Statislique stes sseaisons souveraines de
l Europe.
La Gazette générale allemande (Deutsche allgemeine Zeitung), qui s’imprime à Leipsig, publie dans son numéro du
janvier de cette année l’article statistique et chronologique suivant, concernant les maisons souveraines de l’Europe :
« Le nombre des souverains ou princes régnants de l’Europe I diminué .de deux par la mort du duc d’Anhalt-Kœthen, dans lequel sa ligne s’est éteinte, et par l’abdication du duc de Lucques et la renonciation de son fils, qui ont fait passer ce duché à la Toscane, ce qui serait d’ailleurs arrivé par la mort de la duchesse de Parme; de Sorte qu’on ne compte plus aujourd’hui, 1er janvier 1848, que 49 souverains_en Europe,
ou 50, si on veut y comprendre l’empereur du Brésil, à cause de sa dynastie.
« Parmi ces souverains, il n’y en a que deux qui soient âgés de plus de soixante-dix ans, savoir : le roi de Hanovre, le Nestor des princes de l’Europe, qui est âgé de soixante
seize ans et sept mois, et le roi des Français, qui est âgé de soixante-quatorze ans et quatre mois.
«Parmi les autres, onze sont âgés de soixante à soixante-dix ans, seize de cinquante à soixante, neuf de quarante à cin
quante, trois de trente à quarante, sept de vingt à trente, en
fin deux n’ont pas encore atteint vingt ans; ce sont la reine d’Epagne, qui a dix-sept ans et trois mois à peu près, et le prince de Waldeck, qui n’a pas tout à fait dix-sept ans.
«Celui de tous ces souverains qui règne depuis le plus longtemps est le prince de Schaumbourg-Lippe, qui compte soixante ans dix mois et demi de règne, en y comprenant le temps de sa minorité. Parmi les autres, trois régnent depuis plus de quarante ans, aussi en comptant le temps de leur minorité ; ce sont les princes de Lippe-Detmold et de Schwarzbourg-Rudol.stadt, et le duc de Saxe-Meiningen. Trois règnes depuis trente à quarante ans, six depuis vingt à trente, vingt-deux depuis dix à vingt ans, et quinze (dont deux, l’é
lecteur de Hesse et le duc de Parme, qui n’ont pris les rênes du gouvernement de leurs Etats qu’en 1847), ne comptent pas encore, dix années de règne.
« Six souverains ne sont- pas mariés, ou ne l’ont jamais été ; ce sont, indépendamment du pape, le grand-duc deMecklen
bourg-Schwerin, le duc de Brunswick, et les princes de Reuss- Schleitz, de Reuss-Lobenstein-Eberdorff et de Waldeck.
«Six souverains sont veufs, savoir : le roi de Hanovre, les grands-ducs de Darmstadt et d’Oldenbourg, le duc de Nas
sau, et les princes de Hohenzollern-Sgmaringen et Hohenzollern-Héchingen.
«Un souverain vit en polygamie ; un autre (l’électeur de Hesse) est marié morganatiquement, ou de la main gauche; trente-six ont épousé des princesses de maisons régnantes, et parmi eux un est marié pour la troisième fois et huit le sont pour la deuxième fois.
«La plus âgée des femmes de ces trente-six souverains (parmi lesquels on compte trois souveraines). est la reine des Fran
çais, qui a soixant-cinq ans et huit mois; et la plus jeune est la duchesse de Modène, qui a vingt-quatre ans et neuf mois. Celle qui est mariée depuis le plus longtemps est la grandeduchesse de Weimar, qui compte quarante-trois ans et cinq moins de mariage.
« Parmi quarante-quatre souverains mariés ou veufs, douze n’ont pas d’enfants ou n’en ont que de mariage de la main gauche. Parmi les trente-deux autres, ceux qui ont eu le plus d’enfants, après le sultan, sont : le prince de Lichtenstein, qui en a neuf; le roi de Bavière et le prince de Lippe, qui en
ont chacun huit ; la reine de Portugal et les grands-ducs de Bade, qui en ont chacun sept.
«Le duc de Saxe-Altenbourg n’ayantque des filles, il s’ensuit que trente et un souverains seulement ont des descen
dants présomptifs habiles à leur succéder, et parmi eux le roi des Français a pour successeur un petit-fils, l’empereur du Brésil une fille, tous les autres des fils. Quatorze souve
rains n’ont pour héritiers que des parents collatéraux, douze ont pour héritiers des frères, la reine d’Espagne a pour héritière sa sœur, et l’électeur de Hesse, un cousin.
«Cinq souverains sontsans successeurs assurés dans leur li
gne, savoir, outre le pape, le duc de Brunswick (dont le frère aété déclaré incapable de régner), le ducd’Anhalt-Bernbourg, et les princes de.Hohenzollern-Héchingen et de Reuss-Lobenstein-Ebersdorff.
« Parmi les 45 princes héréditaires ou héritiers présomptifs (celui de la Hesse-Electorale , qui a 60 ans, est le plus âgé, et la princesse impériale du Brésil, qui n’a que 1 an et 5 mois, est la plus jeune), 25 sont mariés à des princesses d’égale naissance ; mais l’un d’eux, le prince royal de Dane
mark, a déjà divorcé pour la seconde fois ; 18 de ces princes ont des enfants, et, parmi eux, le prince Jean de Saxe, qui en a 8, est celui qui en a le plus.
« Les changements suivants ont eu lieu en 1847 parmi les membres des familles souveraines:
«Le [nombre des morts n’a été que de 14. Parmi,eux se trouvent, comme en 1846, trois princes régnants, qui sont l’électeur de Hesse, le duc d’Anhalt-Kœthen et la duchesse de Parme ; de plus, les femmes de deux souverains, savoir, les princesses de Hohenzollern-Héchingen etHohenzollern-Sigmaringen ; 2 héritiers présomptifs, le prince impérial du Brésil et le prince Fré iéric-François-Antoine de Hohenzollern-Hé
chingen, âgés le premier de 2 ans et 5 mois, le second de 57 ans ; 5 archiducs d’Autriche, savoir, Joseph, âgé de 71 ans; Charles, de 76 ans (tous deux oncles de l’Empereur), et Frédéric (fils de l archiduc Charles), âgé de 26 ans. De sorte que la famille impériale d Autriche a perdu, dans le cours de l’année dernière, 4 de ses membres, et l’Empereur 2 oncles, 1 sœur (la duchesse de Parme) et 1 cousin. Enfin on compte aussi parmi ces morts le prince français, le due de Guise,
fils du duc d’Aumale, âgé d’un mois; le prince Ernest do Saxe,- fils du prince Jean, âgé de 16 ans ; le duc Adam de
Wurtemberg, frère de la reine, âgé de 55 ans ; et la demoiselle Charlotte de Wurtemberg, épouse du duc Paul ( frère du roi régnant et sœur du duc de Saxe-Altenbourg), âgée de 60 ans ; auxquels il faut ajouter Madame Adélaïde, demoiselle d’Orléans, morte le 51 décembre.
« Dans la famille Napoléon sont morts, outre sa veuve, la duchesse de Parme, les trois personnes suivantes : Jérôme,
fils aîné de son frère Jérôme, comte de Montfort, âgé de 42 ans ; l’aînée des filles de son frère Lucien, dona Christina- Egypta, mariée lady Dudley Stuart, âgée de 49 ans; le fils aîné de sa sœur Caroline, Louis-Napoléon-Achille Murat,
autrefois duc de Clèves et prince royal de Naples, âgé de 46 ans.
« Les naissances sont au nombre de 15, dont 8 princes, fils de la reine de Portugal, du grand-duc de Toscane, du grand-duc héritier de Russie, de l’archiduc Albrecht-d’,Au
triche, du duc d’Aumale de France (déjà mort), du prince napolitain comte Louis d’Aquila, du duc Max de Léuchtenberg, et du comte Henri II de Reuss-Kosteritz ; — et 5 prin
cesses, savoir : une fille de l’empereur du Brésil, du prince royal de Sardaigne, du prince héréditaire de Lucques ( au
jourd’hui Parme), du duc Max de Bavière, et du prince Chrétien de Holstein-Gluksbourg.
« Quatre mariages ont eu lieu dans des maisons souveraines, savoir : celui de l’infant Jean-Charles d’Espagne (fils de don Carlos) avec Marie de Modène ; — de l’infant Henri d Espagne (fils de l’infant don Francisco) avec dona Elena de Castella y Skelly Fernanda de Cordova; —de l’infante Louise- Thérèse d’Espagne (fille de l’infant don Francisco) avec don José Osorio de Moscovo y Carbajal, comte de Trastamare, duc de Sessa; et celui du prince Ferdinand de Modène avec l’archiduchesse Elisabeth d’Autriche. »
Photographie sur papier.
La photographie est une découverte qui, malgré son application presque exclusive aux arts; ne constitue pas un art,
puisque la perfection de ses produits ne dépend pas du génie du producteur, mais des instruments employés et de l adresse de ceux qui les emploient..
Bien que nouvelle, cette science a cependant déjà fait des progrès qui méritent d’autant plus d’être suivis, constatés et encouragés, qu’ici l’utilité se joint à l’agrément.
On se souvient du vif sentiment d’admiration qu’excita dans le public l’apparition du daguerréotype ; cette ingénieuse découverte de M. Niepce, mise en lumière et dénommée par M. Daguerre, laissait cependant à désirer à beau
coup d’égards : on se plaignait, par exemple, du miroitage des plaques dans lesquelles la lumière dessine avec une mer
veilleuse exactitude les objets soumis à l’instrument; de la susceptibilité de l’image si difficile à fixer ; du prix des plaques, dont la nature métallique ne permettait pas de les recueillir dans des albums, etc., etc.
Le public devait donc voir avec faveur tous progrès apportés, sur ces divers points, à l’invention de M. Niepce ; ainsi fait-il en s’arrêtant avec une complaisante curiosité sur les boulevards et dans les passages, devant une collection d’i
mages représentant des paysages, des édifices ou des figures; ces images, sous l’apparence de gravures à l aqua tinta d’un travail très-fin, ne sont autre chose que des épreuves photo
graphiques sur papier qui offrent toute l’exactitude et la perfection des plaques daguerréotypées sans avoir aucun des in
convénients qui leur sont reprochés ; elles sont indiquées comme obtenues d’après le procédé d’un Anglais, M. Talbot,
et désignées sous le nom de Talbotypes.
Ces épreuves, il faut en convenir, sont remarquables, et nous ne pourrions leur refuser la justice qui leur est due sans renier nos constantes habitudes d’impartialité; mais ce sen
timent même ne nous permet pas de laisser s’accréditer l’er
reur qui attribuerait exclusivement à M. Talbot l’invention, et surtout le perfectionnement des papiers photogéniques ou photographiques.
L’initiative de cette précieuse découverte appartient depuis longtemps à un Français, M. Bayard, dont les travaux trop modestes ont cependant été appréciés par un juge donjon ne récusera pas la compétence ; nous voulons parler de l’Aca
démie royale des Beaux-Arts. Les détails que nous allons donner sont le résumé du rapport lu le 2 novembre 1859 de
vant cette Académie, qui avait soumis l appréciation des pro
cédés de M. Bayard à une commissioncomposée de MM. Picot et Schnetz, peintres; Ramey et Petitot, sculpteurs; Debuc et Guénépin, architectes; Desnoyers et Richomme, gra
veurs, et enfin de M. Raoul Rochette, secrétaire perpétuel, rapporteur.
M. Bayard semble avoir été, dans presque tout le cours de sa vie, préoccupé d’une idée fixe, celle de produire des dessins à l’aide de la lumière agissant sur les corps d’une ma
nière plus ou moins forte, suivant que ces corps sont doués d’une sensibilité plus ou moins vive ; mais sans parler ici de quelques expériences antérieures de plus de trois mois à la révélation du procédé de M. Daguerre, expériences trop peu importantes, c’est seulement du 5 février 839 que nous da
terons, avec M. Bayard, les premiers de ses essais qui offrirent assez de mérite pour constituer une sorte de progrès dans I ap
plication d un procédé déjà connu. En opérant avec du nitrate
d’argent étendu sur une simple feuille de papier, et en y pro
duisant ainsi du chlorure d’argent, M. Bayard obtenait des épreuves plus satisfaisantes que ce qu’il en connaissait; mais ses idées se développant rapidement dans une voie nouvelle,
ce fut le 20 mars suivant qu’il obtint, par le procédé qui lui
est propre, la première image en sens direct constatant ainsi les propriétés si remarquables d’une découverte dont le prix se trouve plus que doublé par l’emploi d’une simple feuille de papier, an lieu d’une feuille de métal.
A côté de ce perfectionnement déjà notable se placent d’autres avantages non moins sensibles.
1°. L’image qui, par le procédé de M. Bayard, se produit dans la chambre obscure sur le papier préparé à cet effet, peut toujours être observée à chaque degré de sa formation; on la suit d’ans le développement progressif de son intensité, on l’arrête au point où on veut la saisir; si l’on ne désire qu’un dessin à peine indiqué, qu’une image aussi faible que possi
ble, on la fixe en cet état au moyen d’un simple lavage, et le dessin peut ensuite être repris et colorié par la main d’un artiste; si l’on veut.au contraire, que le dessin obtienne plus de vigueur, on n a qu’à laisser agir la lumière tout le temps qu’on juge nécessaire, l’opération a toujours un témoin qui l’abrège, la prolonge ou l’arrête, suivant le besoin qu’il en a; c’est là un des principaux avantages du procédé de M. Bayard.
2°. Les types ainsi obtenus peuvent, à leur tour, au moyen d’une opération aussi simple que facile, donner, sans s’altérer, sur un papier sensible, autant d épreuves, alors redressées, que l’opérateur peut en désirer.
5°. Les épreuves produites par ce procédé jouissent, du moment où elles ont été fixées sur le papier, de la propriété de se conserver comme des dessins à l’aquarelle; elles peuvent s’emporter en voyage, se classer dans un album, et pas
ser de main en main sans s’altérer par le temps, sans s’effacer par le frottement.
Mais une des applications propres à M. Bayard et d’une grande utilité pour l’art et ceux qui le cultivent, c’est la re
production des estampes et même des dessins qu’il pratique avec succès. M. Talbot, dont nous avons déjà rappelé les essais photographiques, n’arrive à la reproduction des estam
pes que par un contre-calque où le noir prend la place du blanc et le blanc celle du noir ; les copies de M. Bayard, au contraire, offrent immédiatement, mais seulement dans un
sens contraire, l’effet positif des gravures qu’elles reproduisent.
Cette supériorité du procédé de M. Bayard sur celui de M. Talbot est consignée dans une lettre de M. Raoul Rochette,
insérée au Moniteur du 5 février 1840, de laquelle il résulte que M. Bayard produit la copie d’une estampe par une seule opération, tandis que M. Talbot, de son propre aveu, n’arrive au même résultat que par une opération double.
A cette raison de préférence, nous ajouterons 1° que la préparation de la couche sensible sur le papier est également appliquée parM. Bayard au moyen d’une seule immersion, au lieu d’exiger quatre ou cinq opérations successives, comme celle de M. Talbot (1) ; 2° que les types de M. Talbot s’altèrent lorsqu’ils ont produit un certain nombre de copies, tan
dis que les types de M. Bayard peuvent reproduire quarante mille épreuves, sans altération sensible.
L’Académie des Beaux-Arts, reconnaissant la portée desré
sultats obtenus par les efforts persévérants de M. Bayard, a sollicité longtemps du ministère une récompense qui aurait consacré la nationalité d’une découverte dont les applications ultérieures sont incalculables. nous ignorons si le ministère a fait droit à cette recommandation. G F
Le Misogyne.
Conte. —Voir tome X, pages 263, 278, 294 et 310.
Millier diverse.....
PREMIÈRE PARTIE.
IX.
HISTOIRE DES SECONDES noCES DU BOURGEOIS MYRON.
« Quand j’eus essuyé mes premières infortunes, je quittai Mantoue et vins établir mon comptoir à Venise, ville célèbre par ses gondoliers. J étais bien,résolu à rester veuf, mais j a
vais compté sans la tendresse naturelle de mon cœur. Six mois ne s’écoulèrent pas que je ne me trouvasse engagé dans de nouveaux lacs d’amour. Celle que j’aimais était une veuve, comme j’étais un veuf : jeune encore, et pourvue d’agré
ments, elle joignait à ees attraits un beau douaire en rentes sur la république. De plus, elle passait pour une lemme sans défaut, et l’opinion de toute la ville était que feu son mari, assez vilain nomme d’ailleurs, avait perdu une épouse accomplie en perdant la vie.
« Madame Zerline, — c’élait son nom, — ne consentit pas sans peine à quitter l’état de veuve ; non que cette condition eût pour elle des charmes particuliers, mais la dame se taisait des scrupules infinis :
«—je ne puis répondre, disait-elle, que je ne sois pas encore la femme de mon mari, quoiqu’il soit mort. Que d i- dées, que d habitudes, que de défauts j(ai dû recevoir de cette première union, et mon second mari, en m épousant, ne craint-il pas que l’avenir ne porte le poids et la peine du passé? Une veuve est, pour ainsi dire, un legs, un héritage, — héritage d’autant plus dangereux qu’on n’en connaît presque rien lorsqu’on le recueille...
« J’admirais cette délicatesse de sentiments, et redoublais d’instances, afin d’être l heureux légataire. Réellement, le passe ne me semblait pas de nature à m’effrayer Mon predecesseur, l’époux décédé, était un brutal et un débauche, et son sou
venir ne devait pas être bien cher à sa veuve. Quant aux vices abjects du personnage, il suffisait de connaître madame Zerline, pour se convaincre qu’elle n’avait point ele atienite de cette vilaine contagion. Le seul effet des premières noces qui subsistât encore chez elle, c était une certaine habitude de subtilité dans les raisonnements, et quVlle tenait sans doute de feu son mari, logicien de profession. Madame Zer
line se vantait d’être très-forte sur la logique; elle plaignait beaucoup le reste des femmes de ne pas savoir quels sont les principes des conséquences et les conséquences des prin
ce II me parut qu’une femme raisonneuse était le lot d’un
(I) Yoir les Mélanges photographiques de M. Charles Cheval
lier, page 82 et suivantes.
l Europe.
La Gazette générale allemande (Deutsche allgemeine Zeitung), qui s’imprime à Leipsig, publie dans son numéro du
janvier de cette année l’article statistique et chronologique suivant, concernant les maisons souveraines de l’Europe :
« Le nombre des souverains ou princes régnants de l’Europe I diminué .de deux par la mort du duc d’Anhalt-Kœthen, dans lequel sa ligne s’est éteinte, et par l’abdication du duc de Lucques et la renonciation de son fils, qui ont fait passer ce duché à la Toscane, ce qui serait d’ailleurs arrivé par la mort de la duchesse de Parme; de Sorte qu’on ne compte plus aujourd’hui, 1er janvier 1848, que 49 souverains_en Europe,
ou 50, si on veut y comprendre l’empereur du Brésil, à cause de sa dynastie.
« Parmi ces souverains, il n’y en a que deux qui soient âgés de plus de soixante-dix ans, savoir : le roi de Hanovre, le Nestor des princes de l’Europe, qui est âgé de soixante
seize ans et sept mois, et le roi des Français, qui est âgé de soixante-quatorze ans et quatre mois.
«Parmi les autres, onze sont âgés de soixante à soixante-dix ans, seize de cinquante à soixante, neuf de quarante à cin
quante, trois de trente à quarante, sept de vingt à trente, en
fin deux n’ont pas encore atteint vingt ans; ce sont la reine d’Epagne, qui a dix-sept ans et trois mois à peu près, et le prince de Waldeck, qui n’a pas tout à fait dix-sept ans.
«Celui de tous ces souverains qui règne depuis le plus longtemps est le prince de Schaumbourg-Lippe, qui compte soixante ans dix mois et demi de règne, en y comprenant le temps de sa minorité. Parmi les autres, trois régnent depuis plus de quarante ans, aussi en comptant le temps de leur minorité ; ce sont les princes de Lippe-Detmold et de Schwarzbourg-Rudol.stadt, et le duc de Saxe-Meiningen. Trois règnes depuis trente à quarante ans, six depuis vingt à trente, vingt-deux depuis dix à vingt ans, et quinze (dont deux, l’é
lecteur de Hesse et le duc de Parme, qui n’ont pris les rênes du gouvernement de leurs Etats qu’en 1847), ne comptent pas encore, dix années de règne.
« Six souverains ne sont- pas mariés, ou ne l’ont jamais été ; ce sont, indépendamment du pape, le grand-duc deMecklen
bourg-Schwerin, le duc de Brunswick, et les princes de Reuss- Schleitz, de Reuss-Lobenstein-Eberdorff et de Waldeck.
«Six souverains sont veufs, savoir : le roi de Hanovre, les grands-ducs de Darmstadt et d’Oldenbourg, le duc de Nas
sau, et les princes de Hohenzollern-Sgmaringen et Hohenzollern-Héchingen.
«Un souverain vit en polygamie ; un autre (l’électeur de Hesse) est marié morganatiquement, ou de la main gauche; trente-six ont épousé des princesses de maisons régnantes, et parmi eux un est marié pour la troisième fois et huit le sont pour la deuxième fois.
«La plus âgée des femmes de ces trente-six souverains (parmi lesquels on compte trois souveraines). est la reine des Fran
çais, qui a soixant-cinq ans et huit mois; et la plus jeune est la duchesse de Modène, qui a vingt-quatre ans et neuf mois. Celle qui est mariée depuis le plus longtemps est la grandeduchesse de Weimar, qui compte quarante-trois ans et cinq moins de mariage.
« Parmi quarante-quatre souverains mariés ou veufs, douze n’ont pas d’enfants ou n’en ont que de mariage de la main gauche. Parmi les trente-deux autres, ceux qui ont eu le plus d’enfants, après le sultan, sont : le prince de Lichtenstein, qui en a neuf; le roi de Bavière et le prince de Lippe, qui en
ont chacun huit ; la reine de Portugal et les grands-ducs de Bade, qui en ont chacun sept.
«Le duc de Saxe-Altenbourg n’ayantque des filles, il s’ensuit que trente et un souverains seulement ont des descen
dants présomptifs habiles à leur succéder, et parmi eux le roi des Français a pour successeur un petit-fils, l’empereur du Brésil une fille, tous les autres des fils. Quatorze souve
rains n’ont pour héritiers que des parents collatéraux, douze ont pour héritiers des frères, la reine d’Espagne a pour héritière sa sœur, et l’électeur de Hesse, un cousin.
«Cinq souverains sontsans successeurs assurés dans leur li
gne, savoir, outre le pape, le duc de Brunswick (dont le frère aété déclaré incapable de régner), le ducd’Anhalt-Bernbourg, et les princes de.Hohenzollern-Héchingen et de Reuss-Lobenstein-Ebersdorff.
« Parmi les 45 princes héréditaires ou héritiers présomptifs (celui de la Hesse-Electorale , qui a 60 ans, est le plus âgé, et la princesse impériale du Brésil, qui n’a que 1 an et 5 mois, est la plus jeune), 25 sont mariés à des princesses d’égale naissance ; mais l’un d’eux, le prince royal de Dane
mark, a déjà divorcé pour la seconde fois ; 18 de ces princes ont des enfants, et, parmi eux, le prince Jean de Saxe, qui en a 8, est celui qui en a le plus.
« Les changements suivants ont eu lieu en 1847 parmi les membres des familles souveraines:
«Le [nombre des morts n’a été que de 14. Parmi,eux se trouvent, comme en 1846, trois princes régnants, qui sont l’électeur de Hesse, le duc d’Anhalt-Kœthen et la duchesse de Parme ; de plus, les femmes de deux souverains, savoir, les princesses de Hohenzollern-Héchingen etHohenzollern-Sigmaringen ; 2 héritiers présomptifs, le prince impérial du Brésil et le prince Fré iéric-François-Antoine de Hohenzollern-Hé
chingen, âgés le premier de 2 ans et 5 mois, le second de 57 ans ; 5 archiducs d’Autriche, savoir, Joseph, âgé de 71 ans; Charles, de 76 ans (tous deux oncles de l’Empereur), et Frédéric (fils de l archiduc Charles), âgé de 26 ans. De sorte que la famille impériale d Autriche a perdu, dans le cours de l’année dernière, 4 de ses membres, et l’Empereur 2 oncles, 1 sœur (la duchesse de Parme) et 1 cousin. Enfin on compte aussi parmi ces morts le prince français, le due de Guise,
fils du duc d’Aumale, âgé d’un mois; le prince Ernest do Saxe,- fils du prince Jean, âgé de 16 ans ; le duc Adam de
Wurtemberg, frère de la reine, âgé de 55 ans ; et la demoiselle Charlotte de Wurtemberg, épouse du duc Paul ( frère du roi régnant et sœur du duc de Saxe-Altenbourg), âgée de 60 ans ; auxquels il faut ajouter Madame Adélaïde, demoiselle d’Orléans, morte le 51 décembre.
« Dans la famille Napoléon sont morts, outre sa veuve, la duchesse de Parme, les trois personnes suivantes : Jérôme,
fils aîné de son frère Jérôme, comte de Montfort, âgé de 42 ans ; l’aînée des filles de son frère Lucien, dona Christina- Egypta, mariée lady Dudley Stuart, âgée de 49 ans; le fils aîné de sa sœur Caroline, Louis-Napoléon-Achille Murat,
autrefois duc de Clèves et prince royal de Naples, âgé de 46 ans.
« Les naissances sont au nombre de 15, dont 8 princes, fils de la reine de Portugal, du grand-duc de Toscane, du grand-duc héritier de Russie, de l’archiduc Albrecht-d’,Au
triche, du duc d’Aumale de France (déjà mort), du prince napolitain comte Louis d’Aquila, du duc Max de Léuchtenberg, et du comte Henri II de Reuss-Kosteritz ; — et 5 prin
cesses, savoir : une fille de l’empereur du Brésil, du prince royal de Sardaigne, du prince héréditaire de Lucques ( au
jourd’hui Parme), du duc Max de Bavière, et du prince Chrétien de Holstein-Gluksbourg.
« Quatre mariages ont eu lieu dans des maisons souveraines, savoir : celui de l’infant Jean-Charles d’Espagne (fils de don Carlos) avec Marie de Modène ; — de l’infant Henri d Espagne (fils de l’infant don Francisco) avec dona Elena de Castella y Skelly Fernanda de Cordova; —de l’infante Louise- Thérèse d’Espagne (fille de l’infant don Francisco) avec don José Osorio de Moscovo y Carbajal, comte de Trastamare, duc de Sessa; et celui du prince Ferdinand de Modène avec l’archiduchesse Elisabeth d’Autriche. »
Photographie sur papier.
La photographie est une découverte qui, malgré son application presque exclusive aux arts; ne constitue pas un art,
puisque la perfection de ses produits ne dépend pas du génie du producteur, mais des instruments employés et de l adresse de ceux qui les emploient..
Bien que nouvelle, cette science a cependant déjà fait des progrès qui méritent d’autant plus d’être suivis, constatés et encouragés, qu’ici l’utilité se joint à l’agrément.
On se souvient du vif sentiment d’admiration qu’excita dans le public l’apparition du daguerréotype ; cette ingénieuse découverte de M. Niepce, mise en lumière et dénommée par M. Daguerre, laissait cependant à désirer à beau
coup d’égards : on se plaignait, par exemple, du miroitage des plaques dans lesquelles la lumière dessine avec une mer
veilleuse exactitude les objets soumis à l’instrument; de la susceptibilité de l’image si difficile à fixer ; du prix des plaques, dont la nature métallique ne permettait pas de les recueillir dans des albums, etc., etc.
Le public devait donc voir avec faveur tous progrès apportés, sur ces divers points, à l’invention de M. Niepce ; ainsi fait-il en s’arrêtant avec une complaisante curiosité sur les boulevards et dans les passages, devant une collection d’i
mages représentant des paysages, des édifices ou des figures; ces images, sous l’apparence de gravures à l aqua tinta d’un travail très-fin, ne sont autre chose que des épreuves photo
graphiques sur papier qui offrent toute l’exactitude et la perfection des plaques daguerréotypées sans avoir aucun des in
convénients qui leur sont reprochés ; elles sont indiquées comme obtenues d’après le procédé d’un Anglais, M. Talbot,
et désignées sous le nom de Talbotypes.
Ces épreuves, il faut en convenir, sont remarquables, et nous ne pourrions leur refuser la justice qui leur est due sans renier nos constantes habitudes d’impartialité; mais ce sen
timent même ne nous permet pas de laisser s’accréditer l’er
reur qui attribuerait exclusivement à M. Talbot l’invention, et surtout le perfectionnement des papiers photogéniques ou photographiques.
L’initiative de cette précieuse découverte appartient depuis longtemps à un Français, M. Bayard, dont les travaux trop modestes ont cependant été appréciés par un juge donjon ne récusera pas la compétence ; nous voulons parler de l’Aca
démie royale des Beaux-Arts. Les détails que nous allons donner sont le résumé du rapport lu le 2 novembre 1859 de
vant cette Académie, qui avait soumis l appréciation des pro
cédés de M. Bayard à une commissioncomposée de MM. Picot et Schnetz, peintres; Ramey et Petitot, sculpteurs; Debuc et Guénépin, architectes; Desnoyers et Richomme, gra
veurs, et enfin de M. Raoul Rochette, secrétaire perpétuel, rapporteur.
M. Bayard semble avoir été, dans presque tout le cours de sa vie, préoccupé d’une idée fixe, celle de produire des dessins à l’aide de la lumière agissant sur les corps d’une ma
nière plus ou moins forte, suivant que ces corps sont doués d’une sensibilité plus ou moins vive ; mais sans parler ici de quelques expériences antérieures de plus de trois mois à la révélation du procédé de M. Daguerre, expériences trop peu importantes, c’est seulement du 5 février 839 que nous da
terons, avec M. Bayard, les premiers de ses essais qui offrirent assez de mérite pour constituer une sorte de progrès dans I ap
plication d un procédé déjà connu. En opérant avec du nitrate
d’argent étendu sur une simple feuille de papier, et en y pro
duisant ainsi du chlorure d’argent, M. Bayard obtenait des épreuves plus satisfaisantes que ce qu’il en connaissait; mais ses idées se développant rapidement dans une voie nouvelle,
ce fut le 20 mars suivant qu’il obtint, par le procédé qui lui
est propre, la première image en sens direct constatant ainsi les propriétés si remarquables d’une découverte dont le prix se trouve plus que doublé par l’emploi d’une simple feuille de papier, an lieu d’une feuille de métal.
A côté de ce perfectionnement déjà notable se placent d’autres avantages non moins sensibles.
1°. L’image qui, par le procédé de M. Bayard, se produit dans la chambre obscure sur le papier préparé à cet effet, peut toujours être observée à chaque degré de sa formation; on la suit d’ans le développement progressif de son intensité, on l’arrête au point où on veut la saisir; si l’on ne désire qu’un dessin à peine indiqué, qu’une image aussi faible que possi
ble, on la fixe en cet état au moyen d’un simple lavage, et le dessin peut ensuite être repris et colorié par la main d’un artiste; si l’on veut.au contraire, que le dessin obtienne plus de vigueur, on n a qu’à laisser agir la lumière tout le temps qu’on juge nécessaire, l’opération a toujours un témoin qui l’abrège, la prolonge ou l’arrête, suivant le besoin qu’il en a; c’est là un des principaux avantages du procédé de M. Bayard.
2°. Les types ainsi obtenus peuvent, à leur tour, au moyen d’une opération aussi simple que facile, donner, sans s’altérer, sur un papier sensible, autant d épreuves, alors redressées, que l’opérateur peut en désirer.
5°. Les épreuves produites par ce procédé jouissent, du moment où elles ont été fixées sur le papier, de la propriété de se conserver comme des dessins à l’aquarelle; elles peuvent s’emporter en voyage, se classer dans un album, et pas
ser de main en main sans s’altérer par le temps, sans s’effacer par le frottement.
Mais une des applications propres à M. Bayard et d’une grande utilité pour l’art et ceux qui le cultivent, c’est la re
production des estampes et même des dessins qu’il pratique avec succès. M. Talbot, dont nous avons déjà rappelé les essais photographiques, n’arrive à la reproduction des estam
pes que par un contre-calque où le noir prend la place du blanc et le blanc celle du noir ; les copies de M. Bayard, au contraire, offrent immédiatement, mais seulement dans un
sens contraire, l’effet positif des gravures qu’elles reproduisent.
Cette supériorité du procédé de M. Bayard sur celui de M. Talbot est consignée dans une lettre de M. Raoul Rochette,
insérée au Moniteur du 5 février 1840, de laquelle il résulte que M. Bayard produit la copie d’une estampe par une seule opération, tandis que M. Talbot, de son propre aveu, n’arrive au même résultat que par une opération double.
A cette raison de préférence, nous ajouterons 1° que la préparation de la couche sensible sur le papier est également appliquée parM. Bayard au moyen d’une seule immersion, au lieu d’exiger quatre ou cinq opérations successives, comme celle de M. Talbot (1) ; 2° que les types de M. Talbot s’altèrent lorsqu’ils ont produit un certain nombre de copies, tan
dis que les types de M. Bayard peuvent reproduire quarante mille épreuves, sans altération sensible.
L’Académie des Beaux-Arts, reconnaissant la portée desré
sultats obtenus par les efforts persévérants de M. Bayard, a sollicité longtemps du ministère une récompense qui aurait consacré la nationalité d’une découverte dont les applications ultérieures sont incalculables. nous ignorons si le ministère a fait droit à cette recommandation. G F
Le Misogyne.
Conte. —Voir tome X, pages 263, 278, 294 et 310.
Millier diverse.....
PREMIÈRE PARTIE.
IX.
HISTOIRE DES SECONDES noCES DU BOURGEOIS MYRON.
« Quand j’eus essuyé mes premières infortunes, je quittai Mantoue et vins établir mon comptoir à Venise, ville célèbre par ses gondoliers. J étais bien,résolu à rester veuf, mais j a
vais compté sans la tendresse naturelle de mon cœur. Six mois ne s’écoulèrent pas que je ne me trouvasse engagé dans de nouveaux lacs d’amour. Celle que j’aimais était une veuve, comme j’étais un veuf : jeune encore, et pourvue d’agré
ments, elle joignait à ees attraits un beau douaire en rentes sur la république. De plus, elle passait pour une lemme sans défaut, et l’opinion de toute la ville était que feu son mari, assez vilain nomme d’ailleurs, avait perdu une épouse accomplie en perdant la vie.
« Madame Zerline, — c’élait son nom, — ne consentit pas sans peine à quitter l’état de veuve ; non que cette condition eût pour elle des charmes particuliers, mais la dame se taisait des scrupules infinis :
«—je ne puis répondre, disait-elle, que je ne sois pas encore la femme de mon mari, quoiqu’il soit mort. Que d i- dées, que d habitudes, que de défauts j(ai dû recevoir de cette première union, et mon second mari, en m épousant, ne craint-il pas que l’avenir ne porte le poids et la peine du passé? Une veuve est, pour ainsi dire, un legs, un héritage, — héritage d’autant plus dangereux qu’on n’en connaît presque rien lorsqu’on le recueille...
« J’admirais cette délicatesse de sentiments, et redoublais d’instances, afin d’être l heureux légataire. Réellement, le passe ne me semblait pas de nature à m’effrayer Mon predecesseur, l’époux décédé, était un brutal et un débauche, et son sou
venir ne devait pas être bien cher à sa veuve. Quant aux vices abjects du personnage, il suffisait de connaître madame Zerline, pour se convaincre qu’elle n’avait point ele atienite de cette vilaine contagion. Le seul effet des premières noces qui subsistât encore chez elle, c était une certaine habitude de subtilité dans les raisonnements, et quVlle tenait sans doute de feu son mari, logicien de profession. Madame Zer
line se vantait d’être très-forte sur la logique; elle plaignait beaucoup le reste des femmes de ne pas savoir quels sont les principes des conséquences et les conséquences des prin
ce II me parut qu’une femme raisonneuse était le lot d’un
(I) Yoir les Mélanges photographiques de M. Charles Cheval
lier, page 82 et suivantes.