le rieur Garrido, Guillaume Dubufe, dont une salle spéciale résume la carrière, sans nous rendre ses qualités de placeur ou de « tapissier », comme on disait de Chardin. Mais, loin des rétrospectives, quelques vivants nous appellent : en l’absence de M. Roll, voici, pour la joie des yeux, une page grandiose de M. Charles Cottet, trois clairs panneaux de M. Lucien Simon, le nu puissant de M. Caro-Delvaille, l’exquise Femme aux perles, de M. Lomont, la Religieuse endormie, de M. Frédéric, trois virtuoses du portrait, MM. James Shannon, Jacques Blanche et Raymond
Woog, et plusieurs autres intelligents manieurs de pâte : si 1909 fut l’année d’un poète, 1910 est, l’année des peintres.
Sans thème littéraire ou surnaturel, la couleur est, par elle-même, une poésie : de ses accords graves ou légers émane une suggestion tacite, une musique muette; et voilà pourquoi tout paysage est un état de l’Ame.
Une atmosphère dramatique anime la vaste page que le catalogue appelle vaguement : Cérémonie dans la cathédrale de Burgos; et, par la seule magie de la pourpre, la chose vue par M. Charles Cottet s’élève à la dignité trop oubliée du tableau d’histoire. Au temps du vieux Robert
Fleury, qui fut celui d’Eugène Delacroix, la peinture invoquait sa sœur aînée, la littérature, afin de passionner la couleur et l’ombre avec la belle horreur du sujet et la psychologie des visages; aujourd’hui, les adieux récents d’un cardinal-archevêque quittant Burgos pour Tolède offrent plus simplement un beau prétexte à la symphonie des tons. Mais, dans l’Espagne férue de mise en scène, une étude devient un tableau, pourvu que le décor soit retenu par un artiste : au fond, claire et lointaine,
apparaît la robe vermillonnée du primat; dans la nuit des stalles profondes comme des cellules, se devine un chapitre évoquant les majestés de l’inquisition : cette ombre est pleine de tragiques secrets. Au premier plan des banquettes grenat; devant l’autel invisible, un prêtre en prière et la haute stature du hallobardier. Sous un rayon central, les dalmatiques dorées des diacres, la chape noire de l’orticiant, les calottes rouges des enfants de chœur, et leurs surplis blancs que pâlit le blond parchemin du missel ouvert, composent un instant de drame romantique; et faut-il accuser de ce robuste accord la réalité fugitive ou le peintre ému qui la recompose ? Il n’y a point d’artiste varié, songeait le regretté Jean Dolent ; « un artiste n’est pas un bouquet, c’est une fleur » : mais qu’aurait
Woog, et plusieurs autres intelligents manieurs de pâte : si 1909 fut l’année d’un poète, 1910 est, l’année des peintres.
Sans thème littéraire ou surnaturel, la couleur est, par elle-même, une poésie : de ses accords graves ou légers émane une suggestion tacite, une musique muette; et voilà pourquoi tout paysage est un état de l’Ame.
Une atmosphère dramatique anime la vaste page que le catalogue appelle vaguement : Cérémonie dans la cathédrale de Burgos; et, par la seule magie de la pourpre, la chose vue par M. Charles Cottet s’élève à la dignité trop oubliée du tableau d’histoire. Au temps du vieux Robert
Fleury, qui fut celui d’Eugène Delacroix, la peinture invoquait sa sœur aînée, la littérature, afin de passionner la couleur et l’ombre avec la belle horreur du sujet et la psychologie des visages; aujourd’hui, les adieux récents d’un cardinal-archevêque quittant Burgos pour Tolède offrent plus simplement un beau prétexte à la symphonie des tons. Mais, dans l’Espagne férue de mise en scène, une étude devient un tableau, pourvu que le décor soit retenu par un artiste : au fond, claire et lointaine,
apparaît la robe vermillonnée du primat; dans la nuit des stalles profondes comme des cellules, se devine un chapitre évoquant les majestés de l’inquisition : cette ombre est pleine de tragiques secrets. Au premier plan des banquettes grenat; devant l’autel invisible, un prêtre en prière et la haute stature du hallobardier. Sous un rayon central, les dalmatiques dorées des diacres, la chape noire de l’orticiant, les calottes rouges des enfants de chœur, et leurs surplis blancs que pâlit le blond parchemin du missel ouvert, composent un instant de drame romantique; et faut-il accuser de ce robuste accord la réalité fugitive ou le peintre ému qui la recompose ? Il n’y a point d’artiste varié, songeait le regretté Jean Dolent ; « un artiste n’est pas un bouquet, c’est une fleur » : mais qu’aurait