16 Mai 1908
LA CONSTRUCTION MODERNE
MARTYROLOGE
On sait que chaque jour du calendrier rappelle, en général, un martyr qui eut à subir les plus pénibles traitements au temps jadis. Il est nombre de nos monuments qui sont à peu près dans le même cas; il est temps, par conséquent, d enre
gistrer jour par jour les maux qu ils ont à endurer, alin d’en transmettre au moins le souvenir à la postérité.
***
Le mérite devrait toujours être récompensé, le crime toujours puni. C’est ce que, dans cette regrettable affaire du Foyer qui remue, en ce moment, les couches les plus supcrlicielles comme les plus profondes du public, expliquait tout récemment M° Du Buit. On ne saurait admettre, même dans un théâtre officiel et subventionné, que les erreurs de conduite, politiques ou autres, ne reçoivent pas leur juste châtiment au quatrième acte, et conduisent, au contraire, leurs auteurs à jouir de toutes les félicités parlementaires ou autres.
Il est certain que, s’il existe une Providence spéciale pour les monuments, elle ne s’occupe pas suffisamment de les pro
téger ni de punir leurs bourreaux. Cependant son intervention apparaît quelquefois.
Nos lecteurs se rappellent peut-être tous les malheurs qui assaillirent l’infortuné pont de Cahors, qu’on voulut absolu
ment démolir arche par arche, écarteler membre par membre. On ajoute même que, ne pouvant enfermer les débris dans une malle pour les expédier par les voies rapides, ainsi que s’en est établie la coutume, les anarchistes municipaux prirent le parti de recourir à la dynamite.
Ce jour-là cependant, la Providence dont nous parlons veillait probablement. Aussi apprenons-nous qu’elle envoya, comme au temps de Noé, une inondation partielle, toute ocale, pour châtier et les auteurs de ce crime monumen
23e Année N° 33
tal et quelques autres personnes, par la même occasion.
« La passerelle provisoire fut enlevée par une crue du Lot. « Un des entrepreneurs du pont projeté fut tué par une pierre du pont en démolition, qui se détacha au moment où il allait en barque se rendre compte des choses.
« Le génie construisit un pont de bateaux, qu il retira lors d’une nouvelle crue.
« Enfin les entrepreneurs renoncèrent, en abandonnant leur cautionnement, leur matériel et les sommes qui leur étaient dues, à construire le nouveau pont... »
Evidemment le malheureux entrepreneur, première victime, n’était pas le plus coupable; mais les inondations ven
geresses ne font généralement pas une suffisante acception de personne.
Le génie militaire en fut quitte pour retirer son pont de bateaux; d’ailleurs sa faute n’était pas bien grave.
La municipalité qui avait, malgré toutes les justes réclamations, décidé cette démolition sort indemne de l’aventure; le Lot, grossi pour la circonstance, n’avait pas eu le courage de monter jusqu’aux salles de réunion du Conseil municipal, ce qui était pourtant son devoir.
Il n’y a guère quo les habitants qui, dépourvus de ponts, se trouvent quelque peu embarrassés pour aller journellement à leurs petites affaires. S’ils en souffrent, leur peine est bien méritée. Mais il faut avouer que la justice distributive a été bien imparfaitement répartie.
***
Si incomplète que soit donc la satisfaction de ceux qui voient avec regret détruire ainsi nos vieux édilices, elle est encore plus rare; et, le plus souvent, il faut assister aux déprédations les plus coupables sans espoir qu’elles reçoivent jamais la récompense qui leur est due.
LA CONSTRUCTION MODERNE
ACTUALITES
MARTYROLOGE
On sait que chaque jour du calendrier rappelle, en général, un martyr qui eut à subir les plus pénibles traitements au temps jadis. Il est nombre de nos monuments qui sont à peu près dans le même cas; il est temps, par conséquent, d enre
gistrer jour par jour les maux qu ils ont à endurer, alin d’en transmettre au moins le souvenir à la postérité.
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Le mérite devrait toujours être récompensé, le crime toujours puni. C’est ce que, dans cette regrettable affaire du Foyer qui remue, en ce moment, les couches les plus supcrlicielles comme les plus profondes du public, expliquait tout récemment M° Du Buit. On ne saurait admettre, même dans un théâtre officiel et subventionné, que les erreurs de conduite, politiques ou autres, ne reçoivent pas leur juste châtiment au quatrième acte, et conduisent, au contraire, leurs auteurs à jouir de toutes les félicités parlementaires ou autres.
Il est certain que, s’il existe une Providence spéciale pour les monuments, elle ne s’occupe pas suffisamment de les pro
téger ni de punir leurs bourreaux. Cependant son intervention apparaît quelquefois.
Nos lecteurs se rappellent peut-être tous les malheurs qui assaillirent l’infortuné pont de Cahors, qu’on voulut absolu
ment démolir arche par arche, écarteler membre par membre. On ajoute même que, ne pouvant enfermer les débris dans une malle pour les expédier par les voies rapides, ainsi que s’en est établie la coutume, les anarchistes municipaux prirent le parti de recourir à la dynamite.
Ce jour-là cependant, la Providence dont nous parlons veillait probablement. Aussi apprenons-nous qu’elle envoya, comme au temps de Noé, une inondation partielle, toute ocale, pour châtier et les auteurs de ce crime monumen
23e Année N° 33
tal et quelques autres personnes, par la même occasion.
« La passerelle provisoire fut enlevée par une crue du Lot. « Un des entrepreneurs du pont projeté fut tué par une pierre du pont en démolition, qui se détacha au moment où il allait en barque se rendre compte des choses.
« Le génie construisit un pont de bateaux, qu il retira lors d’une nouvelle crue.
« Enfin les entrepreneurs renoncèrent, en abandonnant leur cautionnement, leur matériel et les sommes qui leur étaient dues, à construire le nouveau pont... »
Evidemment le malheureux entrepreneur, première victime, n’était pas le plus coupable; mais les inondations ven
geresses ne font généralement pas une suffisante acception de personne.
Le génie militaire en fut quitte pour retirer son pont de bateaux; d’ailleurs sa faute n’était pas bien grave.
La municipalité qui avait, malgré toutes les justes réclamations, décidé cette démolition sort indemne de l’aventure; le Lot, grossi pour la circonstance, n’avait pas eu le courage de monter jusqu’aux salles de réunion du Conseil municipal, ce qui était pourtant son devoir.
Il n’y a guère quo les habitants qui, dépourvus de ponts, se trouvent quelque peu embarrassés pour aller journellement à leurs petites affaires. S’ils en souffrent, leur peine est bien méritée. Mais il faut avouer que la justice distributive a été bien imparfaitement répartie.
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Si incomplète que soit donc la satisfaction de ceux qui voient avec regret détruire ainsi nos vieux édilices, elle est encore plus rare; et, le plus souvent, il faut assister aux déprédations les plus coupables sans espoir qu’elles reçoivent jamais la récompense qui leur est due.