nette chez Gabriel, Louis, Antoine et beaucoup d’autres également célèbres.
Si nous parlons d’ordre chronologique, nous n’entendons indiquer quʼun ordre approximatif, attendu qu’à côté de telle construction dont l’achèvement n’exigea que trois ou quatre années, il fallait classer telle autre dont les travaux durè
rent quarante ou même cinquante ans. Doit-on, dans ce cas, s’en tenir simplement à la date de fondation? Mais il est cer
tain qu’au cours de l’exécution, bien des modifications furent introduites par l’architecte lui-même ou ses successeurs, sinon dans le plan général, au moins dans le système décoralif. Il
est donc nécessaire de sʼen fier plutôt au caractère même de l’ouvrage qui indique, beaucoup mieux qu’une date, si l’architecte, en le créant, s’était plus ou moins avancé dans la voie de réformation nouvelle.
A ce sujet, nous devons signaler que, si l’on consulte pour ces recherches les auteurs mêmes du xvIIIe siècle qui ont traité de lʼarchitecture, on trouve parfois des contradictions entre les dates signalées par eux. Cela tient en général à ce que les uns donnent la date où commencèrent les premiers travaux de fondation, lesquels furent parfois très longs; les autres, la date officielle du jour où fut solennellement scellée une première pierre. D autres s’en tiennent même à la date d’inauguration. Mais, ainsi prévenu, on peut assez facilement rétablir une suffisante concordance, surtout si l’on ne se propose qu’un classement approximatif.
Nous terminerons ce préambule en faisant observer que, pour bien connaître un style, il faut, non seulement beaucoup voir, mais encore beaucoup regarder et avec attention; com
parer avec soin ce qui, dans les constructions dʼun même style, varie suivant le goût de chaque architecte, et ce qui, au con
traire, reparaît constamment; c’est-à-dire ici: lʼemploi des frontons faiblement surhaussés, des guirlandes, des draperies, des bas-reliefs, des canaux, des moulures ornées à la façon an
tique, des ordres et des proportions classiques, des corniches très saillantes, soutenues par des consoles très allongées et très délicatement travaillées, des rotondes à colonnes, et, principalement, de la statuaire exactement adaptée aux proportions et aux formes architecturales.
Nous ferons remarquer encore que le style Louis XVI, tout classique qu’il soit, doit être traité avec légèreté, sobriété, sans surcharges, raideur conventionnelle, ni lourdeur, et se recommander par la finesse et l’élégance des détails.
P. Planat.


SALON D’AUTOMNE


Nous l’avons dit: Le Salon d automne est une des gaîtés de la vie à Paris, de ce Paris où l on ne saurait que faire, après avoir quitté les plages où l’on était censé se distraire, les pays norvégiens où l’on se persuade qu’on est allé cherché la fraîcheur estivale et des distractions inédites.
Les jours qui raccourcissent, les premières brumes, la mélancolie automnale, assombriraient assez rapidement l’humeur des habitants d’une capitale réputée gaie, s’ils n’avaient, pour relever leur moral, les joyeusetés du Salon d’automne.
Quoiqu’on en dise, lors même que l’on serait attristé par des commencements de douleurs rhumatismales, ou par un coryza persistant, il suffit, comme recommandent nos Escu
lapes les mieux avertis, d’aller faire un tour, un demi-tour au Palais de l’Art, pour revenir prêt à affronter gaiement les intempéries et les brouillards. Toute tentative du spleen menaçant est immédiatement écartée.
En fait, si nous étions sincèrement reconnaissants, nous devrions considérer les exposants de cet aimable Salon comme de véritables bienfaiteurs de l’humanité. Que sont auprès d’eux l’inventeur des pilules Pink (avec portraits authentiques) et celui de la véritable tisane des Shakers?
Et si nous savions loyalement rendre justice à qui nous rend des services aussi signalés, n est-ce pas à eux que nous préparerions déjà des statues avec piédestaux La semaine dernière on en inaugurait jusqu’à sept pour des personnages que nous ne dirons pas plus inconnus les uns que les autres: par esprit d’égalité les autres l étaient autant que les uns.
Et cependant des ministres se sont dérangés, ont prononcé des discours qui ont beaucoup servi déjà, mais que l’on entend toujours avec un nouveau plaisir; des secrétaires et sous-secrétaires d’État sont accourus à tire-dʼaile.
Personne n’a pensé à glorifier le Salon d’automne, ni les salonniers automnaux!
Seul Miguel Zamacoïs, l’auteur des Bouffons, qui a fondé cette spirituelle « Arche de Noë » où sont décrits, d’une main si légère, les vertus et les vices de tous les animaux désagréables
de la création, seul il a chanté, en un rondeau tout récemment écrit, le charme, la grâce, l’utilité sociale, humanitaire et démocratique, de l’unique, du vrai, de l’inimitable Salon d’automne.
Certes, nous voudrions le reproduire tout entier, ce rondeau réparateur; mais, n’en ayant pas le droit, bornons-nous à quelques extraits qu’autorise l usage.
Je reviens du Salon dʼautomne dit lʼauteur! G est le refrain, puisque tout rondeau qui se respecte comporte un refrain. Et il se demande:
Ces tableaux qu’on nous étala
Sont-ils juste bon pour la foire;
Ou sont-ils du grand art?... Voilà Mon avis; pour rien je le donne: Je reviens du Salon d’automne.
Il ne veut pas trop se compromettre. Certes, il a vu « de tristes Vénus anémiques, de vilains corps décomposés, et des pièces anatomiques, et bien des portraits d’écrasés ». Mais il a bien compris que tout cela, c’était pour rire: Pour ce que rire est, comme on sait, le propre du Salon d automne.
Arrivons promptement à la conclusion qui résume tout en peu de mots:
Et maintenant, nouveaux artistes, Les inventeurs de nouveautés, Vermicelleurs et confettistes,
Et peintres de tableaux sculptés,
Chercheurs de timbales, gymnastes Qui vous pendez à tous les mâts, Sans craindre les iconoclastes
Non plus que la bande à Thomas:
C’est grâce à vous qu’imperturbable, Dorénavant toujours, partout,
De l’impossible à l’improbable,
Dans tous les arts, j’admettrai tout! Ici-bas plus rien ne m’étonne...
Je reviens du salon d’automne!
On en revient, on le voit, sans trop de dommage; c est une campagne glorieuse, mais qui ne coùte aucune mort d homme.