des douanes intérieures, en vivifiant la production, développera de NOuveaux rapports d’échange, et donnera un NOuvel aliment au commerce déjà fort actif qui a lieu depuis un temps immémorial entre les deux pays.
NOus avons donc cru utile de dire ici quelques mots de cette fédération douanière, de sa population, du mouvement actuel de son commerce, de son territoire, de ses forces pro
ductives, et aussi de ses forces défensives, dans le cas où la jalousie de ses voisins viendrait à menacer les intérêts qu’elle a pour but de réunir.
Les bases de la fédération future ont été arrêtées, sauf ce qui touche à la question des tarifs, et un traité provisoire signé entre le roi de Sardaigne, le pape et le grand-duc de Toscane, tant pour le grand-duché, que pour la principauté de Lucques, qui forme aujourd’hui partie de ses Etats. Ces trois Etats ensemble contiennent en superficie 2,328 milles car
rés, et une population d’au moins 8 millions d’habitants, sans compter les adjonctions qui ne pourront manquer d’arriver aussitôt la mise en vigueur du NOuveau système, car cette union ne sera pas complète tant que les duchés de Modène et de Parme persisteront dans leur isolement ; mais, pressés de toutes parts, étreints d’un côté par les douanes du royaume lombardo-vénitien, de l’autre par la NOuvelle fédération com
merciale, leur intérêt les amènera peu à peu à une fusion pro
fitable à tous. Leur peu de développement rendra encore leur isolement plus pénible, et en même temps par une consé
quence inverse, on verra s’accroître, dans une proportion cor
respondante à l’étendue de leur territoire, la prospérité des pays fédérés. Aussi ne craigNOns NOus pas de NOus tromper en disant que de tous, c’est le royaume de Sardaigne qui recueil
lera le plus de fruits du NOuvel ordre de choses. En effet, si jusqu’à présent on n’a jeté qu’un coup d’œil distrait sur l’état industriel de la Sardaigne, c’est qu’on s’est avant tout préoc
cupé d’exalter cette magnifique et savante culture qui est
pour ainsi dire l’orgueil de l’Europe civilisée ; mais il n’en est pas moins vrai que ce royaume est aujourd’hui le centre d’un mouvement industriel fort remarquable. Sans parler de ses manufactures royales, où se font des tapisseries de haute lisse, et de ses grands ateliers où sont exécutés toutes sortes d’instruments de guerre, il possède de NOmbreuses fabriques de soieries qui, quoique inférieures à celles de Lyon, appro
visionnent cependant une partie de l’Italie, et NOtamment tout le pays de Gênes, où elles se placent de préférence aux tis
sus étrangers, qui sont d’un prix fort élevé. Des fabriques importantes de bas de soie, de cotonnades, de fleurs artifi
cielles, de draps, de chapeaux de paille et de feutre, de papiers peints, d’instruments d’optique, de bijouterie, de quin
caillerie, de parfumerie, de liqueurs, d’ouvrages en marbre, y donnent lieu à un commerce important. Mais d’autres pays ne seront pas moins favorisés. La principauté de Lucques, déjà si heureuse de son incorporation à la Toscane, verra augmenter, avec l’étendue du marché, le chiffre de ses transactions. Aujourd’hui ce petit pays exporte déjà pour un mil
lion de francs d’huile d’olive, et 30,000 livres pesant de soie. Là encore on se ressent de l’activité imprimée par l’adminis
tration française. On compte à Lucques des fabriques d’ébenislerie, de draps, d’indiennes, de velours, de gants de peau, et d’autres manufactures exportent des étoffes de soie et des bonnets de laine à l’usage de l’Orient. L’Union facili
tera NOtamment à son profit toutes les opérations de change. Elles continueront probablement à se faire, comme aujour
d’hui, par l’intermédiaire de la place de Livourne ; mais le
peu de lettres de change tirées sur la place de Lucques ne peuvent être acquittées qu’en monnaies du pays, et à leur défaut, comme elles sont peu NOmbreuses, en monnaies de Toscane. Cet état de choses cessera peu à peu par la mise en vigueur de l’association douanière.
L’Etat romain, de son côté, borné par la Méditerranée et par l’Adriatique, donnera à l’union une grande étendue de côtes. S’il n’a que quelques manufactures peu avancées, il possède des richesses naturelles et des ressources agricoles, qui, développées par une sage administration, s’échangeront plus tard avec avantage contre les produits manufacturés des autres parties de l’union.
Mais ce n’est pas tout encore : il faut que l’association ainsi constituée puisse conserver son indépendance et se défendre contre la jalousie de ses voisins. Ce n’est donc pas ex
céder les bornes de cet aperçu que de jeter un coup d’œil sur ses forces militaires. D’après Ricciardi, les Etats sardes comptent dans le chiffre des forces générales indigènes de la péninsule italique pour 81,000 hommes, les Etats romains pour 13,233, la Toscane pour 4,800, sans compter les gar
des-côtes de l’île d’Elbe, et Lucques pour 720. Mais comme en Sardaigne tous les hommes sont soldats, qu’une partiforme l’effectif de l’armée, et les autres, sous le NOm de provinciaux, restent à la disposition du gouvernement, l’armée peut être facilement portée à 138,000 hommes. L’île de Sar
daigne a en outre 15 bataillons et U escadrons de milices. Les Etats du pape ont aujourd’hui une garde nationale de
150.000 hommes, sans y comprendre les troupes auxiliaires de réserve qui restent dans leurs foyers, et dont l’effectif est
de 18,000 hommes, et un grand NOmbre de douaniers qui font journellement le coup de feu avec les contrebandiers.
Ainsi, d’après ces chiffres, on peut évaluer à environ 150.000 soldats l’armée régulière que l’union NOuvelle pour
rait mettre sur pied pour sa défense. On se souvient encore qu’en 1813 l’armée du royaume d’Italie formait 65 bataillons, 30 escadrons, possédait une NOmbreuse artillerie et une réserve considérable.
Pour terminer, évaluons brièvement 1 importance des affaires que fait la France avec les trois pays qui vont former l’union douanière italienne. D’après le relevé officiel des douanes, au commerce spécial, la somme des produits échan
gés ne s’élève pas annuellement à moins de 150 unifions de francs, et elle doit s’augmenter encore par les facilités que le NOuvel ordre de choses, et une législation plus en harmonie avec les besoins et les vœux des populations, doivent donner au commerce.
Réforme postale.
Le directeur général des postes d’Angleterre, le marquis de Glanricarde, vient de quitter Paris, où il était venu stimu
ler la mollesse de M. Dumon, éclairer l’inexpérience de M. Dejean, et chercher à obtenir d’eux le concours nécessaire pour améliorer le service postal entre les deux rives de la Manche. L’administrateur anglais a été assez heureux pour mener ses arrangements à bonne fin, et à partir du lcrjanvier prochain il y aura deux courriers par jour de Paris à Londres,
et vice versa. Les départs de Londres auront lieu tous les jours à onze heures et demie du matin, pour arriver à Paris le lendemain matin à quatre heures, voie de Douvres et Ca
lais, et le soir, à huit heures, voie de Douvres et Boulogne, pour être rendus à dix heures et demie du matin, le lende
main, à Paris. De Paris, le premier courrier sera expédié à midi par Calais, et le second, à sept heures du soir, par Boulogne ; de sorte que les deux dépêches seront rendues respectivement à Londres le lendemain, à quatre heures et à dix heures et demie du matin.
Encore une fois, rendons grâce de cette amélioration à l’insistance de l’Angleterre. Les réclamations les mieux
fondées, les plus générales, les plus persévérantes, se font entendre vainement de tous les côtés de la France en faveur de la réforme postale ; en vain les conseils généraux la de
mandent, en vain le conseil général de la Seine vient, lui aussi, dans sa session qui clôt la session des conseils, de faire entendre le même vœu. On demeure sourd à tant et de si justes représentations, dont le succès n’intéresserait que la France. Tâchons, si NOus voulons réussir, d’obtenir l’apostille de l’Angleterre.
Ce ne sont cependant pas les exemples qui, à défaut d’initiative, manquent en cette question, comme en beaucoup d’autres, à NOtre gouvernement. Chaque jour la Grande- Bretagne fait un pas NOuveau dans cette voie d’améliorations postales. M. Rowland Ilill, le promoteur de la grande réforme,
que cette idée persévéramment poursuivie a fait appeler au secrétariat général des postes, racontait dans un banquet que lui donnait récemment une sociélé commerciale de Liverpool, entre autres faits curieux sur l’administration dont il fait aujourd’hui partie, qu’au moment même où il quittait Londres il avait vu arriver à Easton-square un de ces en
vois qu’on expédie tous les jours par les voies ferrées : cet envoi remplissait six grands omnibus ; le samedi soir il en faut neuf. Avant l’introduction du penny-postage, le NOmbre
des lettres taxées, NOn compris les affranchissements, était annuellement de 75 millions. Il s’est élevé l’année dernière à 299,500,000, c est-à-dire au quadruple. Ce n’est pas en
core assez pour que le Post-Office retrouve la totalité de son éNOrme et ancien revenu. Aujourd hui, le NOmbre des lettres distribuées dans le district de Londres, comprenant un cer
cle d’un rayon de douze milles autour du Post-Office de Saint- Martin-le-Grand, est aussi considérable que celui des lettres délivrées sous l’ancien système dans tout le royaume-uni. Le progrès est continu et rapide. On comptait l’année dernière 28 millionsde lettres déplus que l’année antérieure.— L’adoption de la taxe d’un penny n’entrave en rien les autres amé
liorations du service, comme on avait paru l’appréhender. Les grandes villes, qui ne communiquaient alors avec Lon
dres que par une seule malle, en ont deux aujourd’hui, et le NOmbre des bureaux de poste de toute espèce s’est élevé de 2,000 à 4,000 dans l’Angleterre et le pays de Galles.
Depuis l’établissement de la taxe uniforme en Angleterre, on pouvait se dispenser d’affranchir ses lettres à la poste, en col
lant sur 1 adresse une espèce de marque ou timbre que l’on se
procure au prix d’un penny (un décime), taux de la taxe pour l’intérieur. Le Post-Office anglais vient encore d’étendre les facilités de ce système, en créant de NOuveaux timbres des
tinés de préférence à l’affranchissement préalable des lettres pour l’étranger.
Les timbres qui ont commencé à être délivrés au public, le 13 septembre, sont de la valeur d’un shelling chacun, de couleur verte et de forme octogone, afin que l’on puisse les distinguer facilement des petits timbres (d’un penny) déjà en usage. Les NOuveaux timbres peuvent, à la rigueur, servir
pour l’intérieur aussi bien que pour l’étranger ; mais ils sont surtout destinés, comme NOus veNOns de le dire, à l’affran
chissement des lettres pour les Etats-Unis, pour l’Inde, la Chine, les Indes occidentales, la NOuvelle-Galles du Sud, la NOuvelle-Zélande et autres pays pour lesquels le prix de l’af
franchissement est de un shelling. D’autres timbres de poste doivent être établis ultérieurement, et il paraît que l’on en
créera de quatre et de six pences pour éviter l’embarras de placer, comme on le fait aujourd’hui, toute une rangée de petits timbres à un penny sur une lettre destinée pour l’intérieur, en raison de l’excédant de son poids.
Le NOmbre de lettres tombées, au rebut, depuis l’établissement du penny postage, n’est qu’une insignifiante fraction de la totalité, la 200e partie à peu près. Cependant la moyenne des valeurs trouvées annuellement dans ces lettres, en espè
ces, bank-NOtes et lettres de change, est encore considérable.
On trouve aussi des milliers de livres sterling dans des lettres sans adresses. On publie de temps à autre le relevé, par ordre du parlement, de toutes ces lettres contenant de l’argent, des valeurs et autres objets de diverses natures, dé
posées à la poste et NOn réclamées. Le NOmbre de celles qui ont été portées au dernier état’s’élevait à 5,201, conte
nant, en argent, 510 livres sterling, en billets de banque d’Angleterre, 1,010, et en effets de commerce, 40,410 livres sterling. L’énumération des autres objets est assez curieuse.
Il s’y trouve des cuillers à café, des mèches de cheveux, des reconnaissances des monts-de-piété, des fleurs artificielles, des rasoirs, des hameçons, des tabatières, des ciseaux, des bonnets de nuit, un congé militaire, un manuscrit grec, des protestations, pétitions, etc. Toutes les lettres NOn récla
mées restent trois ans à la poste, après quoi les valeurs qu’elles contiennent deviennent la propriété du trésor.
Le Post-Office anglais vient de faire connaître, par un avis tout récent, une amélioration NOuvelle. Le public aura la faculté d’écrire ou défaire des remarques sur les journaux ex
pédiés par la poste, en ayant soin d’attacher à ces journaux un timbre de 2 sous. Dans les cas où les journaux sont ac ­ tuellement assujettis au droit de poste de 2 sous (comme lors
qu’ils sont mis à la poste et distribués dans la même ville),
l’écriture ou l’observation n’entraîneront pas de NOuveaux frais. Cette faculté d’anNOtations ne devra s’exercer que sur le journal lui-même ; quant à la bande, elle ne devra porter uniquement que l’adresse du destinataire. Si le journal avec observations est expédié sans le timbre de 2 sous, ou si l’on a correspondu sur l’enveloppe, le journal payera le même port qu’une lettre NOn affranchie du même poids. Ce NOuveau règlement ne s’applique pas aux journaux des colonies ou de l’étranger. Ces derniers, lorsque l’on écrira dessus, ou lors
qu’ils contiendront des écritures incluses, seront passibles d’un port triple de celui qu’ils payent actuellement.
Un congrès postal allemand, composé des représentants de l’Autriche, de la Prusse, de la Bavière, de la Saxe, du HaNOvre, de Tour et Taxis, et de plusieurs autres principautés de l’Allemagne, a tenu sa première séance le 30 octobre dernier. Une union postale y a été votée, et l’on est tombé d’ac
cord, sur un système de zones et sur les taxes NOtablement réduites, dont voici la fixation. Une lettre simple, c’est-à- dire -dont le poids ne dépassera pas 25 grammes, payera,
dans les Etats de l’union postale, 2 kreutzer (8 c. 1;4) pour la distance de six lieues; 5 kreutzer (22 c.) pour vingt lieues, et 10 kreutzer (41 c. 1;4) (monnaie conventionnelle) pour toute distance au delà de vingt lieues.
La Bavière s’était proNOncée pour la taxe unique, mais son opinion n’a pas prévalu.
L’opinion de NOs administrateurs, à NOus, c’est, en tout, le statu quo.
Courrier de Paris.
L’approche de la session se fait sentir dans les régions de l’opposition et du pouvoir, et les hommes politiques dont la conduite procure le plus d’amusement à la société commen
cent déjà à l’attrister par leurs discours. On sait que, pour cette grande entrée en campagne de la politique, le salon sert volontiers d’éclaireur à la tribune; parfois aussi il arrive que la discussion, grâce aux dîners qui se prolongent, s’éta
blit dans la salle à manger. On fait et on défait des ministres entre la poire et le fromage, et les questions se NOurrissent en attendant quelles marchent. On prélude par le jeu des fourchettes au grand jeu parlementaire ; le perdreau est dissecteur et le dindon truffé se fait éloquent ; aussi des malintentionnés pourraient prétendre que, NONObstant les apparences et le drapeau, NOus vivons en pleine restauration.
Quoique la danse soit l’exercice le plus salutaire pour faciliter la digestion, il n’est pas encore beaucoup question de bals dans ces hôtels privilégiés qui passent pour donner partout l’élan et le signal ; les réunions n’y sont encore qu’à l’état de rassemblement ; toute causerie y tourne bientôt en discussion : la redoxva n’a pas encore détrôné le premier-Pa
ris, et les NOtes diplomatiques et autres mémorandum ont décidément le pas sur le coiillon et la valse à deux temps.
Que si par extraordinaire il vous arrive une invitation à quelque fête, vous retrouvez bientôt la politique assise parmi les violons, et oubliant toute mesure. NOus savons un concert qui s’était anNOncé sous les auspices les plus harmo
nieux et qui s’est terminé par une scène reNOuvelée de la convention. Deux amis, d’un modérantisme assez exalté, et dont l’un avait pris Lucerne que l’autre ne voulait pas céder à son adversaire, furent au moment de se décréter d’accusation, et faillirent se demander mutuellement leurs têtes.
On dit aussi que des malheurs domestiques qu’il faut déplorer, en éclaircissant les rangs du personnel de NOs légations, ont iNOculé la fièvre diplomatique à certains salons. Des da
mes grandes et petites ont déployé leur science stratégique et fait de la diplomatie pour le compte de leurs attachés.
Disons un mot de l’attaché d’ambassade, puisque le hasard a écrit son NOm dans NOtre chronique.
L’attaché appartient à une race mixte, et sa généalogie, de même que ses antécédents, offre de grandes différences et de singuliers contrastes. Il en est qui sont sortis tout à coup des recoins les plus obscurs de la bohème littéraire ; d’ai très ont pu s’élever jusqu’à la position de rats politiques, grâce à la faveur de quelque parrain ministériel ou à quelque se; rète protection féminine; quelques-uns enfin, et ce n’est pas le plus grand NOmbre, ont reçu leur premier brevet au ber
ceau : ils sont diplomates comme on est prince, par la grâce de Dieu et par le droit de naissance. Ceux-là sont titrés et millionnaires ; c’est l’aristocratie delà tribu. Quelle que soit la légèreté de ses précédents, l’attaché affecte volontiers une contenance grave et posée ; il a des airs penchés et mysté
rieux qui provoquent les communications confidentielles et promettent le secret. Il fréquente les thés parlementeires, court les raouts politiques et affectionne principalemenr. les bals ministériels. L’attaché danseur recherche les quadrilles
où figurent les femmes d’Etat ; tout en surveillant l’avantdeux et le chassé-croisé, il ne perd pas de vue l’équilibre
européen. Sa conversation a une odeur de chancellerie et côtoie toujours le protocole. L’attaché ambitieux possède une collection de joujoux étrangers, dont ii sait faire un
emploi judicieux ; c’est un grand dispensateur de chapelets bénis à Rome, de verroteries andalouses, de vraies pastilles du sérail et de potiches de l’ancien et du NOuveau monde. L’aRa
ché studieux compulse Dumont et Rinner, épèle l’allemand ou l’espagNOl, et emprunte des manuscrits slaves à la Bibliothè
que. Le frivole mange à l’anglaise pour se perfectionner dans cette langue; il se serre la taille, lustre sa moustache, s’em
baume de parfums et sollicite des missions à l’étranger pour y faire des conquêtes d’héritière. L’attaché a toujours plus