Deux-Siciles. — Les événements se pressent , en Italie. Une révolution s’est accomplie à Naples.
Le 28, les hommes modérés du parti royaliste, étant assurés de la résistance victorieuse de Païenne, avaient ouvert des pourparlers avec les chefs du mouvement, et l’on était con
venu d’attendre l’effet des pétitions qu’on signait de tous côtés pour obtenir la constitution. Mai» les masses, dont l’in
stinct dans les circonstances solennelles est un guide plus sur que les combinaisons de cabinet, ne voulurent pas atten
dre, et dès le 26, trente mille personnes se précipitèrent dans la vaste rue de Tolède, criant : Vive la constitution ! Quelques cavaliers ayant essayé une charge sur cette foule sans armes, mais compacte, furent culbutés. Le peuple les releva et les épargna. Les croisées s’ouvrirent et bientôt fu
rent garnies d’hommes, et surtout de dames agitant des mouchoirs aux couleurs nationales ; les jeunes gens de la noblesse accouraient dans la.rue et embrassaient les lazzaroni ; la garde civique, si minutieusement triée parmi la
bourgeoisie la plus dévouée au trône, se mêlait au peuple, il se manifestait un de ces mouvements d union, de fraternité, devant lesquels tous les despotismes sont impuissants.
Cependant, l’autorité militaire a exécuté les ordres donnés pour les cas d’émeute ; le fort Saint-Elme a arboré le drapeau rouge, tiré trois coups de canon, auxquels le fort de TQEuf a répondu, et les troupes sont sorties de leurs casernes pour entourer le palais et pénétrer dans ja rue de Tolède. Mais les masses se tenaient serrées, impénétrables, le canon seul aurait pu s’y faire jour. Il fallait opter entre une de ces luttes horribles dans lesquelles, après avoir sacrifié leurs sentiments au devoir militaire, les soldats finissent par se ran
ger du côté du peuple, ou la proclamation d’une constitution.
Après deux heures d’hésitation, le roi se décida à accepter la démission de tous ses ministres et à former un nouveau ca
binet, sous la présidence du duc de Serra-Capriola. Mais ce n’était pas pour le peuple une question de personnes, et l’a
gitation demeurait la même. Le nouveau cabinet fut unanime pour conseiller au roi la proclamation immédiate d’une constitution. Ferdinand voulait discuter encore, mais à ce moment arriva la nouvelle que les Siciliens avaient enlevé d’as
saut le palais royal et la banque de Palerme, que le général Vial s’était embarqué, laissant le duc de Majo et le général Sauget pour suivre une lutte désormais sans espoir. On ap
prenait de plus que deux régiments dirigés vers les Calabres avaient pris parti pour le peuple. La résistance fut reconnue
impossible. Le roi céda, et l’on annonça formellement pour le lendemain matin un décret promettant une constitution. Le 29, en effet, parut un décret royal dont les principales dispositions sont imitées de la charte française.
Les nouvelles de Messine sont du 28 janvier. La position était menaçante, mais il n’y avait pas eu de conflit. Les premiers décrets du roi n’avaient pas calmé l’effervescence po
pulaire. On avait cru d’abord à une levée de boucliers, mais heureusement elle n’a pas eu lieu. On attendait des nou
velles de Palerme pour agir. Le 24, le général Nunziante est sorti dans la rue Ferdinande à la tête de sa colonne mobile, qu’il a fait ranger en haie avec les canons, mèche allumée.
Cette démonstration a manqué son but, et des signes ‘de mécontentement ayant éclaté dans le peuple, on a pu craindre un moment que la lutte ne s’engageât. Cependant les troupes sont rentrées dans leurs casernes sans qu’il j ait eu de sang répandu. Les officiers et les soldats ont jure qu’ils ne s’exposeraient plus d’une manière semblable. Le général Carda
mone et le duc de Bagnoli, intendant de Messine, ont blâmé énergiquement cette provocation. On assure que Catane s’est révoltée le 26, et l’on disait que Cartagirone, Cartagirette et Milazzo allaient en faire probablement autant. Toute la Sicile paraissait prête à se lever.
— D’après l’Alba (journal de Florence) l’effectif de l’armée napolitaine se compose de 99,068 hommes, savoir : soldats sous les drapeaux, 60,465; de la réserve, 55,505; artillerie du littoral, 5,298. Dans ces chiffres, les Suisses figurent au nombre de 6,124 hommes. L’artillerie suisse compte 171 hommes.
Etats pontificaux. — nous avons annoncé que le département de la guerre, jusqu’à présent dirigé par un ecclésiastique, avait été confié au général prince Gabrielli. Deux laï
ques viennent encore d’être appelés dans le conseil. Le comte Ferretti, frère du cardinal, est nommé ministre des finances, et le prince Teano, duc Michel Guëtani, est nommé ministre de la police. Ces nominations sont considérées comme un progrès sérieux dans la carrière des réformes administratives.
Parme, — On écrivait le 20 janvier de la capitale de ce duché :
« Le nouveau souverain vient de publier un décret relatif au serment que doivent prêter les fonctionnaires. Après
avoir promis de travailler de toutes leurs forces à tout ce qui peut être utile au duc de Parme et à ses successeurs, les fonctionnaires doivent jurer qu’ils ne feront jamais partie d’aucune association, publique ou secrète, qui serait contraire aux principes, aux intérêts du souverain et de ses alliés. »
Royaume Lombardo-Vénitien. — On lit dans la Gazette d Augsbourg du 2 février :
« D’après les nouvelles reçues des frontières de la Lombardie, les envois de troupes en Italie durent toujours. Le corps d’armée autrichien en Italie va recevoir des renforts. »
Autriche. — On écrit de Lemberg (Gallicie), le 18 janvier, à la Gazette d’Aix-la-Chapelle :
« Vendredi dernier, nous avons failli être témoins ici d’une émeute contre les juifs, qui sont au nombre de 50,005. Le bruit s’était répandu que le gouvernement avait l’intention
de leur conférer le droit de bourgeoisie, ce qui les aurait rendus aptes à acquérir des terres nobles. Un membre de la commission municipale avait effectivement fait cette propo
sition au gouverneur. Aussitôt la bourgeoisie envoya une députation au palais pour vérifier le fait. Des groupes nom
breux se formèrent sur la place, attendant avec anxiété la
réponse. Le gouverneur répondit à la députation que la proposition avait été faite, mais qu’elle n’avait pas été agréée. En général, l’opinion publique n’est pas favorable aux juifs. Toutefois on espère que le gouverneur pourra prévenir le désordre.
« Il est décidé maintenant que la Gallicie_ sera divisée en deux gouvernements, dont l’un aura son siège _ à Cracovie. L’archiduc Albert sera nommé vice-roi à Cracovie ; le baron Krauss, notre président de régence, lui sera adjoint. Le con
seiller aulique de Radherny viendra ici en qualité de viceprésident de régence. »
Danemark. — Voici un roi qui tient noblement sa parole. Christian VIII est mort le 20 janvier ; le 21 son fils est proclamé sous le nom de Frécérick VIL Les bourgeois,
marchands et étudiants de Copenhague demandent à lui présenter une pétition tendante à obtenir la régularisation du gouvernement représentatif. Le roi refuse de recevoir la pé
tition, en disant : « Je suis un honnête homme ; dans ma proclamation d’avénement, j’ai promis de poursuivre et d’a
chever l’œuvre de mon père ; mon peuple doit se fier à ma parole.» Le roi s’enferme dans son cabinet avec ses ministres, et après sept jours seulement de délibérations, au mi
lieu du calme le plus profond, il fait paraître une ordonnance qui accorde à son peuple une constitution. Quelques-uns des points indiqués par cette ordonnance peuvent paraître discutables, mais le roi ne veut pas fuir la discussion, car il déclare expressément que la constitution sera_ soumise à l’examen des députés nommés par les états provinciaux.
Les états seront communs au royaume de Danemark et aux duchés de Schleswig et de Holstein ; ils siégeront alternativement dans les duchés et en Danemark ; ils s’as
sembleront régulièrement à des époques fixes ; le nombre des députés est pour le Danemark de 26, et pour les duchés de 26 également.
La constitution consacre le vote de l’impôt par les états, leur participation âu pouvoir législatif et la périodicité de leur réunion. L’usage des deux langues allemande et danoise sera facultatif dans les états, pu reste, la constitution ne change rien aux rapports établis entre les duchés et la confédération germanique.
Turquie. — Dans une visite que le sultan a faite à la Porte, il a ordonné une réconciliation entre le grand vizir, le ministre de la guerre et le ministre de la marine. Cette réconciliation a eu lieu, et toute modification ministérielle se trouve dès lors ajournée.
M. Mussurus n’a pas encore pu aller reprendre ses fonctions à Athènes. La veille du jour fixé pour son départ, il était allé à Constantinople faire ses visites de congé ; en pas
sant dans le quartier d’Ak-Séraï, son cheval s’est effrayé, l’a renversé, l’a foulé aux pieds, et lui a brisé deux côtes. Son état est toujours grave, mais cependant il est hors de dan
ger. Toutefois, son retour à Athènes ne pourra avoir lieu avant un mois, et ce retard est d’autant plus regrettable que les relations entre les deux gouvernements se trouvent ainsi suspendues.
L’envoyé extraordinaire du souverain pontife est arrivé à Constantinople, le 16 janvier, sur le paquebot sarde le Tripoli, et a été reçu en grande pompe.
Des voitures du sultan et des chevaux de selle avaient été préparés d’avance. Le nonce monta dans la première voiture avec le patriarche arménien catholique, et l’envoyé du pape, suivi de son cortège, se rendit à l’hôtel qui lui avait été préparé par la Porte, en traversant tout le quartier de Péra. Plusieurs maisons de ce quartier étaient pavoisées aux couleurs italiennes. Une foule, qui grossissait à chaque instant malgré le froid ‘et la pluie, se pressait autour de la voiture du nonce, et faisait retentir les cris de viva Pio nono ! auxquels se mêlaient aussi ceux de vive l’unité de l’Italie ! Le nonce salua à diverses reprises. Tous les chefs de mission, sans en excepter ceux d’Angleterre et de Russie,
oüt envoyé le féliciter. Aujourd’hui il recevra la visite de l’introducteur des ambassadeurs et du premier drogman de la Porte, et d’ici à peu de jours, il sera reçu en audience par le sultan. Monsignor Ferrieri parle très-facilement le fran
çais, et toutes les personnes qui l’ont.approché font l’éloge de son esprit et de la distinction de ses manières.
Bal de Petit-Bourg. — La société de Petit-Bourg, dont le bal de l’année dernière a eu tant de retentissement, et qui a laissé de si beaux souvenirs, va donner, le 22 de ce mois, une fêle plus brillante encore que toutes les autres, dans ce palais enchanté appelé Jardin d’hiver. Tout ce que l’imagi
nation peut concevoir de plus magnifique sera tenté et réalisé en illumination et en décors. nos lecteurs seront tenus au courant des préparatifs et des suites de cette fête consacrée à une œuvre de bienfaisance.
Affaire Mortier. — Les médecins commis pour faire un rapport sur l’état mental du GOmte Mortier ont conclu dans les termes suivants :
« De l’ensemble des observations recueillies, les docteurs Fabret, Foville et Calmeil, unanimes dans leur jugement, n’hésitent pas à conclure :
« 1° Que M. le comte Mortier est affecté d’une aliénation mentale partielle;
« 2° Que cette aliénation est surtout caractérisée par la croyance qu’il est victime de haines violentes, implacables, de jour en jour plus nombreuses, combinées pour le perdre;
« 5° Que, sous l’empire des illusions qui constituent son délire, M. le comte Mortier a conçu les résolutions les plus fâtâlGS
«4° Que, par conséquent, M. le comte Mortier doit être considéré comme un aliéné dangereux. »
Désastres. — Le steamer Avon, arrivé le 5 au soir en Angleterre avec la malle des Indes occidentales, a a
des lettres de la Jamaïque qui vont jusqu’à la date àu K vier. Ce steamer a donné la nouvelle de la destruction
que totale, par le feu, de la ville de Chagres, dansïjip fjjdit 8 décembre. La douane est devenue la proie deÿaiiijfe On venait d’y déposer une cargaison de 60,000 dpu
— On lisait dans le Daily-Neivs du 4 ;
« On a reçu de Syracuse la nouvelle qu’un tremblement de terre a, le H janvier, détruit la ville d’Augusta. La première secousse s’est fait sentir aune heure de l’après-dînée, et a été si violente, que chacun s’est enfui de chez soi : la secousse suivante, survenue quelques minutes après, a renversé toutes les maisons à l’exception de vingt-sept ; le môle s’est affaissé, et à l’endroit où il était, on ne trouve pas fond aujourd’hui à la profondeur de cinquante toises. D’après les dernières lettres de Syracuse, on avait déjà retiré de dessous les décombres trente-cinq morts et cinquante-neuf blessés. Le trem
blement de terre s’est aussi fait sentir à noto, à Syracuse, à Catane, où il a causé quelques dégâts partiels, et à Messine, où il n’en a causé aucun. »
Nécrologie. — M. de Valon, ancien -député, maire de Tulle, vient de mourir dans sa soixante- cinquième année,
Des rapports qui existent entre le cos
tume des anciens Hébreux et celui des Arabes modernes.
M. Horace Vernet a lu, à la dernière séance de l’Académie des beaux-arts, un travail ingénieux, qu’il veut bien com
muniquer à l Illustration avec les pièces à 1 appui, c’est-à- dire une suite de dessins dans lesquels le lecteur peut luimême suivre, dans son exposition, la thèse de l’illustre académicien.
En parcourant les trois parties de l’ancien monde, la Bible à la main, j’ai été frappé de l’actualité des mœurs de nos premiers pères. Je l’ai trouvée dans les contrées où les Ara
bes ont conservé leurs vieilles traditions, et encore partout où les juifs, depuis leur expulsion de la terre natale par Titus,
ont répandu les mêmes mœurs, sauf l’application du Thalmud qu’ils ont introduit dans leur organisation primitive.
La première révélation m’en a été faite en Algérie, un jour qu’en expédition contre certaines tribus des environs de Bone, je lisais dans le fond de ma tente lesujet deRebeccaà la
fontaine, portant sa cruche sur son épaule gauche, et la laissant glisser sur son bras droit pour donner à boire à Eliézer. Ce mou
vement me parut assez difficile à comprendre ; je levailes yeux, et que vis-je?... Une jeune femme donnantà boire à un soldat et reproduisant exactement l’acte dont je cherchais à nie rendre compte. Dès ce moment, je me sentis dominé par le désir de pousser aussi loin que possible les comparaisons que je pourrais établir entre l’Ecriture et les usages encore existants parmi tant de peuples qui ont toujours vécu sous l’in
fluence des traditions, en échappant à celle des innovations.
J’ai donc pu réunir une foule d’observations qu’il serait trop long de détailler ici. Pour ne point abuser des moments de l’Académie, je ne parlerai que de quelques-unes, en les ap
puyant sur une autre autorité que la mienne ; je citerai de savants documents puisés dans dom Calmet, le docteur
Shaw, etc. Enfin, les preuves matérielles que je r/e stfïs *cp curées, objets en nature, croquis consciencieusement faits dans le but que je voulais atteindre, viendront corroborer mes observations.
Comme spécimen, je soumettrai à l’Académie un tableau représentant la vue de la route qui conduit de Jéricho à Jérusalem, et dans lequel j’ai introduit la parabole du bon Sa
maritain. Tout ce qui est forme est moderne, et Cependant rien de neuf, puisque tout est d’accord avec les documents qui sont parvenus jusqu’à nous.
Depuis longtemps je fais de vains efforts pour accoutumer les yeux à une innovation qui ramènerait à la vérité, et qui, sans changer la poésie de l’Ecriture, lui apporterait au contraire des ressources nouvelles. Je m’explique le peu de suc
cès que j’ai obtenu jusqu’ici à cet égard ; ma direction dans les arts n’est peut-être pas de nature à donner en cette ma
tière une autorité décisive à mes observations ; mes efforts sont donc restés pour ainsi dire inutiles contre des antago
nistes que leurs études savantes portaient vers les régions supérieures du genre dit historique. Je n’en persévère pas
moins à regarder comme fort peu concluantes les réfutations qui s’appuient uniquement sur l’exemple des grands maîtres.,
et, soit dit en passant, j’attache encore moins d’importance à celles de la presse, et spécialement à un article de M. Lenormant, archéologue, membre del’Institut, qui me demande, dans un de ses articles sur le salon, pourquoiyaràbifie la Bible.
Mais de quelque manière que j’envisage cette fin de non recevoir, qui ne va pas au fond de la question, je n’y saurais voir qu’un argument en faveur de la routine, et je demanderai pourquoi les sujets tirés de l’histoire des juifs 11e subi
raient pas les mêmes modifications que ceux de l’histoire grecque et de l’histoire romaine. Ici je prierai l’Académie de vouloir bien entendre quelques fragments de lettres écrites en Syrie à un de mes élèves, sous l’influence des lieux mêmes que je parcourais.
«nous venons de quitter l’Egypte pour entrer dans la terre promise. Après avoir bien lu la Bible au milieu des Arabes de nos possessions d’Afrique, après avoir apprécié toutes les observations du docteur Shaw sur les rapports qui existent toujours entre les modernes habitants du désert et les patriarches de l’Ancien Testament, me voici sur les lieux mê
mes où tant d’événements se sont passés, où Moïse, Jésus- Christ et Mahomet ont frappé l’esprit humain par tous les moyens qui peuvent exalter l’imagination. Ce n’est pas sans
une vive émotion qu’on foule ce sol, et je m’étonne que cer-, tains poètes soient restés si froids lorsqu’ils ont eu sous les yeux l’image vivante de tout ce que l’Ecriture nous a laissé
souvenirs. Je les excuse, s’ils ont renoncé par modestie à ïlcour leur compte ce que la Bible explique si bien.. fovftz lue ici, vous avez dû être frappé de son ac
MÉ»ouez qu’elle semble avoir été écrite aujourd hui,
njÿMditions s’en sont conservées ! Malgré mon enthou- Igpfejgsens trop l’infériorité de ma plume pour hasarder
Le 28, les hommes modérés du parti royaliste, étant assurés de la résistance victorieuse de Païenne, avaient ouvert des pourparlers avec les chefs du mouvement, et l’on était con
venu d’attendre l’effet des pétitions qu’on signait de tous côtés pour obtenir la constitution. Mai» les masses, dont l’in
stinct dans les circonstances solennelles est un guide plus sur que les combinaisons de cabinet, ne voulurent pas atten
dre, et dès le 26, trente mille personnes se précipitèrent dans la vaste rue de Tolède, criant : Vive la constitution ! Quelques cavaliers ayant essayé une charge sur cette foule sans armes, mais compacte, furent culbutés. Le peuple les releva et les épargna. Les croisées s’ouvrirent et bientôt fu
rent garnies d’hommes, et surtout de dames agitant des mouchoirs aux couleurs nationales ; les jeunes gens de la noblesse accouraient dans la.rue et embrassaient les lazzaroni ; la garde civique, si minutieusement triée parmi la
bourgeoisie la plus dévouée au trône, se mêlait au peuple, il se manifestait un de ces mouvements d union, de fraternité, devant lesquels tous les despotismes sont impuissants.
Cependant, l’autorité militaire a exécuté les ordres donnés pour les cas d’émeute ; le fort Saint-Elme a arboré le drapeau rouge, tiré trois coups de canon, auxquels le fort de TQEuf a répondu, et les troupes sont sorties de leurs casernes pour entourer le palais et pénétrer dans ja rue de Tolède. Mais les masses se tenaient serrées, impénétrables, le canon seul aurait pu s’y faire jour. Il fallait opter entre une de ces luttes horribles dans lesquelles, après avoir sacrifié leurs sentiments au devoir militaire, les soldats finissent par se ran
ger du côté du peuple, ou la proclamation d’une constitution.
Après deux heures d’hésitation, le roi se décida à accepter la démission de tous ses ministres et à former un nouveau ca
binet, sous la présidence du duc de Serra-Capriola. Mais ce n’était pas pour le peuple une question de personnes, et l’a
gitation demeurait la même. Le nouveau cabinet fut unanime pour conseiller au roi la proclamation immédiate d’une constitution. Ferdinand voulait discuter encore, mais à ce moment arriva la nouvelle que les Siciliens avaient enlevé d’as
saut le palais royal et la banque de Palerme, que le général Vial s’était embarqué, laissant le duc de Majo et le général Sauget pour suivre une lutte désormais sans espoir. On ap
prenait de plus que deux régiments dirigés vers les Calabres avaient pris parti pour le peuple. La résistance fut reconnue
impossible. Le roi céda, et l’on annonça formellement pour le lendemain matin un décret promettant une constitution. Le 29, en effet, parut un décret royal dont les principales dispositions sont imitées de la charte française.
Les nouvelles de Messine sont du 28 janvier. La position était menaçante, mais il n’y avait pas eu de conflit. Les premiers décrets du roi n’avaient pas calmé l’effervescence po
pulaire. On avait cru d’abord à une levée de boucliers, mais heureusement elle n’a pas eu lieu. On attendait des nou
velles de Palerme pour agir. Le 24, le général Nunziante est sorti dans la rue Ferdinande à la tête de sa colonne mobile, qu’il a fait ranger en haie avec les canons, mèche allumée.
Cette démonstration a manqué son but, et des signes ‘de mécontentement ayant éclaté dans le peuple, on a pu craindre un moment que la lutte ne s’engageât. Cependant les troupes sont rentrées dans leurs casernes sans qu’il j ait eu de sang répandu. Les officiers et les soldats ont jure qu’ils ne s’exposeraient plus d’une manière semblable. Le général Carda
mone et le duc de Bagnoli, intendant de Messine, ont blâmé énergiquement cette provocation. On assure que Catane s’est révoltée le 26, et l’on disait que Cartagirone, Cartagirette et Milazzo allaient en faire probablement autant. Toute la Sicile paraissait prête à se lever.
— D’après l’Alba (journal de Florence) l’effectif de l’armée napolitaine se compose de 99,068 hommes, savoir : soldats sous les drapeaux, 60,465; de la réserve, 55,505; artillerie du littoral, 5,298. Dans ces chiffres, les Suisses figurent au nombre de 6,124 hommes. L’artillerie suisse compte 171 hommes.
Etats pontificaux. — nous avons annoncé que le département de la guerre, jusqu’à présent dirigé par un ecclésiastique, avait été confié au général prince Gabrielli. Deux laï
ques viennent encore d’être appelés dans le conseil. Le comte Ferretti, frère du cardinal, est nommé ministre des finances, et le prince Teano, duc Michel Guëtani, est nommé ministre de la police. Ces nominations sont considérées comme un progrès sérieux dans la carrière des réformes administratives.
Parme, — On écrivait le 20 janvier de la capitale de ce duché :
« Le nouveau souverain vient de publier un décret relatif au serment que doivent prêter les fonctionnaires. Après
avoir promis de travailler de toutes leurs forces à tout ce qui peut être utile au duc de Parme et à ses successeurs, les fonctionnaires doivent jurer qu’ils ne feront jamais partie d’aucune association, publique ou secrète, qui serait contraire aux principes, aux intérêts du souverain et de ses alliés. »
Royaume Lombardo-Vénitien. — On lit dans la Gazette d Augsbourg du 2 février :
« D’après les nouvelles reçues des frontières de la Lombardie, les envois de troupes en Italie durent toujours. Le corps d’armée autrichien en Italie va recevoir des renforts. »
Autriche. — On écrit de Lemberg (Gallicie), le 18 janvier, à la Gazette d’Aix-la-Chapelle :
« Vendredi dernier, nous avons failli être témoins ici d’une émeute contre les juifs, qui sont au nombre de 50,005. Le bruit s’était répandu que le gouvernement avait l’intention
de leur conférer le droit de bourgeoisie, ce qui les aurait rendus aptes à acquérir des terres nobles. Un membre de la commission municipale avait effectivement fait cette propo
sition au gouverneur. Aussitôt la bourgeoisie envoya une députation au palais pour vérifier le fait. Des groupes nom
breux se formèrent sur la place, attendant avec anxiété la
réponse. Le gouverneur répondit à la députation que la proposition avait été faite, mais qu’elle n’avait pas été agréée. En général, l’opinion publique n’est pas favorable aux juifs. Toutefois on espère que le gouverneur pourra prévenir le désordre.
« Il est décidé maintenant que la Gallicie_ sera divisée en deux gouvernements, dont l’un aura son siège _ à Cracovie. L’archiduc Albert sera nommé vice-roi à Cracovie ; le baron Krauss, notre président de régence, lui sera adjoint. Le con
seiller aulique de Radherny viendra ici en qualité de viceprésident de régence. »
Danemark. — Voici un roi qui tient noblement sa parole. Christian VIII est mort le 20 janvier ; le 21 son fils est proclamé sous le nom de Frécérick VIL Les bourgeois,
marchands et étudiants de Copenhague demandent à lui présenter une pétition tendante à obtenir la régularisation du gouvernement représentatif. Le roi refuse de recevoir la pé
tition, en disant : « Je suis un honnête homme ; dans ma proclamation d’avénement, j’ai promis de poursuivre et d’a
chever l’œuvre de mon père ; mon peuple doit se fier à ma parole.» Le roi s’enferme dans son cabinet avec ses ministres, et après sept jours seulement de délibérations, au mi
lieu du calme le plus profond, il fait paraître une ordonnance qui accorde à son peuple une constitution. Quelques-uns des points indiqués par cette ordonnance peuvent paraître discutables, mais le roi ne veut pas fuir la discussion, car il déclare expressément que la constitution sera_ soumise à l’examen des députés nommés par les états provinciaux.
Les états seront communs au royaume de Danemark et aux duchés de Schleswig et de Holstein ; ils siégeront alternativement dans les duchés et en Danemark ; ils s’as
sembleront régulièrement à des époques fixes ; le nombre des députés est pour le Danemark de 26, et pour les duchés de 26 également.
La constitution consacre le vote de l’impôt par les états, leur participation âu pouvoir législatif et la périodicité de leur réunion. L’usage des deux langues allemande et danoise sera facultatif dans les états, pu reste, la constitution ne change rien aux rapports établis entre les duchés et la confédération germanique.
Turquie. — Dans une visite que le sultan a faite à la Porte, il a ordonné une réconciliation entre le grand vizir, le ministre de la guerre et le ministre de la marine. Cette réconciliation a eu lieu, et toute modification ministérielle se trouve dès lors ajournée.
M. Mussurus n’a pas encore pu aller reprendre ses fonctions à Athènes. La veille du jour fixé pour son départ, il était allé à Constantinople faire ses visites de congé ; en pas
sant dans le quartier d’Ak-Séraï, son cheval s’est effrayé, l’a renversé, l’a foulé aux pieds, et lui a brisé deux côtes. Son état est toujours grave, mais cependant il est hors de dan
ger. Toutefois, son retour à Athènes ne pourra avoir lieu avant un mois, et ce retard est d’autant plus regrettable que les relations entre les deux gouvernements se trouvent ainsi suspendues.
L’envoyé extraordinaire du souverain pontife est arrivé à Constantinople, le 16 janvier, sur le paquebot sarde le Tripoli, et a été reçu en grande pompe.
Des voitures du sultan et des chevaux de selle avaient été préparés d’avance. Le nonce monta dans la première voiture avec le patriarche arménien catholique, et l’envoyé du pape, suivi de son cortège, se rendit à l’hôtel qui lui avait été préparé par la Porte, en traversant tout le quartier de Péra. Plusieurs maisons de ce quartier étaient pavoisées aux couleurs italiennes. Une foule, qui grossissait à chaque instant malgré le froid ‘et la pluie, se pressait autour de la voiture du nonce, et faisait retentir les cris de viva Pio nono ! auxquels se mêlaient aussi ceux de vive l’unité de l’Italie ! Le nonce salua à diverses reprises. Tous les chefs de mission, sans en excepter ceux d’Angleterre et de Russie,
oüt envoyé le féliciter. Aujourd’hui il recevra la visite de l’introducteur des ambassadeurs et du premier drogman de la Porte, et d’ici à peu de jours, il sera reçu en audience par le sultan. Monsignor Ferrieri parle très-facilement le fran
çais, et toutes les personnes qui l’ont.approché font l’éloge de son esprit et de la distinction de ses manières.
Bal de Petit-Bourg. — La société de Petit-Bourg, dont le bal de l’année dernière a eu tant de retentissement, et qui a laissé de si beaux souvenirs, va donner, le 22 de ce mois, une fêle plus brillante encore que toutes les autres, dans ce palais enchanté appelé Jardin d’hiver. Tout ce que l’imagi
nation peut concevoir de plus magnifique sera tenté et réalisé en illumination et en décors. nos lecteurs seront tenus au courant des préparatifs et des suites de cette fête consacrée à une œuvre de bienfaisance.
Affaire Mortier. — Les médecins commis pour faire un rapport sur l’état mental du GOmte Mortier ont conclu dans les termes suivants :
« De l’ensemble des observations recueillies, les docteurs Fabret, Foville et Calmeil, unanimes dans leur jugement, n’hésitent pas à conclure :
« 1° Que M. le comte Mortier est affecté d’une aliénation mentale partielle;
« 2° Que cette aliénation est surtout caractérisée par la croyance qu’il est victime de haines violentes, implacables, de jour en jour plus nombreuses, combinées pour le perdre;
« 5° Que, sous l’empire des illusions qui constituent son délire, M. le comte Mortier a conçu les résolutions les plus fâtâlGS
«4° Que, par conséquent, M. le comte Mortier doit être considéré comme un aliéné dangereux. »
Désastres. — Le steamer Avon, arrivé le 5 au soir en Angleterre avec la malle des Indes occidentales, a a
des lettres de la Jamaïque qui vont jusqu’à la date àu K vier. Ce steamer a donné la nouvelle de la destruction
que totale, par le feu, de la ville de Chagres, dansïjip fjjdit 8 décembre. La douane est devenue la proie deÿaiiijfe On venait d’y déposer une cargaison de 60,000 dpu
— On lisait dans le Daily-Neivs du 4 ;
« On a reçu de Syracuse la nouvelle qu’un tremblement de terre a, le H janvier, détruit la ville d’Augusta. La première secousse s’est fait sentir aune heure de l’après-dînée, et a été si violente, que chacun s’est enfui de chez soi : la secousse suivante, survenue quelques minutes après, a renversé toutes les maisons à l’exception de vingt-sept ; le môle s’est affaissé, et à l’endroit où il était, on ne trouve pas fond aujourd’hui à la profondeur de cinquante toises. D’après les dernières lettres de Syracuse, on avait déjà retiré de dessous les décombres trente-cinq morts et cinquante-neuf blessés. Le trem
blement de terre s’est aussi fait sentir à noto, à Syracuse, à Catane, où il a causé quelques dégâts partiels, et à Messine, où il n’en a causé aucun. »
Nécrologie. — M. de Valon, ancien -député, maire de Tulle, vient de mourir dans sa soixante- cinquième année,
Des rapports qui existent entre le cos
tume des anciens Hébreux et celui des Arabes modernes.
M. Horace Vernet a lu, à la dernière séance de l’Académie des beaux-arts, un travail ingénieux, qu’il veut bien com
muniquer à l Illustration avec les pièces à 1 appui, c’est-à- dire une suite de dessins dans lesquels le lecteur peut luimême suivre, dans son exposition, la thèse de l’illustre académicien.
En parcourant les trois parties de l’ancien monde, la Bible à la main, j’ai été frappé de l’actualité des mœurs de nos premiers pères. Je l’ai trouvée dans les contrées où les Ara
bes ont conservé leurs vieilles traditions, et encore partout où les juifs, depuis leur expulsion de la terre natale par Titus,
ont répandu les mêmes mœurs, sauf l’application du Thalmud qu’ils ont introduit dans leur organisation primitive.
La première révélation m’en a été faite en Algérie, un jour qu’en expédition contre certaines tribus des environs de Bone, je lisais dans le fond de ma tente lesujet deRebeccaà la
fontaine, portant sa cruche sur son épaule gauche, et la laissant glisser sur son bras droit pour donner à boire à Eliézer. Ce mou
vement me parut assez difficile à comprendre ; je levailes yeux, et que vis-je?... Une jeune femme donnantà boire à un soldat et reproduisant exactement l’acte dont je cherchais à nie rendre compte. Dès ce moment, je me sentis dominé par le désir de pousser aussi loin que possible les comparaisons que je pourrais établir entre l’Ecriture et les usages encore existants parmi tant de peuples qui ont toujours vécu sous l’in
fluence des traditions, en échappant à celle des innovations.
J’ai donc pu réunir une foule d’observations qu’il serait trop long de détailler ici. Pour ne point abuser des moments de l’Académie, je ne parlerai que de quelques-unes, en les ap
puyant sur une autre autorité que la mienne ; je citerai de savants documents puisés dans dom Calmet, le docteur
Shaw, etc. Enfin, les preuves matérielles que je r/e stfïs *cp curées, objets en nature, croquis consciencieusement faits dans le but que je voulais atteindre, viendront corroborer mes observations.
Comme spécimen, je soumettrai à l’Académie un tableau représentant la vue de la route qui conduit de Jéricho à Jérusalem, et dans lequel j’ai introduit la parabole du bon Sa
maritain. Tout ce qui est forme est moderne, et Cependant rien de neuf, puisque tout est d’accord avec les documents qui sont parvenus jusqu’à nous.
Depuis longtemps je fais de vains efforts pour accoutumer les yeux à une innovation qui ramènerait à la vérité, et qui, sans changer la poésie de l’Ecriture, lui apporterait au contraire des ressources nouvelles. Je m’explique le peu de suc
cès que j’ai obtenu jusqu’ici à cet égard ; ma direction dans les arts n’est peut-être pas de nature à donner en cette ma
tière une autorité décisive à mes observations ; mes efforts sont donc restés pour ainsi dire inutiles contre des antago
nistes que leurs études savantes portaient vers les régions supérieures du genre dit historique. Je n’en persévère pas
moins à regarder comme fort peu concluantes les réfutations qui s’appuient uniquement sur l’exemple des grands maîtres.,
et, soit dit en passant, j’attache encore moins d’importance à celles de la presse, et spécialement à un article de M. Lenormant, archéologue, membre del’Institut, qui me demande, dans un de ses articles sur le salon, pourquoiyaràbifie la Bible.
Mais de quelque manière que j’envisage cette fin de non recevoir, qui ne va pas au fond de la question, je n’y saurais voir qu’un argument en faveur de la routine, et je demanderai pourquoi les sujets tirés de l’histoire des juifs 11e subi
raient pas les mêmes modifications que ceux de l’histoire grecque et de l’histoire romaine. Ici je prierai l’Académie de vouloir bien entendre quelques fragments de lettres écrites en Syrie à un de mes élèves, sous l’influence des lieux mêmes que je parcourais.
«nous venons de quitter l’Egypte pour entrer dans la terre promise. Après avoir bien lu la Bible au milieu des Arabes de nos possessions d’Afrique, après avoir apprécié toutes les observations du docteur Shaw sur les rapports qui existent toujours entre les modernes habitants du désert et les patriarches de l’Ancien Testament, me voici sur les lieux mê
mes où tant d’événements se sont passés, où Moïse, Jésus- Christ et Mahomet ont frappé l’esprit humain par tous les moyens qui peuvent exalter l’imagination. Ce n’est pas sans
une vive émotion qu’on foule ce sol, et je m’étonne que cer-, tains poètes soient restés si froids lorsqu’ils ont eu sous les yeux l’image vivante de tout ce que l’Ecriture nous a laissé
souvenirs. Je les excuse, s’ils ont renoncé par modestie à ïlcour leur compte ce que la Bible explique si bien.. fovftz lue ici, vous avez dû être frappé de son ac
MÉ»ouez qu’elle semble avoir été écrite aujourd hui,
njÿMditions s’en sont conservées ! Malgré mon enthou- Igpfejgsens trop l’infériorité de ma plume pour hasarder