Entrée des cours.
pitoyablement sur le nez du retardataire qui arrive alors langent, ou aérant extérieur, pour continuer à nous servir de l argot spécial, et qui, dans le dernier cas, manque le cours et perd sa .journée d’études.
Les tangents se rendent d’abord à leur salle respective où ils revêtent la longue blouse sacramentelle, puis, au son de la cloche de TAmphi, chaque division se dirige vers l’amphithéâtre où a lieu le cours qu’ils doit suivre.
Rien n’est plus curieux que cette scène de l entrée du cours. Deux cents jeunes gens revêtus de leurs blouses ornées d’emblèmes cabalistiques fran
chissent la porte en rangs serrés sous l’œil vigilant du pituine ou surveillant, ainsi nommé parce que ces fonctions sont toujours remplies par un ancien capitaine d artillerie ou du génie en retraite. Pendant que les élèves gravis
sent les gradins et s’assoient à leurs places, toujours les mêmes, le major au milieu vis-à-vis du professeur et chaque élève à celle qui lui échoit et dont il connaît les coordonnées : salle 3, banc 4, place 17 par exemple, le professeur entre et le cours commence. La planche, sorte d immense tableau noir qui, grâce à son mécanisme ingénieux, peut monter et descendre à volonté, sert aux démonstrations; elle forme, au fond de l’amphithéâtre, un rideau mobile masquant la table qui sert aux expériences de physique et de chimie.
Les chimistes, dont le nom à l’Ecole, on ne sait pourquoi, est l’objet de certaines plaisanteries, ne sont jamais appelés autrement que Ch misls. Quand un élève se trouve embarrassé par une question quelconque, il est sûr d’être dédaigneusement salué par cette phrase : « Comprend rien, ch’mists! «Les produits pour les manipulations sont distribués aux élèves à un guichet spé
cial. Les laboratoires de chimie sont admirablement organisés. A la place de chaque élève aboutissent des tuyaux qui lui fournissent de l’eau et du gaz, et des fils qui lui procurent une source continuelle d’électricité.
Ne sortons pas de Centrale sans avoir jeté un coup d’œil sur le guichet du restaurant de l’Ecole, où, moyennant 80 centimes par portion, les élèves trouvent une carte des plats du jour, qui est des plus variées.
Tous les jours une bousculade a lieu devant ces guichets d’où chacun cherche à se dégager en élevant au-dessus de sa tête son plat que, semblable à un caniche qui a volé un os, il va manger dans un coin, dans la cour sur ses genoux ou debout le long du mur dans les corridors, par mépris du superbe réfectoire que l’administration a fait installer. Le suprême chic lorsqu’on a tini de déjeuner consiste à cacher et à disséminer dans les coins les couverts dont on s’est servi, afin que les garçons aient le plus de peine possible à les retrouver. Comme on le voit, à l Ecole centrale des Arts et Manufactures, le bon rire gaulois et la gaieté côtoient les études sérieuses et le travail assidu.
Nous ne saurions mieux terminer cette rapide visite à l’Ecole centrale qu’en donnant quelques-uns des noms qui l’ont illustrée. Ouverte en novem
bre 1829, elle a eu pour fondateurs: Dumas, le grand chimiste ; Péclet, le grand physicien; Olivier, le mathématicien ; Lavallée enfin qui donna toute sa fortune, plus d’un demi-million, pour surmonter les [difficultés qui vinrent assiéger l’œuvre à ses débuts..
I. Annuaire des anciens élèves de l Ecole centrale est intéressant à consulter: Laplace et Noël y professèrent à Paris; parmi les élèves les plus brillants, on peut rappeler les noms de Péclet, Poloneeau, Vuiilemin, Foiquenot, Yvon-Villarceau, parmi ceux qui sont morts. Quant aux vivants, ils sont légion : Orson, ingénieur en chef de la Compagnie du gaz; Berthon, direc
teur général des téléphones ; Bourdais, l architecte du Trocadéro; le colonel Cance, ancien commandant du palais de l Elysée; Canet, inventeur des canons qui portent son nom, directeur de l artillerie des forges et chantiers de la Méditerranée: Eugène Péreire, de la Compagnie générale transatlantique; Eiffel, Farcot, etc., et tant d’autres dont la liste serait trop longue.
La planche.