Trois systèmes étaient en présence : celui du ministre des finances, M. Malhieu-Bodet, ou du monopole de l’Etal exercé par délégation du droit de l’Etat à des concessionnaires; celui de la commission, ou df la liberté, sous les garanties fixées par la loi et sous la surveillance de l’Etat; enfin le système du monopole de l’Etat, exploité directement et sans intermédiaire. L’Assemblée s’est prononcée pour la liberté, puis aus
sitôt, conséquente avec elle-même, elle a repris la sienne, mais pour huit jours seulement. Toutefois,
elle n’a pas dü, croyons nous, se donner beaucoup de bon temps pendant ces huit jours; et les lauriers qu’elle a cueillis n’ont pas encore acquis assez de consistance pour qu’elle ait pu sitôt songer à se re
poser dessus. En effet, tant que la loi sur le Sénat n’aura pas été volée, rien ne sera fait.
C’est cette loi, dont la deuxième délibération commence aujourd’hui, jeudi, qui doit donner sa signification vraie et sa véritable portée à la loi sur les pou
voirs publics qui, selon la composition du Sénat, pourra être ou la porte cochère d un édifice républi
cain, ou une porte dérobée ouvrant sur la monarchie.
Il est incontestable qu’un Sénat républicain doit être en son entier le produit de l’élection, directe, avec certaines conditions, si l’on veut, ou à deux degrés, mais de l’élection. Les gauches, si elles sont consé
quentes, ne peuvent guère, semble-t-il, sans compro
mettre leur oeuvre, transiger sur ce point. Maintenant le centre droit, ou du moins la portion du centre droit qui est passée à gauche en y portant avec elle la majorité, a-t-elle été suffisamment éclairée sur ce che
min de Damas où elle vient, elle aussi, de pousser une pointe, pour reconnaître cette vérité et y confor
mer sa conduite? On nous dit que oui; fort bien,
nous ne disons pas non, et dans ce cas la République est certainement laite et la majorité constituée. Ce
pendant, bien que pour plus d’une raison cela n’ait rien d’invraisemblable, nous avons déjà tant attendu
jusqu’ici qu’on nous permettra bien d’attendre encore un peu avant d’emboucher la trompette. Non qu’il y ait pour nous le moindre plaisir à ce doute, et que la solution ne soit point de notre goût. C’en est une,
cela suffit. Quelle qu’elle soit, pourvu qu’elle soit, nous applaudissons d’avance, et cela par pur amour pour ce pauvre pays si éprouvé et qui a tant besoin d’un peu de confiance en l’avenir pour se refaire. Et voyez, maintenant que cette solution si longtemps désirée semble sérieusement prendre corps, comme il se ranime et se redresse et déjà s’élance en avant.
L’emprunt de Paris, est-ce une assez bonne preuve, cela! Couvert quarante-deux fois ! 9 milliards 336 millions de souscriptions ! 840 millions de versements de garantie ! Cela fait rêver. Eh bien ! que l’on en finisse tout à fait à Versailles, et nous en verrons bien d’autres!
CHINE
L’empereur de Chine, Toung-Tchi, est mort le 12 janvier dernier. Il était né le 21 avril 1856, avait suc
cédé à son père, Hien-Toung, le 21 août 1861, s’était marié en octobre 1872 et avait pris possession du pouvoir en 1873, époque de sa majorité. C’est au moment même où il succédait à son père que les
forces anglo-françaises envahissaient la Chine. Ce fut son oncle, le prince Kong, qui fit la paix avec ces puissances et inaugura la nouvelle politique que la Chine a suivie depuis, politique favorable aux étran
gers, auxquels l’empereur défunt était foncièrement hostile. Au point de vue européen, il n y a donc pas lieu de le regretter, et il est à souhaiter que sa mort ramène au pouvoir le prince Kong, son oncle.
GRANDE-BRETAGNE
Le parti libéral vient de se choisir un nouveau chef, en remplacement de M. Gladstone, qui, comme nous l’avons dit, s’est retiré. Ce nouveau chef est lord Hartington, fils du duc de Devonsbire, appartenant à l’une des plus grandes familles d’Angleterre. Lord Hartington a tout aussitôt fait ses débuts comme leader de l’opposition à la Chambre des communes en attaquant le passage du discours de la couronne qui con
cerne la reconnaissance du gouvernement du roi Alphonse XII. Ce discours ne contenait du reste aucune déclaration importante, sauf celle concernant les conférences de Bruxelles, relatives aux lois et cou
tumes de la guerre, qui doivent être reprises à Saint- Pétersbourg, où l’Angleterre ne se fera décidément pas représenter. Elle a déjà déclaré qu’on ne peut concilier en aucune façon les intérêts de ceux qui at
taquent et de ceux qui se défendent, et qu’elle tient à conserver le droit de lever à la hâte des volontaires, sans avoir besoin de les encadrer dans l’armée régulière. Ce refus de l’Angleterre d’assister aux confé
rences de Saint-Pétersbourg a décidé la Hollande, la Belgique, la Suisse, le Danemark et la Suède à différer leur réponse aux propositions de la Russie.
TURQUIE
Un sérieux conllit. soulevé entre le Monténégro et la Turquie, à- la suite de l’affaire de Podgoritza, vient heureusement d’être arrangé par l’intervention des grandes puissances.
Voici l’origine du conflit : A la suite de la rixe et des massacres de Podgoritza, les sujets turcs avaient
été condamnés par le gouvernement de Constantinople qui ne se hâtait cependant pas de faire exécuter la sentence, et de plus réclamait l’extradition des sujets monténégrins ayant pris part à la rixe pour les faire juger par les autorités turques. Le Monténégro ne pouvait admettre une telle prétention ; et plutôt que de céder, paraissait décidé a faire la guerre. C’eût été l’étincelle dans un baril de poudre. Aussi l’Autriche, la Russie et l’Allemagne s’interposèrent-elles aussitôt
afin d’apaiser le différend. Elles y ont réussi et la difficulté a été tranchée de la façon suivante ; Il a été convenu que lesaccusés serontjugés par une commis
sion mixte, composée d’officiers turcs et monténégrins, qui siégera sur le territoire monténégrin, et que cette commission pourra au besoin, dans l’intérêt des té
moignages à recueillir, transporter son siège à Spouz, ville turque près de la frontière. Et tout est bien qui finit bien.
Pauvre carnaval ! Il était mort, bien mort, dès la première heure du premier jour gras! On le cherchait des yeux, on ne réussissait à voir que la physionomie accoutumée, le va-etvient des autres dimanches. Quelques fanatiques se sont efforcés de ressusciter le bœuf gras. Au
tant aurait valu refaire la fête des fous, telle
qu’on la célébrait sous Louis-le -Hutin. Un bœuf gras a paru, en effet, quelques minutes, sur les marges du XXe arrondissement. Il a été sifflé par la foule comme un acteur démodé. On l’a poussé avec des huées sur le chemin de l’abattoir. Vous
auriez dit d’une grandeur politique qu’on vient de jeter à bas de son piédestal. Il était donc tout honteux, ce bœuf, de ses oripeaux si mal venus, de sa couronne de fleurs artificielles et de lauriers en carton.
Ceux qui tiennent à la tradition du carnaval attendaient la soirée; c’était à l’heure du crépuscule qu’on commencerait à jouir d’un dédom
magement. Le bal de l’Opéra devenait la grande affaire du moment. On ne s’occupait plus d’autre chose. Le dernier vote de Versailles, chanson !
Parlez nous débardeurs et pierrettes, à la bonne heure ! Tous les billets avaient été enlevés en vingt-quatre heures. La salle nouille, déjà si
Courrier deParis
Texte : His .oire de la s,cinaine. — Courrier de Paris, par M. Philibert Audebrand - M. Wallon. — Le procès Wimpffen et
l’ouvrage de M. de Moltkc. — Hiyotoko, nouvelle japonaise, par M. Peyremal (suite). — Nos gravures : L’attelage russe; — Les acrobates japonais ; — Le bal de l’Opéra; —Mariage de la princesse Louise de Belgique; — La vérification des poids et mesures; - La conscription des chevaux; — Le Concours agricole; — Le nouveau télescope de l’Observatoire de Paris.
— Revue financière de la semaine. — La brique à conjonction de M. Pavy.
Gravures : L attelage russe, d après le tableau de M. SwertschkoAv. — Les acrobates japonais aux Folies-Bergère.
— M. Wallon, député du Nord à l’Assemblée nationale. — Le grand bal de bienfaisance au nouvel Opéra: l’orchestre;
— Vue prise de la scène. — Mariage de la princesse Louise de Belgique et du prince Philippe de Saxe-Cobourg-Gotha : célébration du mariage civil dans le salon bleu du palais du roi, à Bruxelles. — La vérification des poids et mesures. —
Paris : la conscription des chevaux à l’Ecole militaire. — Le grand télescope de l’Observatoire : polissage du miroir ; — Socle destiné à recevoir l’instrument. — Le Concours agricole de 1875 : exposition des machines; — Exposition des animaux gras dans la grande nef du Palais de l’Industrie. — Rébus.
HISTOIRE DE LA SEMAINE
FRANCE
Enregistrons ioul d abord le résultat des deux scrutins qui viennent d’avoir lieu dans le déparlement de Seine-et-Oise, et dans celui des Côtes-du-Nord. Trois candidats étaient en présence dans l’un comme dans l’autre de ces départements.
En Seine-et-Oise, c’étaient MM. Valentin, proscrit par l’empire, ancien préfet de Strasbourg et de Lyon après 1870, candidat, républicain; Arrighi de Padoue, naguère adversaire de M. Senart dans le même dépar
tement, candidat bonapartiste, et de Kéralrv qui se portait comme septennaliste, mais de couleur si indécise qu’il déclarait dernièrement que, dans le cas où il aurait le moins de voix des trois concurrents, il conseillerait l’abstention à ses électeurs au second tour de scrutin, ne voulant prendre parti «ni pour le bonapartisme, ni pour le radicalisme ». Dans le dé
partement des Côtes-du-Nord, c’étaient MM. le contreamiral de Kerjé.gu, candidat légitimiste, mais avec le drapeau tricolore, à l’ombre duquel il a servi et com
battu pendant quarante ans; Toucher de Careil, ancien préfet du département, candidat républicain, choisi au dernier moment après le désistement de M. de Flavigny, auquel avait d’abord été offerte la candidature; et de Goyon, duc de Fellre, candidat bonapartiste, qui a déclaré dans sa circulaire « que
l’empire n’a soustrait deux fois la France à l’anarchie révolutionnaire que pour lui donner les plus grandes gloires et les plus grandes prospérités qu elle ait jamais connues ».
Dans le premier de ces départements le résultat est définitif; c’est le candidat républicain qui l’a emporté, et de beaucoup. Les voix se sont ainsi réparties
M. Valentin, 54 594; M. Arrighi de Padoue, 40877 ; M. de Kéralry, 4026 seulement. Dans le département des Côtes-du-Nord, aucun des candidats n’a obtenu la majorité absolue. M. de Kerjégu a eu 41909 voix; M. Foucher de Careil 37 510, et M. de Goyon 33 934. Il y aura donc un second tour de scrutin.
Ce qui ressort de ces deux épreuves, c’est le double échec des bonapartistes, que l’on s’accorde générale
ment à attribuer aux derniers votes de l’Assemblée nationale. Les journaux de l’appel au peuple ne font eux-mêmes nulle difficulté de l’avouer. de vote qui a terminé la seconde lecture des lois constitution
nelles, dit le Pays, nous laissait peu d’espoir. » Et la Liberté : «Les élections du 7 février peuvent être con
sidérées comme un premier résultat de l’évolution qui vient de s’accomplir dans l’Assemblée nationale. » Ainsi des autres. Le Constitutionnel et la Patrie vont plus loin. Ils ne semblent même pas fâchés de la dé
faite de leurs candidats. « Les bonapartistes étant moins triomphants, lisons-nous dans te premier de ces journaux, seront moins redoutés et persécutés. » Le second accentue encore la note : « Les impéria
listes, dit-il, en étaient arrivés, la veille de ces deux scrutins, à redouter le succès. Devant les animosités parlementaires dont ils sont l’objet, ils appréhendaient que l’élection de M. de Padoue ne fût le signal d’un déchaînement nouveau de haines et de mesures assez injustes pour ressembler presque à un parti pris de persécution. » Ceci évidemment à l’adresse de la commission d’enquête sur l’élection de M. de Bourgoing.
Si l’on en croit les bruits qui courent, les choses semblent, y prendre, en effet, une tournure assez fâ
cheuse pour les bonapartistes. Des communications ayant trait aux actes du parti de l’Appel au peuple y sont, dit-on, journellement adressées des divers points
de la France ; et, dernièrement, une altercation trèsvive y a eu lieu entre M. Tailhand et les membres de
la commission, qui reprochaient au ministre de la justice d’avoir fait preuve d’une trop grande modéra
tion à l’égard des agissements des bonapartistes Ce qu’il y a de certain, c’est que M. Tailhand a persisté dans son refus de communiquer à la commission tous les dossiers de l’instruction relative aux comités de l’Appel au peuple, et que, de son côté, la commission a décidé qu’un rapport spécial serait soumis à l’As
semblée pour lui expliquer que ce refus rend trèsdifficile, sinon impossible, la continuation de l’en
quête. Celte décision a été prise à l’unanimité moins une voix, celle de M. Joubert, et M. Savary nommé rapporteur dans les mêmes conditions. Il a été en outre décidé, ce qui est significatif, que les déposi
tions de MM. Cornélis de Witt, sous-secrétaire d’Etat au ministère de l’intérieur, et Léon Renault, si graves pour les bonapartistes, seraient annexées au rapport.
Cette affaire ne peut donc manquer de donner lieu à un débat très-animé lorsque cerapport viendra devant la Chambre. Mais ce ne sera vraisemblablement pas avant qu’une décision définitive ait été prise sur le projet de loi relatif aux pouvoirs publics, système Wallon, et non plus Ventavon.
Pour le moment, l’Assemblée se repose. C’était bien le moins après ses prouesses de la semaine der
nière. Mais ce repos, très-court, aura cessé quand paraîtront ces lignes. Avant de s’ajourner, elle s’est u,ne fois de plus amusée à donner du poing sur la tête du ministère, sa tète de Turc. C’était à propos du pro
jet de loi sur la vente et la fabrication de la poudredynamite, qui venait devant elle en deuxième lecture.
Trois systèmes étaient en présence : celui du ministre des finances, M. Malhieu-Bodet, ou du monopole de l’Etal exercé par délégation du droit de l’Etat à des concessionnaires; celui de la commission, ou df la liberté, sous les garanties fixées par la loi et sous la surveillance de l’Etat; enfin le système du monopole de l’Etat, exploité directement et sans intermédiaire. L’Assemblée s’est prononcée pour la liberté, puis aus
sitôt, conséquente avec elle-même, elle a repris la sienne, mais pour huit jours seulement. Toutefois,
elle n’a pas dü, croyons nous, se donner beaucoup de bon temps pendant ces huit jours; et les lauriers qu’elle a cueillis n’ont pas encore acquis assez de consistance pour qu’elle ait pu sitôt songer à se re
poser dessus. En effet, tant que la loi sur le Sénat n’aura pas été volée, rien ne sera fait.
C’est cette loi, dont la deuxième délibération commence aujourd’hui, jeudi, qui doit donner sa signification vraie et sa véritable portée à la loi sur les pou
voirs publics qui, selon la composition du Sénat, pourra être ou la porte cochère d un édifice républi
cain, ou une porte dérobée ouvrant sur la monarchie.
Il est incontestable qu’un Sénat républicain doit être en son entier le produit de l’élection, directe, avec certaines conditions, si l’on veut, ou à deux degrés, mais de l’élection. Les gauches, si elles sont consé
quentes, ne peuvent guère, semble-t-il, sans compro
mettre leur oeuvre, transiger sur ce point. Maintenant le centre droit, ou du moins la portion du centre droit qui est passée à gauche en y portant avec elle la majorité, a-t-elle été suffisamment éclairée sur ce che
min de Damas où elle vient, elle aussi, de pousser une pointe, pour reconnaître cette vérité et y confor
mer sa conduite? On nous dit que oui; fort bien,
nous ne disons pas non, et dans ce cas la République est certainement laite et la majorité constituée. Ce
pendant, bien que pour plus d’une raison cela n’ait rien d’invraisemblable, nous avons déjà tant attendu
jusqu’ici qu’on nous permettra bien d’attendre encore un peu avant d’emboucher la trompette. Non qu’il y ait pour nous le moindre plaisir à ce doute, et que la solution ne soit point de notre goût. C’en est une,
cela suffit. Quelle qu’elle soit, pourvu qu’elle soit, nous applaudissons d’avance, et cela par pur amour pour ce pauvre pays si éprouvé et qui a tant besoin d’un peu de confiance en l’avenir pour se refaire. Et voyez, maintenant que cette solution si longtemps désirée semble sérieusement prendre corps, comme il se ranime et se redresse et déjà s’élance en avant.
L’emprunt de Paris, est-ce une assez bonne preuve, cela! Couvert quarante-deux fois ! 9 milliards 336 millions de souscriptions ! 840 millions de versements de garantie ! Cela fait rêver. Eh bien ! que l’on en finisse tout à fait à Versailles, et nous en verrons bien d’autres!
CHINE
L’empereur de Chine, Toung-Tchi, est mort le 12 janvier dernier. Il était né le 21 avril 1856, avait suc
cédé à son père, Hien-Toung, le 21 août 1861, s’était marié en octobre 1872 et avait pris possession du pouvoir en 1873, époque de sa majorité. C’est au moment même où il succédait à son père que les
forces anglo-françaises envahissaient la Chine. Ce fut son oncle, le prince Kong, qui fit la paix avec ces puissances et inaugura la nouvelle politique que la Chine a suivie depuis, politique favorable aux étran
gers, auxquels l’empereur défunt était foncièrement hostile. Au point de vue européen, il n y a donc pas lieu de le regretter, et il est à souhaiter que sa mort ramène au pouvoir le prince Kong, son oncle.
GRANDE-BRETAGNE
Le parti libéral vient de se choisir un nouveau chef, en remplacement de M. Gladstone, qui, comme nous l’avons dit, s’est retiré. Ce nouveau chef est lord Hartington, fils du duc de Devonsbire, appartenant à l’une des plus grandes familles d’Angleterre. Lord Hartington a tout aussitôt fait ses débuts comme leader de l’opposition à la Chambre des communes en attaquant le passage du discours de la couronne qui con
cerne la reconnaissance du gouvernement du roi Alphonse XII. Ce discours ne contenait du reste aucune déclaration importante, sauf celle concernant les conférences de Bruxelles, relatives aux lois et cou
tumes de la guerre, qui doivent être reprises à Saint- Pétersbourg, où l’Angleterre ne se fera décidément pas représenter. Elle a déjà déclaré qu’on ne peut concilier en aucune façon les intérêts de ceux qui at
taquent et de ceux qui se défendent, et qu’elle tient à conserver le droit de lever à la hâte des volontaires, sans avoir besoin de les encadrer dans l’armée régulière. Ce refus de l’Angleterre d’assister aux confé
rences de Saint-Pétersbourg a décidé la Hollande, la Belgique, la Suisse, le Danemark et la Suède à différer leur réponse aux propositions de la Russie.
TURQUIE
Un sérieux conllit. soulevé entre le Monténégro et la Turquie, à- la suite de l’affaire de Podgoritza, vient heureusement d’être arrangé par l’intervention des grandes puissances.
Voici l’origine du conflit : A la suite de la rixe et des massacres de Podgoritza, les sujets turcs avaient
été condamnés par le gouvernement de Constantinople qui ne se hâtait cependant pas de faire exécuter la sentence, et de plus réclamait l’extradition des sujets monténégrins ayant pris part à la rixe pour les faire juger par les autorités turques. Le Monténégro ne pouvait admettre une telle prétention ; et plutôt que de céder, paraissait décidé a faire la guerre. C’eût été l’étincelle dans un baril de poudre. Aussi l’Autriche, la Russie et l’Allemagne s’interposèrent-elles aussitôt
afin d’apaiser le différend. Elles y ont réussi et la difficulté a été tranchée de la façon suivante ; Il a été convenu que lesaccusés serontjugés par une commis
sion mixte, composée d’officiers turcs et monténégrins, qui siégera sur le territoire monténégrin, et que cette commission pourra au besoin, dans l’intérêt des té
moignages à recueillir, transporter son siège à Spouz, ville turque près de la frontière. Et tout est bien qui finit bien.
Pauvre carnaval ! Il était mort, bien mort, dès la première heure du premier jour gras! On le cherchait des yeux, on ne réussissait à voir que la physionomie accoutumée, le va-etvient des autres dimanches. Quelques fanatiques se sont efforcés de ressusciter le bœuf gras. Au
tant aurait valu refaire la fête des fous, telle
qu’on la célébrait sous Louis-le -Hutin. Un bœuf gras a paru, en effet, quelques minutes, sur les marges du XXe arrondissement. Il a été sifflé par la foule comme un acteur démodé. On l’a poussé avec des huées sur le chemin de l’abattoir. Vous
auriez dit d’une grandeur politique qu’on vient de jeter à bas de son piédestal. Il était donc tout honteux, ce bœuf, de ses oripeaux si mal venus, de sa couronne de fleurs artificielles et de lauriers en carton.
Ceux qui tiennent à la tradition du carnaval attendaient la soirée; c’était à l’heure du crépuscule qu’on commencerait à jouir d’un dédom
magement. Le bal de l’Opéra devenait la grande affaire du moment. On ne s’occupait plus d’autre chose. Le dernier vote de Versailles, chanson !
Parlez nous débardeurs et pierrettes, à la bonne heure ! Tous les billets avaient été enlevés en vingt-quatre heures. La salle nouille, déjà si
Courrier deParis