27 Juin 1908
LA CONSTRUCTION MODERNE
MARTYROLOGE
Nous avons signalé, parmi bien d autres, quelques-uns des édifices qui ont été sacrifiés à la voirie, à la spéculation ou à I industrie. Nous ne pouvons les enregistrer tous, la moisson ocrait trop abondante ; nous continuerons cependant à parler, de temps en temps, des massacres projetés ou déjà exécutés. Lorsqu’ils sont encore à l’état de projet, on a parfois quel
ques chances de retarder tout au moins la catastrophe finale ; quand il y a eu exécution, c’est bien le moins qu’on prononce quelques paroles de regret sur la tombe creusée par la fameuse pioche des démolisseurs. *
* *
A Lyon, c’est aujourd’hui l Hôtel-Dieu, vaste édifice bordant e Rhône, qui est menacé. Son origine première était très lointaine, puisqu’elle remontait jusqu’à l’époque mérovin
gienne; de siècle en siècle il s était agrandi; la façade actuelle ovait été commencée par Soufflot pour être terminée beaucoup plus tard.
Une œuvre de Soufllot n’est jamais à dédaigner ; d’ailleurs cette façade, vraiment monumentale, avait fort grand air et »e déparaît nullement l importante ville de Lyon qui ne pos
sédé pas autant de beaux édifices quelle en devrait avoir, en raison de cette importance même. De plus, à l intérieur du monument, subsistent des parties remarquables qui se rattachent à diverses époques.
Lola ne pouvait durer plus longtemps;et la Dépêche de Lyon révélait, il y a quelque temps, les noirs desseins qui mena
cent dès à présent l Hôtel-Dieu qu on avait toujours respecté jusqu’à ce jour.
Lotte lois la coupable, c est l’Administration des Postes et télégraphes. Ces deux services sont éminemment utiles quand ils fonctionnent régulièrement ; nous sommes loin
23e Année N° 39
de le contester. Mais, à première vue, on ne conçoit pas très bien pourquoi le désir de régulariser ces mêmes services implique la démolition ou — ce qui revient au même dans le cas actuel — la transformation de l’édifice hospitalier.
C’est M. le Maire de Lyon lui-même qui va expliquer les raisons de cette nécessité qui ne semblait pas s’imposer :
L’administration des Postes, dit-il, hésite entre deux emplacements : le premier, disponible le jour où les bibliothèques municipales seraient transportées dans l’Archevêché, est la partie du lycée en façade sur la rue Gentil; le second, qui fait en ce moment l’objet d’une étude, serait rendu libre par la désaffectation de l’Hôtel-Dieu.
« Si cette désaffectation se produisait, ajoutait-il, il serait indispensable que l Etat prît en location ou achetât une partie du grand palais du quai, ce palais devant être de toutes façons conservé. L’hôtel des Postes pourrait trouver place dans ces bâtiments. »
Si l’on s’en tenait aveuglément aux termes mêmes de cette déclaration, on pourrait ne pas s alarmer outre mesure : Les Postes se logeraient discrètement dans les bâtiments existants;
de toutes façons le palais serait conservé. On pourraitconclure de là que rien ne serait changé, saulTinscription officielle sur une porte ou sur un fronton.
Mais l expérience journalière prouve que le jour où une administration publique a mis un pied dans un monument de quelque beauté, elle en a bientôt pris quatre, si ce n’est da
vantage. Pour installer des Télégraphes et des Postes dans des salles d hôpital, on peut être déjà certain qu il faudrait des transformations analogues à celles qui feront d’un séminaire de Saint-Sulpice un musée pour artistes vivants. Le séminaire parisien n a qu un médiocre intérêt architectural, le mal sera donc médiocre; il n’eu est plus de même pour l’Hôtel-Dieu de Lyon.
LA CONSTRUCTION MODERNE
MARTYROLOGE
Nous avons signalé, parmi bien d autres, quelques-uns des édifices qui ont été sacrifiés à la voirie, à la spéculation ou à I industrie. Nous ne pouvons les enregistrer tous, la moisson ocrait trop abondante ; nous continuerons cependant à parler, de temps en temps, des massacres projetés ou déjà exécutés. Lorsqu’ils sont encore à l’état de projet, on a parfois quel
ques chances de retarder tout au moins la catastrophe finale ; quand il y a eu exécution, c’est bien le moins qu’on prononce quelques paroles de regret sur la tombe creusée par la fameuse pioche des démolisseurs. *
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A Lyon, c’est aujourd’hui l Hôtel-Dieu, vaste édifice bordant e Rhône, qui est menacé. Son origine première était très lointaine, puisqu’elle remontait jusqu’à l’époque mérovin
gienne; de siècle en siècle il s était agrandi; la façade actuelle ovait été commencée par Soufflot pour être terminée beaucoup plus tard.
Une œuvre de Soufllot n’est jamais à dédaigner ; d’ailleurs cette façade, vraiment monumentale, avait fort grand air et »e déparaît nullement l importante ville de Lyon qui ne pos
sédé pas autant de beaux édifices quelle en devrait avoir, en raison de cette importance même. De plus, à l intérieur du monument, subsistent des parties remarquables qui se rattachent à diverses époques.
Lola ne pouvait durer plus longtemps;et la Dépêche de Lyon révélait, il y a quelque temps, les noirs desseins qui mena
cent dès à présent l Hôtel-Dieu qu on avait toujours respecté jusqu’à ce jour.
Lotte lois la coupable, c est l’Administration des Postes et télégraphes. Ces deux services sont éminemment utiles quand ils fonctionnent régulièrement ; nous sommes loin
23e Année N° 39
de le contester. Mais, à première vue, on ne conçoit pas très bien pourquoi le désir de régulariser ces mêmes services implique la démolition ou — ce qui revient au même dans le cas actuel — la transformation de l’édifice hospitalier.
C’est M. le Maire de Lyon lui-même qui va expliquer les raisons de cette nécessité qui ne semblait pas s’imposer :
L’administration des Postes, dit-il, hésite entre deux emplacements : le premier, disponible le jour où les bibliothèques municipales seraient transportées dans l’Archevêché, est la partie du lycée en façade sur la rue Gentil; le second, qui fait en ce moment l’objet d’une étude, serait rendu libre par la désaffectation de l’Hôtel-Dieu.
« Si cette désaffectation se produisait, ajoutait-il, il serait indispensable que l Etat prît en location ou achetât une partie du grand palais du quai, ce palais devant être de toutes façons conservé. L’hôtel des Postes pourrait trouver place dans ces bâtiments. »
Si l’on s’en tenait aveuglément aux termes mêmes de cette déclaration, on pourrait ne pas s alarmer outre mesure : Les Postes se logeraient discrètement dans les bâtiments existants;
de toutes façons le palais serait conservé. On pourraitconclure de là que rien ne serait changé, saulTinscription officielle sur une porte ou sur un fronton.
Mais l expérience journalière prouve que le jour où une administration publique a mis un pied dans un monument de quelque beauté, elle en a bientôt pris quatre, si ce n’est da
vantage. Pour installer des Télégraphes et des Postes dans des salles d hôpital, on peut être déjà certain qu il faudrait des transformations analogues à celles qui feront d’un séminaire de Saint-Sulpice un musée pour artistes vivants. Le séminaire parisien n a qu un médiocre intérêt architectural, le mal sera donc médiocre; il n’eu est plus de même pour l’Hôtel-Dieu de Lyon.