comblée de présents et reçue presque chaque jour à l’hôtel du gouvernement. Les dîners, la tnusique, les fêtes, se suc
cèdent sans interruption. Du reste, la tranquillité la plus parfaite continue de régner par toute l ile.
Les vues des autorités françaises paraissent modifiées sous quelques rapports ; tous les ouvrages de fortifications ou autres, qui avaient été commencés, restent interrompus. La plus stricte écoNOmie règle maintenant toutes les dépenses, et, dès son arrivée, M. Lavaud acontremandé la plupart des constructions ordonnées par son prédécesseur.
Traité avec la Perse. — La France n’avait fait, jusque dans ces derniers temps, avec la Perse qu’un commerce in
direct et de peu d’importance exclusivement exploité par des Orientaux qui allaient chercher à ConstantiNOple, et même-dans les foires d’Allemagne, quelques-uns de NOs pro
duits qu’ils importaient par la voie d’Erzeroum et de Tauris, et en échange desquels des marchandises d’origine per
sane NOus étaient expédiées par Smyrne. Cette situation a tendu, depuis quelques années, à s’améliorer. L’abandon des anciennes voies de communication a déjà favorisé, dans une proportion sensible, les rapports de i’Europe avec la Perse, rapports qui ne peuvent que prendre un NOuvel accroissement par suite de l’établissement des lignes de ba
teaux à vapeur qui sillonnent la Méditerranée, et qui se pro
longent aujourd’hui jusqu’au port de Trébisonde, devenu le principal entrepôt du commerce de la Perse.
En présence d’un tel état de choses, il importait de NOus assurer des garanties pour l’avenir, et, dans ce but, de chercher à convertir les assurances bienveillantes que NOtre mission en Perse avait reçues, à diverses reprises, du ca
binet de Téhéran, en stipulations positives et formelles. Le gouvernement du roi a donc chargé M. le comte de Sartiges de proposer à ce cabinet.de signer un traité de commerce et de navigation qui NOus assurerait en Perse le traitement de la nation la plus favorisée, et qui reconnaîtrait en outre au gouvernement du roi la faculté de NOmmer des agents consulaires sur les points où l’intérêt commercial des deux pays viendrait à l’exiger.
Après une négociation dans le cours de laquelle NOire envoyé à Téhéran a recueilli les témoignages les moins douteux du désir qui anime lèTgouvernement persan, et NOtam
ment le premier ministre du shah, Hadji Mizza-Agassi, d’entretenir avec la France les relations les plus amicales, le traité dont il s’agit a été signé par les plénipotentiaires respectifs le 24 juillet dernier. Il se compose de six articles qui sont le développement du principe fondé sur le traitement de la nation la plus favorisée, et dont la teneur ré
pond complètement à la dignité du gouvernement du roi, aux intérêts du commerce français en Perse, et à la protection de NOs nationaux.
Piémont. — Le journal officiel de Turin publie une proclamation du directeur général de la police indiquant qu’il y eu des manifestations dont le gouvernement a interdit le retour, « quand même les intentions qui leur serviraient d’origine ne seraient pas blâmables, » dit la proclamation.
Toscane. — Le Felsineo de Bologne a donné le programme attribué au NOuveau ministère toscan, et agréé, dit-on, par le grand-duc -Léopold. Il renferme les institutions suivantes :
« L’organisation de la garde civique, qui sera divisée en deux corps : l’un, formé à l’instar de la landwehr d’Alle
magne, et propre, le cas échéant, à-faire la guerre ; l’autre,
qui ne pourra être distrait de ses foyers, et destiné à la garde des -villes ;
« L’augmentation de l’armée pourvue d’un matériel dé guerre correspondant;
« Etablissement des municipalités fondées sur le principe de l’élection populaire ; -
« Etablissement des conseils provinciaux sur la base également élective ;
« Une représentation centrale dans les formes que les circonstances suggéreront. »
Etats pontificaux. — Le cardinal Ferretti est allé inspecter la garnison du château Saint-Ange. Après que le carré eut été formé sur la place d’armes, le cardinal fit entendre l’allocution suivante :
« Soldats ! je viens près de vous par le commandement exprès de NOtre bien-aimé souverain pour vous témoigner en son NOm l’expression de sa satisfaction. Vous devez être flattés de ce trait de bienveillance vraiment extraordinaire,
parce que je ne crois pas qu’il soit ordinaire aux souverains de se servir de leur premier ministre, comme ta sainteté le fait aujourd’hui, pour porter des paroles qui ont leur place habituelle dans les ordres du jour.
« Je profite de cette circonstance’pour vous exhorter à demeurer observateurs du devoir et de la discipline, NOn que j’aie des raisons particulières de vous le dire. Grâce à Dieu, NOus sommes tranquilles et paisibles, plus peut-être qu’aucun autre peuple. Cependant, si quelque danger se présentait (ce qui certainement n’est pas), je suis certain que, reconnais
sants et pieux envers votre souverain, qui est aussi votre père, vous donneriez des preuves de votre fidélité et de votre
courage, et vous ne seriez pas seuls... je serai votre com
pagNOn.
« Quoique revêtu de l habit du prêtre, et que je ne puisse avoir le courage militaire, je puis vous alfiriner que j’ai assez
de courage civil pour ne pas me tenir en arrière à l’occa
sion; mais, je le répète, le danger ne viendra pas. Soldats! je
vous recommande trois choses : religion, fidélité, discipline, Vive Pie IX! »
Un cri général de vive Pie IX ! suivi du cri vive le cardinal Ferretti ! répondirent à ce discours. Le cardinal reprit immédiatement la parole :
« Si quelqu’un désire par la suite me parler en particulier, qu’on sache que chaque samedi je recevrai tous les militaires qui se présenteront, soldats comme officiers. »
Au sortir du château Saint-Ange, le cardinal se rendit à la caserne de Sora, occupée par les grenadiers.
Le motu-proprio du pape sur l’organisation du conseil municipal et du sénat de Rome a été publié le 2 de ce mois. C’est une grande réforme pour Rome, privée depuis si long
temps du bénéfice des institutions municipales dont jouissent les autres villes des Etats pontificaux. Ce décret a été fort bien accueilli; on l’a trouvé conçu dans des principes libé
raux. C’est ainsi, par exemple, qu’il enlève aux autorités ecclésiastiques la tenue des registres de l’état civil pour la remettre aux mains des autorités civiles. Les articles qui le composent sont au NOmbre de soixante-seize. Par ces dispositions, toute représentation et toute juridiction, soit ad
ministrative, soit judiciaire et baronnale de la magistrature
romaine, qui était en vigueur jusqu’ici, est abolie. Rome et tout l agro romaNO seront représentés et administrés, comme les autres pays de l’Etat, par un conseil délibérant et une magistrature’ administrative.
Le conseil sera composé de cent membres, dont soix antequatre propriétaires, trente-deux exerçant des professions libérales ou appartenant aux collèges ou institutions scienti
fiques, littéraires ou artistiques, banquiers, négociants, et quatre représentant le clergé et les établissements de bienfaisance.
La NOmination des conseillers municipaux sera faite la première fois par le souverain ; ensuite elle se fera par le conseil même, par tiers, de deux ans en deux àns, ou d’a­
près les NOuvelles lois qui seront publiées sur l organisation générale des conseils municipaux dans les Etats.
La magistrature municipale (qui se NOmmera sénat de Rome) se composera d’un sénateur et de huit conservateurs (adjoints.)
Les attributions du conseil et de la magistrature sont celles des autres villes de l’Etat; enfin l’article soixante et un porte que la municipalité gardera les registres de l’état civil où seront inscrits les naissances, les mariages et les morts, quel que soit le culte des personnes.
Royaume des Deux-Siciles. — Après avoir rapporté des versions fort contradictoires de la Gazette d’Augsbourg sur la situation des partis armés en Sicile, le Journal des Débats, se résumant, ajoute : « Aujourd’hui, l’insurrection est vain
cue, et le gouvernement du roi est fort partout, et partout maître de la situation. Tous les points sur lesquels il pouvait concevoir des craintes sont occupés par des forces im
posantes, et des colonnes mobiles parcourent en ce moment, comme tous les ans d’ailleurs à pareille époque, les provinces. »
Espagne. — La reine, aussitôt après la formation de son ministère NOuveau, a signé deux décrets. Par le premier, les corlès sont convoqués pour le 15 NOvembre ; par le second des réformes administratives que le ministère Salamanea avait, fait décréter le 29 septembre dernier sont rapportées.
Suisse. —En Suisse tous les cantons semblent se préparer pour une grande lutte. On comprend donc l’émoi qu a dû causer dans ces circonstances l’imputation adressée au gou
vernement français d’avoir dirigé des armes et des muni
tions de l’arsenal de Besançon vers un des Etats du Sunderbund. Le vorort de Berne s’en est vivement occupé dans la séance du 7 octobre.
Le 5, l’ouverture de la session extraordinaire du grand conseil du Valais a été marquée par un accident qui a pro
duit une très-grande sensation. M. de Courten, président, ouvrait la session par un discours où il cherchait à enflam
mer l’ardeur belliqueuse des députés. Au moment où il les encourageait à répandre jusqu’à ia dernière goutte de leur sang pour la défense de la religion, il tomba mort, frappé d’un coup d’appoplexie, sous les yeux de l’assemblée stupé
faite. Que n’eut pas dit son parti sur le doigt de Dieu, si une pareille mort avait atteint un magistrat libéral, parlant dans un sens opposé!
Bavière.— La première séance de la session de la chambre haute a été signalée par un incident piquant. Lors de la vérification des titres de M. le baron de Reissach, NOuvel ar
chevêque de Munich et Freisingen, M. le prince de Wrede a protesté contre son admission, en sêfondantsur ce que ce prélat, quia étéélevé au collège allemand à Rome, devait appar
tenir à là -Société de Jésus, dont les membres, suivant NOs lois en vigueur, sont exclus de toutes les fonctions publiques. Le président a répondu que la Chambre n’avait pas le droit de s’occuper de cette question, attendu que M. de Reissach, NOmmé archevêque de Munich et Freisingen par le pape, avait prêté entre les mains du roi le serment prescrit, par la constitution, et que par conséquent il était membre né de la Chambre.
Aucune réclamation ne s’étant élevée contre cette observation, le président a fait introduire M. de Reissach ; mais au moment où le NOuveau membre allait occuper le siège qui lui était destiné, M. de Wrede a réitéré sa protestation,
qu’alors il a adressée à M. de Reissach lui-même. Le prélat a dit que, bien qu’il eût fait ses études au collège allemand à Rome, il n’avait jamais fait ni ne faisait partie de l’ordre des jésuites; qu’il connaissait bien les lois de son pays, et que s’il eût été jésuite, il n’aurait jamais eu la mauvaise foi d’accepter une charge que les lois ne lui permettraient pas d’occuper.
M. le prince de Wrede s’est déclaré satisfait de cette explication, et la Chambre a passé à l’ordre du jour.
Russie. — Un jeune aéronaute français, M. Ledet, parti de Saint-Pétersbourg en ballon, est allé malheureusement, à ce qu’il paraît, tomber dans le lac de Ladoga. Voici ce qu’on lit à ce sujet dans la Gazette de la Police du 23 septembre :
« Dimanche, vers six heures du soir, des pêcheurs virent l’aérostat de M. Ledet planer au-dessus de la rive gauche du lac de Ladoga (à environ 300 verstes de Saint-Pétersbourg). Le ballon se trouva bientôt au-dessus du lac même, et com
mença à descendre assez rapidement. Les pêcheurs se jetè
rent dans leurs embarcations et se dirigèrent vers le point où l’aérostat semblait devoir tomber. Lorsqu’ils arrivèrent, le ballon était déjà descendu et à moitié submergé. L’un
d’entre eux déchira avec ses dents l’étoffe du ballon pour en faire sortir le gaz, et ce n’est qu’après l’évacuation de ce
lui-ci qu’ils purent, mais avec grand’peine, amener à bord de leurs embarcations l’éNOrme aérostat et la nacelle qui y était attachée. La nacelle contenait encore la majeure partie de son lest, mais on n y a trouvé ni le parachute, ni le grand couteau, ni les deux pistolets que M. Ledet avait emportés.1
«D’après cela, il est probable que M. Ledet, se trouvant très-près du lac de Ladoga, a cherché à descendre avec le parachute ; mais comme on n’a aucune NOuvelle de lui dans la contrée, il est malheureusemeut douteux qu’il soit arrivé sain et sauf à terre. »
NOuvelles du choléra. —D’après le Messager d Odessa, le choléra s t tait montré dans les provinces néo-russes orien
tales dès la mi-juillet. Le tableau statistique de ses ravages donne 401 morts sur 640 personnes qui ont été atteintes du fléau. Dès l’apparition du choléra, le gouvernement a fait prendre des mesures nécessaires pour établir des hôpitaux, et en même temps pour surveiller la vente des légumes et des fruits. On a remarqué que, par suite de cette dernière mesure, il y a eu décroissance sensible dans les cas de choléra.
D’après les correspondances, le fléau se rapproche de Moscou. On dit même qu’il y a déjà eu quelques cas de mort dans cette ville. Une famille appartenant à la classe élevée, qui se rendait de Saratoff à Moscou, a perdu deux domesti
ques pendant la route, et, arrivée à Moscou, il est encore mort un enfant, et sa NOurrice. Un aide de camp de l’empe
reur, le colonel Stalupin, qui était dans une de ses terres, près de Saratoff, a succombé au fléau.
Grèce. — Le délai d’un mois relatif à l interdiction du cabotage sous pavillon grec dans tous les ports de l’empire turc a expiré le 26 septembre.
La chambre des députés a veté à l’unanimité une adresse au roi dans laquelle elle rend plein hommage et paye un tri
but de regrets au grand citoyen que la Grèce vient de per
dre. Le roi, dans sa réponse à cette adresse, s’est associé à
ces manifestations. La représentation nationale, NOn contente d’applaudir à la direction donnée par M. Goletti à la marche des affaires, exprime le vœu de voir lé gouvernementipersister dans cette marche, lui promet son concours, et félicite le roi de la résolution qu’il a prise de conserver dans le cabinet les hommes dont M. Coletti avait voulu s’entourer. Ce langage si ferme et si explicite est donc de nature à dissiper les doutes et les appréhensions.
Etats-Unis et Mexique. — Un armistice a été conclu entre le général commandant l’armée des Etats-Unis et le gouvernement de Mexico pour ouvrir des négociations. Cet
armistice s’étend à trente lieues autour de Mexico; il durera tant que dureront les négociations, et les hostilités ne pourront être reprises que quarante-huit heures après la déNOn
ciation de la convention. Aucune des deux armées ne pourra recevoir de renforts, mais le passage des provisions sera li
bre. Le négociateur, du côté des Etats-Unis, est M. Trist, qui accompagnait l’armée. Les commissaires mexicains l’ont rencontré à Itzacapulsaco, à une lieue de Mexico. Le général Valencia tomentail une révolution contre Santa-Anna ; cette révolution était de nature à empêcher les négociations pour la paix, sur la conclusion de laquelle, du reste, on semble compter assez peu aux Etats-Unis.
— On lit d ans les journaux américains, sous la date de Boston : « Un jeune homme appelé Boyington, compositeur à l’imprimerie du journal le Palladium de Nexv Haven, a été pendu à Alabamaj il y a quelques années, comme coupable de l’assassinat d’une personne avec laquelle il voyageait. En vain Boyington avait-il protesté de son inNOcence, des preu
ves accablantes s’élevaient contre lui. Cependant le maître de l’auberge dans laquelle le meurtre a été commis vient de mourir après avoir déclaré que lui seul était le meurtrier et que l’inNOcence de Boyington était complète. »
Explosion. — On écrit de Magdebourg (Prusse), le 2 octobre : «Avant-hier, la grande chaudière à vapeur de la raf
finerie de sucre de MM. Foeltscher etC6,à Suderbourg, près de NOtre ville, a éclaté. Les débris de cette chaudière, qui en partie ont été lancés jusqu’à une distance de quatre cents pieds, ont atteint trente-trois ouvriers, dont quatre ont été
tués sur place, six sont morts pendant qu’on les transportait. à l’hôpital, et huit ont succombé dans la journée d’hier. Les quinze autres ne sont pas encore hors de danger. »
Nécrologie. — Un de NOs savants illustres, le digne collaborateur de Cuvier, M. Alexandre Brorigniart, directeur de h manufacture de porcelaine de Sèvres, ingénieur en chef des mines, membre de l’Académie des sciences (section de
minéralogie), professeur au Muséum d’histoire naturelle,vient de mourir à l âge de soixante-dix-huit ans. Il était depuis quarante-sept ans directeur de Sèvres, depuis trente-deux
ans membre de l’Institut. Laborieux, se faisant un devoir de protéger les jeunes gens qui aimaient la science, M. Brongniart l’avait cultivée constamment avec ardeur. Il avait épuisé ses forces à composer son grand Traité dts arts céramiques, qui a paru il y a trois ans ; il avait rassemblé tous
ses efforts pour léguer cette œuvre importante à la postérité, et ensuite il s’est éteint lentement. Depuis trois ans, chaque jour il déclinait, et il répétait souvent : J’ai fini, je pars! — L’Illustration a publié le portrait de M. Brongniart dans son numéro du 1er août 1844. — M. le marquis Just de Chasseloup-Laubat, membre de la chambre des députés, ministre plénipotentiaire de France près la confédération gerrnanique,
est mort à Francfort dans la nuit du 6 au 7. Il n’était âgé que de quarante-sept ans. — M. de Saint-Rome-Gualy, évêque
de Carcassonne, vient de mourir. Ce prélat était né à Milhau (Aveyron) le 1er juin 1765. Il avait été NOmmé évêque le 25 octobre 1824 et sacré le 24 avril 1825. — M. Lorin, ancien député, est mort à Juliénas (Rhône) , à l’âge de soixante-sept ans.
Le jeune archiduc Frédéric, commandant en chef de l’escadre autrichienne, est mort le 5 à Venise. — A Rome est mort le 30 du mois dernier le cardinal Alberghini, de Bologne.