ouvrages importants ; prendre ensuite un aperçu des décorateurs, des peintres de genre et des portraitistes. J’insisterai plus longuement sur Watteau, Lancret et Pater, que nous n’avons guère occasion d’étudier chez nous. Sur le reste, qui, pour une bonne part, nous est connu par de récentes expositions, je passerai plus rapidement. Je dirai enfin un mot des sculptures, assez peu nombreuses.
Avant d’arriver à Watteau, arrêtons-nous devant un portrait qu’on aperçoit dès l’entrée : celui de Frédéric II, par Antoine Pesne. Autant que le modèle, le peintre a le droit de nous accueillir à cette fête de l’art français; il en fut, à la cour de Prusse, pendant près de cinquante années, le très digne représentant. Frédéric, qui le connut dès l’enfance, estimait son talent; il est permis de croire que le goût de l’artiste ne fut pas sans influence sur celui du prince, et que nous lui devons quelque reconnaissance. Pesne mérite de nous retenir un moment.
Né à Paris en 1683, élève de son père et de Charles de la Fosse, Pesne voyageait en Italie quand il connut le baron de Kniephausen, qui parla de lui à Frédéric-Guillaume Ier. Celui-ci l’appelait à Berlin en 1710.
En 1711, Pesne prenait la place de « peintre de la cour »; il la garda jusqu’à sa mort, en 1757. L’occupation qu’il avait en Allemagne ne lui permit guère de revenir en France : il n’y parut qu’en 1723, pour prendre sa place à l’Académie, où il avait été « agréé » trois ans auparavant. C’est ce qui explique qu’il soit fort mal connu chez nous. Le Louvre possède son portrait de Vleughels, si haut placé qu’on le voit à peine; le musée de Rouen, un portrait de femme. Je n’en connais point d’autres. Il faut aller à Berlin pour apprécier sa valeur1. Et l’exposition même ne permet pas d’en bien juger. Rien n’est plus divers que son talent.
Avec un zèle touchant chez cet exilé il a cherché à s’approprier tout ce qui venait de son pays natal. Formé à l’école des portraitistes un peu compassés du xviie siècle, il a simplifié sa manière à mesure que la sim
plicité s’introduisait dans nos portraits; il s’est plié, pour orner un salon, aux grâces de Lancret; il s’est guindé à des allégories mytholo
1. Pesne n’a été étudié que par M. Seidel, qui lui a consacré, en 1891, trois articles dans la Gazette des Beaux-Arts. Il a parlé de lui plus longuement dans Friedrich der Grosse und die franzœsische Malerei seiner Zeit, où l’on trouvera de nombreuses illustrations.