On peut donc conclure de là que si les points d’appui ou les traverses résistaient de la même manière, on ne serait pas obligé de donner aux; rails une force exagérée pour se pré
munir contre.les effets dangereux que pourrait produire le peu de résistance d’un certain nombre d’entre eux. Ajoutons que l’on a dû augmenter la dimension des traverses et des rails pour combattre autant que possible ces effets, et que, par suite, la couche de sable est plus épaisse. Enfin sou
vent les chevilles s’usent, le coussinet joue ou glisse sur la traverse, le coin mal retenu se desserre. Aussi tous les in
génieurs conviennent-ils qu’il est fort difficile d’avoir une bonne voie, et qu’on ne peut l’obtenir qu’au prix de sa(ffifices énormes.
D’après ce que nous venons de dire, on peut prévoir que la bonté d’une voie dépend presque exclusivement de la forme, de la di
mension et de la stabilité des traverses. C’est vers leur amélioration que se sont tournés les efforts d’un habite entrepreneur, M. Pouillet.
Si nous donnons place à son invention dans notre recueil, c’est que l’Illustration a toujours eu pour but de tenir ses lecteurs au courant des innovations utiles, des inventions impor
tantes; c’est que nous avons vu le système de M. Pouillet employé à la gare des marchan
dises du chemin de fer du nord, et que nous n’y avons trouvé que des avantages , sans qu’un seul inconvénient se soit encore révélé à nous.
La traverse, pour maintenir l’écartement des voies, n’a pas besoin de fortes dimensions; mais pour subir la pression occasionnée par le passage des convois, elle doit présenter la surface la pluslarge possible.
Pour atteindre ce double but, M. Pouillet a construit des traverses (dont nous donnons le dessin), dont la section n’est que de 90 centimètres carrés, au lieu de 575 que pré
sentent les traverses ordinaires, et dont les extrémités présentent des surfaces de 30 dé
cimètres carrés, au lieu de 40 à 42, comme
dans les traverses actuelles. Il leur a donné le nom de traverses à tables de pression. Elles ont une hauteur et une largeur con
stantes. Les surfaces des tables de pression étant grandes et toujours les mêmes, on a la certitude que, sur un sol déter
miné, tous les points d’appui résisteront de même, et qu’on pourra en toute assurance se dispenser de donner une force exagérée aux rails et aux coussinets. La traverse proprement dite a 2 mètres 40 centimètres de longueur sur 0 mètre 06 centimètres de hauteur, et 0 mètre 4 S cemimètres de largeur. Les tables de pression sont en deux morceaux ; elles
ont 0 mètre 60 centimètres de longueur sur 0 mètre 50 centimètres de largeur et 0 mètre 04 centimètres d’épaisseur. Un stère de bois peut donner vingt traverses de cette espèce, toutes en bois débité et purgé d’aubier, tandis qu’on ne peut en tirer que huit à dix traverses ordinaires, présentant sou
vent de l’aubier. De plus, ces dernières ne peuvent être prises que dans des bois de grande dimension, tandis que les premières peuvent être faites en bois de toute dimension. La na
ture de la traverse Pouillet permet de réduire beaucoup la hauteur du ballast, ce qui offre une grande économie.
M. Pouillet ne s’est pas borné à améliorer la traverse ; il a cru devoir donner aussi au coussinet une forme particulière. Son coussinet a une base large, évidée un peu au-dessous
pour lui ôter un poids inutile : il porte une nervure ou tenon, qui a pour but d’augmenter la section transversale et de donner plus de résistance contre la tension produite par le ser
rage des coins, et qui sert de plus à-le fixer sur la traverse,
en s’engageant dans une mortaise faite avec précision. Dans la chambre intérieure se trouve une nervure sur laquelle re
pose le rail, et la face extérieure présente une partie large pour que le coin soit pressé sur une grande surface. Enfin, il est fixé à la traverse par les deux boulons, qui servent à y fixer également la table de pression.
La pose se fait avec la plus grande facilité et la plus grande précision ; car, toutes les traverses ayant même longueur et même hauteur, on nivelle le sable par un moyen mécanique, et l’on n’a plus qu’à poser et à espacer les traverses qui portent toutes bien et également.
M. Pouillet, dans le but d’économiser d’une part les frais de terrassement et d’autre part le ballast, propose de déblayer les terres seulement à l’endroit où doivent se trouver les ta
bles de pression. On aurait ainsi deux fossés longitudinaux, dans lesquels le sable serait maintenu, et où des perrés placés de distance en dislance permettraient l’écoulement des eaux. Cette partie de son système, qui, d’ailleurs, n’est qu’un accessoire, et est parfaitement indépendante de sa voie propre
ment dite, ne nous-paraît pas aussi heureu
sement trouvée que le reste; elle soulève de nombreuses objections, dont quelques-unes sont très-graves.
A notre avis, les voies construites avec les traverses Pouillet doivent être plus régulières, plus stables; par suite, le roulement des con
vois sera plus doux, le mouvement de lacet évité ; les frais d’entretien de la voie seront moindres, et ceux de traction et d’entretien du matériel roulant réduits dans une forte proportion.
Quant au prix, il est tout à l’avantage de ce nouveau système. En effet, 4 mètre de sim
ple voie ne dépassera pas 58 francs avec le rail de trente kilogrammes et le coussinet de sept kilogrammes, ou 42 francs, si l’on em ploie deux mètres cubes de ballast.
Le mètre de voie dans le système actuel coûte 50 francs, ou même 62 francs, d’après M. Jullien. La différence est donc de 42 à 45 francs par mètre de voie simple, par consé
quent de 25 à 30,000 francs par kilomètre de voie double.
Or, la France aura près de sept mille kilomètres de chemins de fer. L’économie résultant de l’emploi du nouveau système aurait donc été de 175 à 210 millions. iPourles cinq mille kilomètres non encore exécutés, l économie serait de 425 à 450 millions.
Certes, ce résultat vaut qu’on y réfléchisse. On ne trouve pas aujourd’hui beaucoup d’économies qui se chiffrent par centaines de millions, et un système qui serait de nature à diminuer de près d’un dixième les coûteuses constructions qui occupent tant de bras en France, exige un examen sé
rieux de la part des hommes de l’art, que nous adjurons d’aller voir par eux-mêmes au chemin de fer du nord l’application qui en a été faite.
Etude par Valentin.
UNE HALTE DE BOHÉMIENS DANS LES VOSGES,
Chemins de fer. — Traverses a tables de pression.
Système ordinaire. Système de M. Pouillet.
munir contre.les effets dangereux que pourrait produire le peu de résistance d’un certain nombre d’entre eux. Ajoutons que l’on a dû augmenter la dimension des traverses et des rails pour combattre autant que possible ces effets, et que, par suite, la couche de sable est plus épaisse. Enfin sou
vent les chevilles s’usent, le coussinet joue ou glisse sur la traverse, le coin mal retenu se desserre. Aussi tous les in
génieurs conviennent-ils qu’il est fort difficile d’avoir une bonne voie, et qu’on ne peut l’obtenir qu’au prix de sa(ffifices énormes.
D’après ce que nous venons de dire, on peut prévoir que la bonté d’une voie dépend presque exclusivement de la forme, de la di
mension et de la stabilité des traverses. C’est vers leur amélioration que se sont tournés les efforts d’un habite entrepreneur, M. Pouillet.
Si nous donnons place à son invention dans notre recueil, c’est que l’Illustration a toujours eu pour but de tenir ses lecteurs au courant des innovations utiles, des inventions impor
tantes; c’est que nous avons vu le système de M. Pouillet employé à la gare des marchan
dises du chemin de fer du nord, et que nous n’y avons trouvé que des avantages , sans qu’un seul inconvénient se soit encore révélé à nous.
La traverse, pour maintenir l’écartement des voies, n’a pas besoin de fortes dimensions; mais pour subir la pression occasionnée par le passage des convois, elle doit présenter la surface la pluslarge possible.
Pour atteindre ce double but, M. Pouillet a construit des traverses (dont nous donnons le dessin), dont la section n’est que de 90 centimètres carrés, au lieu de 575 que pré
sentent les traverses ordinaires, et dont les extrémités présentent des surfaces de 30 dé
cimètres carrés, au lieu de 40 à 42, comme
dans les traverses actuelles. Il leur a donné le nom de traverses à tables de pression. Elles ont une hauteur et une largeur con
stantes. Les surfaces des tables de pression étant grandes et toujours les mêmes, on a la certitude que, sur un sol déter
miné, tous les points d’appui résisteront de même, et qu’on pourra en toute assurance se dispenser de donner une force exagérée aux rails et aux coussinets. La traverse proprement dite a 2 mètres 40 centimètres de longueur sur 0 mètre 06 centimètres de hauteur, et 0 mètre 4 S cemimètres de largeur. Les tables de pression sont en deux morceaux ; elles
ont 0 mètre 60 centimètres de longueur sur 0 mètre 50 centimètres de largeur et 0 mètre 04 centimètres d’épaisseur. Un stère de bois peut donner vingt traverses de cette espèce, toutes en bois débité et purgé d’aubier, tandis qu’on ne peut en tirer que huit à dix traverses ordinaires, présentant sou
vent de l’aubier. De plus, ces dernières ne peuvent être prises que dans des bois de grande dimension, tandis que les premières peuvent être faites en bois de toute dimension. La na
ture de la traverse Pouillet permet de réduire beaucoup la hauteur du ballast, ce qui offre une grande économie.
M. Pouillet ne s’est pas borné à améliorer la traverse ; il a cru devoir donner aussi au coussinet une forme particulière. Son coussinet a une base large, évidée un peu au-dessous
pour lui ôter un poids inutile : il porte une nervure ou tenon, qui a pour but d’augmenter la section transversale et de donner plus de résistance contre la tension produite par le ser
rage des coins, et qui sert de plus à-le fixer sur la traverse,
en s’engageant dans une mortaise faite avec précision. Dans la chambre intérieure se trouve une nervure sur laquelle re
pose le rail, et la face extérieure présente une partie large pour que le coin soit pressé sur une grande surface. Enfin, il est fixé à la traverse par les deux boulons, qui servent à y fixer également la table de pression.
La pose se fait avec la plus grande facilité et la plus grande précision ; car, toutes les traverses ayant même longueur et même hauteur, on nivelle le sable par un moyen mécanique, et l’on n’a plus qu’à poser et à espacer les traverses qui portent toutes bien et également.
M. Pouillet, dans le but d’économiser d’une part les frais de terrassement et d’autre part le ballast, propose de déblayer les terres seulement à l’endroit où doivent se trouver les ta
bles de pression. On aurait ainsi deux fossés longitudinaux, dans lesquels le sable serait maintenu, et où des perrés placés de distance en dislance permettraient l’écoulement des eaux. Cette partie de son système, qui, d’ailleurs, n’est qu’un accessoire, et est parfaitement indépendante de sa voie propre
ment dite, ne nous-paraît pas aussi heureu
sement trouvée que le reste; elle soulève de nombreuses objections, dont quelques-unes sont très-graves.
A notre avis, les voies construites avec les traverses Pouillet doivent être plus régulières, plus stables; par suite, le roulement des con
vois sera plus doux, le mouvement de lacet évité ; les frais d’entretien de la voie seront moindres, et ceux de traction et d’entretien du matériel roulant réduits dans une forte proportion.
Quant au prix, il est tout à l’avantage de ce nouveau système. En effet, 4 mètre de sim
ple voie ne dépassera pas 58 francs avec le rail de trente kilogrammes et le coussinet de sept kilogrammes, ou 42 francs, si l’on em ploie deux mètres cubes de ballast.
Le mètre de voie dans le système actuel coûte 50 francs, ou même 62 francs, d’après M. Jullien. La différence est donc de 42 à 45 francs par mètre de voie simple, par consé
quent de 25 à 30,000 francs par kilomètre de voie double.
Or, la France aura près de sept mille kilomètres de chemins de fer. L’économie résultant de l’emploi du nouveau système aurait donc été de 175 à 210 millions. iPourles cinq mille kilomètres non encore exécutés, l économie serait de 425 à 450 millions.
Certes, ce résultat vaut qu’on y réfléchisse. On ne trouve pas aujourd’hui beaucoup d’économies qui se chiffrent par centaines de millions, et un système qui serait de nature à diminuer de près d’un dixième les coûteuses constructions qui occupent tant de bras en France, exige un examen sé
rieux de la part des hommes de l’art, que nous adjurons d’aller voir par eux-mêmes au chemin de fer du nord l’application qui en a été faite.
Etude par Valentin.
UNE HALTE DE BOHÉMIENS DANS LES VOSGES,
Chemins de fer. — Traverses a tables de pression.
Système ordinaire. Système de M. Pouillet.