l’Ecureuil, le Chien et le Singe ; de temps à autre, un audacieux Perroquet parvenait à se glisser dans les feuillages, des Cygnes y recourbaient harmo


nieusement leur col ; on y rencontrait même jusqu’à des Couleuvres et des Hérissons. La Mythologie, toute puissante alors, faisait intervenir le Paon avec Junon et le Cheval avec Neptune, voire même la Chouette de Minerve et le Cerf de Diane, mais rarement émancipés de la présence de leurs maîtres.
Les modernes ont bien réduit cette liste et quand, par ultra-fantaisie, on admet un animal dans une œuvre d’art appliqué, ce n’est qu’à la condition
qu’il soit aimable, c’est-à-dire qu il n’ait pas de trop gros yeux, un trop gros bec, de trop grosses pattes ; il ne faut pas non plus qu’il soit hérissé ou trop glabre; qu’il ne rappelle rien de rampant, de visqueux ou de ces choses qui
sautent ou courent vite avec beaucoup de pattes ! Horreur ! ! — Non, il faut qu’il soit comme il faut, bourgeois et très apprivoisé; qu’on le sente animé
des sentiments les plus doux, les plus tendres, et que sa physionomie soit plutôt bonasse et en tout cas sympathique.
Inutile donc de penser aux Poissons gluants et puants, aux Rats, Souris, Lézards, Grenouilles et Crapauds, Salamandres et Serpents abandonnés pour la plupart depuis des siècles d’un goût plus épuré. Ne parlons pas non plus des Scarabées, Sauterelles et Chenilles, des Escargots et Limaces, ainsi que des Chauves-Souris, Corbeaux et Hiboux, spectres tristes et affreux!
Il va sans dire que des Rhinocéros, Hippopotames, Crocodiles, Iguanes, Langoustes et Crabes, il na jamais été question; et pourtant
Il n’est pas de serpent ni de monstre odieux Qui bien interprété ne puisse plaire aux yeux.
Quelles peuvent bien être les raisons de cette aversion pour tout une partie du règne animal ?
— Il y en a, paraît-il, plusieurs quelque peu obscures. On vous dira entre autres que les vilaines bêtes font peur à la clientèle, à cause de l’état nerveux de la dite clientèle, très souvent féminine.
Mais pourquoi les bêtes sont-elles vilaines, et pourquoi effrayent-elles les dames nerveuses ?
— Parce que, depuis l’époque de la Renaissance, on a pris la funeste habitude de traiter tous les ornements, qu’ils soient tissés, peints ou imprimés sur les
surfaces, comme si on les voyait en relief, et que cette habitude a conduit peu à peu, comme dans tous les autres Arts sans exception, au réalisme absolu.
J’avoue que, dans ces conditions, une série de Cafards de quinze centimètres de long, ou de Crabes de trente de diamètre, serait peu supportable