bre de ces dernières, NOus devons mentionner la Société de musique classique, qui a donné sa première séance à la salle Herz, le dimanche 28 NOvembre. D’après la composition du programme, on jugera de l’esprit élevé qui anime cette so
ciété. C’était d’abord le quatuor en si bémol de Mozart : puis le songe à’Iphigénie, air de Gluck; un trio de Mendelssohn- Bartholdy; l’air deThoas, dans l’opéra d’Iphigénie, de Gluck ;
un NOnetto de Spohr. Il suffira aussi de NOmmer les artistes qui ont formé cette société, pour faire d’un seul coup com
prendre à NOs lecteurs avec quelle perfection les morceaux de ce programme ont été exé
cutés; ce sont MM. T. et A. Tilmant, Dorus, Klosé, Rousselot, S. etc. Verroust, Gouffé,
Guerreau, Casimir Ney, Delsarte, etc. NOmmons aussi ma
dame Wartel, qui a joué avec beaucoup de style la partie de piaNO du trio de Menaelssohn.
Ainsi qu’on le peut voir, le but de cette société de musique classique est de populariser les œuvres inusicalessérieuses, anciennes et modernes, sans ex
clusion. Lechanty tiendra aussi son rang, et des productions admirables de ce genre,enfouies depuis bien longtemps dans les bibliothèques, pourront être de NOuveau entendues et applaudies. L’auditoire NOm
breux qui assistait à la première séance fait très-bien augurer du succès de cette société. La deuxième séance aura lieu le dimanche 12 décembre, et les
autres se succéderont pendant tout le courant de l’hiver, de quinzaine en quinzaine, alter
nant avec les matinées de la Société des concerts du Conservatoire. Celle-ci va inaugurer la NOuvelle session par un très-beau concert au bénéfice de son célèbre et vé
nérable chef, M. Habeneck, le 19 décembre. —NOus devons citer aussi les matinées mu
sicales des frères Dancla, qui
ont recommencé dernièrement
dans les salons de M. Ilesselbein, et qui continuent à obtenir, comme par le passé, les plus hoNOrables succès. NOus aurons plus d’une occasion d’en reparler, puisque NOus ne sommes encore qu’à l’entrée de l’hiver, et NOus le ferons toujours
avec autant de plaisir que NOus en avons à écouter cette jeune famille d’excellents artistes.
Voici maintenant un NOuveau NOm et une œuvre NOuvelle qui se sont fait connaître dimanche dernier dans la salle des Menus-Plaisirs.
M. J. B. Wekerlin est un de ces jeunes maîtres pleins d’enlhousiasme, que la réputation éclatante et subite de M. Félicien David anime d’une louable et courageuse émulation. On l’eût deviné seulement à la manière dont le pro
Mademoiselle Alb ni.
gramme de son concert était formé. Dans la première partie, plusieurs morceaux détachés, de caractères divers ; dans la seconde, une œuvre de longue haleine, divisée en scènes
pittoresques de différente nature. Citons d’abord, comme ayant obtenu le plus de succès dans la première partie, le
Cri de guerre, chœur pour voix d’hommes, avec accompa
gnement d’instruments de cui
vre, et l’hymne arabe, Mouled de Setty Zeynab, ravissante composition qui a mérité les honneurs du bis. En général, la musique de M. Wekerlin, exécutée dans cette première partie du concert, porte le ca
chet d’une imagination rêveuse et mélancolique, distinguée, mais manquant d’accentuation précise dans la forme de ses mélodies. L’œuvre de la se
conde partie était une grande scène héroïque, intitulée Ro
land. Elle renferme plusieurs effets de musique imitative bien conçus et bien réussis, d’a­
près lesquels on voit aisément que l’auteur a sérieusement étudié la science de l’orchestration. Les chœurs sont égale
ment bien écrits pour les voix,
et avec une heureuse sobriété de moyens. NOus n’avons enfin que des éloges à donner au mérite de facture dont M. We
kerlin a fait preuve dans cet ouvrage important. Il n’y manque qu’un peu plus d origina
lité, et surtout de n’être pas venu avant l’ode-symphonie du Désert. Mais à l’âge de M. We
kerlin, on est très-excusable de se laisser aller à l’imitation d’un genre adopté par la faveur publique, jusqu’au moment où l’on a soi-même dé
couvert son faire propre et individuel. NOus attendons par conséquent, le jeune au
teur de Roland à son œuvre, deuxième.
Au Théâtre-Italien, lundi prochain, 15 décembre, à huit heures du soir, pour la conti
nuation des débuts de madame Alboni, le Stabat Mater de Rossini, exécuté par Grisi, Alboni, Mario et Coletti. L’ouverture de Mercadante, compo
sée exprès pour ce Stabat, sera exécutée pour la première fois par l’orchestre ; les chœurs ont été augmentés. G. B.
Une lecture chez Tieck.
LE CHAT BOTTÉ.
Il y a soixante et quatorze ans que Tieck est né ; il y en a cinquante-deux qu’il publia son premier ouvrage. Plus heu
reux que la plupart des jeunes néophytes de la littérature qui, dès le collège, prennent d’une main audacieuse les rê
nes de Pégase et s’élancent à travers les sentiers escarpés d’une œuvre poétique qu’ils ne révéleront point au public,
Tieck écrivit à l’université un roman dans lequel, à travers l’effervescence d’une imagina
tion désordonnée, éclatait un esprit d’observation et un talent de style qui ne pouvaient man
quer d’attirer l’attention des critiques. Depuis cette époque,
Tieck n’a cessé d’occuper l’Al
lemagne par une quantité d’œuvres qui lui assurent une grande place et une place trèsdistincte de toute autre dans la littérature de son pays.
Nul écrivain allemand, sans en excepter Goethe, n’a tou
ché à tant de choses, n’a porté son génie en tant de voies diverses. Poète et critique, homme d’art et d’érudition,
passionné pour les anciennes productions de l’Allemagne et pour les productions de littéra
ture étrangère, tantôt il s’en va dans les champs, dans les bois, gazouillant de fraîches chan
sons qui, par leur grâce naïve,
rappellent les mélodies des Minnesinger ; tantôt, avec les frères Schlegel, il entreprend
de ramener l’esprit de sa nation à de NOuveaux principes d’esthétique, d’arracher le pédantisme scolastique au cercle étroit dans lequel le tiennent enfermé des règles trop absolues, des idées routinières. Le moyen âge, avec ses candides
croyances, ses vives et tendres inspirations, exerce sur lui un puissant attrait, et il se jette avec enthousiasme dans ce nuage magique des traditions populaires, des légendes de
saints, comme dans une source pure et vivifiante qui doit retremper son esprit et rafraîchir les ailes de son imagination. Cet amour du moyen âge ne pouvait pas se ré
duire pour Tieck en une placide et stérile contemplation.
Il lui a inspiré plusieurs œuvres que l’Allemagne n’oubliera pas, une reproduction en langue moderne des plus beaux chants des treizième et quatorzième siècles, trois drames :
l’Empereur Octavius, Fortunat.us et Geneviève, où l’on retrouve, dans toute leur mer
veilleuse ingénuité, toutes les compositions féeriques et les pieuses images qui occupaient le cœur de NOs ancêtres. A voir au sein des gothiques châ
teaux, au pied des profondes forêts de la vieille Germanie, tous ces personnages se mouvoir si aisément sous leur ar
mure de fer ou leur manteau
d’hermine, et raconter en vers si simples et si naïvement sentis leur vie et leurs pas
sions, leur crédulité puérile et leurs sentiments chevaleres
ques, ne dirait-on pas que le poète a longtemps et intime
ment existé au milieu d’eux, qu’il a reposé sous leur toit; qu’il a, d’une oreille avide, é- couté comme eux les chroniques du temps, combattu com
me eux contre les infidèles, et comme eux prié sous les som
bres arceaux des cathédrales? De telles œuvres ne sont point, comme on pourrait le croire, de faciles pastiches. Pour atteindre à un tel degré de vé
rité, elles ont dû être préparées par une sérieuse et patiente étude; elles n’ont pu être faites que par une profonde assimi
lation du génie de l’auteur avec le génie de l’époque qu’il représente.
De ce travail sur l’Allemagne du moyen âge, Tieck, avec
sa prédilection pour les époques d’enfance littéraire, reporta
Une scène du Chal botte.