Bibliothèque nationale, ont été exécutés pour François de Piochechouart, alors qu’il était gouverneur de Gênes et, par conséquent, résidait à demeure en Italie. Mais cette apparence italienne n’est pour moi, malgré tout, que de surface ; et j’estime que, sous elle, se cache un autre caractère
personnel, très différent. Ce caractère me paraîtrait trahir, pour le chef d’atelier, s’il y a collaboration, ou pour l’unique artiste, si tout est de la même plume, la main d’un Flamand. Cette impression se dégage, à mon sens, de mille petits traits de détail plus faciles à saisir par l’œil qu’à expli
quer par des mots, des airs de tête, des dispositions de plis, un maniement spécial du trait dans le rendu des figures. Elle me semble encore percer dans l’arrangement de certaines compositions. Le Paradis terrestre, où sont accumulés tant d’animaux, est beaucoup plus dans la donnée flamande que dans la tradition italienne. La note flamande, avec sa simplicité, en quelque sorte sa bonhomie d’allure, apparaît dans le joli dessin, que nous avons reproduit précédemment, de Térée et Progné, dans une image de l’auteur écrivant 1 et surtout dans la petite esquisse des
Coutumes des François, vivement jetée en quelques coups de plume, et également reproduite par nous, dont les deux personnages principaux n’ont absolument plus rien d’italien ni dans le costume ni dans le style.
L’imitation des principes mantegnesques n’est pas du tout en opposition avec cette conclusion, que, malgré les italianismes, nous sommes en présence d’un artiste flamand. En effet, les créations de Mantegna et de son école, popularisées très tôt par des gravures, ont exercé une influence qui s’est étendue fort loin, pénétrant en France, en Flandre aussi bien qu’en Allemagne. Les érudits ont pu aisément montrer combien l’imitation des motifs mantegnesques se retrouvait parfois tout à fait servile dans maintes œuvres exécutées au nord des Alpes, par exemple dans un dessin de Hans Dürer sur une bordure d’un Livre d’Heures de l’Empereur Maximilien,
conservé à Besançon 2, ou dans un vitrail qui se rattache à l’œuvre de l’artiste d’Anvers, Dirick Vellert 3.
1. Fol. 98, verso du manuscrit original.
2. Cf. Karl Giehlow, Beitræge zur Entslehungsgeschichte des Gebetbuches Kaisers Maximilian /, dans le Jahrbuch des Musées Impériaux de Vienne, t. XX, p. 64-65.
3. Cf. Gustav Glück, Beitræge zur Geschichte der Antwerpner Malerei im XVI Jahrhundert. — I. Der wahre Name des Meisters Df V., planche I, dans le même Jahrbuch des Musées de Vienne, t. XXII.