qui vient présenter quelques respectueuses observations, insistant parce que le quartier choisi est vraiment par trop mal propice aux commémorations.
— Mais, Monsieur, lui répond un jour le conseiller municipal interpellé, voilà vingt- cinq ans que je l habite, et je ne m’en porte pas plus mal!
De quoi se plaindrait donc le héros à glorifier? Là où subsiste un conseiller municipal, une statue, un buste n’auraient-ils pas toutes les commodités nécessaires?
Et comme le conseiller invoqua ce jour-là les immortels principes de 1789, l’incident se trouva clos, ainsi que le bec de l Administration, laquelle n avait plus qu’à verser son contingent et se taire sans murmurer.
C’est ce que ne veut plus la Commission. C’est, pourquoi elle engage vivement les Beaux-Arts à nʼouvrir plus les cordons de leur bourse qu’en « se réservant formellement le droit d intervenir souverainement ».
Souverainement, grands dieux! A quoi songe donc la Commission? Est-ce pour cela que nos pères avaient pris la Bastille?
On voit que la sculpture, tout au moins la commémorative, n’est pas précisément en odeur de sainteté au sein de la Commission chargée de fouiller le budget des Beaux-Arts. Lʼarchi
tecture officielle n y jouit pas d’un renom beaucoup meilleur.
Nous aurons donc à examiner les griefs du rapport contre elle.
C’est un chapitre trop important, trop développé pour que nous puissions l’aborder dès à présent. Hélas! L’architecture
officielle n’aura rien perdu pour attendre, car ce ne sont pas de bien tendres égards que lʼon a pour elle. Mais il nous faut tout dire: le bien et le mal.
P. Planat.


NOTES D’ART


Inauguration du monument Taylor. — Lʼarchitecture à la Chambre. — Exposition chez G. Petit et au pavillon de Marsan.
Le mois qui s’achève semble avoir été consacré plus particulièrement aux Beaux-Arts et à tout ce qui s’y rattache.
D’abord, en une cérémonie touchante et émue duc à la gratitude des artistes, on a inauguré sur le terre-plein de l’Ambigu le monument élevé au baron Taylor par les cinq associations quʼ il a fondées.
Ce fut, on le sait, une belle vie noblement dépensée que la sienne: tous les arts pouvaient se réclamer de lui; et presque
nonagénaire, il continuait à s’occuper encore avec passion des œuvres dont il avait eu l’heureuse initiative.
On s est encore entretenu de lʼart, à l’Institut, à la séance annuelle publique de l’Académie des Beaux-Arts, où, après l’exécution dʼun morceau symphonique dû à l inspiration d un pensionnaire de Rome, le président, qui était cette année le sculpteur Antonin Mercié, a proclamé, pour la première fois, les noms des jeunes artistes bénéficiant de la donation de M.
Jean Henner, neveu du grand peintre, et il a annoncé le legs de deux cent mille francs dû à Alphonse Rothschild, pour la fondation d un prix biennal destiné à encourager les travaux d’un artiste de mérite ou à récompenser une belle carrière artistique. Dans un discours où il a fait l’éloge de Guillaume, prédécesseur de Carolus Duran à la direction de la villa Medicis, — à laquelle notre distingué ami et confrère M. G. Che
danne a offert dernièrement un billard, — M. Henri Roujon a cité une belle parole de Michel-Ange: « O sculpteur, ne cesse de ciseler en toi-même ta propre statue! »
Encore les Beaux-Arts à la Chambre, avec la discussion du budget. Cette discussion fut longue, mais point du tout en
nuyeuse. Cependant quatre discours furent prononcés, ainsi que de multiples allocutions, et M. Dujardin-Beaumetz fut sur la sellette parce qu’il n’empêche pas les vandales (lisez:
les architectes) de ruiner la beauté d’ensemble de Paris par les a énormes immeubles » qu’ils construisent...
Les petites expositions hivernales se succèdent à l’infini. En considérant le nombre d invitations qui nous sont arrivées depuis la seconde quinzaine de ce mois, on est conduit à se demander, sans qu’il entre trop de déraisonnable dans la question, si, en consacrant chacun des jours de l’hiver qui com
mence à une visite particulière, il sera possible de se rendre à toutes « manifestations artistiques » qui se préparent.
Pour risquer une exposition particulière, il faut au moins avoir quelque chose à montrer, des idées, des vues person
nelles, un semblant de talent, — ou de nature, comme on voudra. Il fautavoir franchi cette limite mystérieuse qui sépare l amateur prétentieux et gauche, le snob de l’art, du véritable artiste, du travailleur, du chercheur sincère. Si les jeunes qui dessinent et qui peignent, tourmentés de la très noble ambition d arriver, se préoccupaient surtout et d abord de tra
vailler longtemps, bien simplement, s ils étaient convaincus de l’inutilité de tout ce tapage avant l heure, de l énormité de leur méprise alors qu’ils se croient, à lʼage des balbutiements, en possession d’une vision personnelle et d une formule ori
ginale, s’ils mesuraient tout le tort quʼils se font et tout le mal
qu’ils causent aux travailleurs, aux probes et lents artistes qui s’inquiètent devant le grand problème, ils exposeraient moins facilement.
Ainsi, au sortir de l’exposition de la Société Internationale des Aquarellistes, chez Georges Petit, on ne peut se défendre de cette impression, qu on a vraiment fort peu vu d aquarelles, au sens étroit du mot. Le vouloir qu on apporte à mon
trer une virtuosité plutôt fâcheuse, le désir qu’on a de faire grand, important, « tableau », toute cette influence regrettable qui va tout à l’encontre des belles et assez fragiles qua
lités inhérentes au genre et à ce procédé, la hâte malheureuse avec laquelle, pour beaucoup prouver, on alourdit et on altère les transparences et les fraîcheurs, tout cela gâte le plaisir qu’il y a à trouver beaucoup de talent, chez certains exposants.
Il est à remarquer que cette exposition paraît cette année quelque peu découronnée par l’absence de plusieurs de ceux qui lui avaient acquis un honorable renom.
Dans une salle attenante, M. Paul Rossert expose une centaine d’aquarelles qui ont principalement trait à la Mer et à la Montagne. Ce sont des œuvres qui récèlent beaucoup de charme vrai et qui reposent. M. Rossert est un artiste; il sait appliquer avec sûreté la touche qu’il faut en aquarelle. Nous men
tionnons particulièrement la série de ses aquarelles qui nous représentent le Port de Marseille sous ses différents aspects; les Plages normandes, les Pyrénées, les vues de lʼAuvergne, toutes très habilement enlevées.
Au pavillon de Marsan, sous les auspices de la Société de lʼUnion centrale des Arts Décoratifs, un groupe d artistes décorateurs ont réuni quelques œuvres de lʼArt Moderne.
Ils sont encore en bien petit nombre les architectes qui osent tenter de mettre un peu d’originalité dans nos demeures, et d y faire franchement place à l’art dit « contempo