LE SALON DE 1875
RENSEIGNEMENTS PRÉLIMINAIRES
Des chiffres sur le Salon, tous les journaux en ont, comme chaque année, déjà publié qui plus et qui moins. Il va sans dire que, comme chaque année, ces chiffres étaient les plus fantaisistes du monde. — A peine, en effet, pouvons-nous en ce moment — nous qui sommes mieux que quiconque en position d’avoir de première main des renseignements sur ce sujet — garantir l’exactitude parfaite des nombres qui vont suivre. Comment, dès lors, ceux de nos confrères qui, moins que nous dans le secret des dieux, fournissaient, il y a trois semaines, des indications présu
mées précises et rigoureuses, auraient-ils pu ne pas tomber dans une série d’erreurs inextricables?
C’est pourquoi nous sommes très à l’aise en faisant, des derniers, notre statistique du Salon. Elle sera rectificative et complémentaire, sur quelques points, de celles qui l’ont précédée. Sur tous les au
tres, elle produira des données entièrement inédites, et, ce qui vaut mieux d’une indiscutable authenticité.
Et maintenant entrons en matière.
Le règlement de l’exposition de 1875 était — sauf une particularité dans le mode d’élection du jury — semblable, dans toutes ses clauses, à celui de 1874.
11 n’est pas inutile d’en rappeler les principales conditions :
— Division des œuvres d’art en sept genres, savoir :
I. Peinture;—-IL Dessins, aquarelles, pastels, miniatures, émaux, porcelaines, faïences, cartons de vi
traux et vitraux ; -— III. Sculpture et gravures en médailles et sur pierres fines;—V. Architecture ;— VI. Gravure ; — VII. Lithographie.
—- Faculté pour chaque artiste d’envoyer trois œuvres appartenant à chacun des sept genres susdits;
— Droit d exemption de l’examen du jury pour tout artiste ayant obtenu soit le grand prix de Rome,
soit le prix du Salon, soit une médaille quelconque à l’une des expositions officielles précédemment faites à Paris ;
— Nomination des différents jurys, par voie de tirage au sort sur une liste de noms fournie par voie d’élection ; chaque liste contenant un nombre d’élus triple de celui qui devait composer chaque jury ;
— Qualité d électeur reconnue à tout artiste exposant remplissant les conditions, ci-dessus énoncées, pour être admis au bénéfice de l’exemption ..
La période active de l’exposition s’est ouverte le 10 mars. C’est le jour où la première des toiles destinées au Salon a été reçue et enregistrée par les bureaux installés au palais des Champs-Elysées. La limite extrême du délai réglementaire fixé pour le dé
pôt était le 18.— Le nombre total des ouvrages de tous genres présentés, de l’une à l’autre date, est de
sept mille cinq cent quarante-cinq. — Soit six cent soixante-neuf de plus que l’an dernier.
Par suite de diverses circonstances, dans l appréciation desquelles nous n’avons pas à entrer ici, par suite aussi de la nouveauté du mécanisme adopté pour la formation du jury, le scrutin de 1875 ouvert le 23 mars a été un peu plus animé que celui des an
nées précédentes. Malgré tout, les abstentionnistes ont été, comme de coutume, eu grande majorité.
Il suffit pour s’en convaincre de comparer le nombre effectif des votants à celui qu’un pointage minutieux des noms d’auteurs signés au bas des 7545 ou
vrages présentés, fait ressortir comme électeurs.— Ainsi ferons-nous dans le tableau ci-dessous :
Section de peinture et dessins :
45 noms à élire............................ Section de sculpture et gravure en
médaille : 27 noms à élire.......... Section d’architecture : ta noms à
élire............................................... Section de gravure et lithographie: 24 noms à élire...........................
Totaux................
Ce qui prouve qu’en art, comme en politique, si le
ÉLECTEURS INSCRITS
VOTANTS 411
189 135
83 25
20 52
27 023
319
Français est très-jaloux de ses droits, il est encore plus insoucieux de ses devoirs.
Le mode de formation du jury, a l’aide d’une élection compliquée d’un tirage au sort a été l’objet de diverses critiques. Sans vouloir, à ce propos, entreprendre la moindre polémique, nous croyons intéres
sant de donner la composition des différents jurys,
tels qu’ils ont été définitivement constitués et qu ils ont, par suite, fonctionné :
1” Peinture et dessins (15 membres) : — MM. Cabanel, président; Jules Dupré, vice-président; Der
nier; J. Breton; Carolus Duran; Français; Laugéc; J.-P. Laurens ; Jules Lefebvre ; L. Leloir ; E. Lévy; Luminais; de Neuville; Protais et Vollon.
5 jurés adjoints par l’administration : MM. Ecl. André; M. Cottier ; E. Marcille ; le comte d’Osmon, député; le vicomte de Tauzia.
2 Sculpture (9 membres) : MM Guillaume, président; Carrier-Belleuse ; Cavelier; Chapu; Douhlemard; Fremiet; Jacquemart; Loison et Schœnewerk.
‘d jurés adjoints par l administration : MM. Barbet de Jouv ; Michaux et de Rainneville.
3 Architecture (6 membres) : MM. Duc, président ; Janvier; Lainé ; Mitnev ; Mérindol et Viollet-le- Duc.
2 jurés adjoints par l administration : MM. deCardaillac et Al. Leuvis.
4° Gravure et lithographie (8 membres). Burin : MM. Gaillard et Waltner; — Eau forte : MM. Gaucherel et Veyrassat; — Bois : MM. Joliet et Pisan ; — Lithographie : MM. Chauvel et Sirony.
Ces renseignements, inédits, exacts et complets, permettront du moins aux commentateurs de ne plus fonder leur discussion sur des hypothèses. Ce qui,
d’ailleurs, est une raison pour qu’ils s’abstiennent de discuter davantage.
* *
Voici, par genre, la quotité des œuvres inscrites au livret de celte année. Nous les rapprocherons, pour plus ample édification, des nombres portés aux trois catalogues précédents :
187218731874
1875
I.— Peinture.......................
1179
1204
1852
2019
IL— Dessins, etc..................357287776
807
III.— Sculpture, etc.............. — Grav en médailles, etc.
299395509
627
IV.3524
0440
V.— Architecture................
5543104
105
VL— Gravure ........................130173
255231
VII.— Lithographie...............
12
10
3735 20672142
3b573863
Dans les chiffres donnés ci-dessus, l’apport des artistes « exempts » s’ajoute à l’apport des artistes qui ne le sont pas.
Disons combien d’artistes, de l’une et l’autre catégorie, ont. participé au contingent général des ouvrages exposés :
____________________
NOMBRE DES ARTISTES
TOTAUX
ADMISEXEMPTS I.— Peinture.......................854
3401194
IL— Dessins, etc..................
43371
504
m.
— Sculpture, etc................
271120
397
IV.— Gravure en méd., etc .
13922 V.— Architecture................
5025
75
VI.
— Gravure.... ..............
10345
148
vu.— Lithographie............
18
7
Or,
Totaux ..............1742623
2305
Hâtons-nous d’avouer que ce total de 2365 n’est pas d une justesse absolue. Il comporte en effet « des double et triple emploi » assez nombreux — puisque le temps nous manque pour défalquer tel signataire,
déjà compté dans une section, des aulres sections où il a pu exposer.
Est-on curieux de connaître dans quelle mesure on use du droit d’exemption? Si oui, l’on n’a qu’à com
parer les données ci-dessu savec le tableau des artistes récompensés, c’est-à-dire exempts, vivant au 1er mai 1875. — En voici le résumé succinct :
Parmi ces « récompensés » la moitié, presque exactement, a épuisé l entière série des récompenses qu’il est au pouvoir du jury de distribuer. Ceux-là forment l’état-mojor de l’art, au point de vue officiel
français. Ce sont les « Hors Concours ». Ils se répar
tissent comme suit, dans les divers genres :
Le « Salon de 1875 » comprend, pour la peinture, vingt-cinq salles, dont quatre dites « salons carrés ».
Elles se continuent, suivant le grand côté du parallélogramme formé par le Palais de l’Industrie — le long de l’avenue des Champs-Elysées — et le petit côté faisant face au Panorama.
La sculpture est, comme de coutume, disposée dans la nef du Palais.
L’architecture, les dessins, aquarelles, pastels, gravures, faïences et porcelaines, occupent les quatre galeries qui encadrent et dominent la nef.
Les miniatures, émaux, gravures en médailles et sur pierres fines se trouvent en cymaise sur le pa
lier de l’escalier principal. Ils sont, suivant l’usage, surmontés de quelques dessins et peintures de grandes dimensions.
Jules Dementhe. LE CHAUDRON DU DIABLE
NOUVELLE
(Suile)
— Par le diable ! laissez-moi tranquille, répondit-il, je m’occuperai de vous tout à l’heure; souffrez que je me consacre tout entier à ce re
nard, qui est passé à cinquante pas de moi tandis que Caporal chassait son lièvre ; je l’ai blessé ; — c’est un magnifique charbonnier; — il s’est ré
fugié dans un accul qu’il cherche à percer ; mais c’est égal, Caporal travaille rudement son arrièregarde.
— Chevalier, dit en insistant le jeune homme, il y a là un camarade de chasse, un charmant camarade de chasse, qui voudrait renouveler connaissance avec vous.
— Morbleu ! répondit M. de Bourguebus sans quitter sa position, s’il est digne du titre que vous lui donnez, il ne me dérangera pas tandis que j’accomplis un devoir ; il s’en ira à la ferme la plus proche, il en rapportera des pelles, des pioches, une demi-douzaine de paysans, et nous
nous saluerons après avoir sonné l’hallali de celte vermine.
Un geste de M. de Tancarville indiqua qu’il renonçait à vaincre l’obstination de ce terrible disciple de saint Hubert, et M ” Denise s’approcha à son tour.
— Vous aurez ceitainement votre hallali, mon oncle, mais il faut auparavant que vous embrassiez votre petite nièce.
M. de Bourguebus n’avait pas entendu le sens de ces paroles; mais le timbre féminin qui les prononçait suffisait pour amener une révolution
dans ses résolutions ; un brusque mouvement l’amena hors du terrier ; il se retrouva tant bien que mal sur sa jambe, et tout en essayant de retrouver ses aplombs, il ébaucha devant la dame qu’il voyait devant lui un salut respectueux qui ne s’acheva pas.
— Denise ! par la mordieu ! c’est ma petite
Denise ! s’écria-t-il.