LE GRAND-DUC CONSTANTIN
Le grand-duc Constantin NicolaïevitcU est mort cette semaine à Saint-Péters
bourg des suites d’une paralysie générale dont il souffrait depuis de longs mois. Il était le frère de feu le czar Alexandre II : le czar actuel était, par conséquent, son neveu. Le grand-duc Constantin avait rempli un rôle politique et militaire important sous les règnes de Nicolas et d’A­
lexandre II. C’est lui qui, pendant la guerre d’Orient, commandait la flotte russe de la mer Baltique, et c’est lui qui eut à défen
dre le port de Cronstadt contre les forces navales françaises et anglaises.
En 1857 — après la guerre — il fut désigné par le czar comme ministre de la ma
rine. Il fit, peu de temps après, un voyage en France où Napoléon III l’accueillit avec les plus grands honneurs. De ses entre
vues et de ses conversations avec notre empereur, le grand-duc Constantin em
porta des impression s très libérales, et, dès son retour en Russie, on dit qu’il essaya de gagner son frère à ses généreuses idées de réforme.
En 1865, le grand-duc Constantin était nommé président du conseil de l’empire. Il y incarnait en matière de politique ex
térieure les théories des « vieux-russes », celles que le czar Nicolas avait toujours suivies, c’est-à-dire : la résistance énergi
que à l’influence ou à l’envahissement des puissances occidentales. Et pourtant, dans la politique intérieure, il aida puissam
ment son frère à faire accepter et à appliquer le décret d’émancipation des serfs. Quand, après le meurtre d’Alexandre II, le czar Alexandre III monta sur le trône,une certaine réaction politique marqua néces
sairement ce changement de règne survenu en des circonstances sanglantes. Le grandduc Constantin se retira des affaires. Il laisse cinq enfants : trois fils et deux filles, dont l’une est la reine de Grèce.
X.
LE GRAND-DUC CONSTANTIN NICOLAIÉVITCH Photographie Bergamasco.
L INCENDIE DU PALAIS D’ARENBERG
Le palais d’Arenberg, dont un incendie vient de détruire la plus belle partie, est à coup sùr un des plus beaux et des plus in
téressants monuments de Bruxelles. Sa g-alerie de tableaux,qui contient entre autres trésors deux Franz Hais admirables, sa.bimiothëque où abondent les ouvrages des XVII et XVIIIe siècles et qui renferme
des manuscrits aux enluminures les plus précieuses, sa collection de céramique
chinoise, ses sculptures, ses bronzes, font de cette demeure un musée incomparable.
La plupart de ces richesses, heureuse
ment, ont été sauvées, le feu n’ayant tou
ché que l’aile gauche, entamant un peu la partie centrale du palais.
C’est dans la nuit du 22 au 23, vers une heure et demie, que le feu s est déclaré. Le palais d’Arenberg, situé sur la place du Sablon, est habité par le prince el la princesse de Croy et leurs enfants. Le prince revenait du cercle, lorsqu’il vit les flammes jaillir par les fenêtres du palais. Presque au même moment la princesse, réveillée par le crépitement de l’incendie, s’élançait hors de sa chambre.
Les secours furent vivement organisés, quatre pompes à vapeur furent mises en batterie; mais, malgré tout, on dut faire la part du feu et sacrifier entièrement l’aile gauche du palais. Les hautes flammes s’é­
levant dans nuit faisaient de ce sinistre un spectacle grandiose et saisissant à la fois. Trois pompiers, malheureusement, ont été grièvement blessés.
Si, comme nous l’avons dit, la plupart des objets d’art ont pu être sauvés, on a à déplorer la perte d’un souvenir histo
rique cher au peuple belge : le cabinet du comte d’Egmont, premier martyr de la ré
volution des Pays-Bas. On en avait fait une sorte de chapelle expiatoire, et rien n’avait été changé ni dans l’ameublement ni dans l’ornementation depuis trois siècles.
L’incendie du palais d’Arenberg, à Bruxelles, dans la nuit du 22 janvier.
D’après les documents communiqués par notre correspondant M. Monnier.