Gravures : La reconstruction de la colonne Vendôme : restauration de la statue de Napoléon Ier dans les ateliers de MM. Tniébault, à Paris. — Salon de 1875 : Bayard et les jeunes fûtes de Brescia, tableau de M. Beyle; — La cigale et la fourmi, tableau d^ JV1. Yibeit. — La nouvelle installation des Chambres à Versailles : vue panoramique de la partie ouest du palais de Versailles montrant la nouvelle salle des séances de la Chambre des députes, à construire dans la cour delà Surintendance; — Plan de la future installation de la Chambre des députés au palais de Versailles. — Modes de 1875 : saison d’été. — Revue comique du Salori de 1875 (lit), par Bertall (13 sujets). — Le café-concert des Ambassadeurs, aux Champs-Elysées. — Rébus.
HISTOIRE DE LA SEMAINE
FRANCE
L’Assemblée nationale n’a pas fait grand chose cette semaine, bien qu’e le se soit donné quelque mouvement. Elle piétine volontiers surplace. On voit qu’elle n’est pas pressée d’arriver, quoi qu’elle en dise. La dissolution? un peu de patience, s’il vous plaît. Elle espère bien avoir longtemps encore à en proclamer la nécessité.
En attendant, elle légifère sur ceci et sur cela. Elle a adopté en deuxième lecture les huit articles du projet de loi relatif à la réforme pénitentiaire, qui déve
loppe l’application du système cellulaire ; puis elle a abordé la discussion du projet relatif à la déclaration d’utilité et à la concession a la compagnie de Paris- Lyon-Méditerranée de nouvelles lignes de chemins de fer. Cette discussion, émaillée de discours intermina
bles, dure encore. Entre temps, l’Assemblée a, sur le rapport de M. Amy, validé l’élection de M. Cazeaux, et décidé la nomination en séance publique d’une nouvelle commission des Trente, en remplacement de l’ancienne qui a, comme on sait, donné sa démission à la suite du renvoi à une commission spéciale des lois constitutionnelles complémentaires.
Puis elle a travaillé dans ses bureaux, où elle a procédé à la nomination-de quelques commissions, entre autres de celle qui doit examiner le projet de loi por
tant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l’exercice 1876. Il esta remarquer, à pro
pos de la nomination de cette commission , que les
groupes composant la majorité du 25 février ont réussi à faire passer dix-neuf de leurs candidats sur (rente. Ce vote a été considéré comme une revanche de ceux qui, pour une cause ou pour l’autre, avaient récemment donné la majorité à la droite, dans diver
ses commissions. Les journaux de la gauche s’en sont réjouis, esti naut que l’examen du budget en mar
chera plus rapidement. Peut-être ont-ils raison, mais
peut-être aussi se trompent-ils. La vérité est qu’à bien examiner les choses, on ne sait pas trop aujourd’hui où est la majorité, ni si un côté de la Chambre la gar
dera, lorsqu’il croit le mieux la tenir. Ainsi la gauche pensait bien l’avoir dans la trente-cinquième com
mission d’initiative, qui avait été chargée de l’examen de la proposition de MM. Calmon et de Pressensé, limitant la durée des travaux de l’Assemblée. Et cepen
dant, la trente-cinquième commission d’initiative, par 14 voix contre 12, a repoussé la prise en considérattion de la proposition. « Ce vote fâcheux, qui peut être interprété comme contraire à une prompte dissoüutiott, a dit à ce propos Y Opinion nationale, n’a été «blêmi que grâce à la défection de deux membres du groupe Wallon, élus par les gauches dans des bureaux où celles-ci avaient la majorité et qui ont voté avec la droite, et à l’absence, peut-être calculée, de deux autres. )> Précisément. Voilà le côté faible de la majorité
du 25 février ; c est que l’appoint en a été fait par l’adjonction d’un certain nombre de députés sur lesquels elle ne peut vraiment compter qu’à demi.
.Mais, avant tout, ce qui a été, cette semaine, la graade préoccupation de l’Assemblée, c’est la nomisal/ioa de la nouvelle commission des Trente, qui vient d avoir lieu, et qui a motivé entre les divers groupes parlementaires des négociations aussi longues que .surprenantes. En effet, pourquoi l’Assemblée n’a- 3-elle pas voulu renvoyer les lois constitutionnelles complémentaires à l’ancienne commission? Parce que, celle-ci ayant été jusqu’au bout hostile à la Con
stitution du 25 février, il était naturel de penser qu’elle ne se montrerait pas animée d’un esprit pro
pre a mener à bonne et prompte fin les lois destinées à la compléter. Cependant, contradiction singulière !
cette commission dissoute, alors que l’on aurait pu croire, ce qui était rationnel, que l’on allait, pour constituer la nouvelle commission, faire choix de députés en communion d’idées avec la partie de la Chambre qui a voté la Constitution, tous les efforts ont tendu, au contraire, pendant, plusieurs jours, à reconstituer l’ancienne. On parlait de conciliation, d’entente, de concessions réciproques. On s’offrait ré
ciproquement un certain nombre de commissaires : l’extrême droite en aurait tant, la droite tant, tant pour le centre droit, le groupe Lavergne et, les gau
ches. Bref, on tâchait de recoudre l’habit d’arlequin avec une intrépidité digne d’une meilleure cause. Heureuse ment toutes les tentatives ont échoué, et c’est avec des listes préparées par chacun d’eux et sans en
tente préalable que les groupes parlementaires sont arrivés mardi devant l’urne. Treize commissaires ont été nommés dans cette première journée : MM. Duclerc, Laboulaye, de Lavergne, Delorme, Cézanne, Krantz, Humbert, Ricard, Bethmont, J. Ferry, E. Picard, Voisin et Beau. Ces treize commissaires appar
tiennent tous aux divers groupes de la majorité de février : sept au centre gauche, trois à la gauche et trois au groupe Wallon. Le lendemain, mercredi, au deuxième tour de scrutin, douze autres candidats des mêmes nuances : MM. Rampon, Le Royer, ’Baze, Christophle, Waddington, Schérer, A. Grévy, Lïifo, J. Simon, de Marcère, J. Cazot et Yachcrot ont en
core été élus; et ce n’est qu’après un discours de M. Gambetta, revendiquant pour la minorité les cinq dernières places à remplir, que, au troisième et der
nier tour de scrutin, les noms de MM. Delsol, de Sugny, Sacaze, Adnet et Adrien Léon sont sortis de l’urne. Cette fois, le succès des gauches a donc été complet. Nous verrons dans peu ce qu’il en adviendra.
Ajoutons que sur les trente membres de la nouvelle commission, à laquelle doit être renvoyée avec les lois complémentaires, la loi électorale, plus des deux tiers sont partisans du scrutin de liste, en faveur duquel le centre gauche vient, on le sait, de se prononcer comme la gauche et l’Union républicaine.
Cette décision du centre gauche a créé une situation politique qui n’est pas sans danger. Les gauches affir
ment leur confiance dans le succès final de ce mode d’élection, et il paraît à peu près sûr aujourd’hui que celte confiance ne sera pas trompée, attendu que le scrutin de liste ralliera non-seulement les trois grou
pes de la gauche, mais encore un certain nombre de membres de l’extrême droite, et même, dit-on, quel
ques bonapartistes. Or, et c’est là qu’est le danger, d’après une récente communication de l’agence Havas, le ministère tient énergiquement pour le scrutin uninominal ou d’arrondissement, qu’il se propose de sou
tenir devant l’Assemblée. « Dans ces conditions, dit
la correspondance dont il s’agit, il semble difficile que la question de cabinet ne soit pas posée par la force
même des choses. » Le Moniteur universel, qui passe pour être l’organe particulier du ministère de l inté
rieur, avait dit déjà : « Il n’est plus douteux que M. le vice-président du conseil ne soit résolu à remettre son portefeuille si l’Assemblée ne se prononce pas en faveur du scrutin d’arrondissement. M. Dufaure est dans le même cas et il est également de notoriété pu
blique que le chef de l’Etat est entièrement acquis à des idées analogues. » Et ia même feuilte ajoutait :
La question est donc nettement posée entre le gouvernement et les trois cents voix des trois groupes de la gauche. Si le ministère n’obtient pas la majorité,
que devient l’application des lois constitutionnelles ? S’il l’obtient, que devient la majorité du 25 février, dont une grande partie aura voté contre lui ? »
Si pareille chose arrivait, la situation serait difficile, sans doute, mais nous ne croyons pas qu’elle puisse jamais être cte nature à compromettre l existence du gouvernement fondé en février. La même nécessité qui a groupé une majorité autour de ce gouvernement s’imposerait encore, nous en sommes convaincus, pour assurer sa mise en vigueur. C’est un devoir patrioti
que auquel l’Assemblée ne faillirait pas, aujourd’hui surtout qu’il apparaît que, bien décidément, un ennemi intéressé à notre perte se tient prêt à profiter de la la première occasion favorable pour mettre à exécu
tion les méchants dessins qu’il nourrit contre nous. La lumière s’est faite peu à peu sur les causes de la dernière crise, et c’est un avertissement qu’il ne nous est pas permis de négliger.
Il est donc bien vrai que notre loi des cadres avait excité des inquiétudes à Berlin, et que l’Allemagne, qui, bien qu’armée jusqu’aux dents, ne veut pas que nous nous mettions de notre côté en état de lui tenir tête, nous eût déclaré la guerre, pensant qu’elle pou
vait encore la faire sans danger, sans l’intervention des autres grandes puissances : l’Italie, l’Autriche, la I:ussie, l’Angleterre. Ses journaux et même sa feudle
officielle, le Reichsanzeiger, le nient aujourd’hui; tout mauvais cas est niable, surtout quand le coup est manqué. Mais divers organes de la presse étran
gère l’assurent de la façon la plus positive et main
tiennent quand même leur affirmation. Et voilà qu’une parole officielle nous arrive de l’autre côté du détroit qui ne permet plus le doute sur ce point. Au chef de l’opposition à la Chambre des communes, lord Hartington, demandant au premier ministre s’il était vrai que le gouvernement anglais eut fait des représentations au gouvernement allemand au sujet des relations de l’Allemagne avec la France, M. Disraeli a ré pondu affirmativement. « Il est exact, a-t-il dit, qi le ministère a conseillé à S. M. d’adresser devfw valions au gouvernement de l’empereur d’Alieffai
relativement à l’état des relations entre l’AllemU
et la France. Le but de ces observations était de tifier des notions inexactes et d’assurer le maintiei ...
la paix... » Ces paroles sont parfaitement claires et tous les démentis de journaux plus ou moins officieux, voire officiels de par-delà le Rhin, ne prévaudront pas contre elles. On voit donc combien il est important que nous ne soyons pas divisés contre nous-mêmes,
au moins dans les affaires capitales. Nous ne le serons malheureusement toujours que trop dans les autres!
BELGIQUE
La chambre du conseil du tribunal civil de Liège vient de se prononcer sur l’affaire Duchesne qui figurait au nombre des griefs contenus dans la note alle
mande du 3 février adressée au gouvernement neige. Rappelons les faits.
Dans une lettre envoyée le 9 septembre 1, 14 à l’archevêque de Paris, ce Duchesne, qui était maître chaudronnier à Herstal, offrait au prélat d’assassiner M. de Bismark, moyennant une somme de 60000 fr.
Il lui transmettait en même temps un alphabet chiffré afin d’assurer le secret de la correspondance. Une deuxième lettre, sans date, fut adressée par lui au même prélat, avec un portrait-carte qu’il disait être le sien et son adresse ainsi conçue : « Duchesne Ponce
let, rue Léopold, à Seraing (Belgique). » Enfin, vint, le 31 septembre une dépêche chirffée confirmative de la lettre précédente et par laquelle Duchesne se déclarait prêt à agir. M. l’archevêque de Paris communiqua immédiatement cette correspondance au gou
vernement français, qui en fit part aussitôt au gouvernement belge. Duchesne, dans les différents interrogatoires qu’on lui fit subir ultérieurement, a déclaré qu’il avait écrit ces lettres le même jour, se trouvant en état d’ivresse et sous la dictée d’un ami qu’il a persisté à ne pas vouloir faire connaître, pour lui épargner, a-t-il dit, des désagréments.
Il s’agissait de décider si ces faits tombaient sous l’application de la loi pénale belge. C’est celte ques
tion que vient, de trancher la chambre du conseil du tribunal civil de Liège, en déclarant sur les conclu
sions du juge d’instruction et d’après l’avis conforme du procureur du roi, qu’il n’y avait pas lieu de poursuivre. Cette décision est juridiquement inattaquable,
la loi belge ne punissant la tentative d’un crime ou d’un délit que dans le cas où la résolution de le commettre a été manifestée par des actes extérieurs for
mant un commencement d’exécution. Qu’il y ait là une lacune dans la législation belge, c’est possible ;
en tout cas celte lacune existe dans le code pénal de la France, de l’Angleterre, de l’Italie et même de l’Allemagne. Dans tous ces pays, le législateur exige, pour qu’il y ait crime et responsabilité, la réunion de deux conditions essentielles, l’intention et le fait.
Non, très-certainement, le joli mois de niai n aura jamais été aussi joli. Les petites filles qui dansent en rond sous les marronniers des Tuileries le disent dans une sorte de ballade, et il faut avouer qu’elles ont raison de le chanter.
Ce mois de mai est un enchantement. Jamais on n’aura vu de printemps plus vrai, plus vert,, ni plus animé. Paris en est justement affolé. On va de la ville au palais de l’Industrie, de l’Exposi
tion au Bois. Autrement dit, on est en pleine saison. Les toilettes changent à vue d’œil. Il y a déjà des hommes tout en blanc, des femmes tout en rose. Le pantalon de nankin se montre un peu partout sans redouter ni l’ondée ni les rhumatismes. Il n’y a que le chapeau des femmes
COURRIERDERARIS
Texte : Histoire de la semaine. — Courrier de Paris, par M. Philibert Audcbrand — Le Salon de 1875 (IV). — Le Chaudron
du diable, nouvelle, par M G. de Cherville (suite). — Nos gravures : La statue de la colonne Vendôme; — Bayard et les jeunes filles de Brescia, par M. Beyle; — La cigale et la fourmi, par M. V’ibert; — La future installation des Chambres a Versailles. — Revue comique du Salon de 1875, par Bertall (III). — Chronique du Sport. — Revue financière de la se
maine. — Bulletin bibliographique. — Faits divers. — Le café-concert des Ambassadeurs, aux Champs-Elysées. — Echecs.
SOMMAIRE.