Il est probable même, bien qu’on ne l avoue pas, que ce conflit a dû devenir dʼautant plus aigu que l’opération
nʼintéresse pas seulement les Ponts et les Chaussées, la Voirie parisienne, le service du Balayage, ainsi qu’on lʼa vu. Elle touche de près le Service de la Navigation, sans parler des Beaux-Arts, des Monuments historiques, peut-être aussi des Bâtiments civils (en ce qui concerne les piédestaux occupés par des fonctionnaires-balayeurs). Il ne faudrait pas s’étonner le moins du monde si, entre toutes ces Autorités absolument supérieures, un accord définitif a été long à obtenir.
La controverse, comme dit la nouvelle officieuse, a donc duré deux ans. Ce sont deux années bien employées évidemment;
notre grand regret est qu’on ne nous mette pas à même d’apprécier toute la subtilité des arguments, la finesse des ré
pliques qui durent s’échanger de bureau à bureau. Il doit y avoir là un modèle, tout à fait classique, de l’éloquence administrative, quand elle se met au service des plus graves intérêts. Que ne nous en a-t-on au moins donné à cette occasion quelques extraits, échantillons et modèles du genre!
Néanmoins, nous sommes heureux d avoir pu rassurer nos lecteurs, et de n’ètre pas obligés de les laisser sous le coup des informations si inquiétantes que les Débats avaient cru nécessaire de lancer dans le public.
Il nous reste cependant quelques réserves à présenter: une
fausse joie est quelquefois aussi fatale qu’une trop pénible émotion. Il est donc toujours prudent de ne rien exagérer et d’escompter d’avance quelque légère déception.
Relisons attentivement l’Avis rectificatif: « Ce matin, nous dit-on, on a commencé d édifier le nouveau piédestal de l’une des statues. »
Or il y a quatre statues, donc quatre piédestaux. Nous comprenons parfaitement qu’une sage Administration — la nôtre l’est au plus haut degré — ne commencerait pas à la fois l’érec
tion de quatre Arcs de triomphe par exemple, semblables à ceux de l’Etoile; et personne ne songerait à l’exiger.
Mais quatre modestes piédestaux? Y aurait-il inconvénient grave, non pas à les commencer tous à la fois, ce qui apauvrirait trop le personnel du bâtiment disponible à Paris, mais seulement deux, deux qui feraient la paire. Ne fût-ce que par raison de symétrie, par droit d’ancienneté, nous aurions vu avec plaisir deux édifices de ce genre s’élever simultanément au pied du Louvre, plus âgé que la rue des Saints-Pères, et à qui l’on devait bien cet égard.
C est beaucoup demander, nous le savons; c’est peut-être réclamer un trop grand effort technique et financier, tant à la Ville quʼ à l’Etat, bien qu’ils marchent aujourd’hui la main dans la main. Tout au moins pouvons-nous, à titre de simple information, de curiosité presque légitime, exprimer le désir de savoir combien de temps sera maintenant nécessaire pour l’édification de ce premier et unique piédestal?
Ensuite, par un calcul qui n’exigera même pas le concours des savants de l’Observatoire, il sera facile de tracer, point par point, l orbite probable du phénomène, de préciser sa durée, ses éclipses, la date de ses retours chaque année, etc., etc. Ce sera la distraction des derniers salons où lʼon cause.
Nous le demandons parce que nous sommes loin d’admettre, les yeux fermés, l’assertion, si péremptoire cependant, du rédacteur de cette note. Selon lui: le déménagement « im
mine »! Qu’on blâme donc noire scepticisme éhonté, si Ton veut, mais nous savons par expérience que ce qui urge ou
immine, administrativement parlant, jouit de la même faculté que le provisoire également administratif.
Conformément au vieil adage chanté:
Quand on immine, c’est pour longtemps.
Quant à discuter cette judicieuse remarque de la note officielle: «Le pont étant élargi, la circulation doit se trouver
nécessairement facilitée», nous nʼy songeons même pas. C’est la vérité toute pure.
P. Planat.
EXPOSITION DE L’AUTOMOBILE
Nous avons décrit longuement, l’an dernier, les merveilles que l’architecte, M. Gustave Rives, avait accumulées au Grand Palais, pour y installer le Salon de l’Auto. L habile Commissaire général, cette année, s’est absolument surpassé, tant pour l’aménagement spécial des emplacements que pour la décora
tion de jour et de nuit. Il semblait que le Salon de 1906 fut le dernier mot du progrès et qu’il était impossible de faire mieux, plus vaste et plus beau. Le maximum n’avait pourtant pas été atteint, puisque tout ce qui nous est montré, cette fois, est encore supérieur, et qu’on nous promet pour 1908 une apothéose encore plus grande.
Nous ne nous étendrons pas, dans cet article, sur les dispositions données aux divers emplacements dans le Grand Palais et aux Invalides; nous les avons décrites longuement Tan der
nier (1). Il nous semble inutile de revenir sur ce que nous avons dit; il suffit de constater simplement que, si l’esprit et la méthode demeurent les mêmes, l’habile metteur en scène,
qui a présidé à cette immense installation, a eu à vaincre des difficultés encore plus grandes à cause de l’importance prise par l’Exposition et du peu de temps dont il dispose pour l’installer.
La Décennale — tel est le nom classique du Salon de cette année — a une envergure et une ampleur qui créent pour l’aménagement, forcément rapide, de l’exposition des difficul
tés très grandes. Mais le Commissaire général est un architecte, l organisateur est doublé d’un homme de l’art, l’admi
nistrateur est aussi un technicien; voilà ce qui explique avec quelle facilité les obstacles furent vaincus, pour l’éclosion, presque instantanée, de la ville de l’automobile.
Cette immense cité, toute de fer et d’acier, pour être éphémère, n’en constitue pas moins une œuvre colossale; car, en quelques semaines, environ un mois et demi, il faut aménager,
en vue de la foire annuelle de l’auto, et transformer l’intérieur du Grand Palais; il faut aussi créer de toutes pièces l’immense bâtiment des Invalides.
La lumière est, pour les organisateurs du Salon, une des grandes préoccupations; on l’emploie dans un but utile à la fois et décoratif avec une prodigalité excessive. Nous avons dit, Tan dernier, que les lampes et la force électriques, utilisées pour l’exposition, auraient suffi pour assurer l’éclairage d’une ville de 300. 000 habitants. Cela semblait être un maximum; le nombre d’appareils et la quantité des canalisations ont encore été augmentés, cette fois. C’est une véritable féerie lumineuse; partout des lampes ou des ampoules donnent la lumière à profusion et contribuent, en même temps, à des effets décoratifs dont l ensemble paraît constituer une véritable apothéose,
nʼintéresse pas seulement les Ponts et les Chaussées, la Voirie parisienne, le service du Balayage, ainsi qu’on lʼa vu. Elle touche de près le Service de la Navigation, sans parler des Beaux-Arts, des Monuments historiques, peut-être aussi des Bâtiments civils (en ce qui concerne les piédestaux occupés par des fonctionnaires-balayeurs). Il ne faudrait pas s’étonner le moins du monde si, entre toutes ces Autorités absolument supérieures, un accord définitif a été long à obtenir.
La controverse, comme dit la nouvelle officieuse, a donc duré deux ans. Ce sont deux années bien employées évidemment;
notre grand regret est qu’on ne nous mette pas à même d’apprécier toute la subtilité des arguments, la finesse des ré
pliques qui durent s’échanger de bureau à bureau. Il doit y avoir là un modèle, tout à fait classique, de l’éloquence administrative, quand elle se met au service des plus graves intérêts. Que ne nous en a-t-on au moins donné à cette occasion quelques extraits, échantillons et modèles du genre!
Néanmoins, nous sommes heureux d avoir pu rassurer nos lecteurs, et de n’ètre pas obligés de les laisser sous le coup des informations si inquiétantes que les Débats avaient cru nécessaire de lancer dans le public.
Il nous reste cependant quelques réserves à présenter: une
fausse joie est quelquefois aussi fatale qu’une trop pénible émotion. Il est donc toujours prudent de ne rien exagérer et d’escompter d’avance quelque légère déception.
Relisons attentivement l’Avis rectificatif: « Ce matin, nous dit-on, on a commencé d édifier le nouveau piédestal de l’une des statues. »
Or il y a quatre statues, donc quatre piédestaux. Nous comprenons parfaitement qu’une sage Administration — la nôtre l’est au plus haut degré — ne commencerait pas à la fois l’érec
tion de quatre Arcs de triomphe par exemple, semblables à ceux de l’Etoile; et personne ne songerait à l’exiger.
Mais quatre modestes piédestaux? Y aurait-il inconvénient grave, non pas à les commencer tous à la fois, ce qui apauvrirait trop le personnel du bâtiment disponible à Paris, mais seulement deux, deux qui feraient la paire. Ne fût-ce que par raison de symétrie, par droit d’ancienneté, nous aurions vu avec plaisir deux édifices de ce genre s’élever simultanément au pied du Louvre, plus âgé que la rue des Saints-Pères, et à qui l’on devait bien cet égard.
C est beaucoup demander, nous le savons; c’est peut-être réclamer un trop grand effort technique et financier, tant à la Ville quʼ à l’Etat, bien qu’ils marchent aujourd’hui la main dans la main. Tout au moins pouvons-nous, à titre de simple information, de curiosité presque légitime, exprimer le désir de savoir combien de temps sera maintenant nécessaire pour l’édification de ce premier et unique piédestal?
Ensuite, par un calcul qui n’exigera même pas le concours des savants de l’Observatoire, il sera facile de tracer, point par point, l orbite probable du phénomène, de préciser sa durée, ses éclipses, la date de ses retours chaque année, etc., etc. Ce sera la distraction des derniers salons où lʼon cause.
Nous le demandons parce que nous sommes loin d’admettre, les yeux fermés, l’assertion, si péremptoire cependant, du rédacteur de cette note. Selon lui: le déménagement « im
mine »! Qu’on blâme donc noire scepticisme éhonté, si Ton veut, mais nous savons par expérience que ce qui urge ou
immine, administrativement parlant, jouit de la même faculté que le provisoire également administratif.
Conformément au vieil adage chanté:
Quand on immine, c’est pour longtemps.
Quant à discuter cette judicieuse remarque de la note officielle: «Le pont étant élargi, la circulation doit se trouver
nécessairement facilitée», nous nʼy songeons même pas. C’est la vérité toute pure.
P. Planat.
EXPOSITION DE L’AUTOMOBILE
Nous avons décrit longuement, l’an dernier, les merveilles que l’architecte, M. Gustave Rives, avait accumulées au Grand Palais, pour y installer le Salon de l’Auto. L habile Commissaire général, cette année, s’est absolument surpassé, tant pour l’aménagement spécial des emplacements que pour la décora
tion de jour et de nuit. Il semblait que le Salon de 1906 fut le dernier mot du progrès et qu’il était impossible de faire mieux, plus vaste et plus beau. Le maximum n’avait pourtant pas été atteint, puisque tout ce qui nous est montré, cette fois, est encore supérieur, et qu’on nous promet pour 1908 une apothéose encore plus grande.
Nous ne nous étendrons pas, dans cet article, sur les dispositions données aux divers emplacements dans le Grand Palais et aux Invalides; nous les avons décrites longuement Tan der
nier (1). Il nous semble inutile de revenir sur ce que nous avons dit; il suffit de constater simplement que, si l’esprit et la méthode demeurent les mêmes, l’habile metteur en scène,
qui a présidé à cette immense installation, a eu à vaincre des difficultés encore plus grandes à cause de l’importance prise par l’Exposition et du peu de temps dont il dispose pour l’installer.
La Décennale — tel est le nom classique du Salon de cette année — a une envergure et une ampleur qui créent pour l’aménagement, forcément rapide, de l’exposition des difficul
tés très grandes. Mais le Commissaire général est un architecte, l organisateur est doublé d’un homme de l’art, l’admi
nistrateur est aussi un technicien; voilà ce qui explique avec quelle facilité les obstacles furent vaincus, pour l’éclosion, presque instantanée, de la ville de l’automobile.
Cette immense cité, toute de fer et d’acier, pour être éphémère, n’en constitue pas moins une œuvre colossale; car, en quelques semaines, environ un mois et demi, il faut aménager,
en vue de la foire annuelle de l’auto, et transformer l’intérieur du Grand Palais; il faut aussi créer de toutes pièces l’immense bâtiment des Invalides.
La lumière est, pour les organisateurs du Salon, une des grandes préoccupations; on l’emploie dans un but utile à la fois et décoratif avec une prodigalité excessive. Nous avons dit, Tan dernier, que les lampes et la force électriques, utilisées pour l’exposition, auraient suffi pour assurer l’éclairage d’une ville de 300. 000 habitants. Cela semblait être un maximum; le nombre d’appareils et la quantité des canalisations ont encore été augmentés, cette fois. C’est une véritable féerie lumineuse; partout des lampes ou des ampoules donnent la lumière à profusion et contribuent, en même temps, à des effets décoratifs dont l ensemble paraît constituer une véritable apothéose,