Toutes les conditions favorables à l’éclosion poétique sont donc réunies. Dans son propre intérêt, pour l’avenir de la saine
littérature française, l’Académie se doit à elle-même d appuyer chaudement la pétition si modeste qu’adresse au Préfet de la Seine le rédacteur du Malin.
Cet écrivain possède, au plus haut degré, le sentiment de lʼactualité, tout autant que des parfaites convenances politiques et sociales. Il sait à quels petits désagréments lʼadministration peut se trouver exposée par la bienveillance paternelle qu elle a toujours montrée pour des syndicats trop ingrats et des C. G. T. trop peu reconnaissantes. Il sait également que de bons certificats d’excellent civisme ne peuvent qu’étayer solidement une pétition: c’est lʼéchafaudage confortatif dont il est bon de l’entourer avant, pendant et après.
Aussi conclut-il très adroitement en ces termes, qui en disent plus long quʼils n en ont l’air:
« J’aurai tout dit, Monsieur le Préfet, quand j aurai ajouté que je suis un bon républicain, estimé dans son quartier.
« Soyez sûr que vous n’aurez jamais à sévir contre moi. Je prends l’engagement formel de ne jamais me syndiquer, afin de ne pas me trouver dans l obligation de me mettre en grève. Je hais la grève, Monsieur le Préfet; je hais le chômage!
« Et c’est dans ces sentiments que j’ai l’honneur d’êlre, Monsieur le Préfet, votre très humble et très dévoué serviteur. »
L’engagement sera tenu, nous n’en avons pas le moindre doute: D’abord avec qui le maçon-poète pourrait-il se syndi
quer, même s’il le voulait? Avec le météorologiste, son seul compagnon en ces lieux inhabités? On ne voit pas quelle communauté d’intérêts pourrait les réunir, ni sur quelles bases se fonderait leur syndicat.
Pour former un syndicat il faut d’ordinaire un secrétaire général, un archiviste, un trésorier, un bibliothécaire, un bureau qui ne peut pas être unipersonnel. A deux on ne peut pas occuper toutes ces fonctions simultanément. Et qu’est-ce qui resterait pour former l’assemblée générale?
Ensuite, le cas de M. René Bures serait tout particulier et tout différent des autres. Il prend formellement l’engagement de ne jamais travailler. Contrairement aux usages courants, se mettre en grève, ce serait donc pour lui se mettre à travailler?
Travailler à quoi, puisque personne ne lui donnerait rien à faire?
Il lui est donc impossible de tromper la confiance que lui accordera certainement la Préfecture.
Nous nous en réjouissons pour celle-ci, pour lʼimpétrant, et encore — nous l’avons fait clairement entendre — pour l’Académie, obligée de reconnaître que la Poésie aussi manque de bras.
P. Planât.


VILLA DE M. B. DES G. A NIORT


PLANCHE 5
La Villa que M. Mongeaud vient de faire édifier est située au bord de la Sèvre sur un coteau qui a été, jadis, exploité
comme carrière; par suite, le terrain présentait à 11 mètres de la rue un talus presqu’à pic, de 15 mètres de hauteur, par rapport au sol horizontal joignant la rivière.
Il a donc fallu, pour reculer la façade à 5 mètres seulement de l alignement, implanter la construction à cheval sur le ta
lus, ce qui n’a pas été sans quelques difficultés, et on a dû faire un apport de remblais assez important pour créer une plateforme de 3 mètres de largeur au-devant de l’entrée du sous-sol.
Le talus de ces remblais, qui n est pas encore aménagé, sera fixé par des gazonnements et plantations; une allée en zig
zag permettra d’accéder au jardin bas. On formera ainsi pour la villa un soubassement pittoresque qui la mettra en valeur.
Les matériaux employés dans la construction sont les moellons et la pierre de taille de Niort, sauf au-dessous du rez-dechaussée où les angles, cordons et encadrements des baies sont en pierre de Bonnillet (Poitou) et les moellons de parement en pierre de Grandjean (Charente-Inférieure). Les mar
ches et le perron sont en Chauvigny et les bow-window en Château-Gaillard (Poitou).
La colonne du porche et les colonnettes des baies géminées au-dessus sont en Échaillon rose liseron. Les façades sont égayées par des bandeaux et cordons en briques rouges pressées des Charentes, par quelques briques émaillées, des cabo
chons vieux rose et bleu turquoise et des frises en céramique Millier d un ton très doux; le crépi tyrolien est gris légère
ment bleuté; les menuiseries et tous les bois apparents sont peints en vert clair: l’ensemble est d’une tonalité agréable.
La coloration des matériaux joue donc un grand rôle dans la décoration qui est complétée, au porche et au bow-window, par une note discrète de sculpture où lʼon s’est inspiré de la flore et des végétaux du pays. C est ainsi que les chapiteaux ont été
Coupe longitudinale.