Les causes de cet état de choses consistent dans le poids intolérable de l’existence ordinaire d’un soldat aux Indes. L’em
prisonnement n’effraye point, parce qu’il offre une perspective encore moins triste que les devoirs de chaque jour. La même chose se peut dire de la déportation. Les soldats préfèrent n’importe quel avenir aux réalités du présent.
«C’est ce qui est arrivé pour le malheureux mis à mort dans des circonstances si tragiques. 11 a avoué devant le con
seil de guerre qu il n’avait aucun motif de haine contre le su
périeur qu’il avait frappé, et que son seul but était de se faire condamner à la déportation, parce qu’il était las de la vie qu’il menait. »
Irlande. — On a de bien affligeants détails sur la misère qui désole ce malheureux pays. Dans aucune paroisse du dio
cèse de l’évêque de Kerry il n’y a assez de nourriture, et à si bon marché que soit le riz, le peuple n’a aucun moyen de l’acheter. L’on voit des prêtres vendre ou engager tout ce qu’ils possèdent pour se procurer les choses les plus néces
saires à la vie : le curé de Glengariff s’est vu contraint, il y a
quelques semaines, de faire dans son église une quête pour lui-même : il n’en recueilit que quinze schellings. L’évêque de
Cloyne et Ross écrit que la récolte des pommes de terre est déjà presque entièrement épui
sée ; les pauvres se nourrissent presque exclusivement de navets. L’on a trouvé des mil
liers de malades attaqués de la fièvre ou de la dyssenterie, gi
sant sur une terre humide, quelquefois même sans une misérable litière de paille, n’ayant pour toute couverture que les haillons qu’ils portent le jour, et pour unique nourri
ture de l’eau froide. Voici la situation d’une seule paroisse du diocèse de Rilfenora, d’a­ près les renseignements four
nis par son curé. Depuis le dernier mois d’octobre, la fa
mine, l’épidémie, la maladie, ont ôté la vie à 600 personnes.
La population actuelle de la pa
roisse est de 5,000 âmes. Mille familles ont été obligées de quitter leurs maisons ; 250 famil
les environ ont une nourriture suffisante jusqu’à la prochaine moisson ; 692, comprenant
2,604 âmes, n’ont aucune terre à cultiver et sont dans un dénûment complet.
Espagne.—Il y a eu une nouvelle modification ministé
rielle à Madrid. M. Beltran de Lys a quitté la marine pour les finances, et. en remplaçant M. Orlando, il a été remplacé lui -même par M. Tojorès. La sortie du cabinet de M. Orlando a été mise dans le public sur le compte de sa santé. Mais ce qui annonce que ces remanie
ments ont une cause, c’est que postérieurement à celui-ci, le 27 décembre, le bruit de la retraite du général Narvaez Cir
culait hautement à Madrid. Il peut être prématuré, mais cette rumeur annonce plutôt une crise qui commence qu’une crise qui finit. Tout cela fait de l’arrivée du général Espartero un véritable événement.
Portugal. — On a reçu des nouvelles de Lisbonne à la date du 25 décembre dernier; le ministère a donné sa démis
sion, et le cabinet suivant a été nommé par la reine : Pré
sident du conseil, ministre des affaires étrangères et de la
guerre ad intérim, le duc de Saldanha; intérieur, Bernardo
Georgao Henriques ; finances, Joaquïm-Jose Falcao; marine, A. A. de Silveira-Pirito ; justice, J. J. de Queiros. Quoique purement chartiste, ce ministère a été accepté tranquillement par le peuple, et l’ordre n’a pas été troublé un seul instant.
, gouvernements de France et d’Espagne ont refusé de s associer à la protestation de sir H. Seymour contre les élections. Ils auraient bien sagement fait de ne pas s’associer davantage à l’intervention entre la reine et la junte.
Deux-Siciles. —La correspondance de Naples dit : «L’ordre n’a plus été troublé ici depuis les événements du 14. On a pris des mesures militaires imposantes, et toute tentative d émeute serait immédiatement réprimée. La situation poli
tique est toujours aussi tendue. L’arrestation du ducd’Albanetto et du duc de Malvita, et surtout celle du fils du prince de Torella, auquel a été retiré son brevet d’officier de la garde civique, ont produit, dans une société où presque toutes les l umlles sont alliées, un vif mécontentement. Les jeunes déte
nus, auxquels du reste sont accordées toutes les facilités com
patibles avec leur captivité, ont reçu, le premier jour de leur arrestation, cent cinquante-cinq visites de personnes dont les noms ont été enregistrés. Depuis lors, les visiteurs se portent en foule à Iajprison de Saint-Francesco.
«L ordre avait été donné à tous les jeunes gens des pro
vinces qui suivent à Naples les cours de l’Université de quitter la capitale avant les fêtes de noël. Ces étudiants sont au nom
bre de huit à dix mille : s’ils étaient partis, un quartier tout entier se serait trouvé presque dépeuplé. Ceux qui vivent à Naples de la présence de ces jeunes gens ont réclamé contre une mesure qui a provoqué un blâme général. Cet ordre a été révoqué hier dans un conseil des ministres que le roi prési
dait. Pour rester, il suffira que chaque étudiant indique à Naples une personne qui réponde de lui.
«La presse clandestine continue à exercer son action. Des pamphlets sont continuellement lancés dans les masses et envoyés particulièrement en Sicile. On avait même commencé à en répandre dans les casernes, mais ces provocations n’ont produit jusqu’ici aucun effet. Le gouvernement napolitain s’est montré vivement blessé de la permission accordée parle gou
vernement sarde aux auteurs d’un chant incendiaire, adressé aux Siciliens, quia été imprimé à Gênes avec l’approbation de la censure et envoyé par milliers d’exemplaires en Sicile. »
Duchés de Modène et de Parme. — A la suite de troubles à Modène et à Reggio, le duc a demandé des troupes im
périales pour lui prêter appui. Des uniformes autrichiens ayant également paru à Parme, la Gazette officielle de Florence du
28 décembre donne de ces faits l’explication que voici :
« Au moment où l’attention publique est préoccupée de l’apparition des troupes impériales à Modène et à Parme, nous nous empressons d’annoncer que ce fait ne doit causer aucune appréhension.
_ « Le gouvernement toscan est informé d’une manière officielle qu’un détachement de cavalerie hongroise s’est rendu à Parme dans le but unique de former une escorte d’honneur pour le transport des restes de S. M. l’archiduchesse Marie- Louise à Vienne, d’après les dernières volontés de celte princesse. Les troupes entrées dans l’Etat de Modène y sont ve
nues tout à lait régulièrement, la demande en ayant été faite par le duc lui-même au général en chef à Milan, par suite de quelques désordres populaires survenus à Modène et à Reggio, et dans le but de maintenir plus efficacement la tranquillité publique, au moment où la plus grande partie des troupes du duché se trouvaient de l’autre côté de l’Apennin.
« En même temps a été renouvelée la déclaration positive, déjà faite spontanément par le gouvernement impérial d’Autriche, de vouloir s abstenir toujours d’intervenir militaire
ment dans aucun Etat de l’Italie, si ce n’est dans le cas où le souverain légitime aurait directement demandé du secours. »
Etats pontificaux. — On lit dans le Diario dï Roma, journal officiel, d i 21 décembre: « nous nous réjouissons
d’annoncer que ces jours derniers sont arrivés de France douze mille fusils à percussion pour armer la garde civique de Rome. A cette occasion, nous ne saurions omettre de té
moigner notre reconnaissance à M. Guizot, président du ministère français; à M. le général Trézel, ministre de la guerre, et à M. le comte Rossi, ambassadeur de France à Rome, pour leurs soins actifs, leur noble et généreux empressement à faciliter la conclusion de cette affaire. Si l’ac
quisition de ces armes a tardé un peu plus qu’on ne l’avait pensé d’abord, cela tient uniquement à des doutes qui se sont produits plusieurs fois sur le meilleur système d’armement à choisir entre divers modèles de fusils. »
« Le statu quo vient d’être rélabli à Ferrare. Le service de garnison sera partagé. Les troupes autrichiennes, en conser
vant leurs quartiers dans les casernes qu’elles avaient tou
jours occupées dans la ville, feront le service de la citadelle ; les troupes pontificales feront le service de la ville. »
Toscane. — La Gazette de Florence du 23 décembre annonce que, le 25 janvier prochain, il sera ouvert à Florence une conférence dans laquelle vingt et une personnes nommées par le gouvernement devront poser les bases dMn nouveau système municipal. Dans le préambule de l’ordonnance qui a
été publiée à ce sujet, il est dit « qu il faut que les réfor
mes relatives aux lois et aux règlements municipaux soient coordonnées avec celles qui doivent avoir lieu dans le sys
tème politico-gouvernemental du grand-duché. » Ces ex
pressions pourraientfaire croire que les espérances de ceux
qui espèrent en Toscane voir sortir de la réforme munici
pale un système représentatif ne sont pas dénuées de fondement.
La Patria publie, sous la rubrique de Florence, 27 décembre, la nouvelle suivante :
« Si nous sommes bien informés, le gouvernement a passé un traité pour l’acquisition d une grande quantité de fusils anglais. On assure en outre qu il va partir de Toulon, sur la corvette à vapeur le Triton, 50,000 fusils à percussion et un grand nombre d’autres armes, parmi lesquelles mille cara
bines de tirailleurs. Le roi des Français s’est empressé de répondre aux instances de S.
A. le grand-duc pour obtenir ces armes. »
Suisse. — La diète, sans prononcerjd’ajournement à ses séances, les a néanmoins sus
pendues.Elles ne seront reprises que vers le 10, époque à la
quelle les députations nouvelle
ment nommées des cantons de l’ex-Sunderbund seront arri
vées à Berne, et où l’on pourra s’occuper de la révision du pacte fédéral.
Hollande. — Le ministère de ce royaume vient d’être modifié; il est aujourd’hui com
posé de la manière suivante : affaires étrangères, M. le comte de Randwyck ; intérieur, M. le chevalier (Jonkheer) van der Heim; finances, M. le chevalier van Rappard; jus
tice, M. le chevalier de Jonde; culte réformé, M. le baron de Zuylen de Nyevelt ( tous ap
partenant à l’aristocratie la plus pure); guerre, M. le général List; marine, M. Ryk; colonies, M. Baud ; culte catho
lique, M. van Son. Ce cabinet est décidément rétrograde, et c’est une triste réponse aux vœux de réforme exprimés de toutes parts dans le pays.
Prusse. — On lit dans une correspondance publiée sous la rubrique de Berlin, 28 décembre, par le Journal de Francfort : « noiis avons eu occasion ces jours-ci de voir une liste officielle des personnes qui, en Prusse, ont changé de religion pendant l’année 1846. La plupart sont des israélites qui se sont convertis au christianisme ; la plus grande moitié ont embrassé le protestantisme, et un tiers environ le catholicisme; une centaine de personnes sont passées du protestantisme au catholicisme. »
Autriche. — On écrit de Vienne, 26 décembre :
« La commune israélite de notre ville s’est adressée directement à l’empereur pour lui demander l’émancipation politique et civile. Sa Majesté a accueilli favorablement la péti
tion et l’a envoyée aux autorités compétentes pour lui faire un rapport. La pétition se réduit à trois points : abolition de l’impôt israélite, suppression de la taxe de séjour, droit d’ê­
tre chef de métier et bourgeois. On assure que la régence a fait un rapport favorable sur l’ensemble de la pétition ; mais on ne pense pas que les israélites obtiendront les droits de bourgeoisie, l’opinion publique n’étant pas encore mûre à cet égara.»
Haïti. — On a reçu des nouvelles du Port-au-Prince, en
Le nouvel Office télégraphico-électrique de Londres, communiquant déjà avec cent localités de la Grande-Bretagne.