se trouvent directement mêlés à ces combinaisons louches et deviennent parfois les instigateurs de ces trahisons, les complices généreux de ces vols.
En Hollande, il est vrai, les choses se passent avec moins de véhémence et plus d’honnêteté. La bonne foi, la loyauté bataves répudient ces pratiques détestables. Ce n’est pas toutefois que le désir de posséder le produit merveilleux y soit moins ardent qu’ailleurs. Le nom magique de la porcelaine exerce là aussi une indiscutable fascination, et si spontanée, si vive, que nous le retrouvons, dès la fin du xvie siècle, abusive
ment prodigué par les écrivains les plus autorisés. Sous la plume de Carel van Mander, d’Ampzing, de Bleyswijck1, il apparaît à tout instant.
Il n’est donc pas surprenant que, dès l’année 1614, nous rencontrions dans les Provinces Unies un industriel estimé, un artiste apprécié, qui se vante publiquement d’avoir découvert le secret de contrefaire la porcelaine orientale, et le persuade à ses compatriotes et à son gouvernement.
Tous les historiens de la céramique hollandaise, en effet, depuis un demi-siècle, nous ont dit et répété que, le 14 avril de cette année 1614, les États Généraux accueillirent gracieusement la demande présentée par un certain Claes Jaussen Wytmans, qui affirmait avoir inventé et pouvoir fabriquer « loutcs sortes de porcelaines décorées, conformes, ou à peu près, aux porcelaines qui viennent des lointains pays ». Albert Jacque
mart, qui, croyons-nous2, fut le premier en France à publier cet important document, ajoutait que le privilégié « était tenu de fabriquer dans l’année un échantillon de son invention, qui devait avoir la finesse de la porcelaine orientale ». Mais Jacquemart et ses copistes ont omis, jusqu’à ce jour,
de nous dire qui était ce Claes Wytmans, de nous révéler son lieu de naissance, de nous apprendre quelle ville il habitait. Seul, M. Demmin se crut en droit d’affirmer que Wytmans était originaire de Bois-le-Duc. M. Demmin se trompait3.
Heureusement, l’érudition néerlandaise veillait. Nous n’avons qu’à l’interroger, elle nous répondra. Voici d’abord Christian Kramm4, qui
1. Voir Carel van Mander, Met Leven der dom luchlige nederlandtsche en hooghduytsche Schilders (Haerlem, 1604), f° 287 ; Ampzing, Beschryvinge ende Lof der Stad Haerlem in Holland (Haerlem, 1628), p. 368 et s. ; Dirck van Bleyswyck, Vervolg van Beschryvinge der Stadt Delft (1667), p. 737, etc.
2. Les Merveilles de la Céramique (Paris, 1868). t. 111, p. 174.
3. Le Guide de l Amateur de faïences et de porcelaines, etc., t. 11, p. 674, et t. 111, p. 1098.
4. Ch. Kramm, Levens en Werken der hollandsche en vlaamsche Kunstschilders, etc. (Amster
dam, 1861), t. 11, p. 800.
En Hollande, il est vrai, les choses se passent avec moins de véhémence et plus d’honnêteté. La bonne foi, la loyauté bataves répudient ces pratiques détestables. Ce n’est pas toutefois que le désir de posséder le produit merveilleux y soit moins ardent qu’ailleurs. Le nom magique de la porcelaine exerce là aussi une indiscutable fascination, et si spontanée, si vive, que nous le retrouvons, dès la fin du xvie siècle, abusive
ment prodigué par les écrivains les plus autorisés. Sous la plume de Carel van Mander, d’Ampzing, de Bleyswijck1, il apparaît à tout instant.
Il n’est donc pas surprenant que, dès l’année 1614, nous rencontrions dans les Provinces Unies un industriel estimé, un artiste apprécié, qui se vante publiquement d’avoir découvert le secret de contrefaire la porcelaine orientale, et le persuade à ses compatriotes et à son gouvernement.
Tous les historiens de la céramique hollandaise, en effet, depuis un demi-siècle, nous ont dit et répété que, le 14 avril de cette année 1614, les États Généraux accueillirent gracieusement la demande présentée par un certain Claes Jaussen Wytmans, qui affirmait avoir inventé et pouvoir fabriquer « loutcs sortes de porcelaines décorées, conformes, ou à peu près, aux porcelaines qui viennent des lointains pays ». Albert Jacque
mart, qui, croyons-nous2, fut le premier en France à publier cet important document, ajoutait que le privilégié « était tenu de fabriquer dans l’année un échantillon de son invention, qui devait avoir la finesse de la porcelaine orientale ». Mais Jacquemart et ses copistes ont omis, jusqu’à ce jour,
de nous dire qui était ce Claes Wytmans, de nous révéler son lieu de naissance, de nous apprendre quelle ville il habitait. Seul, M. Demmin se crut en droit d’affirmer que Wytmans était originaire de Bois-le-Duc. M. Demmin se trompait3.
Heureusement, l’érudition néerlandaise veillait. Nous n’avons qu’à l’interroger, elle nous répondra. Voici d’abord Christian Kramm4, qui
1. Voir Carel van Mander, Met Leven der dom luchlige nederlandtsche en hooghduytsche Schilders (Haerlem, 1604), f° 287 ; Ampzing, Beschryvinge ende Lof der Stad Haerlem in Holland (Haerlem, 1628), p. 368 et s. ; Dirck van Bleyswyck, Vervolg van Beschryvinge der Stadt Delft (1667), p. 737, etc.
2. Les Merveilles de la Céramique (Paris, 1868). t. 111, p. 174.
3. Le Guide de l Amateur de faïences et de porcelaines, etc., t. 11, p. 674, et t. 111, p. 1098.
4. Ch. Kramm, Levens en Werken der hollandsche en vlaamsche Kunstschilders, etc. (Amster
dam, 1861), t. 11, p. 800.