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uelques amateurs connaissaient l’existence, dans les églises du pays de Nice, d une
centaine de retables et panneaux remontant à la Renaissance, et de nombreuses fresques de la môme époque décorant quantité de chapelles de la montagne. A la suite de nouvelles cl patientes recherches, le nombre de ces œuvres s est accru aujourd hui
et il reste bien des découvertes à faire dans les petits oratoires alpestres qui tombent lentement en ruines parmi les solitudes des campagnes abandonnées.
La Société des Beaux-Arts de Nice a pu réunir près de quatre-vingts de ces tableaux, et un certain nombre de décalques des plus belles fresques ; cet ensemble donne une idée assez complète du mouvement artistique delà région aux XVe et xvie siècles.
On se demande à la suite de quelles circonstances le Coinlé de Nice engendra tant de peintres de grand talent à l’époque de la Renaissance et épuisa sa fécondité après un
siècle et demi de production. La réponse à celle question est encore à trouver ; mais il faut se rappeler que Nice constituait alors une sorte de pelile capitale italienne dans
laquelle le duc de Savoie et sa cour venaient souvent séjourner ; que celle cité était une place forte très importante et le seul port du Piémont cl de la Savoie. Nice traver
sait donc une période de prospérité favorable à l’éclosion des arts. D’autre part, le Comté, provençal par l’origine et par la langue, mais détaché de la France et appar
tenant à un prince à la fois français et italien, fut forcément pénétré en même temps parles Renaissances française cl italienne cl s’ouvril aux inspirations artistiques des deux civilisations.
La combinaison de ces influences simultanées est telle qu il est impossible, en l état actuel de la critique, de démêler les origines de certaines œuvres d’art de l’époque. Les uns trouvent en elles des réminiscences sicnnoises, ce qui est possible puisque Simon
Memmi est le maître de l Ecole d’Avignon ; d’autres croient reconnaître une filiation flamande et bourguignonne, que l on a constatée déjà dans les Ecoles d’Aix et de la
vallée du Rhône ; d’autres encore évoquent les tendances florentines ou découvrent l’influence des Ecoles du Nord de l’Italie.
Cette diversité d’inspirations semble être corroborée par la diversité des genres da peinture qui furent pratiqués en même temps.
Les tableaux qui dénotent des aspirations idéalistes abondent. La Vierge de Sospel esl l’expression même de la pureté et de l’innocence célestes. Le réalisme est représenté par le retable de Bouson, dans lequel la beauté est résolument sacrifiée à l’expression et à la vérité.
Le vrai style décoratif, avec son dessin large, son coloris sommaire, ses simplifications voulues se retrouve dans le presligieux retable de Gréolières, inconnu hors de son village, il y a un an à peine et que l’on peut présenter comme un modèle de peinture décorative. On ne sait encore à quelle école le rattacher.
Le genre anecdotique a été traité avec une verve de détails tantôt plaisants tantôt tragiques par le peintre inconnu de la Danse des Moris du Bar. C’est une œuvre dont l’origine française est difficilement conleslable.


EXPOSITION DE LA SOCIÉTÉ DES BEAUX-ARTS DE NICE


PEINTRES DES XVe ET XVIe SIÈCLES DE LA RÉGION DE NICE