Élude d’enfant.


LES DESSINS DE MME JEANNE BARDEY




O


n pourrait peut-être proposer une division logique des dessinateurs en distinguant
ceux pour qui le dessin est un molif ornemental et ceux pour lesquels il est une écriture. Si l’on remonte aux temps primitifs, aux époques de la formation des arts, on voit que le dessin conçu par l’homme des cavernes est avant tout destiné à enjoliver par la représentation d’abord réalisle et imitatrice, puis lentement orientée vers la synthèse expressive et l’analogie des formes dans les divers règnes. L’hiéroglyphe, patcontre (et peut-être le dessin étrusque) est avant tout la figuration d’une idée et de sa traduction verbale par une allusion très rapide et très schématique aux formes géné
rales de l’objet que le mot définit — une sténographie imagée. Lorsque, plus tard, on se réfère à l’enluminure grecque, byzantine et franque, avant l’apparition de « l’histoire », ou sujet, d’où le portrait-miniature est issu, on remarque (pie les races méri
dionales s’en tiennent à l’ornement linéaire en soi, à la « calligraphie » par les variantes géométriques des traits, au lieu que les enlumineurs septentrionaux s’attachent déjà à la reproduction précise d’animaux, de fleurs régionales, ou d’objets usuels. Ce sont là les origines des deux conceptions du dessin décoratif et du dessin psychologique.
L’artiste dont j’ai désir de présenter ici un bref commentaire appartient au second groupe : non qu’elle n’ait le sens de l’ornement, mais avant tout elle dessine pour exprimer ses remarques psychologiques. Elle dessine « ce qui est caché dans les êtres ». Elle écrit.
Mme Jeanne Bardey est une jeune femme dont on n’a pas encore parlé. Il y a peu a dire sur elle. Lyonnaise, mariée à un professeur d’art décoratif, elle commença naguère à peindre, timidement et presque en se cachant, des natures mortes et de petits portraits qu elle n’exposa pas, et où il y a un sens riche et savoureux des colorations
sourdes, des nuances discrètes et éteintes, des valeurs fortes dans la pénombre. Un de ces tableaux est au musée de Lyon, parce que le maire de cette ville, M. Herriot, qui est un lettré et un connaisseur d’art de premier ordre, avait vu ce petit cadre, compris à l’instant sa valeur, et tenu à le joindre aux très belles collections qu’il réunit avec amour dans ce musée. Puis, Mme Jeanne Bardey se mit à dessiner selon des prin