Chronique musicale.
Puisque nos théâtres lyriques nous font des loisirs, nous allons en profiter pour raconter à nos lecteurs une révolution musicale.
Il y a quatre ou cinq ans, un jeune artiste étranger arri
vait à Paris, inconnu et sans autres ressources que son activité et sa confiance en son in
telligence. A peine se fut-il mis en relation avec quelques-unes de nos célébrités musicales,
que l’on put entrevoir l’avenir brillant et prochain de cette intelligence et de cette activité nécessaire dans un centre de pro
grès et de lumières tel que notre capitale. M. H. Berlioz, dont il
n’est pas possible de décliner la* compétence en pareille matière, ne craignit pas, dès lors, de prédire une révolution complète dans l’instrumentation. Ettjéjà les événements ont prouvé que l’opinion du célèbre critique musical du Journal des Débats n avait rien de hasardé. En effet, une réforme impor
tante ne tarda pas à s’accom
plir dans les musiques de nos régiments, réforme entièrement fondée sur les notables per
fectionnements, les inventions
vraiment ingénieuses que l’art du fa cteur d’instruments en cuivre doit à M. Adolphe Sax.
La France, en accueillant et protégeant ce jeune et habile facteur, aura donc eu, cette fois, les honneurs d’une heu
reuse initiative. Des intérêts opposés mis en jeu et grave
ment lésés par le fait même d’une amélioration, fût-elle démontrée utile jusqu’à la dernière évidence; des avis diver
gents soutenus pour et contre toute idée d innovation; tel est, pour ainsi dire, le cortège obli
gé ou le lot inévitable de tous les novateurs; ce fut celui de notre artiste. Aujourd hui, quoi
qu’il en soit, la manufacture d’instruments de musique en cuivre et en bois de M. Adolphe Sax n’en a pas moins pris définitivement son rang, et un rang très-considérable, parmi
Fabrque d’instruments de musique de M. Sax. — Yue d’une partie de l’ateüer du rez-de-chaussée.
nos plus beaux établissements industriels. Pour bien apprécier la valeur des services dont, l’art musical est redevable à l’es
prit inventif de M. Ad. Sax, il faut se rappeler dans quel état de médiocrité nos musiques militaires étaient naguère en
core. Des instruments faux, incomplets, d’un mécanisme difficile, d’une sonorité générale
ment pauvre, tels étaient à peu près les moyens matériels que
les exécutahtsavaient àleurdisposition. Et. Dieu sait à quelles rudes épreuves de patience étaient soumis ces exécutants, sans en excepter ceux-mêmes qui étaient doués des meilleures facultés et animés du
zèle le plus ardent. Si nous passons aux compositeurs, quels n’étaient pas leurs tourments de se trouver à tout mo
ment arrêtés par les vides qui existaient dans la gamme du plus grand nombre des anciens instruments ! Il en résul
tait une inévitable monotonie d’idées, jointe à une non moins triste monotonie de son.
Grâce aux saxhorns, aux saxotrornbas et aux saxophones, on peut dire qu’il s’est opéré dans la musique militaire une transformation radicale. La justesse, l’éclat, la beauté de timbre, la portée des instru
ments, leur homogénéité dans toute l’échelle de Paigu au grave, telles sont les qualités ines
timables apportées dans les musiques de nos régiments par les inventions et les perfection
nements de M. Adolphe Sax. Entre tous ces précieux tra
vaux, nous devons mentionner particulièrement le saxophone. C’est un instrument en cuivre à clefs avec un bec à anche ; il participe en même temps, pour le son, des instruments à vent et à corde, de sorte qu’il peut former comme un intermé
Fabrique d’iustruments de musique de M. Sax. — Vue de l’atelier du second étage.
diaire, un lien naturel entre ces deux familles d’un caractère de sonoiité si dissemblable. 11 est diflic le de se faire une idée exacte du son du saxophone, sans l’avoir entendu, tant à cause de la qualité individuelle de son timbre, que des
divers degrés d’intensité sonore qu’un exécutant, même ordinaire, peut aisément en tirer. En l’écoulant pour la pre
mière fois, Rossini s’écria : « C’est la plus belle pâte de son que j’aie jamais entendu! » et Meyerbeer dit : «C’est le beau
idéal du son. » nous pouvons assurer qu’il n’y a rien d’exagéré dans ces paroles.
Les instruments de M. Adolphe Sax présentent encore d’aunes avantages, qui méritent, bien que moins essentiels,
Puisque nos théâtres lyriques nous font des loisirs, nous allons en profiter pour raconter à nos lecteurs une révolution musicale.
Il y a quatre ou cinq ans, un jeune artiste étranger arri
vait à Paris, inconnu et sans autres ressources que son activité et sa confiance en son in
telligence. A peine se fut-il mis en relation avec quelques-unes de nos célébrités musicales,
que l’on put entrevoir l’avenir brillant et prochain de cette intelligence et de cette activité nécessaire dans un centre de pro
grès et de lumières tel que notre capitale. M. H. Berlioz, dont il
n’est pas possible de décliner la* compétence en pareille matière, ne craignit pas, dès lors, de prédire une révolution complète dans l’instrumentation. Ettjéjà les événements ont prouvé que l’opinion du célèbre critique musical du Journal des Débats n avait rien de hasardé. En effet, une réforme impor
tante ne tarda pas à s’accom
plir dans les musiques de nos régiments, réforme entièrement fondée sur les notables per
fectionnements, les inventions
vraiment ingénieuses que l’art du fa cteur d’instruments en cuivre doit à M. Adolphe Sax.
La France, en accueillant et protégeant ce jeune et habile facteur, aura donc eu, cette fois, les honneurs d’une heu
reuse initiative. Des intérêts opposés mis en jeu et grave
ment lésés par le fait même d’une amélioration, fût-elle démontrée utile jusqu’à la dernière évidence; des avis diver
gents soutenus pour et contre toute idée d innovation; tel est, pour ainsi dire, le cortège obli
gé ou le lot inévitable de tous les novateurs; ce fut celui de notre artiste. Aujourd hui, quoi
qu’il en soit, la manufacture d’instruments de musique en cuivre et en bois de M. Adolphe Sax n’en a pas moins pris définitivement son rang, et un rang très-considérable, parmi
Fabrque d’instruments de musique de M. Sax. — Yue d’une partie de l’ateüer du rez-de-chaussée.
nos plus beaux établissements industriels. Pour bien apprécier la valeur des services dont, l’art musical est redevable à l’es
prit inventif de M. Ad. Sax, il faut se rappeler dans quel état de médiocrité nos musiques militaires étaient naguère en
core. Des instruments faux, incomplets, d’un mécanisme difficile, d’une sonorité générale
ment pauvre, tels étaient à peu près les moyens matériels que
les exécutahtsavaient àleurdisposition. Et. Dieu sait à quelles rudes épreuves de patience étaient soumis ces exécutants, sans en excepter ceux-mêmes qui étaient doués des meilleures facultés et animés du
zèle le plus ardent. Si nous passons aux compositeurs, quels n’étaient pas leurs tourments de se trouver à tout mo
ment arrêtés par les vides qui existaient dans la gamme du plus grand nombre des anciens instruments ! Il en résul
tait une inévitable monotonie d’idées, jointe à une non moins triste monotonie de son.
Grâce aux saxhorns, aux saxotrornbas et aux saxophones, on peut dire qu’il s’est opéré dans la musique militaire une transformation radicale. La justesse, l’éclat, la beauté de timbre, la portée des instru
ments, leur homogénéité dans toute l’échelle de Paigu au grave, telles sont les qualités ines
timables apportées dans les musiques de nos régiments par les inventions et les perfection
nements de M. Adolphe Sax. Entre tous ces précieux tra
vaux, nous devons mentionner particulièrement le saxophone. C’est un instrument en cuivre à clefs avec un bec à anche ; il participe en même temps, pour le son, des instruments à vent et à corde, de sorte qu’il peut former comme un intermé
Fabrique d’iustruments de musique de M. Sax. — Vue de l’atelier du second étage.
diaire, un lien naturel entre ces deux familles d’un caractère de sonoiité si dissemblable. 11 est diflic le de se faire une idée exacte du son du saxophone, sans l’avoir entendu, tant à cause de la qualité individuelle de son timbre, que des
divers degrés d’intensité sonore qu’un exécutant, même ordinaire, peut aisément en tirer. En l’écoulant pour la pre
mière fois, Rossini s’écria : « C’est la plus belle pâte de son que j’aie jamais entendu! » et Meyerbeer dit : «C’est le beau
idéal du son. » nous pouvons assurer qu’il n’y a rien d’exagéré dans ces paroles.
Les instruments de M. Adolphe Sax présentent encore d’aunes avantages, qui méritent, bien que moins essentiels,